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Full text of "Histoire de l'Ordre Hospitalier du Saint-Esprit"

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HISTOIRE 



DE L'ORDRE HOSPITALIER 



DU SAINT-ESPRIT 



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HISTOIRE 



DE L'ORDRE HOSPITALIER 



DU 



SAINT-ESPRIT 



PAR 



L'ABBÉ P^'^BRUNE 

Membre de la Société Française (T Archéologie^ 
de la Société des Antiquaires de France, etc. 



LONS-LE-SAUNIER 
Librairie catholique C. Martin 

4, Grande Place, 4 



PARIS 
Alphonse Picard, Editeur. 

82, rue Bonaparte, 82 



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THE NEW YUKK 

PUBLIC LIBR^RY 

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ASTOP. T.F.NOX AND 
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5 R 1019 L 

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Impkimatur : 



L. PERRARD, 



Vicarius Generalis. 



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CET OUVRAGE EST PUBLIÉ SOUS LES AUSPICES ET AVEC LE CONCOURS 



De Monsieur 



Marcel MONNIER 



AVANT -PROPOS 



■•■M- 



L'idée première du présent travail revient tout 
entière à celui dont nous avons inscrit le nom en tête 
de notre volume. Amené par sa situation à prendre la 
défense d'une communauté de Sœurs du Saint-Esprit, 
que des mesures administratives menaçaient dans son 
existence même, il prit à cœur sa mission de dévoue- 
ment, et, pour la mieux remplir, voulut pénétrer le 
{)assé de l'ordre auquel ces sœurs appartenaient. Une 
bis engagé dans cette étude, il en sentit bientôt l'in- 
térêt et ne tarda pas à éprouver une profonde admi- 
ration pour un ordre religieux si illustre autrefois et 
si peu connu de nos jours ; aussi conçut-il dés lors le 
projet d'en écrire l'histoire, afin de rappeler ses services 
à la reconnaissance de notre génération. Dans sa pensée, 
d'ailleurs, cette étude historique ne devait être que le 
prélude d'une entreprise qui présentait un intérêt plus 
pratique : il voulait travailler à rétablir la confrérie du 
Saint-Esprit, si universellement répandue au moyen- 
âge, et qui eût été appelée à rendre dans nos campagnes 
des services analogues à ceux que les Sociétés de S. 
Vincent de Paul rendent dans les villes, et d'une ma- 
nière plus efficace encore. Malheureusement^ les cir- 
constances ne se prêtèrent pas à la réalisation de si 
beaux projets : il dut interrompre ses recherches, sans 
renoncer à son désir de voir paraître l'histoire de 
l'ordre du Saint-Esprit. 



II AVANT-PROPOS 

Aussi, lorsque les circonstances nous mirent en 
rapport avec lui, accueillit-il avec bonheur l'offre que 
nous lui fîmes d'entreprendre cette œuvre. Il nous 
remit les documents nombreux qu'il avait patiemment 
amassés et nous épargna ainsi les premiers tâtonne- 
ments, inévitables au début de telles entreprises. En 
même temps, sa générosité nous fournit 4argement les 
ressources nécessaires à des recherches longues et 
étendues. Nous accomplissons ici un devoir de justice 
autant que de reconnaissance, en déclarant que, si nous 
avons pu mener à bien ce travail, c'est grâce à son 
concours généreux et dévoué. 

L'intérêt d'un tel sujet d'étude nous avait séduit tout 
d'abord, et nous nous mîmes au travail avec une grande 
ardeur. Mais bientôt les difficultés surgirent: c'était une 
véritable réhabilitation historique que nous avions 
entreprise ; les sources étaient extrêmement nombreu- 
ses et fort disséminées, les résultats de nos recherches 
hors de proportions avec les efforts qu'elles nous coû- 
taient. Et nous nous demandâmes quelquefois si notre 
engagement n'avait pas été présomptueux et si la tâche 
n'était pas au-dessus de nos forces. 

Non seulement l'histoire générale de Tordre du Saint- 
Esprit n'a pas encore été faite ; mais nous pourrions 
citer plus d un volume consacré à des hôpitaux qui ont 
sûrement appartenu â cet ordre, et où son nom même 
n'est pas cité ! Nous ne parlons pas des Encyclopédies 
et des Dictionnaires historiques, qui, lorsque par 
hasard ils en font mention, accumulent les erreurs en 
quelques lignes. Ce n'est point pour rehausser notre 
mérite, mais pour nous faire pardonner les imperfec- 
tions de notre travail, que nous accusons ici la pau- 
vreté d'ouvrages estimables d'ailleurs. 

Hâtons-nous cependant de le dire, quelques travaux 
récents nous ont heureusement dédommagé de nos 
nombreuses déceptions. Les hôpitaux de Besançon, de 
Gray, de Toul et de Vaucouleurs ont été l'objet de 
notices très exactes et qui nous ont été d'un grand 



AVAjrr-p&OPOs m 



secours. Nous avons également tiré profit 4es recher- 
ches érudites de M. l'abbé Renard, auteur d'une Histoire 
manuscrite de la maison de Neufchâteau. Le dernier 
commandeur de Dijon, Frère Calmelet, a recueilli dans 
un volumineux manuscrit des détails très circonstan- 
ciés sur son hôpital et l'ordre entier ; ses derniers cha- 
pitres nous ont guidé à travers le dédale de l'histoire 
de notre ordre aux deux derniers siècles» conjointement 
avec la notice que P. Hélyot lui a consacré dans son 
Histoire des ordres religieux. Gui de Montpellier, fonda- 
teur de l'ordre, a trouvé, dans Mgr Paulinier, un bio- 
graphe élégant et un admirateur de sa grande mémoire. 
Mais les deux ouvrages les plus importants pour 
rhistoire de Tordre sont d'abord une Dissertation latine 
sur l'hôpital de Sainte-Marie in Saxia, à Rome, parue 
en 1649. Son auteur. Frère Pierre Saulnier, était reli- 
gieux de cette maison et composa son ouvrage à l'aide 
•de ses archives. Malgré son but restreint et sa compo- 
sition en forme d'arguments, ce volume renferme de 
précieux renseignements, qu'on chercherait vainement 
ailleurs. Le second ouvrage est le Recueil des bulles et 
privilèges de l'ordre du Saint-Esprit, publié en 1727 en 
un volume in-folio ; on y trouve, avec les principaux 
documents pontificaux^ un très grand nombre d'édits 
royaux et d arrêts judiciaires concernant les affaires de 
l'Ordre. 

sont en 
Rome ; 
éprouvées par divers incendies et surtout lors du 
sac de Rome par le connétable de Bourbon^ elles sont 
néanmoins riches encore en pièces anciennes. Aux 
archives nationales de Paris^ nous avons analysé les 
quelques cartons de l'ordre du Saint-Esprit ; ils ne 
•renterment guère que des factums imjprimès ou ma- 
nuscrits, œuvre des pseudo-chevaliers du siècle, et dont 
nous ne nous sommes servi qu'avec une extrême 
réserve. Parmi les dépôts locaux, deux seulement sont 
importants, ceux des nôpitauxde Dijon et de Besançon; 




Vr AYANT-PROPOS 



ce dernier surtout est d'un grand intérêt, parce (ju'il 
renferme les archives de toutes les maisons qui étaient 
soumises à cette commanderie magistrale. Quant aux 
hôpitaux des provinces méridionales, dévastés pour la 
plupart au temps de la Réforme, les débris de leurs 
archives sont conservés aux archives nationales, dans 
le fonds de Saint-Lazare, par suite de leur annexion à 
cet ordre. Ajoutons que nous avons consulté les prin- 
cipaux ouvrages d'histoire locale, ainsi que les Mémoi- 
res des Sociétés savantes, le plus souvent, il faut bien 
le dire, sans grand profit, — et nous aurons indiqué 
les principales sources où nous avons puisé pour la 
confection de cet ouvrage. Nous devons maintenant 
dire un mot de la manière dont nous l'avons conçu. 

Un écrivain bien connu n'a pas craint d affirmer que 
la fondation de l'ordre du Saint-Esprit a été « l'un des 
plus grands événements de l'histoire du monde au 
moyen-âge* ». C'est, dit-il, une admirable institu-^ 
tion, dont l'histoire mériterait d'être écrite par une 
plume illustre^ Ce magnifique éloge n'est pas 
exagéré. Dans l'ordre du Saint-Esprit, en effet, on 
trouve la synthèse de toutes les institutions charitables 
du moyen-âge, qui en eut un si grand nombre. Le 
caractère de l'œuvre de Gui de Montpellier est l'uni- 
versalité de la charité : il a voulu que toutes les œu- 
vres de miséricorde inspirées par l'Evangile fussent 
exercées dans ses maisons, qu'aucun besoin, aucune 
misère n'y restassent sans secours. L'ordre du Saint- 
Esprit résume donc le moyen-âge charitable : et l'on 
retrouve dans son histoire, toutes les institutions bien- 
faisantes de nos pères. Mais les hôpitaux du moyen- 
âge tiennent par des liens trop étroits aux institutions 
qui les ont précédées dans l'Eglise, pour qu'on les 
puisse bien comprendre sans un retour sur celles-ci. 



/ Léon Gautier, Hist. de la charité^ dans les Etudes et- Tableaux 
hUtoriques, 2« éd., p. 59. 
' Ibidf p. 4o« 



AVANT-PROPOS 



Cest pourquoi nous avons fait précéder notre travail 
d'un aperçu des œuvres de la charité avant le XIII® 
siècle. On y verra que, dans l'Eglise, les institutions se 
tiennent et s'enchaînent avec la plus harmonieuse 
continuité. Cette vue d'ensemble aura l'avantage, 
croyons-nous, de donner au lecteur une juste idée de 
ce que fut la charité dans l'Eglise, depuis son origine 
jusqu'à notre époque. 

Entrant ensuite spécialement dans notre sujet, nous 
consacrons une première partie de l'ouvrage à la vie 
de Gui de Montpellier et à son œuvre, qui comprend 
l'établissement de l'Ordre et sa législation. Nous avons 
cherché à résumer la régie du Saint-Esprit en groupant 
sous des divisions logiques ses principales observances. 

Nous suivons dans la seconde partie, les progrés 
merveilleux de notre Ordre pendant prés de trois cents 
ans, puis les vissicitudes de sa lente décadence à partir 
du XVI® siècle, pour arriver enfin à sa restauration dans 
les communautés de sœurs, qui ont recueilli en notre 
siècle son glorieux héritage. Dans la troisième partie, 
nous avons réuni en des notices succintes, ce que 
nous savons sur chacun des hôpitaux français ; nous 
l'avons fait dans le double but de prouver nos asser- 
tions sur l'immense développement de l'Ordre au 
moyen-âge et de donner aux érudits qui s'occuperont 
de l'histoire de ces hôpitaux des indications utiles. On 
comprendra aue nous avons dû nous contenter d'une 
simple liste des maisons étrangères. Un travail plus 
complet sur ces dernières eût élargi notre cadre outre 
mesure, et quoique, dans le corps même de l'ouvrage, 
nous n'ayons pas négligé les pays autres que la Franœ, 
c'est surtout des hôpitaux français que nous nous 
sommes occupé. Enfin des Pièœs justificatives, que 
rous aurions voulu pouvoir multiplier, terminent le 
volume. 

Notre travail doit beaucoup à de nombreux corres- 
pondants et à des amis dévoués ; sans leur obligeant 
concours, il eut été fort imparfait. 



tl AVANT-PROPOS 

Que tous veuillent bien agréer nos sentiments de 
vive reconnaissance. Citons en particulier, MM. J. 
Gauthier, archiviste du Doubs ; Léon Germain, i 
Nancy ; E. Taillebois et* l'abbé Lauréde, i Dax ; Mgr 
Barbier de Montault, à Poitiers ; M. Paul Parfouru, 
archiviste du Gers ; M. l'abbé Paul Bureau, aumônier 
de l'hôpital de Tonnerre ; M. Estéve, conservateur du 
Musée archéologique de Nîmes. MM. les archivistes des 
hôpitaux de San-Spirito, à Rome, de Dijon et de 
Besançon ont mis la plus grande bienveillance à faci- 
liter nos recherches dans leurs riches dépôts. Nous 
devons une mention toute spéciale à notre excellent 
ami, M. l'abbé Favre, qui pendant tout notre travail, 
nous a prêté un concours aussi bienveillant qu'éclairé. 
Le lecteur saura gré à notre habile dessinateur, M. 
Francis Dessauges, d'avoir, par ses nombreux dessins, 
rendu plus attrayante la description de nos hôpitaux. 
Enfin les R. M. Supérieures des communautés de Po- 
ligny, de Neufchâteau et de Cracovie, voudront bien 
agréer notre vive gratitude pour les encouragements 
précieux et les renseignements pleins d'intérêt qu'elles 
nous ont accordés au cours de notre travail. 

Nous serions amplement récompensé, si notre hum- 
ble essai pouvait attirer sur l'ordre illustre du Saint- 
Esprit l'attention d'hommes capables de le mettre da- 
vantage en lumière et de lui élever un monument plus 
digne de lui. Puisse du moins notre livre exciter dans 
Pâme de ceux qui le liront un sentiment de reconnais- 
sance et d'admiration pour ces humbles religieux hos- 
fntaliers qui ont si bien mérité de la chrétienté et de 
'humanité entière, Soyons fiers, nous Français, de voir 
partir de notre pavs la première impulsion de ce beau 
mouvement de charité, de voir une fois de plus, la 
France unie à FEglise pour accomplir Tœuvre de Dieu. 



USTE DES OUVRAGES CITÉS 



Cette Ibte ne coinprend que des ouvrages ayant trait spécialeotent 
â l'Ordre du Saint-Esprit. Nous ne citons pas les fi;rands Recueîti 
généraux, non plus que les très nombreux o uvrages ahistoire locale, 
que nous avons consultés. 



D*ARBOis DB JuBAiNYiLLB. Eiudes SUT Us documents antérieurs à 
r année I28<, conservés dans les archives des quatre petits hôpitaux dé 
la viUe de Tro/es. (Mém. de la Soc. d*Agric. de l'Aube, t. XXI, 
|8J7). 

D' Baillot. NoHce sur les établissements de bienfaisance de Ligny^ 
en-Barrois. (Mém. de la Soc. des Lettres... de Bar-le-Duc, t. X, 
1881). 

Barbibr db Montault (Mgr). La croix à double croisillon. (Bull, 
de la Soc. Archéol. de Tam-et-Garonne, t. X, 1882). 

Philibert Boulier. Fondation, consiruction^ œconomie et rigle^ 
ments des hôpitaux du Saint Esprit et de Nostre Dame de la Charité , 
en la ville de Dijon, (Dijon, Pierre Patliot, 1649, in-4). 

A. Castan. Notice sur V hôpital du Saint-Esprit de Besançon. 
(Annuaire du Doubs, 1865, P* 'Î2-174 ; 1866, p. 177-226. —Tirage 
à part, i8ô6, in-8). 

Fr. de Chanteau. Notice historique sur Vhôpital du Saint-Esprit 
de Vaucouleurs. (Mém. de la Soc. d'ArchéoI. Lorraine, 1881). 

Compendio delli Privilegii, essentioni et indulgente concède da di^ 
versi Pontefici aW Archihospitale di S. Spirito in Sassia di Roma e 
suoi membri. Viterbe, 1 584. 

DuNOD. Dissertation sur la question de savoir si les Religieux de 
POrdre hospitalier du Saint-Esprit peuvent se qualifier de Chanoines 
Réguliers sous la règle de S, Augustin, in-fol., 9 pp. 

A. DuvAL. Notice sur Gui de Montpellier. (Hîst. Littéraire de la 
France, t. XVI). 

Fabre. Vhôpital de Marseille, } vol. 

Nicolas Gaultier. Abrégé de Thistoire de COrdre du ScAnh 
Esprit. Pézénas, i6$6, in-i2. 



VIII LISTB DES OUTRAGES CITÉS 

Nicolas Gaultier. La défense du Chef de Vancien Ordre des 
hospitaliers du Saint Esprit, estably a Montpellier par le Pape Innocent 
III, il Y ^ desiapre\ de cinq cents ans, contre le livre De capite ordinis 
Sancti Spiritus, et les vaines pensées de ceux qui disent qu'il est à 
Rome, par F. Nicolas Gaultier, Docteur es Drois, R. C. H. du même 
Ordre. Paris, MDC. LV. (In-4.) 

J. Gauthier. Notice historique sur Vhàpital du Saint-Esprit de 
Gra/ (12 58- 1790). Vesoul, A. Suchaux, 1873. 

Germer-Durand. Notice et Description de plusieurs sceaux de la 
Collection Séguier, relatifs au Grand Hôpital du Saint-Esprit de 
Rome{Mém. de TAcad.du Gard, 1856-1857, p. 27, 129). 

A. Germain. De la charité publique et hospitalière à Montpellier, 
185, in-4. 

L. Germain. Inscription d'autel du XV^ siècle à MarviUe. (Journal 
delà Soc. d'Archéol. Lorraine, février, 1884). 

Abbé Guillaume. Notice sur Vhospice du Saint-Esprit de la ville de 
Tout, (Nancy, Imp. N. CoUin, i87j,in-8de 2j p). 

P. HÉLYOT. Histoire des ordres monastiques j religieux et militaires 
de rOrdre du Saint-Esprit, t. II,chap. XXX-XXXI, pp. 19J-218, 
éd. de 1721. 

Idée générale de Vordre régulier des Commandeurs et Chanoines 
hospitaliers du Saint-Esprit de Montpellier en deçà les Monts. Paris, 
Jacques Geosse, MDCC. XVIII ; in-8 de 44 p. 

Mortreuil. L'hôpital du Saint-Esprit de Marseille : ses origines^ 
sa première administration intérieure, (Mém. de T Académie de Mar« 
seille, t. XXVIII, 1866). 

Mémoire au Roi (contre les réguliers qui prétendaient se rattacher 
au grand maitre de Rome). Paris, F. Muguet, 1700 ; in-4 de 7-47 p. 

Mémoires et extraicts de pièces pour justifier Vaniiquité de VOrdre 
du Saint-Esprit^ sous la reigle de S. Augustin ; son utilité et les confir- 
mations de ses privilèges par les Roys^ Fondateurs et Protecteurs de cet 
Ordre (par La Terrade }), in-4 de 15 p., s. d. 

Abbé Paulinier. Gui de Montpellier, fondateur de VOrdre du 
Saint-Esprit, son œuvre, sa règle. Destinées de VOrdre du Saint- 
Esprit après sa mort. (Mém. de l'Acad. de Montpellier, t. V, 1870- 
7j, p. 13J-207. (Tirage à part, 1870, 96 p.) 

G. Peignot. Histoire de la fondation des hôpitaux du Saint-Esprit 
de Rome et de Di)on, représentés en vingt-deux sujets gravés diaprés 
les miniatures d'un manuscrit de la Bibliothèque de Vhàpital de la 
Charité de Dijon^ accompagnée d'une description et d'un Précis ehro- 



LISTE DES OUVRAGES CITÉS IX 

nUogique. (Dijon, 1838, iii-4, 22 pi. (Extr. des Mém. de la Comm. 
des antiq. delaC6te-d'Or). 

[PÉMN Dumontet], Idée généraU de Vordre hospitalier du Saini-^ 
Esprit de Montpellier . Paris, Mesnier, M.DCC.XLIII; in-8* de 
56 p, 

Pouillédes biens j hôpitaux j maisons et revenus de Vordre régulier du 
Scdnt'Esprit de MontpelUery divisé en trois classes. Paris^ veuve Le- 
febvre, in-8*^ s. d. (EkI. du Diplomaia). 

Régula Sacri Ordinis Sancti Spiritus in Saxia. Roms, ap. Ant. 
Blandam, 1564. — Autre éd. Lugduni, ap. Guill. Barbier, 
MDCXLVII. 

Requesle^ Bulles, EdiiSy Consultations des Docteurs etJurisconsuUes. 
PouiUé des biens et revenus de F ordre du Saint-Esprit de Montpellier ^ 
présentés au Roy pour le rétablissement dudit Ordre, par les Com- 
mandeurs, Religieux et Chanoines hospitaliers du même Ordre. In 
f-, 1707. 

Fr. Petrus Sàulnier. De Capite Sacri ordinis Sancti Sp'uiius 
Dissertaiio. In qua ortus, progressusque Ordinis totius,ac speciatim 
Romans Domus amplitudo, prsrogativum J us, et iEconomia disserun- 
tur. Lugduni, ap. GuiU. Barbier. M.DC.XLIX. 

[J. A. Tousart]. Diplomaia Pontifida et Regia ordini regulari 
Sancti Spiritus MonspeUensi concesso, in duos tomos distributa. — 
Recueil de Lettres Patentes, Edits, déclarations, Arrêts, et autres 
Pièces conurnanl Vordre régulier et hospitalier du Saint-Esprit de 
Montpellier. Tome second. — Paris, Vve Jacques Letebvre, 
M DCC.XXIII, In f> de 171-453 p. 

Eric Vennerhaleii . Disurtatio de ordine Spiritus Sancti in Saxia 
de Urbe. Upsali», 1791, in-8". 

Fr. Calmelet. Histoire manuscrite de la Maison magistrale, con* 
veniuelle et Hospitalière du Saint-Esprit, fondée à Dijon en 1204 par 
Eudes III du nom, duc de Bourgogne, et sur le point de son extinc- 
tion par Louis XV Achevée en 1771. — Nombreux dessins. Il 

existe plusieurs copies anciennes de ce ms. 

Nota. — On trouve, aux Archives Nationales (M .42-4;), un cer- 
tain nombre de factums imprimés et manuscrits, dont la plupart sont 
consacrés à la défense de la prétendue Milice hoqntalière du Saint- 
E^rit. Nous jugeons inutile de les dter ici. 



Le lecteur est prié de corriger les fautes dlmpression sairantes : p. 19, 
I. 9, Use^ 1099 an lien de 1104 ; — p. ?^ 1. 28 : dnuîH ; — p. î7, 1. 29 : 
cssoMu; — p. 78,1. 29:iioiftiiauiieudeRéiiiis;<->p. J93t h 30 : Crpwii/ra, etc. 



INTRODUCTION 



LA CHARITÉ DANS L'ÉGLISE AVANT LE Xm* SIÈCLE 




E premier auteur et véritable fondateur de tous les 
établissements charitables, tels que celui dont nous 
entreprenons de retracer l'histoire , c'est Notre-Sei- 
grneur Jésus-Christ. C'est lui en effet qui a apporté du ciel 
en terre la charité divine, que l'antiquité païenne n'avait pas 
connue ; c'est lui qui a donné aux hommes le « précepte 
nouveau de s'aimer les uns les autres <. » Il s'est identifié 
en quelque sorte avec les pauvres et les petits, en promettant 
de considérer comme fait à lui-même ce qui serait fait au 
plus petit d'entre eux. Il a voulu que les relations sociales 
fussent désormais basées, non plus sur la force brutale et 
la soumission servile., maissur l'amour fraternel des hommes 
entre eux. Et fidèle sur ce point comme en toutes choses, 
« à pratiquer avant d'enseigner ', n il adonné pendant sa vie 
mortelle de touchants exemples de charité, d'éclatants té- 
moignages de son amour immense pour les hommes, amour 
qu'il voulait allumer dans le cosur de ceux qui croiraient 
en lui. 
L'Eglise, qui devait rq>résenter et continuer Jésus- 



' MAndatiuB oomm do Tobts; ot diUgêSii ioTioem. Jacum. XIII, ^4. 
■ De omnibBS... ^m» ooBpit iev» lioere et dooere. Ad» I. i. 



2 INTRODUCTION 

Christ parmi les hommes, n'eut garde d'oublier un de ses 
enseignements les plus précis, un de ses préceptes les 
plus exprès. Dès les premiers temps, on reconnaissait 
les chrétiens à Taffection qui les unissait, et les païens 
eux-mêmes ne pouvaient se défendre de l'admirer. Les 
œuvres de miséricorde à l'égard des pauvres, des malades 
et des affligés étaient dès lors mises au nombre des plus 
méritoires et des plus conformes à l'esprit de la nouvelle 
religion. De plus, non contente d'exhorter ses enfants à 
imiter chacun en particulier, sur ce point, son divin fon- 
dateur, l'Eglise voulut organiser l'exercice de la charité. 
Et c'est là qu'éclate son rôle éminemment bienfaisant. A 
elle revient l'honneur d'avoir su inspirer d'abord, puis 
grouper tant de dévouements individuels, et, décuplant 
leurs forces par l'association, d'en avoir formé des faisceaux 
qui devinrent de puissantes sociétés charitables. 

Elle trouvait d'ailleurs dans sa constitution même et dans 
la hiérarchie ecclésiastique, le lien nécessaire pour former 
ces sortes d'associations et maintenir leur unité d'action. 
Dans les Eglises particulières, qui avaient une vie à elles, 
la charité privée des fidèles s'organisa naturellement sous 
la direction de l'évêque et de son collège de prêtres et de 
clercs. Ces Eglises constituèrent ainsi des sociétés chari- 
tables, les seules que l'on connut alors, dont la vitalité 
puissante suffit à satisfaire les aspirations généreuses des 
âmes chrétiennes et leurs pieux désirs d'association pour le 
bien. Par elles la charité revêtit un caractère social et se 
trouva solidement organisée. La hiérarchie ecclésiastique 
lui fournit des cadres^ qui lui permirent d'enrégimenter, 
pour ainsi dire, les dévouements individuels, jusqu'au mo- 
ment où des ordres religieux spéciaux, mais tirés de cette 
même hiérarchie, et formés sur son modèle, vinrent dé- 
charger en partie les évêques et les clercs des soins de la 
charité. 

« La charité, qui demeure toujours la même en son fond, 



LA CHARITÉ AVANT LE X1II« SIÈCLE ) 

peut souvent varier en sa forme. L*Eglise, avec son œil de 
mère, découvre sans peine toutes les maladies de nos corps 
comme toutes les infirmités de nos âmes. Mais ces maladies 
sont variables à Tinfini, et TEglise doit aussi sans cesse 
modifier ses remèdes. De là tant de différences sensibles dans 
l'organisation de la charité aux différents siècles de This- 

toire ecclésiastique S'il est un fait qui semble acquis à 

l'histoire, c'est la dissemblance que l'on peut aisément cons- 
tater entre l'administration de la charité durant les persé- 
cutions, et cette même administration quand la paix eut 
été rendue à l'Eglise *. 

L'histoire de la charité peut se résumer en trois phases 
principales : 

Pendant les persécutions, les pauvres sont secourus à do- 
micile, par les soins du clergé. 

Après les persécutions, Aes établissements charitables^ 
élevés par le clergé et desservis par lui et sous ses ordres, 
donnent asile aux malheureux. 

Enfin, à partir du XII* siècle jusqu'à nos jours, des or- 
dres religieux se vouent au service des nécessiteux et dé- 
chargent des soins de l'hospitalité le clergé ordinaire. 

Quelques développements suffiront à mettre en pleine 
lumière les caractères de ces trois phases successives. 



PREMIÈRE ÉPOQUE 



Pendant les trois premiers siècles, l'Eglise est condamnée 
à s'ensevelir au fond des catacombes, à cacher sa vie, son 



* Léoo Gaotîer, HUtmre de la Charité, dans les Etudes et ubleanz histo- 
nqaes, 2* éd., p. 27. Noos poiserons souvent, au cours de ce chapitre, dans 
ce résumé magistral du célèbre écrivain catholique, ainsi que dans le bel 
ouvrage de Tabbé ToUemer, qui Ta inspiré : Da origima dt la ckarUi catkr 
iique^ ;• éd., 1885. 



4 INTRODUCTION 

culte, ses œuvres. Mais même dans une situation aussi dif- 
ficile, sa charité ingénieuse lui fournit le moyen de secourir 
ceux de ses enfants qui ont besoin de son assistance. Ne 
pouvant les réunir sans attirer l'attention des persécuteurs, 
elle va aller à eux et charger ses ministres de les secourir 
à domicile. L'évêque est établi, par son institution même, 
père des pauvres ; à lui donc revient de droit la direction 
de la charité * : « O Evêque, prends soin des pauvres, comme 
le dispensateur de Dieu même, distribue à chacun, aux 
veuves, aux orphelins, aux délaissés, aux indigents et aux 
malheureux, ce qui leur est nécessaire selon leurs besoins*.» 
Il est recommandé à tous les fidèles de remettre entre ses 
mains leurs aumônes, afin qu'il en fasse une répartition plus 
judicieuse et plus égale*. 

Mais Tévêque ne peut suffire à tout ; chargé du ministère 
de la parole et des sacrements, il lui serait impossible de 
secourir tous ses enfants. Les apôtres eux-mêmes y ont pourvu 
dès l'origine, par l'institution des Diacres : « Le nombre 
des disciples croissant de jour en jour à Jérusalem, lit-on 
dans les Actes, il s'éleva parmi les Grecs un murmure con- 
tre les Hébreux, de ce que leurs veuves étaient négligées 
dans la distribution journalière des aumônes. Alors les 
apôtres assemblèrent la multitude des fidèles et leur dirent : 
il n'est point juste que nous abandonnions la parole de 
Dieu pour avoir soin des tables ; choisissez donc entre 
vous sept hommes de bon témoignage, remplis du Saint- 
Esprit et de sagesse, pour prendre soin de ce service*. » 

Ainsi furent institués les diacres, pour remplacer les 
apôtres, puis les évoques leurs successeurs, dans le tninis- 



* Const. Apost, I. V. CI. 

* O episcope, pauperum curam habe, tanquam Deidispensator;distribiiendo 
cuique in tempore, qus commoda sunt, viduis, pupillis, derelictis ac destitutis 
et calamitosis. Const. Apost i. j, c. |. 

' Omnes fidèles ex hiîs bonis quœ habetis, aut ex labore» ministrate sanctîs 
(idest pauperibus) per episcopum vestrum. Const, Apost, 1. v, c. i. 

* Act, Apost, VI. I et seq. 



LA CHARITE AYàMT LE XIII* SIÈCLE 5 

tère des tables^ c'est-à-dire, dans l'assistance des pauvres 
et des nécessiteux. Leurs fonctions sont heureusement ré- 
sumées dans ces mots des Constitutions Apostoliques : 
« Que le diacre soit Toreille, Tœil, la bouche, le cœur et 
Tàme de Tévèque *. » S'informer exactement des malheu- 
reux, les signaler ensuite à Tévèque, les visiter en son 
nom et leur porter à domicile la nourriture, le vêtement 
et même l'argent nécessaires, tel était le principal office 
des diacres*. Bien plus, ils devaient tenir un catalogue 
exact et précis de tous les pauvres et malades, y consignant 
leur état de fortune et leurs dettes, les ressources qu'ils 
pouvaient tirer de leur travail, etc '. Ce catalogue, ils de- 
vaient sans cesse le mettre sous les yeux de Tévèque, qui 
réglait lui-même le montant et la nature des aumônes et 
des secours ^ Pour faciliter la tâche délicate des diacres, 
la ville de Rome fut de bonne heure divisée en Titres ou 
régions, dont chacune était confiée aux soins de l'un des 
sept diacres. Les grandes villes de TOrient étaient aussi 
partagées en diaconies. 

La vie des diacres saint Etienne et saint Laurent four- 
nit le plus illustre témoignage du zèle déployé par les 
ministres des pauvres et du bien qu ils accomplissaient. 

Les fonctions des diacres les mettaient en rapports inces- 
sants avec les fidèles de tout âge, de tout sexe, de toute 
condition : ces relations journalières pouvaient fournir 
aux ennemis de la foi des prétextes à calomnie *. Une ins- 
titution apostolique elle aussi^ y pourvut. Dès le temps des 
apôtres, de pieuses femmes, dont Tâge et la sainteté écar- 
taient tout soupçon, furent adjointes aux diacres. Saint 
Paul, dans son éjntre à Timotfaée, énumère les 



' CotuLAposl, 1. n, c. 44- 

• /*ûL, I. m. c. 12. 

' Voy. ponr les tertrt, Tolteaier, D£S origiita dt la Ckariié caikoUqmt^ p. f oo. 

* thid. 

■ ibié^ p. 4QO. 



6 INTRODUCTION 

qui doivent désigner les diaconesses au choix des évèques * 
et les Canons apostoliques expliquent leur utilité : « Il arrive 
quelquefois qu'on ne peut envoyer un diacre dans cer- 
taines maisons, à cause des infidèles. Vous y enverrez une 
diaconesse, afin de prévenir les soupçons des méchants. 
Celles que vous choisirez devront être fidèles et saintes ; 
elles seront chargées des divers offices qui concernent les 
femmes* ». 

Les diaconesses formaient un ordre véritable et partici- 
paient à la cléricature ; elles exerçaient leur ministère sous 
les ordres et la direction des diacres. 

La hiérarchie sacerdotale et lévitique apparait donc, aux 
premiers siècles, comme la dispensatrice des aumônes du 
peuple chrétien ; « celles-ci, en passant par ses mains^ 
prenaient un caractère sacré ; elles étaient placées sur Tau- 
tel, et elles se répandaient de Tautel sur les infortunes 
humaines'. » N'oublions pas toutefois que cette noble préro- 
gative du clergé n'avait rien d'exclusif ; il appelait au con- 
traire à lui le concours de toutes les âmes saintes. Clercs et 
diaconesses, vierges et veuves consacrées à Dieu, tous 
exerçaient le Ministère charitable en vertu même de leur 
ordre. Bientôt s'adjoignirent à eux de pieux laïques, qui se 
dévouaient gratuitement au service des pauvres et des ma- 
lades sous leur direction *. Toute une classe de chrétiens, 
qui par leur zèle pour la perfection évangélique, devinrent 
la source de l'ordre monastique, les Ascètes^ tenaient pour 
un de leurs premiers devoirs l'assistance des pauvres et des 
malades ; c'était là une recrue bien précieuse, car les clercs, 
sans les ascètes, n'auraient pu, le plus souvent, suffire aux 
œuvres multiples de charité qui leur incombaient ^ Nous 



* Tim.^ V. 9 et sqq. 

■ Can.Apasi,, ^., $ ;^S.Epiph,Hares.,LXX\X;^ HUron, Ep.II ad NepoUan. 
' Dom Gréa, De PBgUse et de sa dmne constitution, p. 462. 

* Dom Gréa, Ibid, 

* Cf. sur le rôle des Ascètes, Martigny, Dîc/. des Antiq. chrétiennes, W Ascètes, 



LA CHARITÉ AVANT LE XIII" SIÈCLE 7 

retrouverons aux époques suivantes le concours des As- 
cètes ; il prendra même une telle importance, qu'il finira 
par devenir le principal élément des ordres religieux 
fondés pour exercer l'hospitalité. 

Nous passerons rapidement sur cette époque héroïque de 
la charité chrétienne. Aussi bien le tableau en a été tracé 
souvent déjà. Forcé de nous restreindre, nous n'en prenons 
que les traits propres à mettre en lumière l'organisation 
primitive de la charité. 



SECONDE ÉPOQUE 



Une ère nouvelle se lève sur le monde avec la conver- 
sion de Constantin. Le christianisme, devenu religion offi- 
cielle de l'empire, place l'Eglise en tète de la société ; 
celle-ci n'est plus réduite « à mendier pour les pauvres une 
place à la table des riches : » c*est à sa propre table qu'elle 
prétend les nourrir. 

Les biens des martyrs restitués, les largesses impériales 
et les dîmes des fidèles lui assurent un patrimoine et des 
richesses, qui la mettent à l'abri des éventualités et de 
l'état précaire de l'âge qui vient de finir. Bientôt, à l'aide 
de ces richesses, s'élèvent de toutes parts de somptueux édi- 
fices. Les évêques, les diacres, dans leur expérience de tfois 
siècles, ont appris à connaître toutes les misères ; aucune 
n'est oubliée, toutes auront leur demeure, où les soins les 
plus assidus leur seront prodigués. Les enfants, les veuves 
et les orphelins, que Taffection maternelle de l'Eglise ne 
sépare jamais, les vieillards, les pauvres mendiants, les 
malades et les infirmes, tous reçoivent de sa main un se- 
cours et un asile. 

Un des premiers objets de la sollicitude de l'Eglise devait 



9 INTRODUCTION 

être le soin des enfants. On sait le pouvoir monstrueux 
accordé par les lois de la Grèce et de Rome aux parents sur 
leurs enfants. La fréquence des infanticides était devenue 
telle dans la société pa!enne, queTertullien pouvait s écrier 
sans crainte de démenti : « Combien, parmi vos magistrats 
eux-mêmes, n'en est-il pas gui tuent leurs enfants dès 
qu'ils sont nés ? Dans votre excessive cruauté, vous les 
exposez sur la voie publique, là où ils doivent périr de 
faim ou de froid, ou devenir la pâture des chiens'. » Je vous 
vois, ajoute Minucius Félix, « exposer aux bêtes féroces 
et aux oiseaux de proie les enfants qui vienneAt de vous 
naître. D'autres les étouffent ou leur broient la tête contre 
la pierre *. » Les malheureux enfants exposés, lorsqu'ils ne 
périssaient pas, étaient recueillis par des marchands d'es- 
claves ou par d'immondes prostituées qui les destinaient 
à un trafic infâme ^ Ce n'était du reste que la mise en pra- 
tique d'une maxime de Platon : « Si des enfants naissent 
de parents trop vieux, l'état ne doit pas les nourrir : qu'on 
les expose *. » 

Notre époque a peine à croire à de telles atrocités ; mais 
les preuves en sont tellement multipliées, que le doute est 
impossible. On comprend que les empereurs chrétiens du- 
rent faire tous leurs efforts pour adoucir sur ce point les 
mœurs romaines. Un édit de Constantin ordonnait à tous 
les officiers fonctionnaires de délivrer des aliments et des 
vêtements aux parents pauvres et chargés d'enfants. Mais 
le secours décisif vint de l'Eglise ; ce fut elle qui fonda ces 
nombreux Brephotrophia^ ou maisons d'enfants trouvés, 
inaugurant cette assistance admirable du jeune âge, que 
nous verrons continuée avec tant d'éclat par Gui de Mont- 



* Apolog., II, dans Tollemer, p. $41 et Léon Gautier, p. $9. 

* Min. Félix, p. 1$, éd. Rigaut (Ibid). 

* L. Gautier, p. 40. 

' Platon, RipubUque, trad. Cousin, t. IX, p. 2I7. {Ihid). 



LA CHARITÉ AVANT LB XIII* SIÈCLE Q 

pellier et son ordre du Saint-Esprit, et restaurée ensuite 
par « le plus grand homme du XVI" siècle, » saint Vin- 
cent de Paul*. 

Les Orphelins avaient leurs établissements spéciaux 
(Orphanotrophia) ; les directeurs de ces maisons étaient, 
selon la disposition des lois, « les tuteurs de ces enfants et 
les curateurs de ces adolescents*, » jusqu'au moment où. 
rendus capables de gagner honnêtement leur vie, ils fon- 
daient à leur tour des familles laborieuses et chrétiennes \ 

Les Vieillards dénués de ressources eurent aussi leurs 
asiles : les Gerontocomia ne nous sont guère connus que 
par le texte des lois * ; cela suffit cependant à prouver que 
TEglise ne les oublia pas. Nous avons du reste des exem- 
ples de sa sollicitude. Le pape Pelage II (577) « fit de sa 
maison un hôpital pour les vieillards pauvres ^ » Au temps 
de saint Grégoire, il existait un hôpital pour les vieillards 
jusque sur le Sinaï. Ayant appris qu'il manquait du mobi- 
lier nécessaire, le grand pape y envoyait quinze matelas, 
trente couvertures et quinze lits, avec une somme d'ar- 
gent*. 

Les Pauvres continuaient à être visités à domicile ; mais 
les secours leur étaient habituellement distribués dans des 
maisons, appelées en Orient Ptochotrophia et en Occi- 
dent Diaconies^ parcequ'elles s'élevaient au centre des 
titres ou régions des diacres. L'affluence y était considéra- 
ble : « Comptez, dit S. Jean Chrysostôme, combien l'Eglise 
nourrit chaque jour de vierges et de veuves. La liste de 
ces pauvres s'élève au moins à trois mille (à Constanti- 



' L. Gautier, p. 42. 

* Sur le rôle de TEglise au sujet de la protection des enfants à cette époque, 
voy. le bel ouvrage de M. Léon Lallemand, Histoire des enfants abandonnés et 
délaissés t livre II. 

• CodJust. III, 32. 

• Itid., I,Ut. II, 19. 

" Liber Pontif, Ex -ejus vita, ap. Labbe. 

* s. Greg. Begesl,^ ii. 



10 INTRODUCTION 

nople seulement). Ajoutez-y les détenus des prisons, les 
malades de Thôpital, les pauvres valides, les étrangers, les 
estropiés, les serviteurs de TEglise, et ceux qui viennent 
lui demander chaque jour des aliments, des vêtements 
et autres secours *. » Les clercs des églises et les monas- 
tères recueilleront un jour Théritage des diaconies. 

Loger les Etrangers et les pauvres passants, tel était, 
d'après les canons Arabiques du concile de Nicée, le but 
des refuges nommés Xenodochia*. Il faut lire la description 
enthousiaste que fait saint Jérôme de rhôtellerie élevée 
par le patricien Pammachius et la noble dame Fabiola, 
qui s'y étaient consacrés eux-mêmes au soin des pauvres 
et des voyageurs' ; rien n'est plus propre à nous donner 
une haute idée de la grandeur de ces établissements et du 
dévouement héroïque de ceux qui les desservaient. 

L'assistance et la visite des malades à domicile ne de- 
vait pas cesser avec les persécutions ; elle continua pendant 
la paix et TEglise Ta toujours placée au premier rang par- 
mi les œuvres de miséricorde. Maïs cette visite ne faisait 
plus qu'accompagner et suppléer l'assistance dans des hôpi- 
taux spéciaux. On comprend que la charité de l'Eglise dût 
porter principalement sur ce point son ministère secoura- 
ble ; les maisons pour les malades, ou Nosocomia, étaient 
les plus utiles de ses nouvelles créations : c'est à ce titre 
que nous les verrons survivre presque seules aux invasions 
et à l'anarchie de la domination barbare, pour devenir 
enfin, au XIIP siècle, ces Maisons-Dieu répandues avec 
une magnifique profusion jusque dans d'humbles villages. 

Souvent ces Nosocomia élevés par les grands évèques 
des quatrième et cinquième siècles, ne le cédaient point en 
grandeur à nos modernes hôpitaux. Saint Grégoire de 



* //t. MaUi. hom. i^. 

* Tollemer, p. $66. 

* s. Hieron. Ep» 84. 



LA CHARITÉ AVANT LE XIII* SIÈCLE II 

Nysse comparait à une ville celui que saint Basile avait 
élevé à Néocésarée * ; plus de six cents infirmiers étaient 
sans cesse occupés au soin des malades à Alexandrie, du 
temps desaint Athanase*. L'hôpital fondé à Rome par sainte 
Fabiola rivalisait de splendeur avec les plus célèbres de 
l'Orient ». 

Après cette revue rapide des établissements charitables 
éclos sous la féconde initiative de TEglise, jetons un coup* 
d'œil sur leur gouvernement. Toutes ces maisons relevaient 
de la juridiction des évéques, qui du reste les avaient 
fondées pour la plupart ; l'Etat n'avait aucune part à leur 
direction et les lois civiles n'intervenaient que pour sau- 
vegarder les droits des évêques. Une loi d'Honorius et de 
Théodose dit en propres termes que le choix des infirmiers 
d'Alexandrie « est laissé à la volonté du très vénéré prélat 
d'Alexandrie S » Les évéques choisissaient eux-mêmes les 
administrateurs et les serviteurs des hospices. S. Ambroise 
plaçait un prêtre à la tête de celui de Milan *. L'historien 
de saint Jean Chrysostôme rapporte qu'il fit construire 
plusieurs hôpitaux, ceux qui existaient jusqu'alors étant 
devenus insuffisants ; qu'il plaçait à leur tête deux prêtres 
choisis parmi les plus pieux et leur adjoignait des méde- 
cins, des cuisiniers et aides subalternes. Aucun de ces aides 
ne devait être engagé dans le mariage *. Les six cents infir- 
miers chargés du service des hospices d'Alexandrie, au temps 
de saint Basile, devaient, eux aussi, demeurer dans le 
célibat, afin d'être plus libres dans l'exercice de leur pieuse 
vocation. 

Qui ne verrait, dans ces pieux laïcs, entièrement à la 



* Greg. Nyss. In laud, fratr'u Basil, 

* Cod. Th€od.,\, i8. 
' s. Hieron. Ep. 84. 

* Cod. Theod,, I. 18. 

* S. Ambros. Ot Officiis, 3, 5» 

* Pallad. DiaL, Cap, 8. 



r4 INTRODUCTION 

Les conciles et les capitulaires Carolingiens rappellent 
constamment les évèques à l'exercice de Thospitalité ; les 
conciles de Reims (813), de Paris (829), d'Aix-la-Chapelle 
(836), etc., leur commandent d*avoir toujours à leur table des 
indigents. Les curés de la campagne étaient tenus àThospi- 
talité comme les évèques. Hérard, archevêque de Tours, la 
leur recommande de la façon la plus pressante * ; Hincmar 
renouvelle les mêmes ordres ;il veut que les pasteurs prennent 
le plus grand soin des pauvres, des infirmes, des orphelins 
et des voyageurs, qu'ils les reçoivent à leur table et leur 
donnent l'hospitalité *. 

Telle était la règle et voilà pourquoi on vit s'élever avec 
le temps, près des basiliques cathédrales, de vastes hospi- 
ces, qui étaient comme les dépendances des maisons épis- 
copales. 

Ces hospices se multiplièrent en même temps que l'apos- 
tolat fondait de nouvelles églises. Les différents quartiers 
des villes eurent aussi leurs maisons charitables, établies 
dans les titres ou régions et desservies par le clergé de ces 
circonscriptions '. Partout donc où il y eut un siège épis- 
copal, il y eut au moins un hospice. Dans les villes et les 
bourgs moins importants, à mesure que se fondèrent les 
paroisses, avec un clergé fixe et sédentaire, ces paroisses 
eurent aussi leurs maisons de secours, car elles se mode- 
laienik en tout sur l'église épiscopale *. 

N'oublions pas ici le rôle important des grands établisse- 
ments monastiques. A l'époque Carolingienne, le monastère 
était constitué comme une véritable église, avec son chef, 
l'abbé, ses clercs pour le service divin, soit à l'église- 



* Herardi Capit., c. 18, 108. 

* Hincm., c. 9, 10. 

' Ideoque placet ut in singulis civitatibus et monaateriis, juxta modum 
rerum hospitale ordinetur advenientium. Conc. Aix-la-Chap, (8^6)^ c. i, ^ 

* Voy. sur le développement des églises paroissiales et monastiques» l'ouvr. 
de D. Gréa : De C Eglise et de sa divine constitution, p. 151 et sv. 



LA CHARITÉ AVANT LE XIII* SIÈCLE 15 

mère, soit dans les prieurés, et son peuple, composé des 
moines laïcs. Mais comme les églises étaient obligées de 
nourrir leurs pauvres et de construire des hôpitaux, de 
même aussi les monastères, véritables églises, durent 
remplir ce devoir. Les conciles étaient très attentifs à le 
leur rappeler ; on y trouve de nombreux canons réglant 
Thospitalité qui devait s^exercer tant dans les abbayes 
d'hommes que dans celles de femmes. Les capitulaires don- 
nèrent force de loi à ces prescriptions et les Af/,s^/ Dominici 
veillaient à leur exécution d'une manière toute spéciale ^ 

Pour être complet, nous devons citer aussi les hospices 
fondés en très grand nombre par les « saints Irlandais », et 
destinés à abriter et recevoir leurs compatriotes, qui, 
d'humeur très voyageuse*, se rendaient en foule à tous les 
pèlerinages du monde entier, sans craindre les extrémités 
ni du froid ni de la chaleur'. Mais dès le temps de Charles 
le Chauve, ces hospices^ comme beaucoup d'autres, étaient 
ou ruinés ou détournés à d'autres usages \ 

On le voit, c'est dans les églises d'une part, dans les 
monastères de l'autre, que s'exerçait à cette époque l'hos- 
pitalité ; et lorsque les rois ou les particuliers fondaient des 
hospices, les évéques en prenaient de droit la direction. 
Une lettre de saint Grégoire nous apprend que l'hôpital, 
fondé à Autun par la reine Brunehaut et son petit-fils 
Théodoric, était dirigé par un abbé, et par conséquent 
desservi par une communauté de clercs \ Cinquante ans 
auparavant, Childebert, en fondant l'hôpital de Lyon, re- 
connaissait bien le droit des évéques, lorsque, pour assurer 



* Capit. (801) tx lege Longoh,^ XXVIII. Baluz., i. col. ^^5.— CapiU Missisdom, 
(851), cap. I. Ibid., II. col. 5a. 

• s. Cr e^.Reg., ij,8. 

• Valafr. Strab., Vita S. Galli, 1. 2, c. 46. 

' Vita 5. Mariani abb, Ratisb., n,2 de 5co<rs« ^ Ducange, v» ScoH. 

* Ducange, ibid. 



l 



l6 INTRODUCTION 

la durée de sa fondation, il faisait décréter par le concile 
d'Orléans (549) : « que jamais aucun prélat de Téglise de 
Lyon ne pourrait retenir par devers lui ou transférer à sa 
propre église les dons provenant des souverains susdits et 
de la charité des fidèles. » Les mêmes prélats devaient 
veiller « à ce que, des préposés zélés et craignant Dieu 
s'y succédant toujours selon le but de la fondation, le soin 
et le nombre des malades, l'accueil des pèlerins y subsistât 
perpétuellement sans aucune atteinte*. » 

Les hôtelleries et hôpitaux n'avaient déjà plus alors la 
destination unique et précise que nous leur avons vue 
auparavant. Ainsi l'hôpital de Lyon est appelé XenodO" 
chium dans le texte précédent, et pourtant il recevait non 
seulement les voyageurs, mais les malades et les pauvres. 
Toutefois les hôtelleries des monastères servaient à peu 
près uniquement à héberger et loger les passants et les 
pauvres *. 

Nous pensons avoir suffisamment démontré, par les 
exemples cités ci-dessus, que l'autorité ecclésiastique eut 
la direction des maisons de charité dans le bas moyen-âge 
comme dans les premiers siècles. Il nous serait facile de 
multiplier les citations; mais nous avons hâte d'arriver 
enfin à la dernière phase de l'histoire de la charité. 



TROISIÈME ÉPOQUE 



Nous touchons au moment où l'Europe sort à grand-peine 
du chaos desinvasions et de la barbarie qu'elles ont déchaînée 
sur le monde, et où le moyen-âge marche vers l'apogée 



* Labbe, t. V., col. 990. — V» aussi Guigue, ATotre-Dame dt Lyon^ p. p5* 

* V. Ducange, v» HospUaU; Thomassin, lU, p. i)68, etc. 



LA CHARITÉ ^VANT LE XIlP SIÈCLE I7 

de sa grandeur. Une foi vive, ardente, anime les cœurs 
et fleurit en œuvres pieuses de toutes sortes. Les hospices 
et hôpitaux, les Hôtels-Dieu, car c'est à cette époque 
qu'apparaît ce beau nom, participent à la rénovation géné- 
rale. Dès le XI« siècle le grand mouvement commence à 
se faire sentir. L'Eglise réforme ses clercs ; la charité et les 
œuvres de miséricorde progressent à mesure que la foi éta- 
blit son empire ; les libéralités abondent et permettent 
aux hôpitaux anciens de s'agrandir, tandis que partout 
s'en élèvent de nouveaux, et dans des localités même où 
ces établissements seraient aujourd'hui inoccupés ^ 

En même temps apparaissent les premiers germes d'or- 
dres religieux spécialement voués au service des maisons 
de charité. Jusqu'alors ces maisons étaient desservies par 
des prêtres attachés aux églises et délégués par les évè- 
ques pour ce ministère ; sous les ordres des prêtres étaient 
des clercs et de pieux laïcs, hommes et femmes, consacrés 
au service des pauvres pour un temps ou pour la vie. Cette 
organisation nous est apparue très clairement dans l'Eglise 
primitive et jusqu'aux invasions. Il est plus difficile d'en 
suivre, les traces à partir du VII^ siècle ; mais il en reste 
assez d'indices pour nous permettre d'affirmer qu'elle se 
maintint à travers cette période calamiteuse, puisque nous 
Talions retrouver bientôt. 

Les hôpitaux qui se trouvaient placés dans les centres 
importants reçurent naturellement de plus grandes lar- 
gesses et se développèrent en proportion de leurs richesses 
et du zèle de leurs préposés. Quelques-uns se distinguèrent 
bientôt entre les autres et devinrent des pépinières où 
ceux qui fondaient de nouvelles maisons venaient prendre 
des directeurs habiles. Cette filiation forma des groupes 
unis par la communauté d'origine et la conformité des ob- 
servances : telle est l'origine très simple de tous les ordres 



* D'Arbois de Jubainville, Abbayes Cisterciennes^ i*"* id, p. 219. 

2 



l8 INTRODUCTION 

hospitaliers, qui tinrent une place si considérable dans le 
moyen-âge féodal. 

Et comme les clercs qui desservaient les hôpitaux appar- 
tenaient au clergé des églises, il s'ensuit qu'ils continuaient 
à vivre selon les règles de la vie canonique ordinaire, qui 
alors comprenait essentiellement le chant de Toffice et la 
vie commune. Lors de la séparation de l'Ordre canonial en 
deux corps distincts, le clergé séculier et le clergé régu- 
lier \ les plus fervents d'entre les clercs gardèrent, avec la 
vie commune, les biens indivis et s'assujettirent à la règle 
dite de S. Augustin, ramenée à sa première rigueur ; les 
autres clercs devinrent peu à peu notre clergé séculier. 
Les clercs chargés des hôpitaux gardèrent leurs anciennes 
observances et par conséquent furent des chanoines régu- 
liers. C'est là l'explication trop peu remarquée de ce fait, 
que tous les ordres hospitaliers suivirent la règle de S.Au- 
gustin *. 

Les grands ordres hospitaliers et militaires ont tous, sans 
exception, pris naissance dans un simple hôpital : ce point 
n'a pas été jusqu'ici mis assez en lumière parles historiens; 
on nous permettra, à raison de son importance, d'entrer dans 
quelques détails. 

L'ordre des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem 
est le plus ancien de ces instituts. Bien avant les Croisades,si 
l'on en croît Guillaume de Tyr', des marchands d'Amalfi, en 
relations commerciales très fréquentes avec la Palestine, 
avaient obtenu des califes l'autorisation d'élever à Jérusalem 
un monastère pour des clercs de leur pays, chargés de 
donner asile aux pèlerins de leur patrie. Comme le nombre 
des pèlerins de toutes nations allait toujours en croissant, 
les clercs Amalfitains^ témoins des mauvais traitements 



* Cette séparation de l'Ordre canonique en clergé séculier et régulier fut 
surtout l'œuvre de S. Léon IX et de S. Grégoire VU . 

• V. Dom Gréa : De l'Eglise, p. 435 et sv. 
' Chron.,1. XVJII, c. V. 



LA CHARITÉ AVANT LE XIII^ SIÈCLE IÇ 

que les chrétiens subissaient de la part des infidèles, 
résolurent de leur venir aussi en aide. Ils augmentèrent 
leurs bâtiments, d'abord d'un hospice pour les femmes, 
comme étant plus exposées, puis d'un second pour tous les 
pèlerins étrangers, qu'ils placèrent sous l'invocation de S. 
Jean l'Aumônier, patriarche d'Alexandrie, d'où ils prirent 
leur nom. Un saint homme, nommé Gérard, était recteur 
de cet hospice, lors de la prise de Jérusalem par Godefroy 
de Bouillon, en 1104 '. 

Mais déjà la reconnaissance des pèlerins avait trans- 
porté dans l'Europe entière la réputation de THôpital de 
Jérusalem. Dès l'année 1083, il avait une notoriété assez 
considérable pour qu'on lui fit, dans les pays chrétiens, des 
donations de territoires, qu'il administrait par des frères et 
des officiers *. 

La conquête des Lieux-Saints eut pour résultat de donner 
un immense essor aux Hospitaliers de Saint-Jean ; Godefroy 
et les seigneurs rivalisèrent de libéralités à leur égards si 
bien qu'ils se répandirent dans la Palestine entière, en même 
temps que leurs maisons d'Europe leur fournissaient des 

ressources d'hommes et d'argent. On ne saità quelle époque 
précise ils ajoutèrent à l'hospitalité la défense des pèlerins 
par les armes ; ce fut vraisemblablement peu d'années 
après la conquête, car on voit, en 11 18, Raymond du Puy, 
successeur de Gérard, contribuer avec ses hospitaliers à 
la défaite du calife d'Egypte. L'Ordre dut aussi à ce maître 



• Hist. des ordres religieux et monastiques, par le P. Hélyot, III, p. 7^ 

* On voit une maison s'établir, de 1082 à 1084, à Saint-Antoine de Lacalm, 
dans Tévcché d*Albi ; elle est administrée par un maitre (magister domus hospi- 
talisa qui a sous lui des frères. Une donation faite à la même maison, en 1085, 
semble prouver que dès l'origine l'Ordre suivit la règle canoniale ; cet acte 
solennel fut accompli le jour de S. Augustin, c et l'on s'explique très bien le 
choix d'une fête patronale de l'Ordre pour la confection d'actes donnant pour 
ainsi dire une existence officielle à l'Hôpital dans ces contrées. > D'autres 
documents, antérieurs à la fondation du prieuré de Saint-Gilles, qui eut lieu 
vers 1112, achèvent de prouver l'existence de l'Ordre dans nos contrées avant 
la fondation de ce célèbre établissement. (G. Saige : Les orig, de VOrdre de 
l Hôpital Saint-Jean de Jérusalem, Extr. du Bull, de l'Ecole des Chartes, i8<i4). 



30 INTRODUCTION 

la division des religieux en trois classes : les nobles, qui 
portaient les armes, les prêtres, chargés du service reli- 
gieux, et les frères servants, destinés aux soins domestiques 
des hôpitaux. 

L'ordre du Temple dut sa création à neuf chevaliers, 
venus en Terre sainte vers 1 1 18. Ils reçurent des mains du 
Patriarche Thabit ecclésiastique et la règle des clercs de 
Saint- Augustin, et furent constitués chanoines gardiens du 
Saint-Sépulcre. Pendant dix années ils n'admirent aucun 
compagnon ; mais ayant reçu de saint Bernard une règle 
précise, ils devinrent un ordre franchement militaire, re- 
prirent leurs armures et furent le plus solide boulevard de 
la Terre sainte. 

L'ordre Teutonique parut après les deux premiers, 
dans le cours du XII* siècle. Jacques de Vitry lui attribue 
la même origine qu'à celui de Saint-Jean, c'est-à-dire un 
hospice bâti à Jérusalem pour les pèlerins Teutons. Céles- 
tin V donna aux nouveaux hospitaliers une règle emprun- 
tée aux statuts de Saint-Jean, en ce qui regardait le soin 
des malades et des pèlerins, et à ceux des Templiers, en 
ce qu'il aurait de militaire et d'ecclésiastique '. 

L'ordre de Saint-Lazare était voué au soulagement 
des lépreux. Ses origines sont très obscures ; mais il est 
certain qu'il existait à Jérusalem et à Ptolémaide peu après 
la première Croisade. Il devint militaire en même temps 
que les autres ordres hospitaliers. Louis VII, qui avait pu 
apprécier les qualités des chevaliers de Saint-Lazare, en 
amena douze en France et confia à l'Ordre les maladreries 
du royaume *. 

La même cause qui avait provoqué la création des trois 
ordres de Terre sainte, amena en Espagne l'établissement 
de Tordre de Saint- Jacques ou de l'Epée. L'affluence con- 



' Hélyot, t. III, p. 141. 

* Hermant, HisU des religions ou ordres militaires de VEglise, 1704, p. 7. 



LA CHARITé AVANT LE X1II« SIÈCLE 21 

sidérable des pèlerins à Téglise de Saint-Eloi en Galice, 
auprès do tombeau de saint Jacques, avait déterminé les 
chanoines de cette église i construire d'abord dans la ville, 
puis en diverses régions d'Espagne, des hôpitaux pour leur 
servir d'asiles. Mais comme les Maures dépouillaient quan- 
tité de pèlerins, des chevaliers s'unirent aux chanoines sous 
la même r^le et se vouèrent i la défense des pieux voya- 
geurs. C'est ainsi que fut fondé Tordre fameux d'Espagne ^ 

En 1095, naissait en Dauphiné Tordre de THôpital de 
SAINT- Antoine, destiné au soulagement des malheureux 
atteints du mal des ardents. Le nouvel institut se propagea 
très rapidement, en raison même de Tétendue et des ra- 
vs^res du mal qu'il était appelé à combattre. Il eut, comme 
les ordres nés en Orienta son grrand maître et ses religieux 
qui suivaient la règle de saint Augustin. Il faut remarquer 
que, comme il n'eut jamais d'ennemis à combattre, il ne se 
transforma pas en ordre militaire. 

Deux autres ordres se formèrent à la fin du XII« siècle 
et au commencement du XIII*, pour le rachat des captifs : 
Tordre de la Merci, d'abord militaire, à Timitation de ceux 
de Terre sainte, ne tarda pasà restreindre son action au but 
principal qu'il s'était proposé: les Trinit aires lui joi- 
gnirent le serin des hôpitaux. 

Enfin le dernier de ces grands ordres fut celui du 
Saint-Esprit, objet de cette étude: nous verrons bientôt 
ses nombreux points de ressemblance avec ses devanciers, 
ocmime aussi les particularités qui lui font une place à part 
an milieu de toutes ces créations grandioses de la charité. 

A côté des grands ordres hospitaliers et militaires, nous 
vojrcms se former partout, àla même époque, des congr^^a- 



et le même but d^hospitàhté. Leur existesioe est attestée 
en œs termes par lliistonen Jacques de Vitry : « U y a en 



22 INTRODUCTION 

outre d'autres congrégations, tant d'hommes que de femmes, 
si nombreuses dans toutes les contrées de l'Occident, qu'elles 
ne se peuvent compter, se dévouant avec humilité et fer- 
veur au service des pauvres et des malades. Elles vivent 
selon la règle de saint Augustin, sans biens propres et en 
commun, sous l'obéissance d'un maître. En revêtant l'habit 
religieux, ces hommes et ces femmes promettent à Dieu une 
continence perpétuelle. Ils assistent le jour et la nuit aux 
heures canoniques, autant que le permettent les soins de 
l'hospitalité et le service des pauvres du Christ. ' » 

La France possédait nombre de ces communautés, qui 
pour la plupart avaient formé des filiations quelquefois 
assez étendues. Telles étaient les congrégations du célèbre 
hôpital d'Aubrac en Rouergue % de l'Hôtel-Dieu de Paris *, 
des Portecroix de Boulogne*, de hôpitaux de Saint-Ger- 
vais et Sainte-Catherine à Paris*, de Noyon, d'Amiens, 
d'Abbeville, de Beauvais*, de Lille % etc., qui tous étaient 
régis par un maître ayant sous lui des frères et sœurs, et 
avaient reçu des papes ou de leurs évèques des constitutions 
empruntées pour le fond à la règle de saint Augustin. 

Malheureusement ces communautés, si ferventes à l'ori- 
gine, tombèrent bientôt dans le relâchement, par suite sur- 
tout de la présence de personnes séculières et mariées, qui 
s'y retiraient pour décliner la juridiction laïque et y vivre 
aux dépens des pauvres, malgré les prescriptions des con- 
ciles •. L'autorité épiscopale était souvent impuissante à ré- 
primer des désordres et des abus entretenus par les sei- 
gneurs laies. Ce qui manquait à ces communautés éparses 



» Guill. de Vitry, HUt. Occid., c. 29. 
•Voy. le P. Hélyot, t. III, p. 169. 

* Ibid., t. III, p. 185. 

* Urb. III. Epist. V. 

* Hélyot, ibid.,p. 299, 295. 

* Ibid., p. joo elsv. 

^ Thomassin, t. III, part. I, L. II, chap. XCI. 

* Conc. Paris, (1212), Part. III, cap. 9. — Conc, Raptnn» (ijn») etc. 



LA CHARITÉ AVANT LE XIIl* SIÈCLE 2} 

partout, c'était le lien plus ferme d'une autorité centrale et 
unique. Ce lien, appliqué pour la première fois aux ordres 
mendiants, fut la source de leur développement, comme 
aussi de la prospérité des ordres hospitaliers-militaires. Il 
ne faut pas non plus chercher ailleurs la cause principale 
de l'éclat jeté aux XIII« et XIV* siècles par l'ordre du Saint- 
Esprit, sorti, comme ceux que nous avons nommés, d'un 
humble hôpital*. 

Nous voudrions avoir réussi à mettre en lumière les deux 
faits qui nous semblent dominer l'histoire primitive de l'as- 
sistance charitable. C'est d'abord la succession non inter- 
rompue de son personnel: clercs, diaconesses et ascètes, 
ensuite prêtres détachés des églises et aidés de pieux laïcs 
des deux sexes, successeurs directs des ascètes du premier 
âge. Lors de la séparation du clergé en séculier et régulier, 
ce personnel de choix demeure dans la seconde catégorie 
et forme de véritables communautés religieuses, composées 
de prêtres, devenus chanoines réguliers, de frères et de 
sœurs, qui suivent la règle de saint Augustin, c'est-à-dire 
la règle commune du clergé régulier. Par là est expliquée 
l'origine de ces innombrables communautés qui desser- 
vent les hôpitaux aux XII* et XIII® siècles, comme aussi 
leur unanimité à suivre la règle canoniale. 

Le second fait est la dépendance absolue des hospices, 
dès les premiers siècles, du pouvoir ecclésiastique. Il fau- 
dra arriver au XV« siècle pour voir cette autorité disputée 
aux évêques par les communes et l'administration souve- 
raine ; et c'est Louis XIV seulement qui soustraira d'une 
manière définitive les hôpitaux à l'Eglise, dont ils sont 
pourtant une dépendance directe et naturelle. 



* V. pour ce qui concerne les congrég. hospitalières dont nous venons de 
parler, laDûcip/i'/tede Thomassini t. III, part. I. L. II,chap. XCI. 



PREMIÈRE PARTIE 



NAISSANCE DE L'ORDRE 



SON ORGANISATION ET SA RÈGLE 



CHAPITRE I 



GUI DE MONTPELLIER. FONDATION DE L'ORDRE 



I . NAISSANCE ET FAMILLE DE GUI 




L n'est pas rare de voir le nom même des plus 
insignes bienfaiteurs de l'humanité tomber, par la 
suite des temps, dans le plus injuste oubli. On jouît 
de leurs bienfaits, sans même se demander à qui on en est 
redevable. Le grand prédécesseur de saint Vincent de Paul, 
Gui de Montpellier, n'a pas échappé à cette ingratitude 
des âges qui l'ont suivi. Il ne fauf donc pas s'étonner si 
tout ce qui concerne sa personne et sa vie demeure encore 
obscur et trop incertain. Mgr Paulinier à réuni avec un 
soin pieux tout ce qu'il a pu recueillir sur son illustre com- 
patriote * ; nous ne saurions choisir, pour ce premier 
chapitre, un guide plus autorisé; c'est à son remarquable 
travail que nous emprunterons une grande partie des 
renseignements qui vont suivre. 

Tous les historiens qui ont parlé de Gui désignent la ville 
de Montpellier comme son lieu d'origine; la tradition étant 
unanime sur ce point, on doit la tenir pour incontestable. 
Mais il est impossible de déterminer la date exacte de sa 
naissance ; toutefois, en la plaçant au commencement de la 



' Gui, de Montpellier, fondateur de VOrdre du Saint-Esprit. Etude historique, 
par Tabbé Paulinier, curé de SainURoch. Montpellier, 1870. (Extrait des Mé- 
moires de TAcadémie). •— Mgr. Paulinier est mort archevêque de Besançon. 



28 GUI DE MONTPELLIER 

seconde moitié du XII® siècle, c'est-à-dire vers Tannée 
II 60, nous ne risquons pas de nous égarer beaucoup: on 
en verra bientôt la raison. 

Gui est-il issu de la puissante famille des Guillems, qui 
depuis deux siècles possédait Montpellier? a L'absence 
regrettable de documents ne nous permet pas, dit Mgr 
Paulinier, d'assigner à notre héros, comme un fait à l'abri 
de toute contestation, une filiation si glorieuse ; mais le senti- 
ment généralement adopté par les historiens, qui le font 
naître de Guillem VII et de Mathilde de Bourgogne, nous 
paraît le plus probable ^ » Le lecteur pensera comme nous 
que cette probabilité touche de bien près à la certitude, 
quand nous aurons exposé les raisons qui militent en faveur 
de ce sentiment. 

Guillem VII fit son testament en 1 1 7 1 et mourut peu 
après, laissant quatre fils et cinq filles. L'aîné des fils, sous 
le nom de Guillem VIII, succéda à son père dans la seigneu- 
rie de Montpellier ; le second, Guillem Burgognon, mourut 
en 1 182 et laissa à son frère aîné la succession de ses biens. 
Raymond, le troisième, embrassa la vie monastique et 
devint évêque d'Agde. « Le quatrième enfin est désigné, 
comme tous les plus jeunes fils de la famille des Guillems, 
sous le simple nom de Gui. Son père lui lègue mille sols 
melgoriens : il veut qu'il soit élevé, six ans, dans la maison 
de la milice du Temple, qui existaitdéjà à Montpellier. Son 
éducation terminée, il s'enrôlera dans ladite milice et sera 
privé de sa substitution, si ses frères vivent. Mais si l'un 
d'eux vient à mourir dans ces six ans, celui qui sera sei- 
gneur de Montpellier retirera son frère de la maison des 
Templiers et l'entretiendra chez lui avec une pension de 20 
marcs d'argent*. » 

L'éminent biographe de Gui de Montpellier n'hésite pas 



* op. cit., p. 4. 

' Mgr Paulinier, op, cU,, p* f ; *- D*Aigrefeuille, Hist, de la viiU de Moni^ 
pelUir, t. l, Itv. 2. 



NAISSANCE ET FAMILLE DE GUI 29 

à reconnaître, dans le quatrième fils de Guillem VII, le 
fondateur de Tordre du Saint-Esprit, et les preuves qu'il 
apporte sont assurément très fortes. D'abord, on chercherait 
en vain, dans les nombreux documents concernant Mont- 
pellier à cette époque, la moindre mention d'un chevalier du 
Temple du nom de Gui ; au contraire, la fondation de l'hô- 
pital du Saint-Esprit correspond parfaitement à la jeunesse 
du dernier fils de Guillem VII, puisque, en 1 198, il en était 
sorti déjà plusieurs colonies florissantes. 

Objectera-t-on la clause du testament de Guillem, le des- 
tinant au Temple ? Mais sans chercher ailleurs que dans la 
famille même des Guillems, on trouvera de nombreux 
exemples qui démontrent que, sur ce point, les volontés 
paternelles demeuraient souvent inexécutées*. Gui, sans 
doute, se disposa à suivre ces volontés et commença son 
éducation chez les Templiers. « Puis, l'amour des pauvres, 
une vocation irrésistible de les servir, une inspiration 
particulière de Dieu peut-être, l'arrachèrent à cet asile 
belliqueux moins en harmonie avec ses goûts, et cédant à 
l'entraînement de son cœur, il voulut fonder une autre 
milice destinée à combattre des combats plus pacifiques, 
mais non moins glorieux *. » 

Le testament de Guillem VIII, du 4 novembre 1202, 
vient appuyer notre sentiment d'une preuve nouvelle. Les 
seigneurs de Montpellier avaient fondé dans cette ville 
Thôpital Saint-Guillem. Il semble que cette maison avait 
des titres spéciaux aux libéralités de Guillem VIII ; cepen- 
dant il ne lui lègue que deux cents sols melgoriens, et gra- 
tifie de cent sols la maladrerie de Saint-Lazare, tandis qu'il 
laisse mille sols à l'hôpital du Saint-Esprit \ Quels étaient 
donc les liens qui l'attachaient à cette œuvre nouvelle et la 



* Mgr Paulinîer ; — D'Aigrefeuille : loc, cit. 
« P. 6. 

' Gemuûo : De ta charité publique et hospitalière à Montpellier au moyen-âge^ 
p. 7. 



30 GUI DB MONTPELLIER 

lui faisaient préférer aux fondations de ses ancêtres ? Une 
simple prédilection personnelle aurait-elle occasionné une 
différence de dons si considérable, et n'est-ce pas plutôt que 
le fondateur de Thôpital du Saint-Esprit lui était attaché 
par les liens du sang ? 

La parenté qui existait entre les deux nobles personna- 
ges est Texplication la plus naturelle de ce fait, que Gui 
assista Guillem VIII dans les circonstances les plus solen- 
nelles de sa vie. C'est ainsi qu'il signa le traité de paix entre 
ce dernier et le comte de Toulouse, Raymond V (Décembre 
II 74)*. Dans le cours des années 1190 à 1195, son nom se 
retrouve dans cinq traités conclus entre divers seigneurs et 
son neveu*. Si, à partir de cette époque, il n'apparaît plus, 
c'est que Gui a quitté sa ville natale pour se rendre à Rome 

et faire goûter à la ville éternelle les heureux fruits de son 
zèle charitable *. 

Il nous paraît bien difficile, après des preuves si convain- 
cantes, de dénier à Gui de Montpellier l'illustre origine 
que les auteurs lui assignent généralement. La noblesse de 
sa naissance était rehaussée par l'éclat des richesses. « Mais 
Dieu lui donna, comme au jeune Salomon, un trésor plus 
précieux, en remplissant son esprit et son cœur des dons 
surnaturels de la sagesse. S'il manifesta de bonne heure 
une foi vive et ardente, sa charité était plus ardente encore. 
Il aimait tellement les pauvres, qu'il les honorait comme 
des seigneurs, les respectait comme des maîtres, les chéris- 
sait comme des frères, les soignait comme des enfants, et 



' Dom Vaissette : HisL générale de la province du Languedoc, t. III, p. ) 7. 

* Id.,ibid, Preuves, p. 164, 167, 176 et 177. 

' Mgr Paulinier apporte, comme dernier argument, le blason de Gui de 
Montpellier, décrit et gravé dansSaulnier (De capite sacriordinis Sancti Spiritus^ 
p. 60). Ce blason, suivant Tusage adopté dans les ordres religieux, présente 
à droite la double croix et la colombe, insignes de TOrdre, et à gauche Técu 
des Guillems : d'argent chargé d'un tourteau de gueules. Le savant écrivain 
n'a pas remarqué que Saulnier dit avoir composé lui-même ce blason, sur les 
indications de Garicl, mais sans en avoir renconté d'anciens exemples. Notre 
opinion nous semble assez bien appuyée pour nous permettre de négliger une 
preuve aussi douteuse. 



NAISSANCE ET FAMILLE DE GUI 3I 

les vénérait comme de vivantes images de Notre-Seigneur 
Jésus-Christ*. » 



II. FONDATION DE L HOPITAL DU SAINT-ESPRIT A MONT- 
PELLIER 



L'histoire ne nous a conservé aucun souvenir relatif à 
l'enfance de Gui de Montpellier et à sa première éducation. 
S'il entra au Temple pour accomplir les volontés pater- 
nelles, il en dut sortir jeune encore. Son père mourait en 
1 1 72 et Mathilde, sa mère, avait devancé son époux dans la 
tombe. La mort de ses parents le rendait maître de sa per- 
sonne et de ses biens ; il conçut le projet de les consacrer 
au soulagement de ses frères indigents, et pour mettre à 
exécution ce pieux projet, il fonda dans la ville de Mont- 
pellier un hôpital où, suivant les exemples illustres des 
premiers siècles, il se voua lui-même à leur service". Il n'est 
pas possible d'attribuer à un autre qu'à Gui la fondation de 
l'hôpital de Montpellier. Plus heureux qu'en ce qui con- 
cerne la naissance et la famille de notre héros, nous nous 
appuyons ici sur des preuves formelles et authentiques. 

Outre la tradition constante, nous avons le témoignage 
positif du pape Innocent III. Dans toutes ses bulles en 
faveur de l'ordre naissant, il reconnaît à Gui la qualité de 
fondateur et premier maître de l'hôpital de Montpel- 
lier ; il lui attribue également la règle suivie parles frères', 



' Saulnier, De capite... p. p ; — Mgr Paulinier, p. 8. 
" W., ibid. 

' Hospitalc sancti spiritus, quod apod Montempessulanum dilecti fîlii fratris 
Goydonis soUicitudo fundavit (Innoc. III , i** bulle). — Guydoni fundatorl 
hospitalis sancti spiritus... (Id.^ i* bulle). — In primis siquidem statuentes ut 
fraircs*.. secundum raUonabilcs instittUiones tuas,., debeant famulari (Ibid.), — 
Defuncto... Guydone, qui vestrorum hospitalium primus extitit institutor et 
rector {Id, 4' bulle). 



J2 GUI DE MONTPELLIER 

Les termes de la première bulle d'Innocent III, donnée en 
1198, sont remarquables; le pape recommande Thôpital 
de Montpellier à la sollicitude des évoques, comme uneplan- 
tation nouvelle, qui déjà brille par la piété et l'exercice 
d'une éminente charité ^ A cette date, la maison ne comp- 
tait donc pas encore de longues années d'existence, ce qui 
concorde avec l'âge présumé de Gui. 

Un témoignage non moins précis nous vient de Mont- 
pellier même. Un an avant la première bulle* d'Innocent 
III, c'est-à-dire, au mois de juin 1197, deux habitants, 
Marie de Fabrègues et Bertrand de Montlaur son mari, cé- 
dèrent et vendirent à Dieu et à l'hôpital du Saint-Esprit, 
sis proche Montpellier, aux frères et aux pauvres présents 
et futurs dudit hôpital, à Gui, son procureur et fonda- 
teur^ en la personne de Guillaume de Agentia son rem- 
plaçant, un jardin, avec maison et puits, touchant le jardin 

de l'hôpital ; plus une rente annuelle de deux sols ; le tout 
tenu en fief du seigneur de Montpellier. Cette vente fut 
faite pour le prix de deux cents sols melgoriens. Guillem 
VIII intervint pour confirmer la vente, en qualité de su- 
zerain ; il céda lui-même tous ses droits sur cette pièce de 
terre et la donna à l'hôpital en pur alleu, sans aucune re- 
devance •. 

Les historiens de Montpellier ont retrouvé l'emplacement 
de l'hôpital du Saint-Esprit. Il était situé, dit M. Germain, 
au faubourg du Pyla-Saint-Gély et occupait l'espace 
compris entre la rue qui mène à la fontaine de ce nom, 
le chemin de Nimes et le Verdanson. Mais les ruines qui 
couvrent aujourd'hui cet emplacement n'appartiennent 
point à la construction primitive. Détruite en 1562 par les 



* Inter c«tera nove plantationis hospitclia et religione fulget et majorîa 
hospitalitatem caritatis exercet (Innoc. 111, i'* bulle). 

' V. Pièces justif., I. Saulnier cite ce titre, sur une indication de Pieir« 
Gariel, son ami; mais il n'en a pas eu de copie, non plus que M. Germain et 
Mgr Paulinier. 




Les serriteurs du pipe Innocent III lui apportent de petits enfuits 
péchés dus le Tibre 



FONDATION DE l'hApiTAL DE MONTPELLIER 33 

calvinistes, on tenta de la rebâtir en 1660, au moment d'un 
essai de restauration de TOrdré. L'entreprise fut abandon- 
née avant son achèvement, et les débris de murs qui sub- 
sistent sont les derniers restes de cette tentative avortée 
de reconstruction *. 



III. GUI A ROME 

Le précieux document que nous avons analysé plus haut, 
outre qu'il est un témoin irrécusable de la fondation par 
Gui de l'hôpital du Saint-Esprit de sa ville natale, renferme 
encore une importante indication, à laquelle les historiens 
n'ont pas pris garde jusqu'ici. Dans leur acte de vente, 
Bertrand de Montlaur et son épouse s'expriment ainsi: 
« Nous cédons.... à Dieu et à l'hôpital du Saint-Esprit..., 
aux pauvres qui l'habitent, à Gui, procureur et fondateur 
de cet hôpital, et à vous Guillaume de Agentia, son 
remplaçant » Les vendeurs s'adressent au rempla- 
çant de Gui ; celui-ci est donc absent. Est-il éloigné pour 
un temps peu considérable, comme en un simple voyage ? 
Non, car alors un suppléant en titre eut été inutile. Où 
était Gui en ce moment ? A Rome certainement, et depuis 
plusieurs années déjà, puisque, moins d'un an après cette 
vente. Innocent III lui reconnaissait la possession de deux 
maisons dans la capitale du monde chrétien, situées l'une 
près de Sainte-Marie au delà du Tibre, et l'autre à l'entrée 
de la ville, au lieu appelé Sainte- Agathe *. 

Sans doute, notre fondateur, en se rendant à Rome, 
poursuivait un double but : faire jouir cette ville des bien- 
faits du nouvel institut, et obtenir plus sûrement pour 



' Germain : Histoire de la Commune de Montpellier . III, p. ;;^; Paulinier, hc, 
cit. p. 9» 
' Innoc. III, Bulle du i; avril 1198, aux Piices Just. n» III. 

3 



34 GUI DE MONTPELLIER 

celui-ci, par l'expérience que ferait le Souverain Pontife de 
son utilité, Tapprobation solennelle de l'Eglise. 

Ce n'était point chose facile alors, que de faire approu- 
ver un ordre nouveau. Le concile de Latran avait décidé 
de ralentir un courant d'où provenaient de nombreux abus 
et on sait quelles résistances eurent à vaincre saint Do- 
minique et saint François d'Assise pour engager l'Eglise à 
adopter les milices destinées par la Providence à devenir 
sa plus solide défense. Mais le succès, à Rome même, de 
l'œuvre de Gui de Montpellier, devait être son meilleur 
avocat. Aussi, malgré la rigidité avec laquelle il mainte- 
nait la règle du concile dans toute sa rigueur. Innocent III, 
témoin lui-même du zèle déployé par le fondateur et ses 
compagnons de charité, ne tarda pas à donner au jeune 
institut la sanction de l'autorité apostolique. 

Il le fit dans deux bulles que nous allons analyser. 

La première est datée du 22 avril 1198 ; le Pape l'a- 
dresse à tous les archevêques, évêques et prélats des Eglises, 
protecteurs naturels de ceux qui vaquent aux œuvres de la 
charité. « Il a, dit-il, appris de la bouche d'un grand nom- 
bre, que l'hôpital du Saint-Esprit que la ville de Mont- 
pellier doit à la pieuse sollicitude de son bien aimé fils, 
le frère Gui, brille entre toutes les nouvelles planta- 
tions par la piété et l'exercice d'une large hospitalité ». 
Et il trace en quelques lignes le tableau touchant des 
œuvres de miséricorde qui s'accomplissent dans cet hôpi- 
tal : « Là, ceux qui ont faim sont rassasiés, les pauvres 
reçoivent des vêtements, les malades, des secours ; l'abon- 
dance des consolations est proportionnée à la grandeur de 
la misère, de sorte que le maître et les frères sont moins 
les protecteurs hospitaliers des malheureux que leurs servi- 
teurs, et parmi tant de pauvres, ceux-là seuls sont les indi- 
gents, qui fournissent charitablement aux pauvres ce qui 
leur est nécessaire. » 

Pour reconnaître un dévouement si héroïque, le Pontife 



GUI A ROME }$ 

accorde aux frères du Saint-Esprit, sans préjudicier aux 
droits des Eglises voisines, le pouvoir d'ériger des oratoires 
et des cimetières pour eux et leurs familles d'indigents. 
Il ordonne aux évéques de ne mettre aucun obstacle aux 
pieuses libéralités des fidèles. Ils consacreront les églises 
et béniront les cimetières, à mesure qu'ils seront cons- 
truits, sans en faire aucune difficulté ; ils approuveront 
les prêtres qui leur seront présentés par le maître pour 
desservir les hôpitaux, s'ils les jugent dignes de cet hon- 
neur. Si ces prêtres viennent à se rendre indignes par leurs 
excès, ils demeureront soumis à la correction des Evêques et 
révocables à leur volonté. Enfin le Pape confie à ces 
derniers la mission de juger, sur la réquisition du maître, 
les coupables ^ 

Ce n'était pas assez, pour l'affection paternelle d'In- 
nocent III, de recommander à tous les évêques l'ordre 
naissant ; il voulut lui donner une confirmation solen- 
nelle et le placer sous la garde toute spéciale du Siège 
Apostolique. A cet effet il adressa, le lendemain même 
du jour où il avait signé la lettre précédente, une seconde 
Bulle à Gui et à ses frères présents et futurs : 

<c A nos bien-aimés fils. Gui, fondateur de l'hôpital du 
Saint-Esprit, et à ses frères présents et futurs, qui ont fait 
profession perpétuelle de la vie religieuse. 

« Il convient que la protection du Saint Siège assiste 
les hommes qui embrassent la vie religieuse, de peur que, 
s'ils venaient à s'engager témérairement, ils ne soient 
bientôt détournés de leur pieux dessin, et que leur témé- 
rité — Dieu daigne nous préserver de ce malheur ! — ne 
tourne au détriment de la religion. C'est pourquoi, fils 
bien-aimé dans le Seigneur, ayant accueilli favorablement 
vos justes demandes, nous recevons sous la protection de 



1 PUus fust. no 11 ; Mgr PaaUfiîer« op. cit. p. 12. 



J6 GCl DC HOVTFBLLm 

saint Pierre et la nôtre, lliâpîtal dn Saint-E^nit fonclé 
& Montpellier, dans leqael voos voos êtes enrôles aa ser- 
vice de Dien^ et le confirmons par le témoîgnag'e da pré- 
sent Privilège. » 

Innocent ajoute qoe les frères, demenrant dans cet hô- 
pital, doivent j servir le Seigneur à perpétuité, selon les 
institutions pleines de sagesse que Gui leur a données. 

Vient ensuite Ténumération des biens possédés par TOr- 
dre, dont nous parlerons plus loin. 

Le Pape décide que toutes les maisons possédées actuel- 
lement par rOrdre, ou qu^il acquerra dans la suite par 
des voies justes, seront soumises à celle de Montpellier ; 
que leurs procureurs devront obéissance à Gui et à ses suc- 
cesseurs et en recevront la correction. 

Puis, après avoir confirmé les divers privilèges énu- 
mérés dans la bulle précédente, il permet de recevoir dans 
rOrdre toutes personnes libres, désireuses de se retirer du 
siècle. Les frères, après leur profession, ne pourront 
quitter TOrdre qu*avec le consentement du grand maître 
et seulement pour embrasser une règle plus austère ; 
défense est faite aux monastères d*admettre celui qui se 
présentera sans être muni de Tautorisation du grand 
maître. 

A la mort de Gui et de ses succeseurs, nul ne devra as- 
sumer par fraude ou violence la charge de général; mais 
elle appartiendra à celui qui sera élu par le commun conseil 
des frères, ou la partie du conseil la plus considérable 
et la plus saine. 

La bulle se termine par de solennels anathèmes contre 
les persécuteurs des frères, les détenteurs de leurs biens et 
les violateurs de leurs privilèges '. 

Telles sont, dans l'ensemble de leurs dispositions, ces 



* Pièca jutt. tf III. 



GUI A ROME )7 

deux premières bulles fondamentales deTOrdre. Les vœux 
de Gui sont donc exaucés ; son œuvre est maintenant à 
Tabri des orages. Le Pasteur suprême a parlé : il a procla- 
mé devant l'Eglise entière l'héroïsme des nouveaux ou- 
vriers de la charité et Texcellence de leur œuvre. La 
« jeune plantation » va devenir bientôt un grand arbre ; 
et voici que déjà elle a poussé de nombreux rameaux. 

Neuf maisons sont énumérées dans la seconde bulle d'In- 
nocent III comme appartenant à l'Ordre ; les villes qui 
avoisinent Montpellier se sont empressées d'appeler dans 
leurs murs de pieuses colonies sorties de l'hôpital de Gui ; 
les seigneurs donnent une portion de leurs domaines. 
Milhau, Largentière, Barjac, Mèze, Clapier, Brioude, 
voient s'élever des maisons ; Marseille elle-même ne tarde 
pas à confier à l'Ordre un hôpital destiné à un grand avenir *. 

Mais ce n'est pas seulement dans les régions voisines que 
les frères du Saint-Esprit sont appelés à exercer leur zèle; 
l'illustre cité de Troyes veut être des premières à en faire 
l'heureuse expérience. Ils ont même franchi les Alpes et, 
nous l'avons dit, Rome leur ouvrant ses portes, les a vus 
s'établir à Sainte-Marie au delà du Tibre et à Sainte- 
Agathe in suburro •. 

Cependant ce n'est là que le commencement de leurs 
succès. Bientôt nous serons témoins d'un développement 
si prompt et si merveilleux, que nous serons contraints d'y 
reconnaître la main de la Providence. L'hôpital de Mont- 
pellier va semer partout les disciples formés dans son sein ; 
ceux-ci à leur tour ne tarderont pas à se répandre en de 
nombreux essains ; ce beau treizième siècle, si fertile en 
merveilles de fécondité religieuse, pourra montrer avec 
orgueil l'œuvre de Gui parvenue à son apogée et couvrant 
l'Europe entière de ses établissements charitables 



> Innoc. m,"!» bulle; Pièces just. n« III. 
* Id, ibid, ; Mgr Paulinicr, toc. cit. p. i6. 



j8 GUI DE MOHTPELLIER 

Toutefois, il n'est point temps encore d'aborder le récit 
de ces merveilles ; revenons auparavant à notre fondateur 
et suivons ses travaux dans la ville éternelle. 



IV. FONDATION DE L'HOPITAL DE SAINTE-MARIE IN SAXIA 



La haute approbation dont Innocent III venait d'honorer 
Gui et son ordre marquait bien la confiance qu'il accor- 
dait au dévoué fondateur ; toutefois il se disposait à lui 
en donner une preuve plus éclatante encore, en l'appelant 
à la direction du célèbre hôpital dont il songeait alors à 
doter la ville de Rome. 

L'œuvre grandiose d'Innocent est restée pendant bien 
des siècles sans rivale au monde ; elle paraît avoir frappé 
bien vivement l'imagination populaire, car sa fondation 
finit par revêtir le caractère d'une légende aux traits 
merveilleux. Le peuple jugeait qu'un simple mortel eut 
été impuissant à réaliser une œuvre si colossale : 
Dieu lui-même avait inspiré le grand pape. Des 
peintures très anciennes, qui existaient paraît-il, à Rome, 
confirmaient la légende ; elles ont disparu ; mais on peut 
voir, à Thôpital de Dijon, une série de fort belles miniatu- 
res, dans lesquelles la légende revit avec toute sa naïve 
fraîcheur *. 



* Ces miniatures ont été Tobjet d*une description très complète dans Tou- 
vrage suivant de G. Peignot : Histoire de la fondation des Hôpitaux du Saint- 
Esprit de Rome et de Dijon (Extrait des Mém. de la Commission des Antiquités 
de la C6te-d*Or. 18^8, in-40). Le manuscrit qui les renferme se compose de 
deux parties d'Ages différents ; les miniatures forment la première et la plus 
ancienne; elles ont dû être exécutées vers l'année 1460, d'après leur style et 
d'autres indices. La seconde partie est un recueil de bulles relatives à l'ordre 
du Saint-Esprit, écrit dans les premières années du XV 1* siècle. Les minia- 
tures, au nombre de vingt-deux, forment un ensemble complet, destiné vrai- 
semblablement à orner une histoire de l'Ordre pour la librairie des ducs do 
Bourgogne, histoire demeurée en projet. Aucun texte ne les accompagne, 
sauf de courtes légendes explicatives au bas des sujets. Après deux tableaux 



GUI A ROME 39 

L'origine légendaire de l'hôpital d'Innocent III est rap- 
portée en ces termes par un vieil historien : 

« Ce Saint-Père meu de compassion envers les membres 
de Iésu-Christ, fonda pour le salut (dit-il) de son âme, des 
Souverains Pontifes ses prédécesseurs et successeurs, et 
des cardinaux de la Sainte Eglise vivants et trespassés, le 
célèbre Hospital du Saint Esprit de Rome... Quelque escri- 
vain raconte que ce fut ensuite d'une reuelation qu'il eut 
de faire pescher dans le Tybre ; ce qu'ayant commandé, les 
Pescheurs rapportèrent dans leurs filets au lieu de poissons, 
quantité de petits enfans de mammelle qui y auoient esté 
iettés par des mères desnaturées, lesquelles pensants 
sauuer leur honneur deuant le monde n'auoient pas appré- 
hendé de perdre tout ensemble, et leur fruit, et leur cons- 
cience, et leur honneur mesme deuant Dieu et ses Anges. 
Il se voit, tant à Rome, qu'ailleurs, d'anciennes peintures 
qui fauorisent ce récit *. » 

La légende exagère la corruption des mœurs à Rome à 
cette époque. Elle est du moins une preuve de la recon- 
naissance populaire envers le Pontife qui avait doté Rome 
d'une institution si bienfaisante, et à ce titre, sa place était 
tout naturellement marquée dans cette histoire. En dé- 
pouillant la fondation de l'hôpital de Sainte-Marie de son 



qui servent de frontispices, douze sont consacrés à Thistoire légendaire de 
la fondation de Sainte-Marie in Saxia, d'après les anciennes fresques de Rome. 
On y voit des femmes jetant, du haut d'un pont, leurs enfants nouveaux nés 
dans le fleuve; puis la vision d'Innocent III, à la suite de laquelle il fait pêcher 
dans le Tibre le poisson qui doit le guérir de sa maladie ; les pécheurs, au 
lieu de poissons, retirent leurs filets remplis de jeunes enfants morts, qulls 
apportent au pape. Un ange lui apparaît et lui mande de bâtir un hôpital pour 
recueillir les enfants abandonnés. Innocent obéit et fait construire l'édifice; il 
le confie aux soins des religieux du Saint-Esprit, après leur avoir imposé le 
manteau et la croix double, dont un ange lui avait apporté le modèle. — Les 
huit dernières miniatures concernent l'établissement de l'hôpital de Dijon, par 
le duc de Bourgogne. Nous donnons, dans cet ouvrage, trois des sujets les 
plus caractéristiques, d'après les dessins très exacts de l'ouvrage de Peignot. 
* Ph. Boullier : Fondation, construction, œconomie et règlements des 
hospitauxdu St-Esprit et de Nostre-Dame-de-la-Charité, en la ville de Dijon. 
1649. p. 9. 



40 GUI M MorrpcLLiat 

caractCTC merveilleux, nous n admirerons pas w^"^ la 
hante diarité d^Innocent III. 

Xoo knn de la basiliqae de Saint-Pierre et toat anprès 
des mines dn cirque de Néron, se trouvait un ancien hos- 
pice abandonné. Ce lieu était prédestiné aux cenvres de 
bienfaisance ; saint Symmaque y avait établi un Xénodo^ 
chiutn dès la fin du V« siècle '. Vers 717, Ina, roi des 
Saxons Occidentaux, y construisit un hospice et une église, 
destinés aux pèlerins de sa nation : de là lui vint sa déno- 
mination dliospice des Saxons, ou in Saxia. Un incendie 
terrible, qui eut lieu en 817. et un second en 847, détruisi- 
rent les bâtiments, qui furent rétablis par Léon IV. Plus 
tard, les ravages de l'empereur Henri IV« qui assiégea 
Rome en 108 1, et ceux qu*exercèrent les soldats de Robert 
Gtiiscard,.accouru au secours du pape, désolèrent tellement 
ce quartier de la ville, qu'il ne resta même pas de traces de 
rétablissement. * 

Innocent III cherchait un lieu propice à la construction 
d'un hôpital, dont la grandeur pût remédier à l'insuffisance 
de ceux qui existaient dans sa capitale et recevoir en même 
temps les trop nombreux enfants que le vice de leur nais- 
sance ou la pauvreté de leurs parents exposaient à une 
mort presque certaine. L'emplacement de l'hospice des 
Saxons était très propre à cette destination ; il le choisit, et 
bientôt, à la place de l'humble édifice du roi Ina, on vit 
s'élever, sur les plans de l'architecte Marchionne d'Arezzo, 
un véritable palais, dont les vastes proportions répondaient 
à l'étendue des misères qu'il devait abriter. 

Mais ce n'était point assez de construire un splendide 
édifice : où trouver des hommes dont le dévouement fût à 
la hauteur des vues larges et charitables du grand Pontife ? 



* Fâhtucci : Traitât, de lutte le opère pie neiralma cilla di Roma, 1603, 
cliap. I. 

' M. Vasi. — Itinéraire instructif de Rome, 1793, II, 593. ~ Lelarouilly, 
EMfices de Rome moderne, pi. 356. — Saulnier, De Capite, p. 130. 



GUI A ROME 41 

Ces hommes, Innocent les avait sous sa main. Il connais- 
sait les prodiges accomplis déjà à Montpellier par l'ordre 
naissant du Saint-Esprit ; il avait même vu de ses propres 
yeux Gui et ses enfants à l'œuvre dans leurs deux maisons 
de Rome : pouvait-iï hésiter à confier la direction de son 
entreprise au noble seigneur de Montpellier ? * 

Sans doute Gui répondit avec bonheur à la confiance du 
Pontife : plus le théâtre était vaste, plus seraient nom- 
breuses les occasions d'exercer les œuvres de sublime dé- 
vouement auxquelles il avait voué son existence. 

L'ayant donc placé à la tète de l'hôpital de Sainte-Marie 
in Saxia, avec cinq de ses compagnons. Innocent III lui 
adressa, le 19 juin 1204, une bulle plus solennelle encore 
que les deux premières, et écrite « avec cette ampleur ma- 
gistrale dont les bulles apostoliques de cette époque sem- 
blent s'être réservé le secret. » L'importance de ce docu- 
ment mérite que nous le mettions sous les yeux du lecteur; 
en voici la traduction : 

« A nos chers fils. Gui, Maître des hôpitaux de Sainte- 
Marie in Saxia et du Saint-Esprit de Montpellier, et à ses 
frères présents et futurs, faisant profession de la vie reli- 
gieuse. 

« Parmi les œuvres de la piété chrétienne, qui d'après 
saint Paul, a reçu les promesses de la vie présente aussi 
bien que celles de la vie future, les Saintes Ecritures nous 
recommandent souvent et d'une manière toute spéciale la 
vertu d'hospitalité, comme résumant toutes les bonnes œu- 
vres pour lesquelles le Seigneur a promis de récompenser, . 
au jour du dernier jugement, les bons, et d'y punir les mé- 
chants. C'est cette vertu en eflfet, qui nourrit ceux qui ont 
faim, donne à boire à ceux qui ont soif, accueille les étran- 
gers sans asile, revêt ceux qui sont nus, ne se contente 
pas de visiter les malades, mais adoptant leurs infirmités. 



* Mgr Paulinier, op. cil, y p. 17, 



42 GUI DE UOKmUJEK 

leur prodigue des soins maternels, soul^^ les captife dans 
leurs prisons, et après être venue ainsi en aide, pendant 
leur vie, à tous ceux qui souffrent, ne leur refuse pas après 
la mort le bienfait de la sépulture. C'est par elle qu*At»a- 
ham et Lotfa, ayant mérité Thonneur de donner lliospitalité 
aux anges, s'attirèrent leur bénédiction ; par elle, Abn- 
ham reçut la promesse que la vieillesse de Sara ne serait 
pas stérile, et Loth fut sauvé de Tincendie de Sodome. 

« En récompense de l'hospitalité offerte à Jésus, deux dis- 
ciples qui n'avaient point deviné sa présence quand il leur 
expliquait les Ecritures, le reconnurent dans la fraction du 
pain. 

« Par la vertu de l'hospitalité, les richesses, qui condui- 
raient leurs possesseurs à la perdition, si elles ne servaient 
qu'à grossir leurs trésors, les conduisent à la vie en soula- 
geant la misère du pauvre. 

a Par elle, un commerce admirable s'accomplit ; les biens 
périssables de ce monde sont échangés avec les biens éter- 
nels ; car en les versant dans les mains de l'indigence, 
nous thésaurisons pour le ciel, où la rouille et les vers ne 
rongeront pas nos richesses, où les voleurs ne les raviront 
pas, et nous nous faisons, avec un or sans valeur, des amis 
qui nous introduiront dans les tabernacles étemels * ! 

a A ces causes donc, nous, pour notre salut^ celui de nos 
prédécesseurs et de nos successeurs, ainsi que de nos 
frères les cardinaux évêques, prêtres et diacres de l'Eglise 
Romaine tant vivants que défunts, nous avons érigé, des 
deniers de ladite Eglise, un hôpital à Sainte-Marie in Saxia, 
lieu favorable à l'exercice de l'hospitalité, afin que les 
pauvres soient reçus, les infirmes soulagés, et toutes les 
autres œuvres de la charité pratiquées. 

« Nous statuons que la discipline régulière, établie par 
nous en ce même lieu, selon les lumières divines et Tinsti- 



i Nous avons suivi, jusqu*ici| la traduction de Mgr Paulinier. 



OUI A ROME 4} 

tution des frères de Thôpital du Saînt-Esprit, y sera gar- 
dée à perpétuité et d'une manière inviolable. 

« Nous voulons en outre qu'il y ait toujours, pour le ser- 
vice de l'Eglise, au moins quatre clercs profès de l'Ordre, 
lesquels prieront pour nous et nos frères vivants et défunts 
et auront la charge entière de l'administration spirituelle, 
ne relevant que du Pontife Romain, à la correction duquel 
après une monition fraternelle, les frères les dénonce- 
ront quand ils seront coupables. 

« Pour eux, se contentant de la nourriture et du vête- 
ment que nous leur avons octroyés, suivant la même règle, 
qu'ils vaquent aux saints offices et à l'administration des 
sacrements, sans s'occuper des autres affaires de l'hôpital, 
à moins d'une permission expresse du grand maître ; car ils 
doivent vous laisser, notre fils, et à vos successeurs ou à 
ceux que vous aurez députés à cet office, tout ce qui re 
garde les soins matériels de la maison. 

« De plus, sachant que, grâce à Dieu, la vertu d'hospitalité 
est en grand honneur dans la maison du Saint-Esprit, de 
l'avis de nos frères, nous unissons l' un à l'autre les deux 
hôpitaux, afin qu'ils aient plus de facilité à se rendre mu- 
tuellement de bons' offices ; celui de Rome, en implorant 
notre protection en faveur de l'hôpital de Montpellier ; ce- 
lui-ci, en procurant au premier des ministres plus aptes à 
l'hospitalité. Par cette union cependant nous n'entendons 
point soustraire la maison de Montpellier à la juridiction 
de l'Eglise de Maguelone, laquelle conservera ses droits, 
ainsi que nous l'avons antérieurement réglé. 

« Nous voulons qu'à la tète des deux maisons soit placé un 
seul maître, qui les visitera une fois chaque année, fera les 
règlements et les amendements nécessaires et pourra trans- 
férer les frères partout où leur présence lui paraîtra plus 
utile. 

« S'il arrive que le grand maître entre dans la voie com- 
mune à toute chair à Rome ou en deçà des monts, les frères 



/ 



44 GUI DB MONTPELLIER 

de Thôpital de Sainte-Marie in Saxia enverront sans délai 
Tavis de sa mort à ceux de Montpellier et ceux-ci délégue- 
ront deux ou trois d'entre-eux pour procéder avec ceux de 
Rome à l'élection d'un nouveau Maître. Que si, au contraire 
le grand maître mourait à Montpellier ou au delà des 
monts, deux ou trois frères de Rome se rendraient à 
Montpellier pour l'élection. 

« Du reste, comme l'Eglise de Sainte-Marie in Saxia et 
l'hôpital que nous avons construit en ce lieu nous appar- 
tiennent en propre, à l'exception pour les clercs, du scrutin, 
du baptême et des litanies, qui reviennent à la basilique du 
Prince des Apôtres, selon notre ordonnance ; de peur qu'on 
ne vienne à préposera l'hôpital quelque personne soumise à 
une juridiction étrangère, nous vous exemptons, vous et vos 
successeurs, de toute puissance épiscopale et déclarons 
nulle toute sentence d'interdit ou d'excommunication por- 
tée contre vous et vos successeurs, sans l'exprès mandat du 
Siège Apostolique. 

« Mais cette union, que nous avons consommée entre les 
deux hôpitaux, ne doit point engendrer la confusion ; car 
si l'union plaît à Dieu, Tordre ne lui est pas moins agréable. 
C'est pourquoi nous voulons que les frères de l'hôpital 
Sainte-Marie, destinés à la collecte des aumônes, se conten- 
tent de parcourir l'Italie, la Sicile, l'Angleterre et la Hon- 
grie ; les frères de Montpellier pourront quêter librement 
dans les autres états; de cette sorte les deux maisons se 
tiendront dans leurs limites, et les collectes qui leur 
seront destinées iront à chacune sans réclamations ni 
désordre » 

Viennent ensuite des prescriptions relatives à l'ordre à 
suivre dans les quêtes ; des privilèges accordés aux mem- 
bres de la confrérie érigée à Rome et dans les maisons du 
Saint-Esprit ; l'exemption des dîmes et de tous les hom- 
mages exigés des personnes séculières. Innocent III re- 
jjouvelle enfin toutes les faveurs précédemment accordées 



DERNIÈRES ANNÉES DE GUI 45- 

à rOrdre et termine en plaçant Thôpital sous la protection 
des papes ses successeurs : 

« Nous prions nos successeurs et nous les exhortons dans 
le Seigneur Jésus, qui viendra juger les vivants et les 
morts, de garder et défendre comme vos patrons spéciaux, 
vos personnes et vos biens ; car s'ils sont tenus par leur 
charge apostolique de pourvoira tous les pieux intérêts des 
lieux consacrés à la charité, c'est avec un soin tout particu- 
lier qu'ils devront veiller à la prospérité d'une maison fon- 
dée et dotée des ressources de l'Eglise romaine » 

La bulle fulmine les excommunications habituelles 
contre les infracteurs et se termine par la date suivante : 

« Donné à Latran, le XI V« jour des Calendes de juillet, 
indiction 7®, l'an de Notre Seigneur mil deux cent quatre, 
du Seigneur Pape Innocent trois la septième année (19 juin 
1204). *» 

Innocent III, en traçant les sages règlements contenus 
dans cette bulle, assurait un avenir brillant et prospère à 
son hôpital et à l'ordre entier. Nous aurons, dans le cours 
de l'ouvrage, à revenir plus d'une fois sur cet important do- 
cument, en particulier lorsque nous traiterons des privi- 
lèges de l'Ordre, des quêtes et de la confrérie du Saint-Es- 
prit. 



V. DERNIÈRES ANNÉES DE GUI. — SA MORT 



« Rien ne relève, à nos yeux, le mérite de Gui comme 
l'acte d'Innocent III réunissant les deux maisons de Rome 
et de Montpellier sous la direction d'un même recteur. Ces 



* Voyez pour le texte : Diplomaia,., Ordini.., Sancii Spirîtus Mohspéliensi 
ecnccssa, I, p. 5. 



46 GUI DB MONTPELLIER 

deux maisons étaient en effet à une grande distance Tune de 
Tautre : la mer ou les Alpes les séparaient, la difficulté 
des communications était extrême à cette époque ; il fal- 
lait donc que le pape comptât beaucoup sur l'activité, l'in- 
telligence et la sagesse de Gui pour lui confier à la fois cette 
double administration, alors surtout que le concile d'E- 
paône avait expressément défendu de préposer un même 
abbé à deux monastères *. 

Mais ce n'est point la seule marque de confiance qu'il lui 
accorda. Déjà, plusieurs années auparavant, la première 
année de son pontificat, il lui avait donné une preuve 
éclatante de son estime, en le chargeant d'une mission de 
grande importance. 

C'était le temps néfaste où la patrie de Gui et tout le midi 
de la France étaient désolés par le terrible fléau de l'héré- 
sie albigeoise. Les sectaires refusaient non seulement 
l'obéissance aux dogmes de l'Eglise, mais ils menaçaient la 
société civile elle-même en la sapant dans ses fondements, 
l'autorité et la propriété. Innocent III lutta contre le mal 
avec toute la force de son indomptable énergie ; mais la légion 
de saint Dominique n'était pas encore debout : bien des an- 
nées devaient s'écouler avant que le monstre fût abattu. 

La province d'Aix était plus particulièrement atteinte ; 
le Pape résolut de lui porter secours par l'envoi de deux lé- 
gats. Il choisit pour cette mission délicate le frère Rainier 
et lui adjoignit Gui de Montpellier, que sa sagesse et sa si- 
tuation élevée dans le pays rendaient éminemment propre 
à seconder les vœux du Pontife. Innocent annonçait ses en- 
voyés en ces termes à l'Archevêque et à ses sufiragants : 

« Nous avons jugé opportun de vous envoyer notre bien- 
aimé fils, le frère Rainier, homme d'une vie éprouvée et 
digne de tout éloge, puissant par la grâce de Dieu en 
œuvres et en paroles, et avec lui notre bien-aimé fils le 



* Mgr. Paulinier, cp. cit, p. 33. 



DERNIÈRES ANNÉES DE GUI 47 

frère Gui, craignant Dieu et consacrant sa vie à toutes les 
œuvres charitables '. » 

Dans la suite de sa lettre, le Pape recommandait ses 
légats aux bons offices des prélats, et demandait aux fidèles 
eux-mêmes de les assister dans leur difficile mission, ac- 
cordant à tous ceux qui leur viendraient en aide la même 
indulgence qu'aux pèlerins de Saint-Pierre et de Saint- 
Jacques de Composte] le \ 

Quel fut le résultat de la mission de Gui, l'Histoire ne le 
dit pas ; « mais le choix fait de lui par l'illustre pontife est 
à lui seul un assez beau titre de gloire *. » 

Pendant que Gui s'occupait à Rome, avec le succès que 
l'on sait, du développement de son ordre, l'Esprit de con- 
tradiction cherchait à lui susciter des obstacles à Montpel- 
lier. L'Eglise de Maguelone ne voyait pas sans peine s'é- 
lever dans son sein un établissement devenu rapidement 
populaire, qui pouvait porter atteinte à ses droits et dimi- 
nuer la source de ses revenus. 

Au mépris des bulles d'Innocent III, elle s'opposait à 
l'érection d'une chapelle, complément nécessaire de l'hô- 
pital. Pour vaincre une résistance obstinée, Gui recourut à 
son dévoué protecteur ; son appel ne resta point sans ré- 
ponse : « Il ne serait point convenable, lui écrivit le 
Pape que, possédant un cimetière bénit, avec des clercs 
proies de votre ordre, et adonnés comme vous l'êtes aux 
œuvres de piété, vous demeuriez privés d'un oratoire. C'est 
pourquoi nous vous autorisons par les présentes, nonobs- 
tant l'accord conclu entre vous et l'Eglise de Maguelone, 
sous les auspices du Cardinal de Saint- Ange, alors légat du 



* Dilectum filtum fratrem Rainerium virum probatae vitœ et conversationis 
honestae, potentem dirino munere in opère et sermone ; ac cum eo dilectum 
filium fratrem Guidonem, virum Deum timentem, et studentem operibus cari- 
tatis, ad partes ipsas duxerimus destinandos.. . (Innoc. pp. III; epist. I, 94. 

• Id. Ibid. 

' Mgr. Paulinier, p. 24. 



48 GUI DE M(MfTPEUJSR 

Saint-Siège, à construire dans les limites de votre maison 
un Oratoire, où vos clercs puissent célébrer Toffice divin* ». 
La lettre édicté en outre les mesures propres à éloigner 
toute occasion de rivalité entre les deux parties. Et comme 
la cause principale de l'opposition provenait des dons faits 
par les fidèles à lliôpital, Innocent décide que les oblations 
des fêtes principales, ainsi que les présents offerts au prêtre 
officiant, appartiendront pour un quart à Téglise mère ; 
mais que les oblations des autres jours, et de même les ob- 
jets donnés en propre aux pauvres reviendront entière- 
ment à la maison du Saint-Esprit. Les frères, les serviteurs 
et les étrangers sans domicile pourront seuls être inhumés 
au cimetière ; pour les habitants de la ville, la permission 
de Tévêque sera nécessaire *. 

Des ordres si formels devaient, semble-t-il, désarmer la 
résistance opiniâtre de l'évêque de Maguelone : il n'en fut 
rien, et le pape dut en venir à de terribles menaces et faire 
appel aux consuls et au peuple de la cité de Montpellier. 

Dans une lettre du 5 juillet 1 205, il leur dit sa honte et 
sa douleur, à la pensée qu'il y a des hommes descendus sur 
la pente du vice jusqu'au mépris de toute autorité, qui s'ef- 
forcent d'entraver par mille moyens une œuvre si sainte, 
contre ses ordres, ou plutôt contre les ordres de Dieu lui- 
même. Et dans son indignation, il menace d'excommuni- 
cation relevable seulement à l'article de la mort, tous ceux 
qui s'opposeront à la construction de l'oratoire de l'hôpital 
et aux bonnes œuvres des trères '. 



* Gutdoni rectori et fratribus hospîtalts Sancti Spirttus Mtgalonensis. Cnm 
sitls operibos pietatis intenti, et habeatis cœmeterium benedictum, et dericos 
in vestro conventu professos, absonum esset ut oratorio careretis. Quocirca 
pnesentium vobis auctoritate concedtmuSi ut non obstante compositione, quae 
facta fuisse proponitur inter vos et Magalooensem ecclesiam, per bon» mémo- 
ri» G. tituli sancti Angeli diaconum cardtnalem, tune Apostolicœ sedis lega- 
tum, infra septa domus vestrae oratorium habeatis, in quo per clertcos vestros 
divinum vobis officîum recitetur. (Innoc.pp.lII. Episi,,]ib,\ln^ 107, i*' juillet 

I20J). 

• Id. ibid. 

' Non sine dolore, nec sine pudore narramus quod quidam in reprobum sen* 




Le pape Innocent III remet aux frères du Saint Esprit l'habit de 
l'ordre, qu'il a reçu d'un ange. 



DERNIÈRES ANNÉES DE GUI 49 

L'afiFection d'Innocent III pour Gui allait toujours crois- 
sant. Quatre ans s'étaient écoulés depuis qu'il l'avait placé à 
la tète de Sainte-Marie in Saxia, lorsqu'il voulut consacrer 
cette affection par une faveur durable et d'un grand prix. Le 
Pontife institua donc une procession solennelle qui chaque 
année partirait de la basilique de Saint-Pierre pour aller 
faire une station à Sainte-Marie. Une bulle du 3 janvier 
1208 fixa cette procession au premier dimanche après l'E- 
piphanie, jour où l'Eglise récite dans sa liturgie l'Evangile 
des noces de Cana *. « Innocent III croit retrouver en effet 
dans Thôpital confié à Gui, les six urnes, dont il est parlé 
dans cet Evangile. Ce sont les six œuvres de miséri- 
corde, et ces urnes, ajoute-t-il, sont toujours remplies 
dans cette pieuse maison, car les œuvres de charité y sont 
accomplies dans toute leur plénitude *. » 

La cérémonie s'accomplissait en grande pompe, au chant 
des hymnes et des cantiques ; les chanoines de Saint-Pierre 
portaient, dans une châsse d'or et d'argent ornée de pierres 
précieuses, l'insigne relique delà Sainte Face du Sauveur'. 
Le Souverain Pontife suivait lui-même la procession, au 
milieu des cardinaux ; il célébrait la messe et prêchait une 
homélie sur le sujet de l'Evangile, afin que le peuple, 
comme le dit Innocent, ne sortit pas affamé spirituellement 
de ces noces mystérieuses *. 



sum dati, tanquam impii, qui cum venerint in profundum vitionim, contemnunt, 
œdificationem oratorii fratnim hospitalis Sancti Spiritus, contra nostrum sta- 
tutum, imo potius contra divinum mandatum, multipliater impedire nituntur, 
non attendentes quant sit impium et iniquum nequiter operari contra opéra 
pietatiSy quœ secundum Apostolum promissionem habet vitœ, quas iiunc est, 
pariter et futurœ. {Epist. lib. VIII, n» 91.) 

> Innoc. pp. in, epist» lib. I, n<* 94. 

* Et quidem in hoc hospitali, tanquam in Cana Galileae positœ sunt sex 

hydrias, id est, sex opéra misericordi» instituta. .... Sitœ vero sex hydrias 
usque ad summum implentur, quando iila sex opéra misericordi» ad perfec- 
tum usque geruntur, et ex aqua fit vinum, cum ex merito eleemosynae vis ac- 
cenditur caritatis, (/df. Ibid.) 

*Id. ibid. ; Innoc. pp. IllGesta, cap. CXLIV (Migne, tom. 214, col. CC-CC III. 

« Débet huic stationi romanus pontifex cum suis cardinalibus interesse, ut et 
missarum solemnia ibi celebret, et exhortatorium facrat de hac celebritate ser- 
monem, neve populus famelicus ab his nuptiis revertatur. {Ibid)^ 

4 



;o GUI DB MOrmiXIER 

Les pauvres n'étaient pas oubliés dans la fête. Mille indi- 
gents du dehors et trois cents de la maison, recevaient cha- 
cun trois deniers pris au trésor pontifical, pour acheter du 
pain, du vin et de la viande *. 

Les chanoines, qui portaient la sainte Véronique, étaient 
tenus également de donner chacun douze pièces d'argent des 
oblations faites à la confession de Saint-Pierre, et le cierge 
de cire, du poids d'une livre, qu'ils tenaient pendant la cé- 
rémonie*. Une indulgence d'un an était accordée à tous ceux 
qui, à la suite de cet office, feraient des actes de miséricorde 
et de charité envers les pauvres de Thôpital du Saint- 
Esprit *. 

L'institution de cette station annuelle était un grand 
bienfait ; durant les longues années où l'usage s'en maintint, 
elle fut la source de nombreuses largesses, que les pieux 
assistants ne manquaient pas de laisser, en quittant l'asile 
charitable. 

Ce fut apparemment la dernière faveur reçue par Gui de 
son éminent protecteur. Cinq mois à peine après l'institu- 
tion de la procession de la Sainte-Face *, le noble servi- 
teur des pauvres allait entendre, de la bouche de Celui qu'il 
avait soulagé dans la personne de tant de malheureux, les 
paroles consolantes placées par lui à la tête de la règle. 
« Venez, possédez le royaume qui vous est préparé..., car 
j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger, j'ai eu soif et 
vous m'avez donné à boire ; j'étais étranger et vous m'avez 
recueilli; nu, et vous m'avez vêtu ; malade et vous m'avez 
visité *. » Certes, il pouvait bien, l'humble mourant, faire 
sienne la parole de Job : non omnis moriar^ je ne mourrai 



« w. IbU. 

* Id. Ibid, 
» Id, Ibid, 

* Mgr Pauiinier donne la date du mois de mai iao8 ; nous ignorons la source 
oii il a puisé ce document. 

* Matth.XXW, H, j6. 



DERNIÈRES ANNÉES DE GUI $1 

pas tout entier ! Car il vivait dans son œuvre, qui pendant 
bien des siècles, allait semer à travers le monde d'innom- 
brables bienfaits. 

Nous connaissons maintenant la vie de Gui de Montpel- 
lier, autant du moins que la rareté des documents le per- 
met. Mais ce n'est pas précisément dans les actions de leur 
vie qu'il faut étudier les fondateurs des grands ordres ; ils 
vivent principalement dans leur législation '. Il est temps 
d'ouvrir la règle donnée par Gui à sesenfants; en pénétrant 
dans l'organisation intime de son ordre, nous y trouverons 
une nouvelle preuve du génie du fondateur et la source du 
succès de l'œuvre. 





CHAPITRE II 



LA RÈGLE DE GUI 






u moment de pénétrer au cœur de notre sujet, une 
question se présente, qui intéresse au plus haut point 
la gloire de Gui de Montpellier. Jusqu'ici nous lui 
avons décerné le beau titre de fondateur d'un ordre nouveau. 
Cependant des historiens lui ont refusé cet honneur. Les uns 
ont attribué à Tordre du Saint-Esprit une origine beaucoup 
plus reculée ; d'autres, en déniant à Gui la composition de la 
règle suivie par son ordre, ou même en faisant de cet ordre 
un simple rameau de l'ordre de saint Augustin, sont arrivés 
à lui ravir indirectement sa qualité de véritable fondateur. 
C'est à rétablir la vérité du sentiment commun que nous 
allons consacrer les premières pages de ce chapitre '. 



* L*ouvrBge de Pierre Saulnier : D: capitt Saeri ordinis Sancti SpirituSt 
renferme une remarquable dissertation sur ce sujet (Cap. VIIl, Argum. VII, 
p. 90) : Mgr Paulinier l*a prise avec raison pour guide et s'est contenté le plus 
souvent de la traduire, fort élégamment du reste ; nous suivrons les deux 
historiens, en renvoyant à leurs ouvrages le lecteur désireux de détails plus 
circonstanciés . 



54 LA RÈGLE DE GOÎ 



I. GUI A FONDÉ US ORDRE RÉGULIER ; IL EST L' AUTEUR 

DE LA REGLE 



Il est impossible de douter que Gui ne soit le véritable 
fondateur de l'ordre du Saint-Esprit. Au XVII* siècle, il 
est vrai, Olivier de la Trau, sieur de la Terrade, esprit 
aventureux dont nous aurons plus tard à entretenir le lec- 
teur, imagina d'en faire remonter Tinstitution à sainte 
Marthe elle-même, « la bien aymée hôtesse de Jésus- 
Christ ' » Son imagination féconde lui fit inventer une liste 
des grands mitres de l'Ordre qui remontait jusqu'à saint 
Lazare, premier commandeur, institué par sa sœur 
Marthe •. 

Il suffit de relater cette assertion romanesque pour en 
démontrer l'invraisemblance et le ridicule. Aucun docu- 
ment historique ne fait mention de l'ordre du Saint-Es- 
prit avant la fin du XIP siècle. Le cardinal Baronius ne 
laisse subsister aucun doute sur le nom de son fondateur. On 
lit en effet, dans le manuscrit autographe du tome XIII de 
ses Annales, qui parut après sa mort : « Nous voyons plu- 
sieurs induits accordés à différentes personnes par le pape 



1 Le manuscrit de La Terrade est conservé à la Bibl. nationale (Suppl. 
français, 1^4); il est intitulé : « Discours sur la règle et fondation de Tordre 
royal et militaire des chevaliers et archi-hospitaliers du Saint-Esprit de Mont- 
pellier, faicte par sainte Marthe la bien aymée hôtesse de Jésus-Christ, Tan 3; 
du Christ, avec les esdits, arrestz, déclarations et privilèges des Roys de 
France, chefs souverains et protecteurs du dit ordre, et plusieurs bulles des 
SS. Pères les Papes ; dédié à feu très illustre Reyne et princesse Marie de 
Médicis, mère du Roy, par Messire Olivier de la Trau, sieur de La Terrade, 
grand maistre et général du dit ordre, par le commandement exprès de Sa 
Majesté, 1629. » 

* M. de Blégny, dans son Projet (f Histoire des religions militaires (1694), et 
généralement tous ceux qui avaient intérêt à donner à Tordre du Saint-Esprit 
une origine militaire, se firent les champions de ces fables. On trouve même 
la série des portraits de tous les grands maîtres, y compris saint Lazare, sans 
oublier leurs armoiries I (Arch. nat. M, 45). 



GUI EST L\UTEUR DE LA RÈGLE $5 

Innocent III, la première année de son pontificat, et en 
particulier celui par lequel il confirme, enrichit de privi- 
lèges et propage dans le monde Tordre régulier des Hos- 
pitaliers du Saint-Esprit, que venait d'ériger récemment 
Gui à Montpellier. * » 

Les bulles accordées par Innocent III en iiq8 sont en 
effet très concluantes ; les termes employés démontrent 
qu'il ne s'agit pas d'une simple communauté, comme le 
XIII* siècle en vit éclore un si grand nombre ; mais on y 
voit un corps qui se constitue, une famille religieuse qui se 
forme ». Les droits et les privilèges concédés sont ceux des 
des grands ordres religieux. 

La seconde bulle surtout ne laisse subsister aucun doute 
sur le véritable caractère de l'œuvre de Gui. 

« Le pape Innocent affirme en effet que Gui et ses com- 
pagnons ont embrassé la vie religieuse, religiosam vitam 
eligentibus. Ils se dévouent par un engagement formel au 
service de Dieu dans un hôpital, in quo divino estis obse-- 
quio mancipati ; ces frères sont régis par des constitutions, 
secundum rationabiles institutiones ; ils ont embrassé la 
vie régulière, regularem vitam prof assis \ leur ordre est 
appelé régulier, or do regularis ; leurs engagements sont 
peri)étuels, vitam professis in perpetuum.... perpetuo 
famulari. Il nous semble donc impossible de ne pas voir 
dans ces paroles d'Innocent III autant de caractères dis- 
tinctifs d'une grande institution religieuse ' ». 

L'opinion qui enlève à Gui l'honneur d'avoir composé et 
écrit la règle de son ordre, pour l'attribuer au pape 



* Videamus complura ab eodem Pontifice hoc I anno sui Pontificatus indulta 
diversis , atque in primis quod Ordintm regularem Hospitalariorum Sancti 
Spiritus nuper authore Guidone cœptum erigi in Montepessulano in Gallia 
confirmavit, et privilegiis auxit, et miriiîce propagatus est. Extant de his 
ejusdem Pontificis sacra diplomata. (Innocent, lib. L epist. 65 et 98). Mgr Pau- 
linier, p. 11. 

• Mgr Paulinier, p. x^ 
' Ibid, p. I4« 



56 LA RÈGLB DE GUI 

Innocent III, est plus spécieuse; mais nous n'aurons pas de 
peine à la réfuter. 

Si Gui a fondé un ordre régulier, un véritable ordre re- 
ligieux — et nous croyons l'avoir montré — , il a du lui 
donner une constitution particulière, différente de celles 
des ordres déjà existants. C'est ainsi qu'ont agi tous les fon- 
dateurs d'ordres, S. Basile, S. Pacôme, S. Augustin, S* 
Benoit, S. Dominique, S. François, etc. Du moment où ils 
se proposaient un but spécial, leur premier soin devait être 
de préciser les obligations qu'il leur convenait d'imposer à 
leurs disciples, d'écrire, en un mot, leurs constitutions. 

Il ne pouvait en être autrement pour l'oeuvre de Gui. Ne 
serait-il pas étrange, dit Mgr Paulinier, que le fondateur 
de l'ordre du Saint-Esprit eût reçu d'une main étrangère 
la règle qui devait régir ses enfants ? Cet ordre ne ressem- 
blait pas aux anciennes institutions monastiques, il avait un 
but différent, il réclamait un genre de vie approprié au 
ministère de charité confié à chacun de ses membres ; com- 
ment supposer que Gui, dont le génie créateur avait conçu 
cette institution nouvelle, n'eût pas préparé le moyen de 
la réaliser ? * 

Mais notre assertion ne s'appuie pas seulement sur des 
conjectures; le pape lui-même vient la confirmer. Dans ses 
deux bulles, datées de la première année de son pontificat, 
on lit que dix maisons sont sorties déjà de l'hôpital de 
Montpellier ; que les frères du nouvel institut font profes- 
sion de la vie régulière ; qu'ils vivent selon les instiutions 
pleines de sagesse du fondateur et sont liés à perpétuité 
au service de Dieu et des pauvres. Or, fonder une maison, 
recruter et former de nombreux disciples, acquérir une répu- 
tation assez étendue pour que dix villes, et quelques-unes 
éloignées, demandent et obtiennent des colonies de la 
maison-mère, c'est un problème qui ne peut se résoudre 



' Ibid. p. 71. 



:J 



GUI EST L*AXrrEUR DE hK RÈGLE 57 

en quelques mois, qui demande des années. Admettra-t- 
on que, pendant cette période, Gui et ses disciples aien t 
vécu sans règlements, sans une constitution particulière ? 
(c L'ordre du Saint-Esprit avait donc déjà une règle en 1 198. 
Qui la lui avait donnée ? Il ne Tavait pas reçue du pape 
Innocent III, car ses relations avec Gui n'existaient, pas 
encore ; il la tenait donc de son pieux fondateur •. » Le 
pape l'affirme lui-même, lorsqu'il dit que les frères de 
Montpellier vivent dans leur hôpital selon les sages institu- 
tions de Gui leur fondateur , secundum illius rationabiles 
institutiones . 

Mais, dira-t-on peut-être, admettons que Gui soit l'au- 
teur des constitutions approuvées par Innocent III en 
1198. Ce n'était là qu'une ébauche, et non la règle 
définitive. Celle-ci est différente de la première, puisqu'elle 
contient des prescriptions spéciales à la maison de Rome, 
laquelle ne fut établie qu'en 1204. Si la première est de 
Gui, la seconde appartient bien au pape, comme en témoi- 
gnent les deux cardinaux chargés par lui de la promul- 
guer. 

Il est vrai qu'en 1213, Innocent III, après avoir fait 
examiner par le collège des cardinaux la règle du Saint- 
Esprit, l'approuva de nouveau, et chargea de sa promul- 
gation solennelle les cardinaux Etienne de Sainte-Marie 
Transtyberim et Rainier de Sainte-Marie in Cosmedin. 
Les deux délégués s'expriment ainsi dans leur instruction 
préliminaire : « Voici la règle que, par l'ordre et l'auto- 
rité du Siège Apostolique, nous vous prescrivons d'obser- 
ver ; elle a été donnée par le Seigneur pape Innocent III 
et confirmée par tous les cardinaux de la sainte Eglise *. h 



1 Ibid, p. 73. 

* Dilectîs iîliis magistro et capitulo domus sancti spîritus de Urbe et uni- 
▼ersit rectoribus, fratribus et sororibus aliaruin domornin sub ipsius ordine 
et magisterio commorantibus salutem in Domino. 

Hec est régula que de mandato et auctoritate sedis apostolice vobis obser- 



58 LA RÈGLE DE GUI 

Cette expression : donnée par Innocent^ peut s'interpréter 
de deux manières. Ou bien le Souverain Pontife a imposé 
aux religieux un texte qu*il a lui-même rédigé ; ou bien 
il a donné la règle aux cardinaux pour la leur faire exami- 
ner et la promulguer ensuite. Des deux explications, la 
dernière est seule acceptable. Une règle composée par un 
pape et donnée à un ordre déjà existant serait une anoma- 
lie unique dans les annales des ordres religieux. Les 
choses ne se passent point ainsi. Mais le fondateur, après 
avoir éprouvé par la pratique les règlements qu'il destine à 
sa congrégation, les soumet au Souverain Pontife, qui les fait 
examiner et corriger au besoin par le Sacré-Collège, et, si 
le rapport est favorable, leur donne force de loi en vertu de 
son approbation suprême. Il ne peut en avoir été autre- 
ment pour la règle du Saint-Esprit. 

La forme même de sa rédaction apporte un nouvel appui 
à notre interprétation. On est loin, en l'examinant, de 
trouver l'ampleur magistrale, la justesse et la précision du 
style du grand pape ; ce qui frappe le lecteur, c'est au 
contraire une simplicité naïve et une redondance d'idées et 
d'expressions qui révèlent un novice dans l'art d'écrire et 
un homme peu lettré, tel que devait l'être Gui de 
Montpellier '. De plus le texte est émaillé de gallicismes 
assurément inconnus à la cour romaine. Par exemple, la 
formule d'oblation: Ego me offero Dco, B. Mariœ et 
Sancto Spiritui, n'est pas latine ; les derniers mots dési- 
gnent non la troisième personne divine, mais l'ordre même 
du Saint-Esprit ; — la règle parle couramment de barons y 
de pleiges •, de baillies (Ballivae), etc '. 



vare preclpimus et a summo pontifice scilicet domino Innocentio papa tertio 
data fuit, et omnibus sacrosancte Romane Ecciesie Cardinalibus confirmata. 

* Mgr Pauiinier. p. 74. 

* Régula, cap. CIII. 

' IbU. cap. XV| XCV. On trouve d'autres exemples, tels que ceux-ci : 
Provideat Magistcr honestam societatem, c. a. d. honestum socium (c. XVII); — 
Vcsiiti camiseis lineis (c. XVIIH; — Si clamorem Prœcephr habuerii (c. XXXIl); 



GUI EST l'auteur DE LA RÈGLE 59 

Enfin, comme dernier argument, remarquons que plu- 
sieurs passages de la règle désignent le pape par la troisième 
personne: secundum ténor em privilegii Domini Inno- 
centa Papœ III — Domino Papce denuntietur * ; tandis 
que dans d'autres endroits c'est le supérieur de l'Ordre 
qui parle : qualiter societas nostra petentibus detur •. 

Il est facile, après cette démonstration, de faire soit à 
Gui, soit à Innocent III, la part qui revient à chacun dans 
la règle : au pape, l'honneur d'avoir inspiré quelques-unes 
des prescriptions de Gui et d'avoir confirmé, en vertu de 
la suprématie pontificale, la règle du Saint-Esprit; à Gui, 
celui d'avoir écrit cette règle, qui réfléchit du reste comme 
un miroir d'une manière si fidèle la tournure de son esprit 
et les vertus de son cœur '. 

Reste un dernier sentiment. Certains auteurs prétendent 
que l'ordre du Saint-Esprit suivit simplement la règle de 
saint Augustin, et se rattache ainsi au grand ordre Augus- 
tinien. 

Ce sentiment, s'il n'est pas absolument faux, est au moins 
fortement empreint d'exagération. Nous l'avons reconnu 
dans notre chapitre préliminaire, tous les ordres hospita- 
liers et militaires ont emprunté à la règle de saint Augustin 
les dispositions générales de leurs constitutions. Il n'est pas 
possible cependant de les confondre dans l'ordre des 
chanoines réguliers ; car, en ajoutant au fonds commun 
des observances particulières à chacun, telles que la défense 
armée des pèlerins, ou le soin des malades, ils se sont consti- 
tués en ordres religieux parfaits, et bien différents de 



De omnibus clamoribus in capitule judicetur (c. L.) (Clamor pour querela) ; — 
les expressions injorieuses de rentgatum ou ore fœUntem n'appartiennent 
évidemment pas à la langue des pontifes romains (Ibid.), 

' Régula, cap. XXVI II, LIV. 

' Ibid, cap. IV ; — si frater se emendare noluerit, nobis mittatur, eumque cor- 
rigemus (c. XXXIV) ; — Si quis ex nostris quoquam eundi necessitatem ha- 
buerit (c. XVI). 

• Mgr Paulinier, p. 76. 



60 LA RÈGLE DE GUI 

simples congrégations formant ensemble une seule famille . 
Il en fut des Hospitaliers du Saint-Esprit comme des autres ; 
reconnus à plusieurs reprises par Innocent III comme un 
ordre véritable, ils suivaient la règle de leur fondateur, 
règle dont la charpente, pour ainsi dire, appartenant à 
celle de saint Augustin, leur donnait le droit de se pro- 
clamer les disciples du grand Docteur ; mais aussi, règle 
essentiellement différente de celle-là, par les prescriptions 
nouvelles qu'elle apportait. 

Nous accordons, disent nos adversaires, que la règle de 
Gui a gouverné son Ordre pendant les deux premiers siècles 
de son existence. Mais il est nécessaire de reconnaître qu e 
celle de saint Augustin Ta supplantée à partir du pontificat 
d'Eugène IV. En effet ce pape, et à sa suite tous ses 
successeurs, ont attribué à l'Ordre la règle Augustinienne ' ; 
il faut donc admettre qu'Eugène IV a opéré cette réforme, 
comme l'avait fait déjà Boniface VIII à l'égard des Anto- 
nîns de Viennois. 

Cette difficulté n*aurait pas arrêté Pierre Saulnier, et à 
sa suite Mgr Paulinier, si nos historiens avaient pris garde 
que, bien antérieurement à Eugène IV, le pape Grégoire XI 
avait ainsi qualifié les fils de Gui *. Bien plus, dès le XIII^ 
siècle, un visiteur général de l'Ordre, frère Jean Mouette, 
prenait habituellement cette qualité dans ses actes \ Il n'y 
a donc aucune raison d'attribuer à Eugène IV une réfor- 
me dans la règle, parce qu'il range l'ordre du Saint-Esprit 



* Léon X, dans une bulle du lo janvier i$09, va jusqu'à dire, incidemment 
il est vrai, que TOrdre fut, dès le principe, institué canoniquement et approuvé 
par Innocent III, sous la règle de saint Augustin ; mais Tapprobation de la 
règle de Gui par le même Innocent fait justice de cette erreur. 

* Statuentes... quod ipsius ordinis hospitalia... nuUi... prœterqoam ipsius 
vestri hospitalis fratribus, et ordinem Sancti Spiritus, suh régula tancti Augus* 
Uni expresse professis... conferri valeant. Greg, XI, Const. I. (Diplomata, 1. 
p. 69). 

' Frater Johannes Monette, presbyter, sancti Augustini canonicus regularis. 
(Voy. Diplomatûf II, p. jyo et sv. — Pièces just. n« V). 



BUT DE l'ordre D'aPRÈS LA RÈGLE 6l 

SOUS la bannière de saint Augustin. Au reste, cette réfor- 
me est si peu véritable que, cent ans après la mort de ce pape, 
un grand maître. Bernardin Cjrrille, jugeait nécessaire 
d'envoyer à toutes les maisons de TOrdre un exemplaire de 
la règle de Gui, qu'il avait fait imprimer en 1564. 

Ainsi la gloire de Gui, comme auteur de la règle des 
frères du Saint-Esprit, est à Tabri de toutes les attaques, 
et nous croyons pouvoir résumer ainsi notre démonstration : 
Gui, en fondant à Montpellier son Ordre, écrivit les consti- 
tutions qui devaient le régir. Ces constitutions furent pro- 
clamées pleines de sagesse par Innocent III, et reçurent 
ainsi ime première approbation de ce pontife en 1198. 
L'illustre enfant de Montpellier, durant son séjour à l'hôpi- 
tal de Sainte-Marie in Saxia^ à Rome, développa et 
perfectionna les premiers Statuts. Sa règle, ainsi complé- 
tée reçut, en 1213, une confirmation nouvelle et fut pro- 
mulguée solennellement par les cardinaux Etienne et 
Rainier, au nom du même pape Innocent <. Elle contient 
toutes les prescription» de la règle de saint Augustin, mais 
augmentées d'un bon nombre d'observances nouvelles, qui 
font de l'ordre du Saint-Esprit un ordre entièrement dis- 
tinct, tout en permettant aux fils de Gui de Montpellier de 
se glorifier du titre de fils du grand Docteur. 



II. BUT DE l'ordre D'APRÈS LA RÈGLE 



La règle de l'ordre du Saint-Esprit a été conservée, avons- 
nous dit, dans un manuscrit qui est aujourd'hui encore, le 
trésor le plus précieux des archives de l'hôpital du Saint- 



* Mgr Paulinier» p. 81. 



62 LA RÈGLE DE GUI 

Esprit à Rome. Ce manuscrit est orné de lettres enluminées 
et de superbes miniatures représentant les frères et les 
sœurs de l'Ordre dans Texercice de leurs fonctions ; ses ca- 
ractères paléographiques le font remonter au XIIP siècle. 
C'est donc un exemplaire d'autant plus précieux qu'il n'est 
que très peu postérieur à Gui de Montpellier ; peut-être 
a-t-il été exécuté par les ordres de son premier successeur, 
immédiatement après l'approbation pontificale. 

La règle débute par la promulgation des deux cardinaux 
délégués par Innocent III ; nous en avons cité plus haut la 
teneur. Vient ensuite le texte même, dont chaque article 
est suivi d'un commentaire assez développé, dans le goût 
des écrivains mystiques du moyen-âge. Ces commentaires 
sont écrits dans le même style pieux, mais naïf et quelque peu 
inexpérimenté, qui caractérise la règle proprement dite ; ils 
ont pour auteur, sans aucun doute, comme celle-ci. Gui lui- 
même *. 

La règle de Gui va nous dire quel était le but de l'ordre 
nouveau et en quoi cet ordre différait des congrégations 
hospitalières alors existantes ; nous ne pouvons suivre un 
guide plus autorisé. 

En tête de la règle, comme pour la résumer et lui servir 
d'introduction naturelle, le saint fondateur avait inscrit 
un long passage de l'Evangile de saint Mathieu. 

Dans cette page solennelle, qui est devenue comme le 
code divin de la charité chrétienne, le Fils de l'homme an- 
nonce qu'il viendra dans sa majesté récompenser les élus de 
son Père, et il leur rappelle comment ils ont mérité d'être 
admis dans le royaume qui leur a été préparé depuis le 



' Les archives de Thôpital de Dii'on (c»* j) possèdent une copie de la règle 
avec les commentaires, du XV« siècle ; c*est la seule que nous connaissions 
avec celle de Rome. La règle a été imprimée, sans les commentaires, par les 
ordres du grand-mattre Bernardin Cyrille, sous ce titre : Régula Sacri OrdinU 
Sancti Spiritus in Saxia, Romas, ap. Ant. Blandani, impressorem Cameralem, 
Ann. 1564 -* Réimprimée à Lyon, par Guillaume Barbier, MDCXLVII. On 
la trouve dans Migne, tom. CCXVII. 



BUT DE L*ORDRE dVpRÈS LK RÈGLE 6} 

commencement du monde : « J'ai eu faim, leur dit-il, et 
vous m'avez donné à manger ; j'ai eu soif, et vous m'avez 
donné à boire ; j'étais sans asile, et vous m'avez accueilli ; 
j'étais nu, et vous m'avez vêtu ; malade, et vous m'avez 
visité ; prisonnier, et vous êtes venu à moi. » Et comme 
les élus du Père demandent à Jésus à quel moment ils 
l'ont vu dans un si complet dénuement, le Sauveur leur ré- 
pond : « En vérité, je vous le dis, ce que vous avez fait 
au plus petit et au plus délaissé de vos frères, c'est à moi 
que vous l'avez fait. *» 

Gui, en plaçant ces paroles mémorables du Sauveur en 
tête de sa règle, montre bien quel a été son but dans la 
fondation l'ordre du Saint-Esprit. Ce qui nous frappe le 
plus dans son œuvre, dit Mgr Paulinier, c'est son carac- 
tère éminemment évangélique. Le but de Gui est de re- 
produire, autant que le permet l'infirmité humaine, le divin 
idéal de la charité, proposé par Jésus-Christ. Aussi ne 
s'arrête-t-il pas aune œuvre en particulier, ainsi que l'ont fait 
les autres fondateurs. Si les diverses infirmités humaines 
avaient rencontré au XIP siècle chacune une main pour les 
guérir, on n'avait pas encore eu la pensée de créer des 
établissements assez vastes -pour les recueillir toutes en- 
semble. Les ordres hospitaliers qui avaient surgi depuis le 
commencement de ce siècle, sous les noms de Saint-An- 
toine, de Saint-Jean de Jérusalem, de Saint-Lazare, de 
Trinitaifes, avaient eux-mêmes une mission de bienfai- 
sance restreinte, et ne s'adressaient pas à tous les déshé- 
rités de la vie '. 11 était réservé à Gui de réaliser une pensée 
si féconde ; son œuvre a un caractère d'universalité qui 
étonne par sa grrandeur ; le but de cette œuvre est le sou- 
lagement de toutes les misères qui se peuvent rencontrer 
dans ce triste monde. Et ce n'est pas à la suite de transfor- 



' luth. XXV, M-40. 
' Mgr Paalinîer, p. |X. 



64 LA RÈGLE DE GUI 

mations successives que Tordre du Saint-Esprit revêtit ce 
caractère d'universalité ; Gui Tavait voulu ainsi dès Torigine. 
Aussi, lorsqu'Innocent III voulut caractériser l'œuvre nais- 
sante, ne trouva-t-il pas de termes mieux appropriés à ce 
but que les paroles du Sauveur que nous avons citées. 

A vrai dire, toutes les maisons de l'Ordre ne purent exer- 
cer les œuvres de miséricorde avec l'abondance et l'am- 
pleur des hôpitaux de Sainte-Marie in Saxia ou de Montpel- 
lier ; bien souvent, l'exiguité des revenus forçait les reli- 
gieux à comprimer les élans de leur charité. Cependant, 
nous ne craignons pas de dire que ce caractère de généra- 
lité, qui est pour nous la marque distinctive de l'ordre du 
Saint-Esprit, se retrouve dans toutes ses fondations, et 
nous en donnerons plus d'une preuve dans la suite de cet 
ouvrage. 

Un coup d'œil d'ensemble sur les œuvres si diverses aux- 
quelles se dévoua notre ordre, sera la meilleure démonstra- 
tion de ce que nous venons d'avancer. 

Le frère du Saint-Esprit,en faisant profession, se donnait à 
Dieu et à ses seigneurs les malades *, pour être jusqu'à 
la fin de ses jours leur serviteur. Les malades étaient donc 
proclamés les maîtres de la maison, et les soins affectueux 
dont les entourait la charité des frères, prouvaient que ce 
n'était point là une vaine formule. 

Non contents de recevoir tous ceux qui leur étaient ame- 
nés, les religieux parcouraient la ville une fois la semaine, 
recueillaient tous les pauvres infirmes privés de soins, et 
les faisaient transporter à l'hôpital. 

Chaque malade, à son entrée, devait mettre ordre à sa 
conscience par la confession et la communion *. « Cette 
précaution, contre laquelle nous nous élèverions peut-être 
aujourd'hui, comme blessant la liberté de conscience. 



* Régula, cap. II. 

• Ibid. c. XIII. 



PLANCHE n 




Le duc de Bourgogne remet les bulles du Suat-P6re aux 
frires de l'hôp. de Dijon. — Les œurres des hdpiuux du 
Saint-Esprit. 



: ^-'r, 



t i . 1 ■ ■ 

ASTOR, LENOX 
TlLDtN >.or;NlJA LIONS 



BUT DE l'ordre d'aPRÈS LA RÈGLE 65 

n'offrait aucun inconvénient à une époque où les enseigne-^ 
ments et les pratiques de la foi catholique étaient acceptés 
partons sans aucune contestation *. » 

Ayant par là pris possession, pour ainsi dire, le malade 
recevait, suivant les ressources de chaque maison, tous les 
soins que réclamait sont état. 

A Theure des repas des malades, au son de la cloche, tous 
les frères devaient quitter leurs occupations et se rendre 
auprès d'eux pour les servir ; ce n'est qu'après l'accomplis- 
sement de ce devoir qu'ils pouvaient eux-mêmes prendre 
leur maigre réfection *. Les meilleurs mets étaient réservés 
aux infirmes. 

Une fois la semaine on leur lavait la tète et les pieds'. 

Le dimanche, les prêtres, les clercs, les frères et les 
sœurs se rendaient en procession dans la grande salle des 
malades, et s'il s'y trouvait un autel, on y célébrait le 
Saint Sacrifice; sinon, on se contentait du chant de l'Epître 
et de l'Evangile *. 

A ceux qui approchaient de leur dernière heure, le saint- 
Viatique était solennellement porté par un prêtre, accom- 
pagné autant que possible de plusieurs clercs *. S'ils suc- 
combaient, leur dépouille mortelle était l'objet de soins 
respectueux ; la règle ordonnait que les obsèques n'eussent 
lieu que le lendemain de la mort et que des lumières 
fussent placées auprès du cercueil. Le matin, avant l'heure 
de prime, le corps était porté à l'église, afin que le défunt 
eût part aux prières de la communauté *. 

A propos de ces prescriptions de la règle, Mgr Pauli- 
nier observe judicieusement qu'on ne saurait assez admirer 



' Mgr Paulinier, p. $). 

• Régula, c.Xlll. 

• Ibid,, c. XLU. 
*nid., c. XIII. 

• /Wrf., c. XIV. 
•/Wrf.,c. LVIII. 



66 LA RÈGLE DE OUI 

comment Gui prescrit au commencement du XIII* siècle 
les sages précautions de la philanthropie et delà science mé- 
dicale moderne ; nous aurons plus d'une fois à faire sem- 
blable remarque. 

Après les malades, les pauvres étaient Tobjet de la cha- 
rité des frères. Tous ceux qui se présentaient étaient ad- 
mis et traités suivant les ressources de la maison. Ils rece- 
vaient en hiver des vêtements de laine, et tous les ans, 
entre la fête de la Pentecôte et celle de saint Jean, le 
maître distribuait aux plus nécessiteux les vieux vêtements 
des frères et des malades défunts *. Les vieillards étaient 
l'objet d'attentions spéciales, motivées par leurs infirmités et 
leurs besoins plus pressants ; leur régime dans les maisons 
de rOrdre était laissé à la discrétion du maître '. 

Les pèlerins et voyageurs étrangers trouvaient asile dans 
toutes les maisons du Saint-Esprit. La règle disposait 
seulement, par une précaution nécessaire, que nul étranger 
ne devait prolonger son séjour au delà d'une semaine, à 
moins de raisons spéciales, dont le maître étaitlaisséjuge'. 

Les religieux étaient accueillis « avec une respectueuse 
charité, comme les serviteurs de Dieu *. » Il n'y avait pas 
jusqu'aux personnages de qualité qui ne pussent bénéficier 
de l'hospitalité des maisons de l'Ordre, s'ils en avaient le 
désir. Autant que possible alors, on leur préparait un loge- 
ment proportionné à leur rang *. On voit déjà par là avec 
quelle largeur Gui et son ordre comprenaient l'hospitalité. 

Mais une œuvre dont il eut la première initiative, c'est 
celle des enfants trouvés. Nous avons vu précédemment, 
par la légende formée à ce sujet, combien cette œuvre avait 
frappé l'imagination populaire. 



« Régula, c. XXXIX. 
•/Wi., c. LXIII. 
*lbid,y c. LXXXVin. 

* Ibid., c XLIV. 

• Ibid., c. XLV. 



BUT DE l'ordre d'aPRÈS LA RÈGLE f>^ 

Après la destruction des orphanotrophia des IV* et V* 
siècles, à peine peut-on citer une ou deux maisons destinées 
à recueillir ces pauvres et innocentes victimes du vice et de 
la misère. Toute la gloire et le mérite en reviennent donc à 
notre fondateur *. 

Un petit réduit, pratiqué près de la porte de l'hôpital de 
Sainte-Marie in Saxia, permettait d'y déposer les enfants 
à toute heure du jour et de la nuit. Défense expresse était 
faite, non seulement de s'enquérir du nom du déposant, 
mais même de le suivre du regard •. Bien plus, on devait 
recevoir avec empressement les pauvres femmes qui venaient 
faire leurs couches, et leurs enfants étaient admis d'office au 
nombre des orphelins élevés dans la maison *. De petits 
berceaux étaient toujours prêts à les recevoir, car le sage 
législateur voulait qu'ils fussent couchés seuls et séparés, 
afin qu'il ne pût leur arriver aucun dommage *. Ces enfants 
étaient élevés par les sœurs de l'Ordre, qui leur prodi- 
guaient les soins les plus dévoués. Les jeunes garçons étaient, 
vers dix ou douze ans, placés en apprentissage *, Les jeunes 
filles, si elles en sentaient la vocation, pouvaient demeu- 
rer dans la maison et se consacrer par les vœux de religion 
au service des pauvres ; sinon, elles étaient mariées avec 
une dot convenable*. 

Du reste, beaucoup de ces enfants étaient, de sept à dix 
ans, demandés par des cultivateurs ou des artisans, qui les 
adoptaient dans les formes, en assurant leur avenir. Les 
archives de la maison de Rome contiennent une multitude de 
ces actes d'adoption, qui, sans aucun doute et pour les 



* D*après les lois féodales, le soin des enfants trouvés revenait en beaucoup 
de lieux aux seigneurs ; souvent ils s*en déchargèrent en érigeant des hôpitaux 
qui héritaient de leurs obligations. Voy. Lallemand : Hist, des enfants aban- 
donnés et délaissés f p. 109. 

' Saulnier, p. 182; Lallemand, op, cit.y p. ^96 et sq. 
■ Régula, c. XLI. 

* Ibid., c. LIX. 

' Saulnier, p. 185. 
•Régula, c. LXXVl. 



68 i.A RiGLE DE OUI 

mêmes causes, avaient lieu également dans les autres 
maisons de TOrdre. 

Les femmes pécheresses elles-mêmes étaient appelées à 
bénéficier de la charité de Gui. Elles étaient admises à 
Thôpital pendant la semaine sainte et Toctave de Pâques, 
quand elles manifestaient le désir de faire pénitence de leurs 
débordements *. 

Ce rapide exposé, que nous compléterons plus tard, est 
suffisant déjà pour mettre en lumière le caractère frappant 
d'universalité, qui est le signe distinctif de la fondation de 
Gui. N'y trouve-t-on pas la charité la plus large, embras- 
sant toutes les misères ? N'y trouve-t-on pas, dans un su- 
perbe développement, ou au moins en germe, toutes les 
œuvres dont se glorifient nos institutions modernes de bien- 
faisance ? Soins éclairés donnés aux malades, asiles offerts 
aux orphelins et aux enfants abandonnés, œuvres de mater- 
nité, refuges ouverts au repentir, hospitalité exercée dans 
toute sa plénitude : voilà l'œuvre gigantesque entreprise et 
menée à bien par un seul homme ! Familiarisés avec les pro- 
diges de bienfaisance accomplis par le catholicisme dans les 
temps modernes, nous sommes moins saisis peut-être de 
l'ensemble majestueux de la création de Gui ; mais si l'on 
réfléchit que le fondateur du Saint-Esprit vécut avant le 
XIII' siècle, que les deux hôpitaux de Montpellier et de 
Rome n'avaient pas de précédents, on comprendra les diffi- 
cultés et la grandeur de cette œuvre, et l'on sera fier de pou- 
voir rapporter à la France l'honneur d'une institution si 
généreuse •. 



» Régula, c. XLVI. 
* Mgr Paulinier, p. ^8. 



HIÉRARCHIE DE l'ORDRE 69 



ni. HIÉRARCHIE DE L'ORDRE 



Innocent III avait placé Tordre du Saint-Esprit sous la 
protection immédiate du S. Siège. Il donna même pour 
principal motif de Tunion qu'il fit des maisons de Rome et 
de Montpellier sous un seul maître, l'efficacité plus grande 
avec laquelle cette protection pourrait s'exercer, grâce à 
la proximité de la maison de Rome et à la facilité de ses 
relations avec le chef de l'Eglise. 

CARDINAL PROTECTEUR. — Afin de rendre cette protection 
plus réelle, et aussi parce que la maison de Sainte-Marie 
in Saxia était dotée des revenus de l'Eglise romaine, 
le même pape lui donna un Cardinal protecteur^ chargé 
de veiller sur ses intérêts *. Ce protecteur, que l'Ordre était 
tenu de demander au S. Siège, lorsqu'il venait à en être 
dépourvu, exerçait une juridiction véritable et effective. 
Chaque innée il devait faire la visite de l'hôpital romain 
et corriger les abus qui auraient pu s'y glisser • ; La cor- 
rection des clercs lui appartenait exclusivement, lorsque le 
grand maître était choisi parmi les frères laïques. Mais il lui 
était loisible de déléguer son pouvoir à l'un des membres de 
la communauté % et, dans la pratique, les choses ont du le 
plus souvent se passer ainsi ; de telle sorte qu'on ne recou- 
rait à l'autorité du cardinal protecteur que dans les cas 
exceptionnellement graves, comme les accusations contre 
les recteurs des maisons particulières de l'Ordre, et même 
contre le grand maître, dont on aurait essayé vainement 
de vaincre l'obstination et de réprimer les excès *. 



» Regida, c. LXXXIX. 

• Ibid. 

» Ibid., c. XXVI. 

* Ibid,, c LXV. 



JO LA RÈGLE DE GUI 

Les maisons infidèles à la règle, lorsqu'elles s'insurgeaient 
contre le jugement du grand maître et du chapitre géné- 
ral, étaient déférées au tribunal du protecteur, qui avait au- 
torité pour requérir au besoin le secours du bras séculier*. 

Enfin le protecteur était l'interprète autorisé de la règle et 
avait le pouvoir d'admettre un postulant, sans attendre la 
décision du chapitre général •. 

« Il est facile de comprendre l'importance d'une sem- 
blable institution, et l'heureuse influence qu'elle dut exer- 
cer pendant de longs siècles sur toutes les maisons de l'Or- 
dre, pour y conserver l'esprit de son illustre fondateur •. » 

LE GRAND MAITRE. — Le grand maître était le chef de 
l'ordre entier. Il était élu par la communauté de l'hôpital 
de Sainte-Marie. Nous savons déjà que^ par suite des dispo- 
sitions prises par Innocent III pour Tunion des hôpitaux de 
Rome et de Montpellier, l'élection devait se faire dans la 
maison où mourait le grand maître, mais avec le concours 
de deux délégués de la maison-sœur. Une fois l'union 
rompue, au bout de peu d'années, l'élection du grand 
maître fut confiée exclusivement aux frères de Rome, dont 
il était le recteur immédiat. Elle avait lieu dans le mois 
qui suivait la mort du dernier titulaire. Le « mérite de la vie 
et la sagesse de la doctrine » devaient seuls diriger le choix 
des frères, sans qu'ils eussent égard à la noblesse ni à 
l'éclat de la naissance \ 

En entrant en charge, le grand maître prêtait im serment 
solennel, renfermant l'énumération complète des devoirs de 
la charge éminente qu'il assumait ; en voici la formule, que 
la règle nous a transmise : « Moi, N., grand maître de 
l'hôpital du Saint-Esprit, je jure et je promets d'adminis- 
trer en bonne foi les affaires dudit hôpital, pour la gloire 



• Régula, c. LXVIII. 

• Ibid,, c. LXXXVI. 

' Mgr Paulinier, p. 40. 

• Régula, c. XXIV. 



HIÉRARCHIE DE L*ORDRE 7I 

de Dieu et Tutilité de cette maison, pour le soulagement 
des pauvres et des malades, auxquels, avec Taide de Dieu, 
je consacrerai toute ma sollicitude, m'efforçant de la faire 
partager à tous mes frères. Je n'emploierai jamais les aumô- 
nes et les revenus de Thôpital à d'autres usages qu'à ceux 
auxquels ils sont particulièrement destinés, savoir : le sou- 
tien des pauvres, des malades, des étrangers et de la 
famille; je ne détournerai rien en fraude pour le distribuer 
à d'autres maisons ou à d'autres personnes. Je n'aliénerai 
non plus, sous aucun prétexte, les possessions ou les titres 
dudit hôpital, sans avoir consulté le souverain pontife, à qui 
je serai obéissant et fidèle en toute chose. Et qu'ainsi Dieu 
et les saints Evangiles me soient en aide.. Amen \ » 

Le grand maître n'était pas nécessairement un ecclésias- 
tique ; et, en fait, pendant les deux premiers siècles, il 
fut choisi le plus souvent parmi les simples frères. Dans ce 
cas, la présidence des fonctions sacrées revenait au prieur, 
et la correction des clercs, au cardinal protecteur, à moins 
que celui-qi n'eût délégué sa juridiction à l'un des membres 
de la communauté ^ 

L'administration temporelle de l'Ordre incombait toute 
entière au grand maître. Il présidait les assemblées capitu- 
laires des quatre-temps et le chapitre général de la Pen- 
tecôte ; il admettait les postulants, recevait les novices et les 
profès, en laissant au prieur le soin de réciter les formules 
liturgiques ; il distribuait les diverses fonctions, sur l'avis 
du chapitre, et déposait ceux qui s'étaient rendus indignes de 
sa confiance ^ 

Un pouvoir aussi étendu, s'il n'avait eu un contrepoids, 
aurait pu facilement dégénérer en absolutisme et engen- 
drer de nombreux abus. Le législateur trouva dans l'insti- 
tution des chapitres généraux le tempérament nécessaire. 

• Regiday c. LXXV. 
•/^W., CXXV, XXVI. 
» /frW., c. XCV. 



72 LA RÈGLE DE GUI 

Le grand maître veillait au maintien de la règle et des 
usages louables ' ; à son tour le chapitre recevait les plain- 
tes contre le grand maître •. 

Dans une situation si éminente, il aurait pu concevoir 
de Torgueil ; la règle lui fournissait l'occasion d'exercer 
Thumilité, en le soumettant à la vie commune pour tout ce 
qui n'était pas incompatible avec ses fonctions. En particu- 
lier, il était tenu de prendre ses repas à la table des frères, 
à moins que des hôtes étrangers ou quelque nécessité de 
son service ne vinssent à justifier son absence '. Il était 
soumis au silence monastique et avait son lit au dortoir 
commun des frères \ 

Bien plus, il était soumis aux corrections capitulaires, 
comme le plus humble des membres de TOrdre. Un jeûne 
rigoureux au pain et à Teau, sous la surveillance des clercs, 
punissait sa plus légère négligence ^ S'il poussait l'obstina- 
tion jusqu'à résister à un triple avertissement, le chapitre 
le dénonçait au pape ou au cardinal protecteur ; une peine 
proportionnée au délit et même la déposition pouvaient 
s'ensuivre*. Si, à sa mort, on venait à lui découvrir quelque 
bien possédé en propre, sans que le délégué du protecteur 
ou deux frères en eussent eu connaissance, la règle ordon- 
nait qu'il fût enterré hors du cimetière, comme un excom- 
munié et sans aucune cérémonie \ 

Hàtons-nous de dire que ces peines préventives n'eurent 
jamais occasion d'être appliquées pendant toute la durée 
de l'Ordre. 

La dignité de grand maître de l'ordre du Saint- 
Esprit devint considérable ; les souverains pontifes lui 



• Régula^ c. XXII. 

• Ibid., c. XXXVIII, LXIV. 
» /W</.,c. XXIII. 

• Ibid., c. LXXVIII. 

• Ibid., c. LXV. 
^ Ibid., cLXlW. 
-> Ibid., c. LX. 



HIÉRARCHIE DE l'oRDRE 7) 

annexèrent de hautes prérogatives, en reconnaissance 
des services rendus par TOrdre. Le grand maître avait à la 
cour pontificale le droit de préséance sur tous les généraux 
d'ordre, et il exerçait ce droit en siégeant à leur tète 
immédiatement après les abbés, dans les conciles et les 
cérémonies pontificales *. 

De nombreuses réclamations s'élevèrent contre un droit 
qui paraissait exorbitant, chez un religieux qui n'était pas 
nécessairement revêtu du sacerdoce ; mais toujours les papes 
donnèrent raison au grand maître, en maintenant ses 
privilèges, comme nous le verrons dans la suite de cette 
histoire. 

Cette dignité était rehaussée par les qualités éminentes 
et l'illustre extraction du plus grand nombre de ceux qui 
en furent revêtus ; les plus nobles familles s'honoraient d'y 
compter des représentants. Douze cardinaux, plusieurs 
légats, bon nombre d'archevêques et d'évêques, le pape 
Eugène IV, ont rempli le;s fonctions de grand maître, et les 
noms célèbres des Conty, des Orsini, des Aquaviva, des 
Aldobrandini, des Spinola, des Doria et des Polignac, sont 
inscrits sur les registres commendataires de l'Ordre •. 

VICAIRE GÉNÉRAL DU GRAND MAITRE. — Les intérêts géné- 
raux de l'Ordre, les soins multiples d'une vaste admi- 
nistration — quelquefois même des missions concernant le 
bien général de l'Eglise — obligeaient le grand maître à des 
absences fréquentes et prolongées ; il lui fallait donc à Rome 
un suppléant, qui possédât, en vertu de sa charge, des 
IX)uvoirs assez étendus pour administrer l'Ordre en son 
absence. Ce suppléant était le Vicaire Général du grand 
maître. Cette fonction fut d'abord essentiellement transi- 
toire ; sa durée ne dépassait pas celle de l'absence du grand 



'Joann. Paul. Mercanti, Diario, 1598, die ^oJanuar. 
* Idée géniraie de Vordre hcspiUUier du Saint-Esprit de Montpellier, 
MDCCXLIH, ïtiS^, p. 5. — Mgr Paulinier, p. 45. 



74 LA RÈGLE DE GUI 

maître. Voici en quels termes la règle parle de Télection du 
vicaire général et des qualités éminentes requises pour 
cette charge : 

« S'il arrive que le Maître de notre ordre ait nécessité de 
faire quelque voyage, qu'il convoque le chapitre avant son 
départ et dise où il doit aller, et qu'alors il élise, de concert 
avec le chapitre, un des frères pour régir la maison jusqu'à 
son retour. Quant à celui qui sera élu, il ne sera ni sensuel, 
ni orgueilleux, ni turbulent, ni offensant, ni nonchalant, ni 
prodigue, mais craignant Dieu et sachant posséder son âme. 
Qu'il se souvienne de la parole de l'Apôtre : celui qui gou- 
verne bien, acquiert un rang honorable *, » 

Les fonctions du vicaire général étaient celles du grand 
maître ; il en partageait l'autorité et les pouvoirs : « Qu'il 
ait la plus grande sollicitude pour les infirmes, les enfants, 
les pèlerins et les pauvres, étant certain qu'au jour du 
jugement, il en rendra un compte rigoureux ■. » 

S'il avait le malheur de se rendre indigne de sa charge 
et si, après une triple admonition, il n'avait pas amendé ce 
qui se trouvait répréhensible dans sa conduite, il était 
déposé et remplacé par un plus digne *. 

Le vicaire général, comme nous l'avons dit, n'était primi- 
tivement élu que dans le cas d'une absence du grand maître. 
Les progrès de l'Ordre et la multiplicité des affaires firent 
que, dans la suite, cette dignité devint permanente ; on la 
confiait aux Maîtres ou Camériers de la Maison de 
Sainte-Marie in Saxia et cet usage s'est toujours maintenu 
dans la suite ^ 

VISITEURSGÉNÉRAUX. — Il ne parait pas que cette charge 
ait existé tout d'abord dans l'Ordre. Le nombre des établis- 
sements étant alors peu considérable, il est à croire que 



• Régula, c. XCIII — Epist, ad Timotk, III, x^ 
» et » Ibid. 

* Voy. Saulnier, p. 1^8. 



HIÉRARCHIE DE l'oRDRE 75 

Gui et ses premiers successeurs remplirent eux-mêmes 
l'office de visiteurs. Du reste, la ferveur dont étaient animées 
les premières générations des hospitaliers rendait cette 
précaution inutile. Il ne faut donc pas chercher dans la règle 
l'institution des visiteurs : il n'y est parlé que du Cardinal 
Visiteur de la maison de Sainte-Marie. 

Mais les archives de Rome et des autres hôpitaux du Saint- 
Esprit nous apportent de nombreuses preuves de l'existence 
des visiteurs généraux à une époque assez reculée. Le pre- 
mier dont le nom nous soit connu, est frère Jean Monette, 
recteur de la maison conventuelle d'Auray. Ce personnage, 
dont il sera plus amplement parlé, prend le titre de « visiteur 
de toutes les maisons de l'ordre Archihospitalier du Saint- 
Esprit, immédiatement soumises au grand maître dudit 
ordre * ». Son acte de visite, le plus ancien qui ait été con- 
servé, est daté de l'année 1 289. D'autres actes montrent qu4l 
conserva cette dignité probablement jusqu'à sa mort *. Rien 
n'indique qu'il ait été le premier à l'exercer ; il n'est donc pas 
téméraire de faire remonter l'institution des visiteurs géné- 
raux au milieu du XIII* siècle, alors que les hôpitaux du 
Saint-Esprit étaient déjà très nombreux. 

Le visiteur était désigné au chapitre général de la Pente- 
côte et investi de sa charge dans le même chapitre ; il 
emportait avec lui la procuration écrite du grand maître, 
en témoignage de son autorité. Dans cette procuration, il 
était nommé indifféremment Visiteur ou Vicaire du grand 
maître ; mais il ne faut point le confondre avec le vicaire 
général, dont nous venons de parler, et qui, par la nature 
même de sa charge, ne pouvait quitter la ville de Rome. 

La fonction de visiteur général était essentiellement per- 
sonnelle et révocable à la volonté du grand maître et du 



* Frater JoannesMonette.... totius ordinis archihospitalaris Sancii Spiritus 
domorum hospitalariarum magistralium Generali Magistro huiusdem ordinis 
immédiate subditarum visitator. — Voy. Diplomata. H, p. ^70 et sv. 

• Actes de ijo8, i)i2, xjif, ijx?» 1)1% Diplomata. II, p. J76 et sv. — Voy. 
Pièces just. n« V. 



7<> LA RÈGLE Dfi GUI 

diapitre général ; quelques-uns cependant paraissent Tavoir 
exercée jusqu'à leur mort, non qu elle leur eût été conférée 
à vie, mais plutôt par suite de renouvellements successifs 
de leur mandat '. Habituellement, les commissions de vicaire 
et visiteur général n'étaient valables que jusqu'au chapitre 
suivant, c'est-à-dire pendant un an ; mais on en trouve de 
deux, de trois et même de cinq années, suivant Tétendue de 
la circonscription à inspecter. 

Les nombreuses lettres de provision que nous avons rele- 
vées aux archives de l'hôpital de Sainte-Marie in Saxia nous 
autorisent à penser que toutes les maisons étaient inspectées 
chaque année et que le chapitre de la Pentecôte partageait 
entre un certain nombre de visiteurs les provinces et les 
états ou rOrdre possédait des établissements '. 

Les pouvoirs du visiteur étaient très étendus : il inspectait 
les maisons, se faisait rendre un compte exact des revenus 
et des dépenses, tenait la main à ce que la chapelle et ses 
ornements fussent toujours décents et dignes ; visitait les 
salles des malades, recevait les plaintes des frères contre les 
prieurs et avait pleine autorité pour corriger et amender 
tout ce qu'il trouvait en opposition avec la règle. Si les reli- 
gieux ou les prieurs même ne se soimiettaient pas à ses 
prescriptions, il avait le pouvoir de les déférer à Tévèque 
et même d'invoquer le secours du bras séculier. 

Le grand maître seul pouvait absoudre de son excommu- 
nication *. C'est aussi le visiteur qui touchait habituellement 
le cens annuel des maisons et ordonnait les quêtes *. 



< Disons cependant qu*à partir du XIV« siècle, la plupart des recteurs de 
Besançon reçurent du grand maître, en même temps que leurs lettres d'insti- 
tution, une procuration qui les inrestissait du titre de Procureun et insUeurs de 
POrdre, inpartibui uUramontanis, Cette faveur était due sans doute à Timpor- 
tance exceptionnelle de la rectorie de Besançon. 

' Voy. aux Pièces justif.t n« XIV, la liste des visiteurs généraux que nous 
avons pu découvrir. 

* En 1459, absolution, par le grand maître, du prieur de Metz, qui avait ré- 
sisté au recteur de Besançon, vicaire et visiteur général (Arch. du S.-Esprit 
in Saxia, lib. 23^. 

* Arch. du Saint-Esprit in Saxia, Lib. rub,, f» 191, etc. 



HIÉRARCHIE DE l'ORDRE 77 

En outre de ces commissions de visite universelles et 
régulières, le grand maître en donnait de moins étendues, 
par exemple, quand il s'agissait de régler des différends 
entre deux maisons ', ou de corriger de graves désordres qui 
demandaient une attention prolongée *. Dans ce dernier cas, 
le visiteur n'était pas nécessairement un religieux ^de 
rOrdre; le grand maître désignait quelquefois Tévèque 
diocésain ou son officiai \ 

L'institution des visiteurs était excellente ; il ne faut pas 
douter qu'elle n'ait contribué puissamment à maintenir pen- 
dant longtemps la régularité dans l'Ordre. Elle a cependant 
échappé jusqu'ici aux historiens ; c'est une raison de plus 
pour nous de la replacer à son rang dans cette organisation 
hiérarchique si complète et en même temps si simple. 

PROCUREURS GÉNÉRAUX. — Nous trouvons la mention de 
ces dignitaires dans les actes de frère Jean Monette, de 1 308 
et 1319. 

On y voit que, au chapitre général annuel tenu par ce 
visiteur général, chapitre auquel assistaient les comman- 
deurs des maisons-mères de toute la France, il est nommé, 
a selon la coutume », un procureur général, qui doit prendre 
soin des affaires matérielles de tous les hôpitaux de France ; 
l'assemblée lui donne blanc-seing pour les dépenses qu'il 
jugera nécessaires au bien de l'Ordre \ 

Comme nous n'avons pas trouvé d'autres mentions de 
ces officiers, nous ne pourrions dire s'ils ont subsisté long- 
temps. 



* Voy. au chap. IV de la seconde partie, les différends entre Besançon et 
Toul. 

' Commission à frère Jodocus de Baden, pour les maisons de Berne, 
Steffanfeldt, Lausanne, 1468 (Arch. du S.-Esprit in Saxia, Lib. 2;, f">. .) 

' En 14^9, Commission de vicaire général donnée à Tofficial de Besançon, 
pour instruire la cause du frère Collin contre le recteur Claude Buffet, qui 
l'avait séparé des frères (Arch. du S.-Esprit inSaxia, lib. M. f» 7;.) 

* Voy. Diplomata, II, p. J76, ^79. 



78 LA RÈGLE DE GUI 

ASSEMBLÉES CAPITULAIRES. — L'assemblée des frères, ou 
chapitre j était le lien qui unissait ^ntre eux les membres 
des maisons, des provinces et de Tordre entier. La règle dis- 
tingue plusieurs espèces de chapitres. Il y avait d^abordle 
chapitre hebdomadaire : Que le maître, ou celui qui le rem- 
place, dit-elle, tienne chapitre avec les frères au moins une 
fois la semaine ; qu'il tienne aussi le chapitre des sœurs, 
assisté d'un frère prêtre et de deux autres frères *. C'était le 
chapitre ordinaire des coulpes, usité dans tous les ordres 
religieux ; chacun s'y accusait des fautes qu'il avait commises 
contre la règle dans la semaine. Quatre fois l'année, le pre- 
mier jour des quatre-temps, le précepteur devait tenir un 
chapitre général avec les frères ; s'il était absent ou empêché 
de le tenir dans les huit jours, il devait le faire le plutôt pos- 
sible * ; on y traitait soigneusement des affaires de la 
maison ', et l'on y jugeait de toutes les plaintes selon l'amour 
de Dieu et un jugement droit *, 

En dehors de ces deux chapitres, destinés à maintenir la 
régularité dans chacune des communautés, les comman- 
deurs des maisons magistrales en tenaient une fois l'an un 
troisième, auquel les recteurs des maisons filiales étaient 
tenus d'assister par eux ou leurs délégués, sous peine des 
censures *. Frère Jean Mouette, recteur de la maison magis- 
trale; conventuelle et hospitalière d'Auray, et visiteur 
général de l'Ordre, célébrait son chapitre le jour de sainte 
Elisabeth (19 novembre) ; les maîtres des maisons filiales 
d'Auray y assistaient. Parfois les recteurs d'autres maisons 
non soumises à Auray, telles que Marseille, Besançon, 
Lyon, Reims, Troyes, etc., y prenaient part, comme en 
1312 et en 1319*. 

• Régula, c. XXX. 

• Ibid., c. XXI. 

• Ihid. 

• Ibid., c. XXXI. 

• Voy.aux PUces Justif., no IV, les extraits des Actes capttulaires de Besançon* 

• Diplomata, II. p. J77, J79. 



HIÉRARCHIE DE L^ORDRE . 79 

En 1345, frère Guillaume Colombie précepteur général 
de Montpellier, assisté des prieurs et représentants des 
membres de sa dépendance, tint le chapitre général annuel 
de la Pentecôte, au son de la cloche, sonnée trois fois selon 
la coutume. On discuta dans cette assemblée sur Tutilité 
d'une amodiation de terres dépendantes de Thôpital de 
Clapier de Manvielle ; deux commissaires, envoyés sur 
les lieux, firent leur rapport ; l'assemblée rendit ensuite sa 
décision'. 

A Besançon, le chapitre annuel était fixé au dimanche 
Cantate^ quatrième après Pâques. Le commandeur présidait 
l'assemblée, qui se composait des religieux du chef-lieu et 
des recteurs de sa filiation ; il examinait les excuses des 
absents et leur appliquait les censures, si ces excuses 
n'étaient pas jugées suffisantes ; il instituait les nouveaux 
maîtres; faisait rendre à chacun un compte exact de son 
administration et de la situation de son hôpital ; enfin, rece- 
vait un tribut annuel, à titre de reconnaissance de sa supé- 
riorité ". 

L'Archihôpital romain avait, lui aussi, de même que les 
maisons magistrales, son assemblée annuelle : c'était le 
célèbre chapitre de la Pentecôte. Les intérêts de l'hôpital 
de Sainte-Marie in Saxia lui étaient soumis d'abord, puis il 
s'occupait des affaires de l'ordre entier. A cet effet, il était 
composé d'un double élément : c'étaient en premier lieu 
les frères de Rome et les recteurs de ses maisons filiales, 
auxquels venaient se joindre tous les commandeurs 
magistraux de l'Ordre *. 



* Diplomata, II, p. ^80. 

* Voir les Actes capituUires de Besançon, Pièces Justif,, n® IV.— A. Castan, 
Notice sur Vhôpital du Saint-Esprit de Besançon^ p. 1^4 (Annuaire du Doubs, 
186O. 

' Lorsque les commandeurs manquaient au chapitre, sans s'être fait excuser, 
ils étaient menacés d*excommunication : frère Pierre Mathieu, recteur de 
Montpellier, reçut un monitoire pour le chapitre de 14^0 (Arch. du Saint- 
Esprit in Saxia, lib. 20, f» ^o). En 1448, les maîtres des hôpitaux d'Allemagne 
furent aussi menacés d'excommunication, s*ils n'assistaient pas à ce même cha- 



8o tA KàGLB DE GUI 

La règle prescrivait soigneusement le détail de ces as- 
sises solennelles * : « Lorsque les frères seront réunis, que 
le prieur sorte en procession de Téglise, accompagné d'un 
diacre ^t d'un sous-diacre revêtus. Arrivé dans la salle du 
chapitre^ il entonnera le Veni créât or Spiritus, fléchis- 
sant trois fois le genou avec les frères et répétant à chaque 
fois ce même verset ; puis on achèvera l'hymne. Ensuite 
le diacre chantera l'Evangile selon S. Mathieu : Cum vene^ 
rit Dominus in sede majestatis suœ *, et la procession 
retournera à l'église, tandis que les frères demeureront au 
chapitre. » 

Le chapitre ainsi ouvert, le prieur ou l'un des frères 
prononçait une exhortation et le grand maître expliquait 
la règle et recevait le produit des quêtes et des dons ap- 
portés par les frères. Puis^ après avoir reçu la démission 
de tous les dignitaires de l'hôpital romain, il les soumettait 
l'uy après l'autre à un sévère examen : « Le maître leur de- 
mandera l'état des maisons, si elles sont fournies d'ani- 
maux domestiques et de vivres, si elles sont prospères ou 
endettées ; de cette manière, il pourra connsdtre qui aura 
mieux ou plus mal administré sa maison ou exercé son em- 
ploi. » 

Le chapitre jugeait les plaintes qui lui étaient soiunises : 
« Si le maître se plaint de quelque frère, ou un frère d'un 
autre,rassemblée écoutera ces plaintes et aussi les réponses. 
Les griefs et les témoins entendus, que les frères prononcent 
une juste sentence et que le coupable satisfasse à la justice 
selon la teneur de la règle. » 

Venait ensuite le choix des dignitaires. Le grand maître, 
accompagné de quelques frères, se retirait à part et 



pitre (Ibid., f» )o v*]. La présence des simples recteurs était, croyons-nous, une 
exception ; les frais du voyage auraient pesé trop lourdement sur les petits hô- 
pitaux. 

* Rigula, c. CV. 

* C'était TEvangile inscrit en tête de la règle. — Voy. plus haut» art. II. 



HIÉRARCHIE DE L'ORDRE 8i 

choisissait les divers officiers : Thospitalier, le prieur, le 
camérier, le trésorier, et les administrateurs des dépen- 
dances. Les frères consultés devaient donner leur avis avec 
simplicité, prudence et discrétion : la règle commandait 
au maître d'y avoir le plus grand égard. 

Le chapitre terminé, le prieur disait des oraisons pour la 
paix de TEglise et des royaumes chrétiens, pour l'Ordre et 
ses bienfaiteurs. Après la prière, les frères embrassaient le 
grand maître, se donnaient mutuellement le baiser de paix 
et chacun se rendait à ses fonctions * . 

L'institution des chapitres généraux, introduite dans les 
ordres religieux par les Cisterciens, était un puissant 
élément de discipline. Par ces chapitres, les recteurs 
des maisons-mères maintenaient leurs sujets dans une 
étroite dépendance, assuraient l'exécution de la règle et se 
trouvaient en mesure de porter un prompt remède aux 
désordres et à la mauvaise administration des hôpitaux. 
Toutes ces maisons d'importance très variable formaient 
avec leur chef une famille étroitement unie. Mais leur 
sujétion ne pouvait engendrer le despotisme, grâce au 
chapitre suprême de Rome, dans lequel toutes les plaintes 
étaient admises et discutées avec une justice impartiale. 

RECTEURS. — Chacune des maisons de l'Ordre, fondées sur 
le modèle de celle de Sainte-Marie in Saxia, avait à sa tête 
un frère appelé Recteur, Maître ou Précepteur^ car ces 
trois titres étaient pris indifféremment l'un pour l'autre *. 

Les recteurs recevaient leur autorité du grand maître, 
dont ils étaient les remplaçants : « Que tous les recteurs 

des maisons engendrées par celle du Saint-Esprit de Rome, 
tiennent du grand maître et du chapitre leur maîtrise '. » 



» Régula, c. CV. 

* Il faut joindre à ces titres celui de Prieur, qui se confondait dans les petits 
hôpitaux avec celui de Mattre, surtout à partir du XV* siècle, époque oii les 
frères dans les ordres formèrent la majorité . 

' Régula f c. LXII. 

6, 



tx2 Là ÙGLE HE CQ 

JEjd fait cepeikâain. le âroit de jkommsnaax âes ndeuis était 
laiëffê an ciiapitre des hôpitanx-ciiefs pour les inaîwwis de 
leur filiatioD^ &auf à en demiasdeT canfirmaiian aa grand 
iDaitre et au dbapître g-énéral de Rome '. 

La duiTge de recteur était révocàbie à la volcoié da 
grand maître. ^«^ examen en di^âtre *. Le recteur avait 
la misâon de pourvcâr aux besoiss des pauvres et des 
malades, ainsi que des frères et des sœnrs \ Son autorité 
était la même, dans chaque maison particulière, que celle 
du grand maître dans la maison de Sainte-Naiie: mais s'il 
lui arrivait d'aller sciemment contre la volonté du grand 
maitre. il était dépouillé de ll^abit de TOidie, déclaré 
parjure et excommunié *. 

Le recteur était tenu de faire rendre aux officiers inférieurs 
un compte exact de leur administration : si, par sa négligence, 
ce travail n'était pas fait dans les huit joursqui suivaient les 
calendes^ il se rendait lui-même respcMisable et oioourait 
un jeûne rigoureux au pain et à Teau, le vendredi qui 
suivait \ Un recteur gravement coupable, qui ne s*amendait 
pas après trois avertissements des fières, était dénoncé au 
grand maître, et. au besoin, au cardinal protecteur, ou 
même au pape *. 

Si une révolte éclatait dans une des maisons de TOrdre, 
elle était réprimée sévèrement par le grand maître, qui 
prenait préalablement conseil de son chapitre. Si la maison 
résîstait, elle était dénoncée à la cour de Rome, et pour 
ramener les rebelles, on n*hésitait pas à recourir même au 
bras séculier '. 



' Toutes les confirmstioos de recteurs qoe nous «Tons Tues aux archives de 
Rome ont été données par le grand maître et le chapitre. 

• Régula, c. LIV. 
» Ibid,, c. LXV. 

' Ibid.,c. IJCII. 
■ Ibid., c. LXV. 

• /«rf., c. LXIV. 
Uhid.,c LXVin. 



HIÉRARCHIE DE l'oRDRE 83 

CAMÉRIER ET CELLERIER. —Les recteurs, lorsque leur grand 
âge ou l'importance de leur charge le requérait, pouvaient 
se faire donner par le chapitre un Vicaire ou Coadjuteur\ 
mais cet emploi n'était pas habituel, et on choisissait pour 
le remplir un frère déjà pourvu d'autres charges, par exem- 
ple, le Camérier. La fonction de celui-ci, en raison de son 
importance, ne devait jamais vaquer : il avait pleine 
puissance pour administrer la maison et pourvoir aux 
nécessités des frères, des sœurs et des pauvres ', mais avec 
l'avis du maître et du chapitre. Le premier jour de chaque 
mois, il rendait ses comptes, et s'il ne l'avait pas fait au 
bout de huit jours, il jeûnait au pain et à l'eau le mercredi 
et le vendredi, jusqu'à ce qu'il se fût exécuté, sans préjudice 
de la peine infligée alors par le chapitre *. Cette disposition 
était très sage et dut être une source de bon ordre et de 
prospérité pour les maisons ; mais il est probable qu'elle ne 
fut pas toujours pratiquée strictement ; de là les nombreuses 
plaintes dont nous entendrons l'écho sur la fin du XV' 
siècle, touchant la mauvaise administration des hôpi- 
taux. 

Le camérier avait une des trois clefs du coffre qui conte- 
nait les revenus. Ce trésor était placé dans le dortoir 
commun, auprès de son lit, étant plus en sûreté sous la 
garde de tous, que dans une chambre particulière • ; mais 
il n'en pouvait rien tirer lui même; le recteur et le chapitre, 
qui détenaient les deux autres clefs, lui remettaient à certains 
intervalles les sommes nécessaires aux dépenses courantes *. 

Le Cellerier était chargé exclusivement de l'office. Les 
approvisionnements et le service de la table des malades, 
des hôtes, des pauvres et de tout le personnel, étaient de 



' Regida, c. LXV. 

* Ibid. 

*Ibid,y c. LXXVIII. 

* Ibid,, c. LXVI. 



LA t£SLX &ft 



n.ypGKCTSSZ nés 
rasKtoraat&oa expresse da 



*- II nous reste à parler en denner lîea d' 
àigtàtair^ d'un ordre ^ port, du PriéMr. A InL retenait 
rioteodaiioe qsmtnene des maxsaos: il partageait en 
qoelqoe sorte le premier rang avec le leuem , car la r^le 



hâ confiait la présidence de tontes les oércflMxties religieuses 
et Tadministration spiritaelle des maisons. Sa charge était 
annuelle, comme celle dn camêrier et dn oellerier. Il 
réglait et présidait l'office, et a dmiiiiMjaii les sacrements 
anx malades, assisté par les antres cdercs *. 

Remarquons tontefois que les prieurs, en permanence à 
Rome, n'existaient que rarement dans les maisons de 
moindre importance: les l ec tem s en remplissaient les 
fonctions, du moins à partir de l'époque ou <m les choisit 
habituellement parmi les clercs. 

La pensée générale qui domine dans la partie de la 1^^ 
lation que nous venons d'examiner, est la sainteté de 
Tautorité. le profond respect de la hiérarchie et la 
division bien entendue des pouvoirs. Sans doute^ Gui n^est 
pas l'inventeur de toutes les heureuses dispositions de sa 
règle; il en a emprunté un certain nombre aux grands 
législateurs monastiques. Mais si sa glcnre n*^ale pas, à 
ce point de vue, celle des Basile, des Augustin, des Benoit, 
ses illustres devanciers, on ne saurait contester au noble 
enfant de Montpellier un mérite qui lui est propre, celui de 
la netteté des vues, de la simplicité de leur mise en œuvre, 
« et surtout de cet esprit à la fois libéral et pratique qui 
distingue essentiellement la nation française '• » 



• Ibid., c. VII. 

» ibid,, c. III, IV, etc. 

* Mgr Paalioier, p. 50. 




CHAPITRE III 



LA RÈGLE DE GUI: RÉGIME INTÉRIEUR 

DE L'ORDRE 




ous venons de passer en revue les différents degrés 
de la hiérarchie de l'ordre du Saint-Esprit; nous 
'avons pu en admirer l'ordonnance si sage et si sim- 
ple à la fois. Il faut maintenant pénétrer plus avant, 
étudier la vie intime de ce grand corps, voir par qui et 
comment étaient exercées, jour par jour, sous la direction 
des supérieurs, les œuvres de charité. La règle nous dira 
aussi quelles obligations s'imposaient à ceux qui voulaient 
devenir les serviteurs des pauvres, ainsi que les peines que 
le sage législateur crut devoir édicter pour prévenir, par 
l'efiFet d'une crainte salutaire, les défaillances de la faiblesse 
humaine. 



I. PERSONNEL DE L'ORDRE 



La grande famille du Saint-Esprit se composait de 
frères, dont une partie seulement était dans les ordres 
sacrés, de sœurs, et d'oblats, qui, sans être mis précisé- 



\ 



as 

Wkcot ZMk DOiotire des T^igitnx^ âaimt Jilwft oepeodaiit ik 
"çajtàftr leur vie. Eafiii. des aeiiilcms à g^^ aidaient 
et p er son nel dans ses traTanx direfs. 

FNÉIKS. — Celm qui se présentait pour entrer dans 
rOrdre. subissait on examen préliminaire, destiné à vérifier 
ses aptitudes et à ép rott \er sa vocation : « Quand «{nelqa^an, 
dit la règle, demande à faire partie de la oommonanté de 
lliôpital du Saint-Esprit, que le p réce pte ur tienne conseil 
avec les frères, pour savoir si on doit le recevoir. S*il est 
reçu, qn il vienne an chapitre avec tons les frères, et qae 
le précepteur lui demande s'il persévère dans son intention 
d'entrer dans la communauté. s*il se sent capable de porter 
le joug de la règle et de garder la chasteté. Tobéissance 
et la pauvreté '. » 

Le maître recommandait ensuite au postulant de bien ré- 
fléchir à sa demande pendant qu'il en était temps : « Jusqu'à 
présent vous étiez libre, vous agissiez à votre volonté; 
mais en entrant en religion, vous serez sous la puissance 
d'autrui. n S*il persistait dans sa résolution, en disant qu'il 
aurait le courage d'observer fidèlement la règle et de se 
vouer au service des seigneurs pauvres jusqu'à son dernier 
jour^ le maître alors s'enquérait de lui s'il était marié ou 
fiancé, s'il avait promis d'entrer dans un autre ordre, et s'il 
avait des dettes. Car tant qu'un de ces empêchements 
subsistait, on ne pouvait faire droit à sa requête, à moins 
d'une autorisation de son évèque ou de son monastère *. 
Ces précautions étaient fort sages. Gui ne voulait accepter 
que des personnes absolument libres de tout lien antérieur, 
capables par conséquent de se consacrer entièrement à la 
tâche déjà assez lourde qui leur était destinée, sans que le 
siècle qu'ils quittaient pût leur adresser aucun reproche. 



' Régula, c. LXX. 
Ibid.,c LXX, LXIII. 



PERSONNEL DE l'ORDRE 87 

Lorsqu'il avait satisfait à ces conditions préliminaires, le 
postulant était reçu à la maison. Pendant un an au moins, 
il vivait soumis à la règle, partageant les occupations des 
frères, et s'exerçant au service des pauvres et des malades. 
Si, au bout de ce temps de probation et de noviciat, sa 
vocation paraissait bien assurée, on l'admettait à prononcer 
ses vœux. L'époque de l'assemblée générale étant arrivée, 
on lui faisait lecture de la règle et des constitutions dans 
leurs détails ; cette lecture se terminait par ces paroles : 
« Voilà la loi sous laquelle vous voulez vivre. » Le novice, 
après avoir promis de l'observer, était reçu définitivement 
dans l'Ordre et admis à faire profession *. 

Voici la formule de ses vœux : « Moi, N., je m'offre et me 
donne à Dieu, à la Bienheureuse Marie, au Saint-Esprit et à 
nos seigneurs les malades, pour être leur serviteur tous les 
jours de ma vie. Je promets, avec le secours de Dieu, de 
garder la chasteté, de vivre sans bien propre. » Puis s'adres- 
sant au recteur : « Je promets de garder l'obéissance à 
vous et à vos successeurs, et de garder fidèlement les biens 
des pauvres. Que Dieu et ces saints Evangiles me soient en 
aide *. » 

Il se levait alors et s'avançait vers l'autel, ayant dans 
les mains le livre des Evangiles, sur lesquels il venait de 
prononcer ses vœux, et le grand maître récitait la formule 
d'agrégation, formule admirable, dans laquelle se révèle 
la tendresse du cœur de Gui ; car ce n'est pas seulement 
l'élu qui participe aux privilèges de l'Ordre ; l'âme de son 
père et de sa mère est associée aux suffrages communs * : 

« Suivant la promesse que vous venez de faire à Dieu, à 
la B. Marie, au Saint-Esprit et à nos seigneurs les malades, 
nous vous recevons dans notre ordre, et nous faisons 



' Reguldy c. LXXI. 

* Ibid., c. II. — Voyez l'acte de profession cité aux PP. fUsHlf,, n« VI. 

• Mgr Paulinier, p. 5;. 



88 REGIME IHTÉRIEUR DE L^ORDRB 

participer Tâme de votre x>ëre et de votre mère aux mérites 
acquis par les messes, offices, jeûnes, prières, aumônes et 
autres bonnes-œuvres qui se font et se feront à perpétuité 
dans la maison du Saint-Esprit ; daig^ne Dieu nous accorder 
la récompense que chacun de nous espère I La maison du 
Saint-Esprit prend l'engagement de vous donner le vivre 
et le vêtement ^ » 

A ce moment le prieur ou le maftre revêtaient le nouveau 
frère du manteau et de la croix, insigne de TOrdre, en lui 
disant : « Que par ce signe de la croix, le Christ éloigne de 
vous les embûches de Tesprit du mal et vous introduise 
dans son royaume étemel '. » 

Tous les frères se prosternaient alors et priaient pour 
Télu. Le prieur ou un prêtre entonnait un psaimie que tous 
chantaient, et cette touchante cérémonie s'achevait i>ar trois 
oraisons, où Ton appelait sur le nouveau profès toutes les 
grâces du S. Esprit *. 

A partir de ce moment, le frère appartenait à l'Ordre 
d'une manière irrévocable. 

Innocent III avait voulu que nul frère ne put sortir de 
l'ordre du Saint-Esprit, sinon pour embrasser une règle 
plus sévère *. 

Et même dans ce cas, il ne pouvait sortir de l'Ordre sans 
l'autorisation du grand maitre, sous peine d'excommuni- 
cation *. 

Par contre, les Souverains Pontifes, afin de montrer 
l'estime dans laquelle ils tenaient l'ordre du Saint-Esprit, 
favorisèrent son accroissement en enlevant tous les obstacles 
qui auraient pu arrêter les religieux des autres ordres, 
désireux de se consacrer au service des malades. 



^ Régula, c. III. 
•Ibid. 

• Ibid. — Mgr Paulinier, p. $4. 

' Innoc. III, ConsL II {Diplom,, I» p. 4) — Régula, c. LXXII. 

• Ibid. 



PERSONNEL DE l'oRDRE 89 

C'est ainsi qu'Alexandre IV, voyant que les frères du 
Saint-Esprit ne pouvaient suffire au service de toutes les 
maisons qui leur étaient offertes, leur permit de recevoir 
les profès de tous ordres, à l'exception des seuls chartreux, 
et cela sans aucune réclamation des supérieurs *. 

CLERCS. — L'Ordre comprenait deux catégories de frères : 
les la!cs et les clercs ; mais on se demande s'il en fut ainsi 
dès l'origine. Mgr Paulinier dit formellement que l'ordre 
du Saint-Esprit, à son origine, n'admettait que des frères 
laïcs ; et il fonde son opinion sur ce que, dans sa première 
bulle. Innocent III ordonne aux évèques des lieux où 
seraient bâties des maisons de l'Ordre, d'approuver les prê- 
tres qui leur seraient présentés pour desservir ces hôpitaux. 
Ces prêtres, du reste, demeuraient soumis à la correction et 
révocables à la volonté des évêques *. 

Ce texte prouve bien en effet que l'Ordre n'avait pas dans 
son sein, dès l'origine, des clercs en assez grand nombre 
pour subvenir aux nécessités spirituelles de toutes les 
nouvelles fondations ; mais c'est en forcer le sens, croyons- 
nous, que de s'en servir pour prouver qu'à l'origine, l'Ordre 
était composé seulement de laïcs. 

Ce qui nous porte à adopter une conclusion différente de 
celle de notre savant prédécesseur, c'est que la seconde 
bulle du même pape, donnée, on le sait, le lendemain de la 
première, indique la présence dans l'Ordre de profès élevés 
àlacléricature: « Vous demanderez à vos évêques diocésains 
l'ordination de ceux de vos clercs qui seront jugés dignes 
d'être appelés aux ordres sacrés *. » C'est la formule ordinaire 
des bulles pontificales octroyées aux ordres de clercs ; par 
conséquent, si l'ordre du Saint-Esprit était considéré comme 



^ CoiuL //, 21 juillet 12^6 (Diplom.f I, p. 29}. 

' Innoc. III, Const i, aux Pièces fiuHf,, n» II. ~ Mgr Paulinier, p. 48. 

' Innoc, m, Cb«it //» aux PUcis jast,, n^UÎ. 



93 REGUfC RTEUEUm DC L (MIOCK 

tel à Rome, ce ne pouvait être qu'à la suhe des déclaratioiis 
faites par le fondateur. lors de sa demande d*approbatioo. 
yigr Paulinier ajoute que TOrdre était devenu mixte en 
1204. après la publication de la balle d'Innocent III de 
cette même année. Dans cette bulle, le pape, en donnant 
aux frères du Saint-Esprit son hôpital de Sainte-Marie 
in Saxia. statua qu'il j aurait toujours dans cet hôpital au 
moins quatre frères profes. engragés dans les ordres, afin 
dV célébrer le St-Sacrifice et de pourvoir àTadministration 
des sacrements et au chant de l'office. Mais comment 
aurait-il pu exiger cette condition, si l'Ordre n^avait pas, 
auparavant déjà, admis les clercs dans son sein ? 

Gui parait-ètre demeuré toute sa vie dans Tétat séculier ; 
probablement aussi ses premiers compagnons furent de 
simples laïcs : mais nous avons la conviction que le pieux 
fondateur n'avait nullement l'intention d'exclure les clercs 
de son ordre, et qu'il dut recevoir avec bonheur les premiers 
qui s*o£Frirent à lui : il ne fit qu'imiter en cela les grands 
ordres hospitaliers et militaires, alors composés tous des 
deux éléments. 

Quoiqu'il en soit de la question d'orig^ine, il est du moins 
certain qu*à partir de Tannée 1 198, l'Ordre comprenait un 
certain nombre de prêtres, et que par conséquent, sa Consti- 
tution n'éprouva pas depuis de changement à cet égard. 

La règle définit les fonctions des clercs et assigne leur 
rang, ainsi que nous le verrons bientôt. La dignité sacer- 
dotale, dont ils étaient revêtus, leur assurait de hautes 
prérogatives ; s'ils se rendaient coupables, leur correction 
n'appartenait point au grand maître laïque, mais seulement 
au cardinal protecteur. Pour eux les pénalités perdaient, 
en l'honneur du sacerdoce, ce qu'elles auraient pu avoir 
d'avilissant. 

SOEURS. — Gui ne se contenta pas de lever pour le service 
des pauvres et des malades une nombreuse armée de frères ; 



PERSONNEL DE L ORDRE CI 

le premier à son époque, il eut la pensée féconde de faire 
appel au dévouement féminin, de restaurer, en lui rendant 
une existence canonique et officielle, Tantique institution 
des diaconesses de la primitive Eglise. Comprenant « la 
nécessité de l'intervention de la femme, pour donner à la 
charité sa toute puissance, il adjoignit donc aux frères du 
Saint-Esppt des religieuses chargées de donner des soins 
maternels aux pauvres, aux malades et aux petits enfants '. » 

Nous verrons dans la suite de cette histoire comment ce 
concours, qui pouvait au XIII' siècle paraître secondaire, 
gagna peu à peu du terrain, par suite de la désertion des 
hommes, jusqu'à suppléer à peu près entièrement à leur 
intervention. Sous la puissante impulsion de saint Vincent 
de Paul, la transformation s'acheva et l'élément 'féminin 
devint Tunique ressource des hôpitaux et maisons de charité 
modernes. Si l'ordre du Saint-Esprit n'a pas péri entière- 
ment au siècle dernier, c'est grâce aux sœurs ; aux sœurs 
aussi revient l'honneur d'avoir rallumé dans notre siècle la 
flamme divine de la charité, déposée dans leur ordre par 
Gui, son fondateur. 

Les sœurs suivaient la même règle que les frères • ; elles 
étaient soumises au même régime disciplinaire ; le noviciat, 
la profession, les occupations, tout était réglé pour elles 
d'une manière identique. Chaque semaine elles tenaient 
chapitre à part, sous la présidence du recteur, assisté d'un 
prêtre et de deux frères '. Elles récitaient le grand office 
selon l'usage de l'Eglise romaine. Elles suivaient donc la 
règle des chanoinesses régulières, de même que les frères 
avaient emprunté leurs observances au grand ordre cano- 
nique ; et ainsi elles se rattachaient intimement aux diaco- 
nesses des hôpitaux de l'époque primitive du christianisme. 



* Mgr Paulînier, p. 69. 

* Régula, c. XCVII. 
» Ibid., c. XXX. 



92 RÉGIME INTÉRIEUR DE L*ORDRE 

Les sœurs du Saint-Esprit paraissent avoir formé, à une 
certaine époque, des monastères cloîtrés sans exercice de 
rhospitalité ; nous trouvons des traces de cette institution 
en Espagne et en Italie, aux XV* et XVI* siècles. Mais ce 
n'était là qu'une exception. 

Nous parlerons de rétablissement de ces monastères 
dans le chapitre consacré à Thistoire de TOrdre au XV* 
siècle. 

OBLATS. — Les oblats étaient des enfants que leurs parents 
offraient aux monastères pour y être élevés et s'engager 
ensuite au service de Dieu par les vœux de religion. Ils 
passaient toute leur vie dans la maison qui les avait reçus ; 
cependant, suivant les temps et les lieux, ils étaient libres, 
arrivés à Tâge de discrétion, de quitter le monastère et de 
rentrer dans le monde. 

L'ordre du Saint-Esprit eut ses oblats, à l'exemple des 
autres ordres religieux. Gui a consacré un chapitre de la 
règle au formulaire de leur réception. Les parents qui vou- 
laient offrir leur enfant à Dieu dans un hôpital du Saint- 
Esprit, le conduisaient à l'église, devant l'autel ; là, entou- 
rant ses mains de la nappe de l'autel, selon le cérémonial 
bénédictin * , en signe de consécration à Dieu, ils le remet- 
taient aux mains du prieur, qui récitait sur lui cette belle 
prière : Seigneur Dieu tout*puissant, qui avez daigné, par 
une vocation sainte, choisir votre créature pour votre 
auguste service, accordez à cet enfant une vie honnête, une 
conduite réglée, une prière puissante, afin qu'il se rende 
digne de la société des saints *. 

Dès lors ces enfants faisaient partie de la communauté. 



* Voy. des formules d*oblaUons d*enfants dans Mabillon, AnaUcta, éd. in- 
folio, p. i$$-i$8 ; de Rozière, Rtcueil général dit formules^ t. II, p. 699, n« 
S $9 (Zeumer, p. $70) ; L. Delisle, Littérature latine et histoire du mo/en-â^e, 
1890, p. 10. 

■ Régula, c. V. 



PERSONNEL DE l'ORDRE 93 

et, dès qu'ils avaient atteint un âge suffisant, ils étaient 
admis à faire leur noviciat et à prononcer les vœux, comme 
frères ou sœurs de l'Ordre. 

Outre ces enfants, beaucoup des orphelins recueillis par 
les frères, ou donnés par des parents pauvres, passaient au 
rang d'oblats et entraient par les vœux dans la commu- 
nauté. 

Non seulement les enfants, mais aussi les personnes de 
tout âge, pouvaient se présenter comme oblats dans les 
hôpitaux, si elles n'étaient pas retenues dans le monde par 
les liens du mariage ^ L'oblat ou le donné d'âge mûr était 
reçu avec les mêmes solennités que les enfants • ; il s'enga- 
geait à suivre en tout la règle et les usages de la maison, et 
promettait d'obéir aux supérieurs et de partager les occu- 
pations des frères ; moyennant quoi la maison le prenait à 
sa charge. Tantôt l'oblat se donnait pour toute sa vie et 
avec tous ses biens, tantôt il ne promettait que pour un 
temps déterminé sa résidence et ses services •, et alors il se 
réservait l'administration de sa fortune et s'engageait à 
une redevance annuelle. On trouve des exemples de ces 
diverses sortes d'oblats dans l'ordre du Saint-Esprit *. 

Bien plus, par une dérogation aux lois, qui montre bien 
l'affection des Souverains Pontifes pour l'Ordre, il était 
permis aux clercs de servir pour un an ou deux dans les 
hôpitaux, sans perdre pour autant leurs bénéfices ; les 
prélats devaient même les encourager à ces actes de cha- 



« Ibid,,c. Lxni. 

* Oratio : concède huicfamulo vel puero {Ibid,, c. V). 
» Voir Ducangc, V© OblatL 

* Offrande d'oblat à la maison du Saint-Esprit de Poligny (1296) : «Je Hen- 
riette de Poloigney... désirant lé salut et le remède de m'arme, me suis 
rendue et donnée m'arme et mon cors à Deu, et à la maison du Saint Esprit 
de Besançon, cest à sçavoir à la maison de Poloigney, et ai donné et octroyé 
por moi et por les miens en pure donacion entre vis et en agmone per- 
pétuai à Deu et à la maison du Saint Esprit de Poloigney ces moie choses 
ci après dites et spécifiées.... » Chevalier, Histoire de Poligny^ 1769. Il, p. 
666. Henriette de Poligny mourut en i|a8, d'après le nécrologe de Besançon. 



94 KÉGOB onâuBcm k l* 

rite '. Ils derenaient alors de Téritafales oblats à temps. 



rerêtaieDt habitoelleiDent le n m u ni r de la 
beaucoup, ao bout d on certain temps, faisaient profession. 
Ils cédaient la préséance aux firëtes, quand fls ne portaient 
pas lliabit rehgieajL K 

SElHf fTEUas. — On voit de quel secours devaient être aux 
maisons ces oUats. qui partageaient les labeurs et la charité 
des frères. Quand ils manquaient, on employait des servi- 
teurs i gages, qui suppléaient au petit nombre des firëres et 
des sceurs. Ils étaient sous la surveillance du camérier, et 
recevaient de lui leur besogne et leur salaire. 

Les secours de ces hommes à gages étaient surtout 
nécessaires dans les grranges et exploitations agricoles, 
dépendances nécessaires, dont la charité des bienfaiteurs 
avait pourvu tous les hôpitaux. 

COSTUME ET INSIGNES. —Au moment où Gui fondait son 
institut, le costume religieux et ecclésiastique ne différait 
pas sensiblement du costume laïque. La robe, appelée aussi 
gonne ou cotte, et par dessus, la chape garnie de son 
chaperon, ou le manteau, de proportions moins amples, 
constituaient les pièces principales de ThabiUement des 
deux sexes. Les grands ordres seuls avaient adopté une 
couleur unique pour les vêtements : le noir appartenait aux 
Bénédictins, le blanc aux Chartreux, aux Prémontrés, 
aux Augustins '. Quant au clergé séculier, les canons des 
conciles, tout en lui recommandant la modestie dans Thabil- 
lement, n'imposaient point une couleur unique ; aussi les 
monuments du moyen-âge montrent-ils les ecclésiastiques 
vêtus indifféremment de couleurs variées, parmi lesquelles 



* Nicol. IV, Cous/. I (Diplon., I, p. n). 

* Rtgula, c. LXXIX. 

* Qoicherat, Hùtoire du coUnmc en France, p. I68, }i8. 



PERSONNEL DB L ORDRB Çj 

dominent le bleu céleste, le violet et le rouge. L'idée de 
réduire le clergé à l'usage exclusif du noir appartient à 
S. Charles Borromée; adoptée immédiatement par toute 
l'Italie (1565), cette couleur ne se répandit en France qu'à 
partir de 1583 '. 

Gui choisit pour son ordre la couleur bleue, la moins 
éclatante de celles qui étaient alors en usage chez les clercs. 
L'habillement ordinaire de ses religieux consistait en une 
soutane ou cotte bleu-céleste, puis en un manteau ou une 
chape noire avec capuce de même couleur. C'est ainsi que 
les miniatures du beau manuscrit de la règle représentent 
les frères de l'hôpital de Sainte-Marie in Saxia. 




Fig. I. — D'aprè» le ms. de 



De même aussi les Dalles funéraires de deux recteurs de 
Dijon au XIV* siècle, frère Pierre d'Auxonne ( 1 335) et frère 
Guillaume de Pouvant {1388), les représentent le premier, 
vêtu du manteau noir, retenu sur la poitrine par une patte, 
et le second, de la chape et du capuce '. Ce costume se 
maintint sans changement notable jusqu'au XVI» siècle. 



' Ibid. p. 4)1- 

* Voir les desiini de ces Daltei lumulaires dans les mss. de Dom Calmelet. 
nODl donnons ici une reproduction de la première. Les sceaux de Trère Jean, 
dixième grand maître 11190) et de frère Michel dcCe9ii{I!4Û)lesrepr£senteal 
veiui de la chape et du capuce. [PI. VII et VIII). 



9» 



RtelHB IHTâRlBUR DB L'ORDRB 



car dans le manuscrit de l'hôpital de Dijon, dont nous avons 
déjà parlé, on retrouve la robe bleue et le manteau ncnr, 
retenu au cou par deux boutons, et quelquefois le capuce 
retombant sur les épaules '. 




Fig. 1. — DiUe lumuUire de frire Pierre d'Auxonna, XIV >. 

Les sœurs avaient comme les frères la robe bleue et le 
manteau, noir, et sur la tète une guimpe et un voile blanc '. 

A partir de la réforme opérée par S. Charles Borromée, 
les religieux du Saint-Esprit adoptèrent le costume 
ecclésiastique ordinaire, de couleur noire. Au chœur, ils 
étaient vêtus d'un surplis, qui dans la saison d'hiver dispa- 
raissait sous une grande cape de drap noir, doublée d'étoffe 



' Voir cet miniMares dans la Notice de Pei^ot et aux pt. III el IV dti 
préMnt ouvrage. 
' V<rir la pi. IV. 



- ^ •» • 



ArrOR. LKNOX 
TILDEN FOUNi^AllONS 



PERSONNEL DE l'oRDRE 97 

bleue, avec camâil à boutons et retroussis bleus. En été, 
la cape était remplacée par une aumusse en drap noir, 
doublée de bleu céleste et bordée de fourrure noire, qui se 
portait sur le bras *. Les religieuses prirent aussi la couleur 
noire pour la robe et le manteau ; elles portaient un grand 
voile noir à Téglise et au dehors ; à l'intérieur de la 
maison elles prenaient un voile blanc *. 

Les ordres hospitaliers et militaires avaient tous pris 
comme signe dîstinctif, à l'exemple des Croisés, une croix 
de forme et de couleur variée, cousue sur les habits. Gui 
adopta pour son ordre une croix de toile blanche, à double 
croisillon, dont les extrémités étaient élargies en forme de 
croix pattée. Tous ses disciples portaient la croix double, 
cousue au côté gauche de leur robe et de leur manteau •. 
Au moment où il prononçait ses vœux, le nouveau profès 
recevait le manteau noir des mains du recteur , qui lui disait, 
en lui montrant la croix : « Que par ce signe s'éloigne de 
vous tout mal, et que le Christ vous conduise au royaume 
éternel *. » La signification et le symbolisme de la croix 
du Saint-Esprit sont expliqués d'une manière analogue dans 
cet autre passage de la règle : « Que les frères portent le 
signe de la croix sur leurs capes et leurs manteaux, afin que 
par ce signe Dieu nous garde dans nos actions, nous 
maintienne dans l'obéissance et défende nos âmes et nos 
corps contre la puissance du démon, dans cette vie et dans 

l'autre *. 

On ne voit pas que le fondateur ait attaché une signifi- 
cation spéciale à la forme particulière de la croix de l'Ordre. 



• p. Hélyot, Histoire des ordres monastiques, II, p. 216-217. -^ A* .Castan, 
Notici, V^ partie, page 160. 

• Ibid, - Voir les pi. V-VI. 

• Reiula, c. LVII. 

• Ibid.j c. III. 

• nid., c. LVII. 

7 



98 RéciME INTERIEUR DE l'ORDRE 

Mais plus tard, lorsqu'on en vînt à pratiquer une échancrure 
aux extrémités des croisillons, la croix forma douze 
branches, auxquelles fut attribué un sens propre. Melchîor 
de la Vallée, dans le cours de sa visite de Thôpital de 
Dijon, en 1596, l'expliquait ainsi aux frères: « La croix 
double signifie le mystère de la Très-Sainte Trinité, parce 
que ses trois traverses ne forment qu'une croix unique. Les 
douze pointes nous représentent les douze apôtres, qui 
ont prêché la croix par toute la terre. Certains tiennent que 
la croix figurée par la première branche est celle même du 
Sauveur, tandis que la seconde est celle que tout chrétien 
doit porter, en souffrant avec patience les misères de ce 

monde Cette croix est double aussi, parce que les 

membres de notre ordre s'imposent un double fardeau, qui 
est de travailler à leur propre salut, et de s'employer au 
soulagement de leurs semblables *. » 

La croix à double croisillon formait la pièce essentielle 
des armoiries de l'Ordre, et figurait à ce titre sur le sceau 
de ses maisons et de leurs officiers. Nous avons recueilli, 
dans les archives des hôpitaux de Rome, Besançon et 
Dijon, un bon nombre de ces sceaux, dont nous avons 
réuni les types principaux dans les planches VII et VIII. Le 
grand et le petit sceau de la maison-mère de Sainte-Marie 
in Saxia présentent la croix double, surmontée d'un 
Saint-Esprit, en forme de colombe. Dans celui du chapitre 
général, on voyait, outre la croix et la colombe, l'effigie des 
douze apôtres. On a un exemple de la présence de la 
colombe sur le sceau de Rome dès l'année 1290*. Ce 



* Ms. de la Visite, f» 11 ç v», Arch. de Besançon, ch. II, n» i, botte 14. 

Les prétendus chevaliers de TOrdre furent les auteurs, au XVII* siècle, d*une 
nouvelle interprétation ; pour eux, qui prétendaient remonter à S. Lazare et à 
sainte Marthe, la branche principale de la croix figurait Jésus-Christ ou Lazare, 
et les traverses, Marthe et Marie, c les hôtesses de Jésus-Christ. > Voir 
Hélyot, II, p. 198. — Mgr Barbier de Montault, La croix à double croiûUon, 
dans le Bulletin de la Soc. Archéol. de Tarn-et-Garonne, i882, p. 141. 

' Peignot, Histoire de la fondation, p. 76. 



PERSONNEL DE L^ORDRB 99 

symbole ne se trouve pas toujours sur ceux des autres 
maisons. Le sceau de Besançon porte la croix sans autre 
emblème ; mais son sceau des indulgences possède la 
colombe. De même pour Dijon, qui offre en outre les têtes 
de S. Pierre et de S. Paul au pied de la croix. Certaines 
maisons ajoutaient aux insignes de TOrdre les armes de 
leur fondateur, comme Fouvent, ou d'autres ornements, 
comme Toul et Tonnerre *. 

Il était d'usage, dans les ordres religieux, que leurs 
membres unissent à leurs armes propres celles de leur 
ordre. Les recteurs et autres dignitaires de Tordre du 
Saint-Esprit suivirent cet exemple, en ajoutant à leur 
blason la double croix, ainsi que nous Tont montré de 
nombreux sceaux. 

Les armes de l'Ordre étaient: d'azur à une croix 
d'argent à douje pointes. D'après M. Castan, le champ 
d'azur aurait fait place, au XVc siècle, à un champ de sable 
et c'est aussi dans le même temps que la croix aurait été 
surmontée d'un Saint-Esprit d'argent en champ d'or sur 
une nuée d'azur ». Cette double assertion nous parait trop 
absolue, car d'une part l'hôpital romain plaçait la colombe 
sur son sceau dès l'année 1290, ainsi que nous venons de 
le dire, et ce symbole manquait sur ceux de plusieurs 
autres maisons, dans les XVI' et XVII' siècles ; d'autre 
part, les maisons de Franche-Comté, mentionnées dans 



* Ajoutons que certaines maisons ont uni quelquefois à leurs propres ar- 
moiries celles de TEgiisc romaine ; c*était apparemment pour indiquer leur 
dépendance immédiate du maître romain, à l'exclusion de celui de Montpellier. 
L'écu peint en tête du ms. des miniatures de Dijon porte : parti au premier 
de gueules à deux clefs d'argent en sautoir, qui est du pape, et au second, 
d*azur à la croix d'argent qui est de l'Ordre (Peignot, p. 18). ^ Le môme 
écu se voit encore sur un chapiteau du réfectoire de l'hôpital de Besançon 
(Guénard, Besançon^ p. 12^). 

* Notice sur Vhôpital de Besançon, I, p. 160. L*honorable érudit cite à ce pro- 
pos le P. Hélyot; mais cet écrivain donne au blason de l'Ordre un champ 
de sable, sans paraître soupçonner qu'il en ait jamais été autrement (V. t. II, 
p. 218). 



8<< î 4 -y ^ 



100 RfCIME HCTERIEUR DE LOMHtE 

TArmorial de d'Hozier, avaient conservé la croix d^ar- 
gent sur champ d'azur '. 



n. OCCUPATIONS ET EMPLOIS 



Nous venons de faire connaissance avec le personnel de 
rOrdre ; tous ses membres, depuis le grand maître jus- 
qu'au plus humble des serviteurs, ont passé devant nos 
yeux. Nous allons maintenant voir à Tœuvre cette grande 



* C'est ici le lieo de donner, comme appendice au présent article, la des- 
cription succincte des sceaux fibres dans le» planches VII et VIll. 

FLâXcav yn 

I. Hôpital Sainte-Marie in Saxia. Grand sceau : SANCTI SPVS • DE. 

SAXIA IN'R* — Croix double à branches non pattées, surmontée 
d'un Saint-Esprit en forme de colombe.— XVI* siècle. Arckipts de Vkôp. 
de Besançon, casier C, botte 1, chap. 8. 

II. Chapitre de Thôpital Sainte-Marie in Saxia : S -CAPITVLI- HOSPI- 

TALIS- SANCTI SPVS- IN- SAXIA DE VRBE. — Croix double 
à branches presque droites, au pied fiché, surmontée d'un Saint-Es- 
prit et entourée des effigies des douze apôtres. — XVI* siècle. Ibid. 
cas. C. Botte I, chap. 8. 

III. Besançon. Sceau des indulgences : S • INDVLGENCIARVM* SANCTI 

SPVS BISVNTlT?-— Croix double, pattée, surmontée d*un Saint- 
Esprit. — XV* siècle. Ibid. cas. C Boite I, chap. i. 

IV. Sceau de frère Jean, lo' Grand maître (1290) : •{• S* FRA- lOH • PRI • 

S * M ' RIPE ' SASSI. — Dans la partie supérieure, le couronnement 
de Notre-Dame; dans la partie inférieure, frère Jean, agenouillé les 
mains jointes, sous une arcade trilobée.— 0>//. S^^mVr, n* 5. Matrice. 
Musée de Nîmes. 

V. Hôpital Sainte-Marie in Saxia. Petit sceau : f S • SPIRITVS • IN • 

SAXIA • D • VRBE. — En chef un Saint-Esprit nimbé; en pointe une 
croix pattée à double croisillon. — XVI* siècle. Même coll., n* 379. 
Matrice. 

VI. Sceau de frère Michel de Cesis, visiteur général (im^) •* ["h S - F1RA * 

MICHL • P-SCl- SP es- D.... PREGNA....? - Vierge-mère, 
accompagnée de la croix du Saint-Esprit surmontée de deux étoiles 
en pal, et d'une tige d'arbrisseau; en pointe, frère Michel à genoux. 
— XIV* siècle. — Arch. de Besançon, cas. C. Botte I, chap. i. 

PLANCRB TIII 

I. Besançon . Légende illisible sur l'empreinte en papier. — Ange tenant 
un écu, sur lequel est figurée la croix double. — XV* ou XVI* siècle. 
Arch. de Vhôp. de Besançon, Cas. C. Botte ^ 



OCCUPATIONS ET EMPLOIS ICI 

et belle association de dévouements, dont les forces réunies 
dans un commun effort, produisirent des résultats si magni- 
fiques. Il suffit pour cela de les suivre dans l'emploi si bien 
réglé de leurs journées : c'est le moyen de saisir sur le vif 
toutes les particularités de leur existence et du régime in- 
térieur de nos maisons. 

OFFICE. — Dès l'aurore, selon Tusage monastique, la 
cloche appelle la communauté à l'église, pour l'office cano- 
nial. Le plus grand silence est exigé dans le lieu saint, 
afin de ne point troubler l'office. On se dit à V oreille ce 
qu'il est nécessaire et urgent de faire connaître; toute 
infraction est punie de la privation de vin *. 



II. Besançon. Petit sceau : SIGILLV • S • SPIRITVS.... — Croix de 
l'Ordre pattée. — XVI» siècle. — Ibid, Botte I, chap. 5. 

m. Tonnerre : SIGILLV • DOMVS • SANCTI (quintefcuille) SPIRITVS- 
DE-TORNODORO. — Croix double, entourée de deux branches 
entrelacées, et accompagnée de deux quintefeuilles, un en chef et 
l'autre en pointe. - XV« siècle. Bibl. de Nimes, n» 98. IJ791. Recueil 
Séguier, ms., PI. III, n» 11. 

IV. Sceau d'un vicaire général de l'Ordre : •{- SIGILLVM • F- VlC • OR • 

S • S. — Croix de l'Ordre pattée. — XVI» siècle. — Coll. Séguicr, 
n» ji. Matrice. 

V. Dijon : t SIGL : SCTI : SPVS : DE : DIVIONE : LINGONEN : DIO- 

CESIS. — Croix du Saint-Esprit, accostée en pointe des têtes de S. 
Pierre et de S. Paul, un Saint-Esprit nimbé en chef. — XVI» siècle. 

— Arch, hôp, de Dijon, C«" 8. 

VI. Fouvent : t S • HOSPITALIS • SCTl • SPIRITVS • FONTISVENNE. 

— Croix double, accompagnée en pointe de deux quintefeuilles, qui 
sont de Vergy. — XVI» siècle. Diaprés D. Calmelet, ms. de l'hôp. de 
Dijon, f» 26. 

VII. Toul : [f] SIGILLV • HOSPITAfLIS] SPIRITVS • TVLLEN — 

A la partie supérieure, tète du Sauveur, à nimbe crucifère ; à la partie 
inférieure, sur un écusson, la croix du Saint-Esprit, accostée en chef 
de deux étoiles. — XV« siècle. Ibid,, cas. C, Boîte j. 

VIII. Frère Jacques, ij« grand maître (IJ26-IJ48) : •{• S • FRATIS • lACOBI 

— Croix double, fortement pattée, surmontée d'un Saint-Esprit et 
accompagnée en chef d'un croissant et d*uue étoile. —XIV» siècle. 
Coll. Séguiery n» 74. Matrice. 

IX. Besançon. Sceau des indulgences : SIGILLVM • INDULGENTIA- 

RVM BISVNTIN. — Croix du Saint-Esprit sur un écu suspendu 

à un estoc. — XVI' siècle. Arch, hôp, de Besançon^ cas. C. Botte I, 
chap. 12. 

• Régula, c.XXXUl. 



I02 REGIME INTÉRIEUR DE L'ORDRE 

A la chapelle, les clercs se placent après le maître et le 
prieur, selon leur rang d'ordination ; les frères laïques 
viennent ensuite, puis les oblats qui ne portent pas le cos- 
tume de TOrdre. Les clercs chantent l'office en entier et sui- 
vant la coutume de la cour romaine ^ Ils se lèvent la nuit 
pour le chant des matines, à Theure ou le font les autres 
religieux de la ville ■. A l'office du jour ils ajoutent encore 
celui de la Sainte- Vierge •. Le matin, les heures du jour et 
de la Vierge sont suivies de la messe conventuelle, célé- 
brée par chacun des prêtres, à tour de rôle. Lorsque les 
clercs sont en nombre suffisant, deux d'entre eux remplis- 
sent l'office de diacre et de sous-diacre aux côtés du célé- 
brant *. 

L'office du soir se compose de vêpres et de complies. Les 
frères laïques et les sœurs s'acquittent de l'office par des 
pater. Ils en récitent chaque jour cent trente-trois. Les 
absents sont soumis à la même obligation ^ 

Le dimanche, les malades participent aussi à l'office 
divin : les prêtres et les clercs, suivis des frères et des 
sœurs, se rendent en procession dans la grande salle, et là 
on célèbre le Saint-Sacrifice, ou bien on se contente de 
chanter l'épitre et l'évangile •. 

Quand le prieur porte aux malades la sainte Eucharistie, 
il est accompagné d'un diacre ou d'un sous-diacre ; à défaut 
de ces ministres, le prieur est précédé d'un acoljrte portant 
un flambeau et une éponge avec de l'eau bénite \ 

OCCUPATIONS. — Après avoir satisfait par le chant de 



'/^w., c. xxvii. 

• Ibid., c. LXXXVIII. 
« Ibid,, c. LXXXVIU. 

• Régula, c. XIV. 

• Ibid,, c. XXXIII. 

• Ibid.,c. XIII. 
» Ibid., c. XIV. 



OCCUPATIONS ET EMPLOIS I03 

l'office à la première obligation de l'état monastique, 
chacun se rend aux occupations fixées par le recteur ou le 
camérier. Le prieur et les clercs visitent les malades, dis- 
tribuent à tous des paroles d'encouragement et de rési- 
gnation, réconcilient par le sacrement de pénitence ceux 
qui entrent dans Tasile de la charité *, administrent les 
sacrements aux mourants, donnent Tinstruction religieuse 
aux enfants et aux pauvres. 

Parmi les frères, chacun a son rôle et ses fonctions 
déterminées ; la volonté des supérieurs est regardée comme 
celle de Dieu même, et les récompenses éternelles sont la 
seule ambition et le stimulant du zèle. Les uns préparent la 
nourriture des pauvres et des malades ; les autres vaquent 
aux soins domestiques. Tous ceux dont la présence n'est 
pas indispensable à la maison sont employés à la culture du 
domaine, dont les produits sont le plus souvent la prin- 
cipale ressource de l'établissement. Lorsque les frères ne 
peuvent suffire à la tâche, des mercenaires leur sont 
adjoints. 

Le son de la cloche annonce-t-il l'heure du repas des 
pauvres et malades, tous les frères présents quittent leur 
travail et les servent comme leurs maîtres *. Ils ne pensent 
à eux-mêmes que lorsque les malades n'ont plus rien 
à désirer. Les hôtes de la maison trouvent des frères em- 
pressés à leur service. Riches ou pauvres, clercs, moines 
ou laïques, tous sont traités avec un égal dévouement *. 

Les sœurs partagent les travaux et les occupations des 
frères, sous la direction d'une supérieure ou maîtresse^ ; le 



' Régula, c. XIII. 

• Ibid. 

• IbU., c. XLIV,XLV. 

• On trouve dans les hôpitaux importants la mention de la supérieure des 
religieuses, appelée aussi rectrice ou gouvernante des pauvres. Plusieurs des 
rectrices de Besançon sont connues : sœur Huguenette, de Baume-les-Dames, 
en 1^70 ; sœur Clémence, de Marnay (141^-1428) ; sœur Guillemettc, de Gou- 
hcnans, f en 1470. — A. Castan, II, p. 200. 



104 RÉGIME INTERIEUR DE L'ORDRE 

soin des femmes et des enfants, placés autant que possible 
dans des chambres séparées, leur est dévolu tout naturel- 
lement. Les femmes en couches sont logées à part, et des 
berceaux sont toujours prêts pour recevoir les petits enfants 
exposés, ainsi que ceux qui naissent dans la maison ; ces 
enfants couchent seuls et séparés, afin quMl ne puisse leur 
arriver aucun dommage *. Les sœurs sont pour ces pauvres 
êtres de secondes mères ; elles leur distribuent la nourriture 
et le vêtement selon les ressources de la maison *. 

Des nourrices à gages habitent Thôpital; mais lorsque 
les nourrissons deviennent trop nombreux, le précepteur 
les confie à des femmes du voisinage *. 

Orphelins nés de parents légitimes et pauvres, « enfants 
renyés de père et de mère S » fruits innocents de la débauche 
et du libertinage, déposés à la porte de Téglise et dans la 
crèche de pierre placée à l'entrée de Thôpital, ou abandon- 
nés surjla voie publique, tous sont reçus avec la même 
charité. 

Cette belle œuvre acquiert même une telle importance, 
qu'elle finit par être la seule destination des maisons du 
Saint-Esprit, dans les villes qui voient s'élever d'autres 
hôpitaux ^ A mesure que ces enfants grandissent sous 
l'œil vigilant du recteur •, leur éducation vient réclamer 
de nouveaux soins ; il faut les instruire des vérités et des 
devoirs de la religion, sous peine de les voir retomber dans 
les ignominies de leur origine, lorsqu'ils seront rendus à 
leur liberté. Les garçons sont séparés des jeunes filles. On 
leur apprend, dans la maison même, divers métiers qui les 
rendront capables de gagner honnêtement leur subsis- 



* Régula f c. LIX. 
^ Ibid.,c. XLI. 

* Histoires de Gray, Besançon, Pont-Saint-Esprit, etc. 
' Not, sur V hôpital de Gray, p. 17. 

* On constate ce fait, dès ie XVi« siècle, à Dijon, Besançon, Dole, Gray, etc. 

* Régula, c. LXI. 



OCCUPATIONS ET EMPLOIS lOÇ 

tance *, ou bien ils sont placés en apprentissage chez des 
maîtres habiles et de mœurs éprouvées *. D'autres, les plus 
privilégiés, sont admis dans les collèges comme boursiers; 
c'est ainsi que l'hôpital de Paris a droit à une bourse au 
collège de Navarre, et à huit places au collège de Montaigu'. 
Par une faveur toute spéciale, les Souverains Pontifes 
dérogent en leur faveur aux règles du Droit-Canon ; pour 
achever l'œuvre de leur réhabilitation sociale, ils ouvrent 
à ces jeunes gens les portes du sanctuaire et les déclarent 
aptes à recevoir les ordres sacrés *. 

Quant aux jeunes filles, elles demeurent auprès des 
sœurs, les aident aux soins domestiques dans la mesure de 
leurs forces, et sont peu à peu initiées aux occupations et 
aux connaissances qui conviennent à leur sexe. Si elles en 
ont le goût, on leur ménage un honnête établissement *, et 
à leur mariage elles reçoivent un trousseau et une modeste 
dot •. Quand, au contraire, elles désirent s'enrôler pour la 
vie au service des pauvres, on les admet à prendre rang 
dans la communauté, sous le nom de sœurs données \ 

Les occupations des sœurs ne se bornent pas au soin des 
enfants ; elles ne répugnent pas aux plus humbles emplois 
de l'hôpital ; une fois la semaine, le mardi, elles nettoient 
la tète des infirmes, et le jeudi, elles leur lavent les pieds*. 
A elles aussi la charge de blanchir et d'entretenir le linge, 
toutes les fois qu'il en est besoin •. « Mais, prescrit le sage 



* A Rome (Saulnier, p. 185), à Pont-Saint-Esprit [Les enfants assistés au Pont- 
S.'E.t p. j2i), etc. 

'A Paris (Bibl. nat. ms 11778 (^ 80), à Besançon (marché avec un brodeur 
pour l'apprentissage d*tin enfant, en 15x0, etc.)» à Marseille, à Rome, etc. 
*Ms 11778, f» 29. 

* Saulnier, De Capite, p. 120. 
» Reguia, c. LXXVI. 

* Cette dot était à Rome de 100 florins. Saulnier ^ p. 191. 

^ Régula^ c. LXXVI ; Rome {Saulnier^ p. 190), Pont-Saint-Esprit {loc, 
cit.), Besançon, deux prises d'habit en 151^. (Cas. C. Botte j), etc. 
•Régula, c.XUl. 

* Ibid. 



I06 RÉGIME INTÉRIEUR DE l'oRDRE 

législateur, elles ne doivent laver ni la tête ni Iqs pieds des 
frères, ni ôter leurs chaussures, ni faire leurs lits. » Et il 
ajoute : Que les hommes servent les hommes, les femmes 
leurs compagnes, à moins de maladie et sur la permission 
expresse du recteur *. 

REPAS. — La règle de l'Ordre n'accorde aux frères que deux 
repas par jour *. Tous mangent ensemble, autant que pos- 
sible^etla frugalité la plus sévère préside toujours à la table. 
Nul autre que le cellerier n'a le pouvoir d'ordonner le service*. 
Les places sont assignées suivant l'année de la profession. 

Le maître ne doit point se distinguer des frères par la 
qualité des mets qui lui sont servis, mais il prend ses repas 
au milieu d'eux à la table commune, toutes les fois qu'il 
n'est pas empêché par quelque cause légitime, comme la 
présence d'hôtes étrangers *. 

Avant le repas, tous les frères disent le Benedicite et 
récitent l'oraison dominicale ; après le repas, le psaume 
Miserere et la même oraison. Les frères illettrés remplacent 
le Miserere par cinq pater *. 

La viande n'est permise que trois fois la semaine, les 
mardi, jeudi et dimanche, ainsi que le jour de Noël ; mais 
le maître modère la rigueur de ce régime en faveur des frè- 
res malades ou de tempérament maladif *. 

Les autres jours, la nourriture ne se compose que de légu- 
mes ^ 



' /J^^ii/a, c. LXXIX. 

• Ibid., c. X. 

• Ibid,,Q. VII. 

• Ibid., c. XXIII. 
^ Ibid., c. VIII. 

• Ibid., c. XII. 

^ Cétatt le régime ordinaire des communautés hospitalières. Nous le trou- 
vons décrit ainsi dans un acte de visite de Phdpital de Gonesse, en 1169: 
Dimanche, viandes fraîches ; — lundi, fèves avec du lard, et le soir des œufs 
ou du fromage ; — mardi et jeudi, comme le dimanche ; — mercredi, ven- 
dredi et samedi, des œufs selon l'ancien usage, à moins quMls ne puissent «voir 



OCCUPATIONS ET EMPLOIS IO7 



Est-il besoin d ajouter que très souvent la rigueur de ce 
régime déjà si austère était encore aggravée par la pauvreté 
des maisons et l'inépuisable charité des frères, qui se 
privaient du nécessaire, afin que leurs chers malades, « leurs 
seigneurs », comme les appelle Gui, eussent jusqu'au 
superflu. 

La lecture est faite à table par un clerc semainier, à tour 
de rôle*. Un frère laïque sert la communauté *. « A table, 
ordonne le législateur, que les frères, comme parle T Apôtre, 
mangent leur pain en silence et écoutent la lecture sans 
bruit, de sorte qu'en même temps la bouche prenne la 
nourriture et les oreilles goûtent la parole de Dieu '. » Le 
maître a la liberté de prendre la parole, lorsqu'il le juge à 
propos, mais avec discrétion et mesure *. 

Malgré leurs travaux souvent rudes et pénibles, les frères 
observent le jeûne monastique dans toute sa rigueur, 
pendant le Carême entier et depuis la Toussaint jusqu'à 
Noël. Ils jeûnent de même tous les mercredis et vendredis, 
à partir de l'Exaltation de la sainte Croix jusqu'à Pâques *. 

SOMMEIL. — La journée se termine par le chant de l'office 
de complies, et immédiatement après, clercs et laïques, 
frères et sœurs se rendent en silence à leurs dortoirs 
respectifs et séparés • : « Nous voulons que nul, frère, sœur 
ou oblat, n'ait une chambre à coucher particulière, mais 
que tous prennent leur repos en un commun dortoir \ » 
Détail curieux, le camérier, qui aurait pu prétexter de la 



mieux. » L. DelisUt Fragments de Thistoire de Goaesse (Bibl. de TEcole des 
Chartes, 1859, p. 271-274). 

' Régula, c. IX. 

• Ibid. 

• Ibid.f c. XXV. — Cnf. Reg. B. AugusUnif cap. III. 

• Ibid. 
*Ibid,,c. XI. 

• JbU., c. XVIII. 

' Jbi4., c. LXXVIII. 



c 



Io8 RÉGIME INTÉRIEUR DE l'ORDRE 

garde du trésor de la maison, pour coucher séparément, se 
voyait enlever cette excuse par la règle ; elle lui ordonnait 
en effet de placer l'argent dans un coffre auprès de son lit, 
parce que, disait-elle, « ce trésor serait plus en sûreté, étant 
confié à la garde de tous, que sous la surveillance d^un 
seul '. » 

Chacun a son lit particulier et dort revêtu d'une chemise 
de laine ou de lin, contrairement à Tusage encore général 
au XIII* siècle •. 

Le grand silence de la nuit est gardé rigoureusement 
jusqu'à Prime, et ceux qui y contreviennent par des paroles 
inutiles sont frappés de peines très sévères, « Un tel 
relâchement doit être évité avec soin, car, dit l'Apôtre, rien 
n'est propre à corrompre les bonnes mœurs, comme les 
entretiens oiseux et superflus *. » 

VOYAGES. — Personne ne doit sortir de la maison sans 
ordre du maître ou de son suppléant. Mais si un membre de 
la communauté se trouve obligé de s'absenter, il en 
demande l'autorisation et se met en route avec le compagnon 
que le maître lui a donné ; car nul ne doit aller seul dehors, 
ni même dans la ville *. Le frère en voyage prendra garde 
« que rien dans ses démarches et sa conduite ne vienne à 
malédifier, ou à offenser la sainteté de son état *. » Dans 
les endroits où se trouvent des maisons de l'Ordre, il lui est 
défendu de rien prendre hors de cette maison, à moins que 
le prélat du lieu ne le retienne à sa table * ; et là encore, 
il doit s'efforcer d'observer le plus possible un silence 
modeste \ Le frère attardé à la campagne ne peut coucher 



• /W<f.,c. XVIII. 

» Ibid., c. CIV ; I Cor. xv, H- 

• JbU.^c.XW, XVII, XCI. 

»/frW.,c. XVI;cnf. Heg. B. Augustini, c. IV. 

• Ibid., c. XV. 
'W<f.,c. XVI, 



OBLIGATIONS ET PÉNALITÉS IO9 

dans les fermes du domaine, si la maison est rapprochée, 
sous peine de perdre Thabitde la religion *. 

Telle était la vie journalière, dans les maisons de TOrdre ; 
■ vie toute de sacrifice, de pénitence, d'obéissance, de prière. 
C'est cette vie pourtant qu'embrassèrent une multitude 
d'hommes, dont l'existence se passa toute entière dans 
l'exercice de devoirs obscurs et pénibles. En l'embrassant, 
ils ne cherchaient point la gloire humaine : leur ambition 
ne visait que le ciel. Rarement leur nom dépassa les limites 
de leur hôpital. Mais à qui, mieux qu'à chacun de ces 
humbles frères, dont les jours se consumèrent lentement 
dans les travaux de la charité, peut-on appliquer la parole 
de nos Saints-Livres : « Pertansiit benefaciendo *, il a passé 
en faisant le bien ? » Nous ne saurions leur décerner un 
plus bel éloge. 



ni. OBUGATIONS IMPOSÉES AUX MEMBRES DE L'ORDRE. 

PÉNALITÉS. 



Le but charitable que s'était proposé Gui de Montpellier 
en créant son ordre, exigeait pour sa réalisation des hom- 
mes qui, détachés des sens et morts à eux-mêmes, pussent 
trouver dans un véritable esprit de sacrifice, l'inspiration 
et le courage de tous les .dévouements. Il fallait pour cela 
mettre la volonté humaine en garde contre ses propres 
défaillances ; c'est ce que fit le sage législateur en soumettant 
ses religieux aux trois vœux de religion : au vœu de pau- 
vreté, qui les détachait du monde ; au vœu d'obéissance, 
base nécessaire de toute communauté religieuse^ sans lequel 



* Régula, c. c. 

• Act, X. j8. 



IIO RÉGIME INTÉRIEUR DE L*ORDRE 

il n'y a ni ordre, ni unité d'action possibles, et qui exige du 
religieux le premier sacrifice, celui qui prépare tous les 
autres, le sacrifice de la volonté propre ; enfin le vœu de 
chasteté, particulièrement efficace pour mettre en nous 
Thomme charnel sous la dépendance de Thomme spirituel, 
créé selon l'esprit de Jésus-Christ, et que Notre-Seîgneur 
demande d'abord aux âmes qu'il appelle à la perfection. 

PAUVRETÉ. — Dans un ordre hospitalier, si la pauvreté la 
plus exacte n'est pas observée, les soins deviennent prompte- 
ment intéressés ; le religieux, au lieu de travailler en vue 
de la récompense éternelle^ se transforme en un simple 
mercenaire, et n'exerce son ministère charitable qu'en pro- 
portion des profits qu'il en attend. Gui le savait: aussi 
prit-il les précautions les plus minutieuses contre toute 
espèce de propriété particulière. La sévérité de la règle 
à cet endroit pourrait même paraître excessive, si l'on ne 
savait que de l'exacte observation de la pauvreté dépendait, 
pour une grande part, la réalisation du bien que l'Ordre 
était appelé à faire dans le monde. 

Selon la coutume des ordres monastiques, chacun rece- 
vait du caroérier ou procureur ce qui lui était nécessaire, 
c'est-à-dire ce que l'Ordre avait promis de lui fournir, le 
vivre et le vêtement. Rien de plus frugal que la table des 
hospitaliers, rien de plus vulgaire et de plus modeste que 
leur vêtement. Nul ne devait se permettre de vendre ou 
d'acheter des vêtements sans le consentement du maître ; 
un vestiaire commun les fournissait à tous : « Comme vous 
êtes nourris du même cellier, ainsi vous devez être vêtus 
du même vestiaire. » Le trangresseur se voyait enlever son 
vêtement de choix et subissait une pénitence de sept jours, 
avec jeûne au pain et à l'eau le mercredi et le vendredi *. 

Quatre jours de la même peine étaient infligés au frère ou 



* Régula, c, LIW, 



OBLIGATIONS ET PÉNALITÉS ÏIÏ 

à la sœur qui gardait sans autorisation un don, quelle que 
fût sa nature. Il n'était même permis de conserver, ni des 
eulogies, ni le plus petit cadeau fait par des parents ou des 
amis, sans Texprès consentement du maître *. 

Si on trouvait sur un frère de l'argent dont il n'avait pas 
révélé l'existence, on lui attachait son trésor au cou et on 
le conduisait ainsi à travers les salles de l'hôpital '. Chaque 
année, au chapitre général de la Pentecôte, l'excommunica- 
tion était prononcée contre les frères possédant des biens en 
propre. Même après leur aveu et leur pardon, ils étaient 
condamnés à une pénitence de sept jours, avec deux jours 
de jeûne rigoureux. La récidive était frappée d'une peine 
double ; mais à la troisième rechute, quarante jours de 
pénitence et l'interdiction complète de tout commerce avec 
les frères n'avaient pas semblé au législateur un châtiment 
exagéré *. Bien plus, il avait voulu que le châtiment pour- 
suivit, même au delà delà tombe, ceux qui avaient violé leur 
vœu de pauvreté. Celui dont la faute n'était connue qu'après 
sa mort et qui, de son vivant, n'avait pas eu le courage de 
l'avouer au recteur ou au prieur, était privé des suffrages de 
l'Eglise, et enseveli hors du cimetière de l'hôpital, comme 
un excommunié *. Le grand maître n'échappait pas à cette 
loi * ; « loi terrible, mais pleine de sagesse, établie pour 
empêcher de détourner au profit d'un homme ou d'une 
famille les biens de l'Ordre, qui étaient la vraie propriété 
des indigents*. » 

OBÉISSANCE. — Le religieux du Saint-Esprit, en faisant 
vœu d'obéissance, se soumettait librement à toutes les 



' Ibid., c. LU. 

* Ibid,, c. XXV. 

» Ibid,, c. XXXVI. 

* IbU,, XXXV. 
» JbU.y c. LX. 

* Mgr Paulinier, p. 02. 



112 RéciMB INTÉRIEUR DE L*ORDRE 

prescriptions de la règle et de Tautorité légitime. Cette 
soumission volontaire impliquait d'avance l'acceptation des 
châtiments portés par la règle. 

La moindre désobéissance était punie de sept jours de 
pénitence. Si un frère refusait d'obtempérer à un ordre for- 
mel et précis, c'était la déchéance de son emploi et même 
la perte de l'habit de l'Ordre. S'il persistait dans son entê- 
tement coupable, il était enfermé et condamné à vivre au 
pain et à l'eau. Cependant, quand la solitude et la réflexion 
l'avaient amené à implorer sa grâce, on lui rendait l'habit; 
mais il était envoyé dans une autre maison, pour éviter le 
scandale que sa présence aurait pu causer \ 

Le frère qui quittait l'habit, de son propre mouvement 
et sans l'avis du chapitre, ne pouvait être reçu de nouveau 
qu'en se soumettant à la discipline pendant trois jours *• 
Celui qui quittait l'Ordre pour entrer dans une autre reli- 
gion était excommunié; à moins toutefois qu'il ne fit 
profession dans un ordre plus sévère ; encore, dans ce cas, 
devait-il se munir, ainsi que nous l'avons dit, de lettres 
dimissoires données par le chapitre '. 

Dans le cas où une maison toute entière aurait refusé la 
soumission au grand maître, celui-ci devait, sur le conseil 
du chapitre de Rome, appliquer une répression énergique. 
Si la révolte persistait, on devait dénoncer les coupables à 
l'Eglise romaine, et réclamer au besoin le secours du bras 
séculier pour faire rentrer les rebelles dans le devoir *. 

L'obéissance était due au grand maître et à ceux qui 
représentaient comme lui l'autorité divine. Mais la règle 
allait plus loin ; elle recommandait aux hospitaliers de se 
soumettre, en tout ce qui était juste et bon, à la volonté du 



• Régula, c. XCIX. 

• Jbid., c. XCIV. 

* Jbid., c. LXXII. 

* Ibid., c. LXVIII. 



OBLIGATIONS BT p£naUT£S II) 

moindre de leurs frères, ajoutant que cette soumission, 
dont Jésus-Christ a donné tant de fois l'exemple, était la 
voie qui les conduirait le plus sûrement à Dieu K 

CHASTETÉ. — Les fonctions des frères et des sœurs de 
rOrdre exposaient leur vertu à des dangers nombreux et 
inévitables. C'est pour tenir toujours leur attention en éveil, 
que la règle multipliait les précautions les plus sages. Telle 
était par exemple l'obligation si étroite de la résidence et la 
défense de sortir de la maison sans autorisation et sans 
socius. Les rapports des frères et des sœurs devaient être 
aussi rares que possible. Nous avons parlé déjà de la dé- 
fense qui était faite à ces dernières de pénétrer dans le 
dortoir des frères, de préparer leur lit et de leur rendre 
aucun des soins domestiques que la charité semblerait devoir 
autoriser. Des frères étaient préposés au service des frères, 
des sœurs à celui des sœurs. La seule exception admise 
était le cas de maladie grave, et encore fallait-il obtenir la 
permission expresse du recteur *. 

Des peines terribles menaçaient le violateur du vœu de 

chasteté. On l'enfermait dans une prison pendant un an ; on 
le condamnait à l'abstinence quotidienne la plus rigoureuse 
et au jeûne au pain et à l'eau tous les vendredis. Si le cou- 
pable donnait des garanties d'une conversion sincère, il 
était réintégré au bout de l'année. 

Une nouvelle chute entraînait deux années de réclusion. 
Mais à la troisième récidive, la règle était impitoyable ; 
c'était la prison perpétuelle. Le prisonnier ne recevait 
quelque adoucissement qu'aux jours de grande fête ; on lui 
accordait une ration de vin dans les octaves de Noël et de 
Pâques, et le jour de la Toussaint, il avait part aux ali- 
ments préparés pour la communauté *. Cependant, après un 



' Régula, c. LV, LXXIV. — Mgr Pttulinier, p. 62. 
• Ihid,, c. LXXX. 
» Ibid., c. XXXI. 

8 



114 RÉGIME INTÉRIEUR DE l'ORDRE 

temps de réclusion plus ou moins long, le recteur, sur 
Tavis du chapitre, pouvait adoucir quelque peu la rigueur 
de la peine, s'il le jugeait à propos. Le législateur, on le 
voit, ne sévissait qu'à regret, et à la dernière extrémité ; 
encore voulait-il que la miséricorde ne perdit jamais en- 
tièrement ses droits '• 

SOBRIÉTÉ. — La pauvreté, Tobéissance et la chasteté sont 
les vertus fondamentales du religieux. Mais la perfection 
de la vie régulière en exige d'autres, qui sont l'application 
ou la sauvegarde des premières. 

La sobriété la plus sévère devait être observée dans un 
ordre dont les biens étaient regardés comme le patrimoine 
des pauvres. Le frère qui refusait de se soumettre au jeûne 
prescrit par la règle, était privé de vin le jour suivant ; la 
seconde fois, il jeûnait deux jours au pain et à l'eau*. 
Trois jours du même jeûne punissaient ceux qui mangeaient 
de la viande aux jours défendus, ou qui se permettaient 
d'accepter des invitations au dehors ; de plus ces derniers 
subissaient l'humiliation de prendre leurs repas, assis à 
terre, sans serviette, pendant deux semaines au moins *• 
Celui qui s'oubliait à boire jusqu'à s'enivrer faisait une 
pénitence de sept jours, avec un double jeûne. S'il persistait 
dans son habitude vicieuse, on l'envoyait dans une maison 
où il y avait peu de vin, afin de le mettre dans l'impossi- 
bilité de s'enivrer à nouveau *. 

RÉSIDENCE. — Pour sortir dans la ville, ainsi que nous 
l'avons dit, l'autorisation du recteur était nécessaire. Celui 
qui sortait seul et sans permission mangeait àterreun jour, 
la première fois ; deux jours la seconde ; la troisième, sept 



' Régula, c. XXXI. 

• Ibid., c. XI. 
•/^îi.,cXII,XV. 

• Jbid., c. XCIV. 



OBUGATIONS ET PÉNALITÉS 11$ 

jours, et il devait jeûner deux fois *. Coucher hors de la mai- 
son, lorsqu'on pouvait rentrer, entraînait la privation de 
Thabit de l'Ordre, ou, quand le chapitre jugeait convenable 
d'user de douceur, une pénitence de quarante jours ■. 

SILENCE. — Le grand silence de la nuit, qui commence à 
Complies pour se terminer à Prime, a toujours été rigou- 
reusement exigé dans tous les ordres religieux. L'infraction 
en était punie de la privation de vin pendant une journée ; 
en cas de récidive, le châtiment du coupable était remis à 
la discrétion du recteur '. La même peine était réservée à 
celui qui troublait l'office par des paroles inutiles *, 

ESPRIT DE CHARITÉ. — La charité étant le fondement et le 
but suprême de l'ordre du Saint-Esprit, il était nécessaire 
qu'elle régnât dans tous ses membres. Aussi le saint fonda- 
teur en avait-il fait un article spécial de sa règle : Que les 
frères, disait-il, pratiquent la charité envers tous les hommes 
et s'eflForcent de faire régner au milieu d'eux la paix et la 
concorde. Qu'ils chassent bien loin d'eux l'avarice, l'envie, 
la haine, la colère, l'orgueil, les médisances, les murmures 
et toute espèce de malice '. 

Un des grands maîtres les plus illustres, frère Bernardin 
Cyrille, explique en termes touchants, dans son instruction 
sur la règle, la pensée du législateur : « Ne pensez point 
que nous posséderons la vie éternelle, par cela seul que nous 
avons voué à Dieu obéissance et chasteté ; car la fin princi- 
pale de tous les préceptes, et le fondement de notre institut, 
c'est la charité. Que toutes nos œuvres s'opèrent donc dans 
la charité ! Affermis en elle, croissons en elle tous les jours. 



' Régula, c. XVII. 

• IbU,, c. G. 

» Ibid., c.XVIlI. 

• Ibid., c. XIX. 

• Ibid., c. XX. 



II 6 RÂOIIIB INTÉRIEUR DB l'oRDRE 

La charité est la plus tendre des mères. Elle ranime ceux 

qui sont tièdes, elle exerce les parfaits La charité est 

douce dans ses reproches, simple dans ses caresses et ses 
encouragements ; elle corrige avec bonté ; elle guérit sans 
amertume ; elle s'irrite quelquefois, mais avec patience ; 
feUe s'indigne, mais avec humilité. Elle supporte l'adversité 
et tempère les joies que la prospérité procure. Elle soufiEre 
tout, elle croit tout, elle espère tout, elle tolère tout ; si 
nous l'embrassons, mes frères, avec amour, elle entretiendra 
parmi nous la concorde, elle conservera l'union, et ne faisant 
qu'un dans le Saint-Esprit, nous garderons toujours avec 
nous le Dieu de paix et de consolation *. » 

Dans un ordre où la charité était tenue en si haute estime, 
tout ce qui tendait à la détruire où seulement à Taltérer 
devait être sévèrement proscrit. 

Le frère qui avait appelé un autre frère : traître, rené' 
gat, menteur y fils de courtisane^ était puni par sept jours 
de jeûne, dont deux au pain et à Teau*. De plus, il mangeait 
au réfectoire, assis à terre. La pénitence durait quarante 
jours, s'il s'était oublié jusqu'à lever la main sur lui : s'il y 
avait eu eflfusion de sang, on lui enlevait l'habit de l'Ordre'. 
Lorsqu'il était reconnu qu'un des frères avait frappé 
quelque serviteur de la maison, les mêmes peines lui étaient 
infligées. Si la mort s'ensuivait, il perdait l'habit et son 
jugement était remis aux mains du Pape \ Entre les 
simples serviteurs, il y avait lieu de craindre des querelles 
plus fréquentes, parce que c'étaient le plus souvent des 
mercenaires, que ne retenait point la pratique des vertus 
monastiques. Pour entretenir la concorde parmi eux, il 
fallait des pénalités plus rigoureuses. Deux serviteurs 



* B. Cyriili generalis Preeceptoris adhortatio (ad caicem Regulœ). 

* Rtgula, c. L, XXXII. 
•/frW.,c.XXXII. 

* Ibid., c. LXXXI. 



OBLIGATIONS BT PÉNALITÉS II7 

s'étaient-ils pris de paroles, on les frappait de verges et de 
courroies sur les épaules nues, devant les frères assemblés K 
Si c'était un des frères qui avait reçu l'outrage, le coupable 
était conduit à travers la maison jusqu'au dehors à coups de 
verges et congédié avec son salaire*. L'eflEusion du sang, 
dans les querelles entre serviteurs, était punie de même : on 
chassait honteusement le coupable et on lui retenait même 
ses gages '. 

Si l'on ajoute à cet aperçu rapide de la règle les péni- 
tences analogues, appliquées à tous les autres délits, comme 
le vol, la communication avec les hérétiques, etc., on aura 
une idée suffisamment complète du code disciplinaire de 
Tordre du Saint-Esprit. La pénitence y était soigneusement 
proportionnée aux fautes. Les châtiments corporels étaient 
réservés aux serviteurs. Les peines pour les frères consis- 
taient seulement en jeûnes et en mortifications de l'amour 
propre ; la réclusion et l'expulsion n'étaient employées qu'à la 
dernière extrémité et pour les fautes les plus graves. « Il 
nous est donc impossible de ne pas admirer ici un caractère 
de mansuétude qui signale la règle de Gui, et qui contraste 
étrangement avec les habitudes encore pleines de rudesse 
du XII* siècle *. » 

En fait, la répression devait être assez rarement néces- 
saire ; car le législateur avait pris tous les moyens pour la 
rendre inutile. S'inspirant du grand Code monastique de 
saint Benoît, il avait établi comme premier moyen de 
réforme la correction fraternelle. 

Lorsqu'un frère se trouvait témoin d'une faute, il corn- 
mençait par en reprendre l'auteur secrètement et sans en 
parler à personne. Un premier avertissement ne suffisant 



* Régula, c LXXXV. 
*Ibid., c LXXXII. 

* /Wi., c. LXXXV. 

* Mgr Panlinier, p. 65. 



Il8 RÉGIME INTÉRIEUR DE L'ORDRE 

pas, il le réitérait en présence de trois frères. Si le frère 
coupable s'amendait, on s*en réjouissait en bénissant Dieu 
de son retour. Ce n'est qu'à la dernière extrémité qu'il était 
dénoncé au maître * . 

Celui-ci examinait en chapitre le délit et les preuves 
apportées. L'accusateur imprudent, qui n'apportait que des 
preuves insuffisantes, subissait lui-même la peine du délit 
dont il avait chargé son frère •. 

C'est ainsi que tout, dans le nouvel ordre, avait été prévu 
par le prudent législateur. Les charges et la responsabilité 
des supérieurs, les devoirs des inférieurs, les obligations 
imposées à tous, les peines mêmes réservées aux fautes, 
tout est fixé d'avance dans la règle du Saint-Esprit, monu- 
ment plein de sagesse et de prudence, où la sévérité et la 
douceur, l'autorité et la charité se fondent et se tempèrent 
dans un accord plein d'harmonie. Le succès de l'œuvre de 
Gui de Montpellier est dû à sa constitution si sage. Aussi, 
tant que la règle sera en honneur, TOrdre se maintiendra 
prospère ; dès que la règle perdra de son empire, l'Ordre 
commencera à dépérir. Il ne nous sera que trop facile de 
le constater. 



» Régula, c. XXIV, LV. 
• Ibid.j c. LVI 




CHAPITRE IV 



BIENS, REVENUS ET PRIVILÈGES DE L'ORDRE 



I. BIENS ET REVENUS 




'ordre du Saint-Esprit était universel dans sa 
charité. Son but était de ne laisser aucune souf- 
france, aucun dénuement sans soulagement et 
sans remède. La charité, a dit TApôtre, n'a pas à redouter 
l'excès. Cependant ne peut-on pas se demander si l'élan 
magnifique de miséricordieux dévouement du fondateur 
ne l'avait pas entraîné trop loin, en ne lui laissant point 
assigner de bornes précises au zèle de ses enfants ? Ceux-ci 
pourraient-ils suffire à la lourde tâche qu'ils assumaient 
de si grand cœur, et les ressources matérielles ne leur 
feraient-elles point défaut? Ces considérations, nécessaires 
dans toute entreprise humaine, ne doivent pas nous préoc- 
cuper quand il s'agit d'une œuvre marquée du sceau divin 
comme celle de Gui de Montpellier. Jamais Dieu n'a manqué 
aux âmes généreuses dans l'accomplissement des desseins 
qu'il leur inspire pour sa gloire et l'exercice de la charité ; 
Gui de Montpellier en fit l'expérience après tant d'autres, 
et son ordre reçut des marques visibles de la bénédiction de 



1 20 UBN8 ET PRlVItiOES DB L'ORDRE 

la Providence. Tantqu'il sut conserver le trédor de lacharité, 
les biens temporels, nécessaires à sa mission, ne lui firent 
point défaut. • 

Les biens des maisons de TOrdre se composaient surtout, 
outre les édifices et leurs dépendances, de propriétés fon- 
cières, qui formaient la meilleure partie de leurs revenus. 

Jusqu'ici nous n'avons rien dit encore des constructions 
affectées aux hôpitaux et à lliabitation des religieux ; il est 
temps de combler cette lacune. 

CONSTRUCTIONS DES ÉTABLISSEMENTS. — La plupart des 

établissements hospitaliers du Saint-Esprit sont aujourd'hui 
détruits, et les quelques édifices demeurés debout ont perdu 
en grande partie leur physionomie primitive, par suite de 
remaniements successifs ou d'un changement de destination. 
D'autre part, les anciens inventaires, dont nous avons ana- 
lysé un grand nombre, sont loin de suppléer au manque 
d'édifices : ces inventaires, en effet, scrupuleusement exacts 
et complets en ce qui touche le mobilier, les propriétés et 
revenus des hôpitaux, sont habituellement muets sur les 
bâtiments, ou se contentent d'indiquer leur bon ou leur 
mauvais état d'entretien. Les visiteurs ne songeaient point 
assurément à l'intérêt qui s'attache aujourd'hui aux rares 
indications égarées, pour ainsi dire, dans leurs procès- 
verbaux. 

Cependant, en réunissant les renseignements que nous 
avons pu recueillir et en les comparant à ce que l'on sait 
des Hôtels-Dieu et maladreriesdu moyen-âge, nous espérons 
arriver à donner au lecteur une idée assez précise de nos 
établissements. 

Les XI% XII* et XIII* siècles virent s'élever une quan- 
tité prodigieuse d'hospices. Presque toutes les abbayes 
avaient un hôpital dans leur enceinte ; pas de ville, pas de 
bourg de quelque importance qui n'eût sa léproserie en 
dehors de ses murs. De plus, les voies romaines, seuls 



CONSTRUCTIONS DES ÉTABLISSEMENTS 121 

moyens de communications à cette époque, o£Fraient, éche- 
lonnées sur leur parcours, de nombreuses stations ou refuges 
pour les voyageurs \ 

« On comprendra, dit un éminent architecte, que parmi 
tant d'édifices élevés sous l'inspiration d'une charité vive 
et voulant immédiatement porter remède au mal, beaucoup 
n'étaient que des bicoques, des maisons que l'on appropriait 
tant bien que mal au service des pauvres et des malades; 
car nombre de ces hospices se composaient d'une maison 
donnée par un simple bourgeois, avec une rente à prendre 
sur son bien. Peu à peu ces modestes donations s'éten- 
daient, s'enrichissaient par les quêtes et devenaient des 
établissements importants *. » 

Il ne faut donc pas nous imaginer en général que les 
hôpitaux du moyen-âge ressemblaient à ces imposantes et 
sévères constructions qui sont nos hospices modernes. Les 
villes importantes seules, comme Chartres, Angers, Ton- 
nerre • purent tout d'abord se doter d'Hôtels-Dieu vastes et 
complets, où l'on ne sait ce que l'on doit le plus admirer, 
de la beauté architecturale de ces salles monumentales, ou 
de l'entente parfaite et ingénieuse de tous les besoins dans 
la distribution des services. 

Certains de nos établissements du Saint-Esprit rivalisaient 
d'importance avec les grands Hôtels-Dieu. 

Le frère Calmelet, historien et dernier commandeur de 
Dijon, nous a laissé de sa maison une description qui, 
jointe à ses dessins, en donne une haute idée S Autour 
d'une cour intérieure s'élevaient d'un côté l'église, vaste, 
bien ornée de peintures murales et de tableaux, abondam- 
ment pourvue de vases sacrés, de reliquaires précieux et 



* Voir Guigue, Les poies antiques du Lyonnais déterminées par les hôpitaux du 
moyen-âge, Mém. de la Soc. Littéraire de Lyon. 1876. 

* Viollet-le-Duc, Dictionnaire raisonné de C architecture^ t. VI, p. lo^ 

* Voy. dans VioUet-ie-Duc, à l'art, cité, la description de ces hôpitaux. 

* Voir la fig. au chap. I de la seconde partie» 



122 BIENS ET PRIVILÈGES DE L*ORDRE 

d'ornements d'étoffes rares; en face de l'église, un beau 
bâtiment à deux étages, renfermant la grande salle des 
malades et les appartements réservés aux enfants et aux 
sœurs. Deux autres bâtiments complétaient l'ensemble et 
servaient d'habitation aux frères et de magasins aux pro- 
visions *. Dans les siècles suivants, de nouvelles construc- 
tions s'ajoutèrent aux anciennes et ces édifices, en partie 
conservés, ne sont pas une des moindres curiosités de la cité 
des ducs de Bourgogne, pourtant si riche en monuments 
anciens. 

La maison conventuelle de Besançon ne le cédait pas en 
grandeur à celle de Dijon. Ses bâtiments formaient tout un 
quartier de la ville •. De la fondation primitive l'église seule 
nous reste, et dépouillée des peintures et des ornements 
dont elle était enrichie. Néanmoins elle est encore un des 
monuments les plus intéressants de la ville. De curieuses 
sculptures ornent la porte d'entrée à voussures romanes ; 
autour de cette porte on lisait jadis l'inscription suivante 
qui rappelait que cet édifice était à la fois une église et un 
asile pour les malheureux : Flosflorum,,, cibuset requies 
miserorum '. La même idée est exprimée en termes iden- 
tiques dans les deux vers qui furent gravés en 1443 sur le 
portail de l'hôpital de Dijon : 

Ut rosa flos florum, sic est domus ista domorum: 

Nam pupillorum est cibus, et reçûtes miserorum. 

« Comme la rose est la fleur des fleurs, de même cette 
maison est la maison des maisons : car les orphelins y 
trouvent leur nourriture, et les malheureux, le repos * . » 

Les nervures de la voûte retombent sur des piliers 



* p. Calmelet, Hist. de la maison magistrale, conventuelle et hospitalUre de 
Dijon, chap. II. 

* Voir la description de cet hôpital dans Guénard, Besançon. Description de 
ses monuments, 1844, p. 120-123 ; — A Castan, Besançon et ses environs, 1887, p. 7 1. 

' Guénard, B:sançon, p. 120. 

* G. Peignot, Histoire de la fondation ., p. 8, 



CONSTRUCTIONS DES ÉTABLISSE H SNTS 



13î 



accostés de colonnettes à chapiteaux historiés. Les lenètres 
sont longues et étroites ; mais au chevet une rose élégante 
répand une abondante lumière. Tout dans cette église 
respire une simplicité qui n'exclut pas la noblesse et l'élé- 
gance. Mais combien devait-elle être plus belle, ornée de 
ses peintureséclatantes qui retraçaient les scènes de l'ancien 
et du nouveau Testament. Ici la charité chrétienne était 
figurée par le Père Eternel accueillant dans son sein une 
troupe déjeunes enfants ; là le jugement dernier développait 
ses épisodes à la fois terribles et consolants. Que de fois les 
humbles frères ne puisèrent-ils pas de nouvelles forces dans 
la contemplation du souverain Juge, qui semblaitleur adres- 
ser les paroles placées par Gui en tête de la règle : Venez les 
bénis de mon Père, car j'ai eu faim, et vous m'avez nourri, 

j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire La pauvre 

chapelle, aujourd'hui tristement nue et dépouillée, est 
affectée au culte protestant. 




Fig. j. ~ HApiUt du Saint-Esprit de Besançon. 
La maison conventuelle a conservé en partie le riche 
aspect qu'elle avait au XV' siècle. 



124 BIENS ET PRIVILÈGES DE L^ORDRE 

On y visite en particulier une galerie de boisa colonnetted 
couvertes de rinceaux de feuillage et d'animaux fantasti- 
ques, le réfectoire aux poutres artistement sculptées et aux 
colonnes portant les armes de l'Ordre, et Ténorme tour 
carrée, construite en 1443 *. 

La plupart des hôpitaux étaient réduits à des proportions 
plus modestes, qui répondaient d'ailleurs à leur destination. 
Les établissements de moyenne importance étaient formés 
de deux parties distinctes : le prieuré, comprenant les 
lieux réguliers nécessaires à toute communauté religieuse, 
comme le dortoir commun, le réfectoire, la salle capitulaire ; 
puis l'hôpital proprement dit, ordinairement composé d'une 
grande salle plafonnée ou voûtée et disposée pour recevoir 
jusqu'à quatre rangs de lits, et d'un étage supérieur ou de 
chambres latérales, qui servaient au logement des enfants, 
de leurs nourrices et des sœurs. On ménageait, soit près 
des cuisines, soit dans la grande salle, une vaste cheminée 
à l'usage des pauvres et des passants. Une chapelle avec 
son cimetière, un jardin ou un enclos entouré de murs, 
complétaient l'installation •. 

On trouvait même des hôpitaux moins privilégiés encore, 
dont toute l'installation se bornait à une maison d'un ou 
de deux étages et d'une chapelle adossée qui permettait aux 
malades d'assister à l'office. Ces maisons n'avaient pas 
pris de développement, soit parce qu'étant situées dans des 
localités peu importantes, elles suffisaient aux besoins de la 
population, soit parce que d'autres établissements étaient 
venus partager avec elles le soin des malheureux et aussi 
les largesses des habitants. Les hôpitaux de Dole, de 



* Nul doute que les hôpitaux de Montpellier, Marseille, Auray, Coutances, 
etc., niaient eu des constructions aussi importantes: mais les documents nous 
manquent au sujet de ces édifices. 

' Voy. au chap. I de la seconde partie la Vue de Thôpital de Gray. 



CONSTRUCTIONS DES ÉTABLISSEMENTS 12^ 

Neufchâteau, d'Arlay, de Chaussin, etc. , rentrent dans cette 
catégorie '. 



^^ 




Fig. 4- — Hfipilal du Saint-Esprit de Dole, d'aprè$ une ancienne gravure (1668). 

Le mobilier des maisons répondait naturellement à leur 
importance. Si dans les grandes maisons conventuelles 
l'ameublement était abondant et quelquefois somptueux, 
dans les hôpitaux ordinaires, on savait se contenter du 
fltrict nécessaire. 

Les inventaires montrent que le luxe était réservé à la 
chapelle; encore provenait-il le plus souvent des donations 
de nches bienfaiteurs ou de la reconnaissance des malades. 
C'est ainsi qu'un inventaire du petit hôpital de Saint-Julien 
mentionne soigneusement, à coté des ornements etdes vases 
sacrés, assez nombreux, « deux ymaiges et un petit livre de 
St Aloïs *. .. 

L'hôpital de Dole, qui ne se composait que d'un bâtiment, 
assez vaste il est vrai, avec une chapelle construite à son 



' Voyet PI. Xt, lavue de I'h6piial de Neufchitaau. 

■ IitPtnt. dt t)6e. Arch. de l'hfip, de Besançon, chap. I, n* it. 



128 BIBN8 ET PRIVILiOBS DE l'ORDRB 

hôpitaux du Saint-Esprit, dont la dotation primitive con- 
sistait le plus souvent en terres. A cette première dota- 
tion venaient successivement se joindre les donations des 
habitants et seigneurs du voisinage, faites à charge d'an- 
niversaires et de services religieux; peu à peu se formait 
un domaine souvent assez considérable, que les frères 
cultivaient eux-mêmes, ou qu'ils a£Fermaient à cens. 

Les maisons conventuelles et magistrales réunirent assez 
rapidement de grandes possessions. Ainsi, nous voyons 
celle de Besançon posséder dès le XV* siècle ving^-neuf 
domaines, tant aux environs de la ville, que dans des lieux 
plus éloignés, dont plusieurs étaient assez considérables pour 
nécessiter la présence d'un frère chargé de diriger les 
travaux d'exploitation. La plupart de ces possessions 
provenaient de dons ou encore d'achats opérés à Taide du 
produit des quêtes dans le cours du XIII« et du XIV* 
siècle *. 

L'exploitation du domaine des hôpitaux fournissait la 
part principale de la nourriture des malades et des frères ; 
on y joignait dans toutes les maisons l'élevage des animaux 
domestiques. L'ordre du Saint-Esprit partageait avec celui 
de Saint-Antoine le privilège enviéde faire paitrepartoutses 
animaux, ses porcs en particulier, et de les faire nourrir 
par les habitants des villes et des campagnes. Comme signe 
distinctif, ils devaient être munis de sonnettes. Une bulle 
d'Urbain V (1363) confirma ce droit à l'hôpital de Toul*. 
Les Antonins prétendaient jouir seuls des privilèges et 
empêchaient les frères du Saint-Esprit d'en user ; ceux-ci 
en appelèrent au pape Sixte IV, qui en 1482, leur accorda 
une bulle dans laquelle, constatant que l'ordre du Saint- 
Esprit jouissait de ce droit de temps immémorial, il 
ordonna aux Antonins de ne plus l'inquiéter *. 



' A. Caatan, Notice, II, p. aoo et sv. 

' Arch. de Thôp. de Besançon, chap. I, n^S^. 

> Diplomata, l, p. iio. 



• . - — - 



t 
- i 



PROPRIÉTÉS ET REVENUS I29 

Quelquefois la coutume ou quelque concession seig^neu- 
riale accordait aux hôpitaux une sorte de dîme appelée droit 
de Gerberie^ qui consistait dans la possession de la pre- 
mière gerbe de tous les champs de la circonscription \ 

Des droits de parcours dans les pâturages, d*usage dans 
les forêts, de sel dans les sauneries, s'ajoutaient au produit 
des terres. 

Les confréries du Saint-Esprit, rayonnant partout au- 
tour des hôpitaux, fournissaient un nouvel appoint, par le 
tribut annuel qu'elles s'engageaient à remettre à la maison 
qui les avait fondées. En outre, les hôpitaux de l'Ordre 
avaient le droit de faire apposer des troncs et bassins 
dans toutes les églises et chapelles de leur ville et de leur 
voisinage *. Enfin les offrandes et les dons journaliers des 
habitants constituaient une source de revenus plus aléa- 
toires, il est vrai, mais souvent fort considérables. Au 
moyen-âge, les testaments de la noblesse contenaient tou- 
jours des legs en terre ou en argent aux églises et aux 
institutions charitables. La [bourgeoisie et le menu peuple 
ne restaient pas en arrière ; les hôpitaux étaient créés pour 
eux ; plusieurs avaient eu à bén éficier des soins des hospi- 
taliers ; ils savaient en montrer une reconnaissance 
proportionnée à leurs ressources. On peutapplîquer à toutes 
les maisons du Saint-Esprit ces paroles de M. J. Gauthier 
au sujet de Gray : « Les petites gens, bourgeois ou artisans 
de Gray, drapiers, selliers, parcheminiers et laboureurs, 
continuaient à léguer en mourant quelques terres ou quel- 
ques meubles à l'asile des pauvres ; la situation de la 
maison s'améliorait d'autant '. » 



* J. Gauthier, Notice sur l*hâp, de Gray^ p. 11. 

' c Ils ont droit de placer dans toutes les églises des troncs et de constituer 
des gardiens pour en prendre soin. Les collecteurs et les gardiens auront le 
premier rang sur tous les autres, quels qu'ils soient. > Bulle de Grégoire X! 
(ij7j). (Diplomata, I, p. 66,) etc. 

' Notice, p. II. 

9 



1 )0 BIENS ET PRIVILÈGES DE L*ORDRE 

L'obole du pauvre est quelquefois plus précieuse aux 
yeux de Dieu que les riches présents des puissants du 
siècle ; n'était-il pas grand le mérite de cette pauvre femme 
de Gray qui, au mois de juin 1431, donnait à Thôpital tout 
son avoir — quelques ouvrées de vigne, — « considérant, di- 
sait-elle en son naïf langage, les biens, bontés, curalités, que 
Ton me fait en Tospital du Saint-Esprit de Grray, auquel je 
suis et ay estée recehue bien et convenablement selon mon 
estât et ma maladie, et encore suis-je à présent...., je ne 
veulx pas encore (encourir) le péchier de ingratitude '. » 

Nous n'avons pas de données suffisantes pour apprécier 
à quelle somme moyenne pouvait monter le produit de ces 
diverses sources de revenus ; elles variaient selon l'impor- 
tance des maisons et des villes, et aussi selon les époques. D 
nous est donc impossible de citer des chiffires précis. 

Les maisons conventuelles et chefs de provinces avaient 
des besoins plus nombreux et plus considérables, par suite 
de leur personnel plus abondant. Dans ces maisons étaient 
formés la plupart des novices destinés à peupler les hôpi- 
taux dépendants. Pour subvenir à ces frais, deux sortes de 
revenus leur étaient spécialement réservés : les quêtes et 
les redevances des hôpitaux inférieurs. 

QUÊTES. — Au moyen-âge, temps de foi vive et abondante 
en œuvres, Tusage des quêtes était très répandu. Les ordres 
mendiants n'avaient pas peu contribué à donner à cette 
forme d'assistance un développement considérable. Mal- 
heureusement les abus ne furent pas longs à se produire. 
Des mendiants paresseux trouvaient fort agréable, au lieu 
de travailler, de se revêtir d'un costume religieux et de 
vivre aux dépens de la charité publique. Les quêtes étaient 
devenues ime véritable industrie. Aussi les évêques, dont 



* J. Gauthier, Notice^ Ibid, 



QUÊTES ET TRIBUTS I3I 

les œuvres diocésaines soufiEraient de ces abus, interdirent 
de bonne heure à leurs fidèles de donner Taumône aux reli- 
grieux, vrais ou déguisés, qui se 'présentaient sans leur 
autorisation écrite. Les Souverains Pontifes agirent de 
même et veillèrent soigneusement à ce que des bulles d'in- 
dulgences ne fussent point accordées aux indignes *. 

L'ordre du Saint-Esprit jouit dès l'origine des privilèges 
les plus étendus relativement aux quêtes, grâce à son uti- 
lité et à TafiFection que lui témoignaient les Papes. Nul 
ordre hospitalier ne partagea d'aussi insignes faveurs. 
Innocent III, dans sa bulle d'union des maisons de Rome 
et de Montpellier (1204), ordonnait que les frères quêteurs 
du Saint-Esprit fussent reçus, lors de leur tournée annuelle, 
dans toutes les cités, villes et bourgs, au son des cloches. 
Les églises devaient leur être ouvertes^ afin qu'ils pussent 
librement exhorter le peuple à l'aumône ; l'interdit même 
était suspendu à leur arrivée et durant tout le temps de leur 
présence *. Les successeurs d' Innocent III augmentèrent à 
l'envi les concessions accordées à l'Ordre par ce Pape ; 
citons en particulier Nicolas IV (1289), Clément V (1306), 
Jean XX(i3i8), Grégoire XI (1372), Calixte III, Sixte IV 
(1476), Innocent VIII (1485), Urbain VI, Paul IV, 
LéonX'. Entre toutes leurs bulles, la plus complète est 
celle de Nicolas IV. Ses successeurs se contentèrent habi- 
tuellement de la confirmer, sans en modifier notablement 
les termes; à raison de son importance, nous en donnons 
ici les principales dispositions : 

« Nicolas, évêque, serviteur des serviteurs de Dieu, à 
nos vénérables frères : patriarches, archevêques, évêques, 
et à nos chers fils, abbés, prieurs, doyens, chantres, archi- 
diacres, sacristains, et à tous les recteurs des églises à qui 



' Voy. Ducange, V'« Quaesta et Quacstuarii, 
* Diplomata, I, p. 7. 
' ibid,9 p. ;o et sqq. 



îll BtEMS ET PRITOIGES DE LOUMLE 

ces lettres parviendront, salut et bénédîctioo apostolique. 

tf Nos prédécesseurs de bonne mémoire Innocent III. 
Honorios III. Alexandre r\". et plusieurs autres des Pon- 
tifes Romains après eux, ont accordé, et nous-mêmes avons 
confirmé à nos chers fils le Précepteur et les frères de 
l'hôpital du Saint-Esprit in Saxia et de ses membres^ le 
privilège d*ètre reçus une fois Tan dans les églises, pour y 
recueillir des aumônes. Cependant nous avons appris que 
certains, mus par Tavarice. font leurs assemblées le jour de 
Tarrivée des frères, si bien que ceux-ci n'obtiennent rien ou 
très peu de chose et sont forcés de se retirer*avec confusion. 

« Voulant réprimer ces procédés outrageants pour Dieu 
et TEglise Romaine, et suivre les traces de nos prédéces- 
seurs, nous vous ordonnons à tous par ces lettres aposto- 
liques et vous enjoigrnons absolument, en vertu de la sainte 
obéissance et sous peine d'excommunication et de la perte 
de vos bénéfices et offices, de recevoir et traiter honnêtement 
les frères susdits, lorsqu'ils seront de passage pour recueil- 
lir des aumônes ; de leur permettre d'exhorter le peuple et 
de solliciter la charité des fidèles dans vos églises. Prenez 
garde d'opposer vos assemblées, que vous pouvez faire 
tous les jours, aux leurs, qu'ils ne font qu'une fois par an, 
de peur que les o£Frandes destinées aux pauvres ne vien- 
nent à diminuer et les œuvres de piété à cesser par votre 
faute 

ce Lorsque les frères ou leurs envoyés vous en feront la 
demande, nous voulons que vous leur accordiez bénévole- 
ment des lettres de convocation favorables à leur mission, 
avec des indulgences pour le bien des pauvres. 

« Nous ajoutons que si une cité, une ville ou un bourg 
se trouvaient être sous le coup de l'interdit, à l'arrivée des 
frères, les églises seront ouvertes, en l'honneur de leur 
venue, pour la lecture des lettres apostoliques, en ayant 
soin cependant d'en défendre l'entrée aux interdits ou 
excommuniés nommément. Les offices y seront célébrés 



QUÊTES ET TRIBUTS IJJ 

• 

les portes ouvertes et au sondes cloches. Usera également 

permis de procéder aux funérailles ecclésiastiques Ce 

jour sera regardé comme un dimanche ou une fête solen- 
nelle, jusqu'à ce que les frères aient achevé leur œuvre 

« Nous ordonnons aux doyens, prévôts, prélats, prédi- 
cateurs, chapelains, curés, exempts ou non exempts, et 
leur enjoignons sous les peines susdites, de permettre aux 
frères et à leurs envoyés, à toute réquisition, d'expliquer 
à leurs paroissiens ces lettres d'indulgences toutes les fois 
qu'il leur plaira, toutes quêtes faites ou à faire cessant le 
jour où la parole divine sera annoncée par lesdits frères 

« Donné à Rome, la seconde année de notre pontificat, 
le jour des ides de mai. (15 mars 1289) *. » 

Grégoire XI ajouta à ces privilèges des frères celui de 
publier leurs indulgences même dans les églises des ordres 
religieux, sans en excepter les mendiants, et défaire, dans 
les lieux de leur passage, des processions générales, croix 
en tête et au son des cloches*. 

Des faveurs aussi éclatantes faisaient prendre à l'arrivée 
des frères quêteurs les proportions d'un événement solennel. 

L'appareil imposant de la cérémonie ne pouvait qu'en 
augmenter les résultats, pour le plus grand profit des 
pauvres. 

A l'hôpital de Besançon, dont les quêtes se faisaient très 
régulièrement chaque année, des religieux accompagnés 
de serviteurs étaient délégués par le commandeur pour cette 
fonction ; ou bien, lorsque les religieux manquaient, et 
comme les quêtes se faisaient à la fois en divers lieux dans 
une circonscription fort étendue, l'hôpital affermait l'en- 
treprise àdes hommes probes et de conduite irréprochable, 
marchands ou banquiers *. La maison leur fournissait des 



* Diplomataf , p. ;o. 

* Bulle du j août IJ72. — Ibid.^ p. 67. 

* A. Castan, Notice, II, p. 201. 



■M 



t BT namiGss de l'ormib 



cliariots, des serviteurs pour conduire les chevaux, des troncs 
pour recneiUir les aamânes, des prêtres de l'Ordre pour 
la prédication, des châsses et des tableaux d'indulgences 
destinés à provoquer les libéralités des fidèles '. 




Fig. {. — Chljse des qufite* de l'hfip. de Dijon, d'ipris D. Calmelet. 

Lesquèteurs, en arrivant dans les bourgades et les villes, 
se rendaient à l'église, où ils exposaient les châsses ren- 
fermant les reliques de l'hôpital. Ces châsses étaient de 
grands coffres décorés et peints en forme d'églises à toiture 
aigûe, suivant l'usage da moyen-î^e. Elles s'ouvrùent à 
deux battants ; à l'intérieur on voyait la représentation de 
la Sainte-Trinité, et sur les parois des volets extérieurs, la 
double croixde l'Ordre*. Les quêteurs de Dijon se conten- 



' A. CasUn, Ifrid. — En iI(o, l'^uipage des quêtes de Besançoo éuit trttni 
ptt oiue cheviux, comme on le verra plus loin. 

* D. Calmelet, Hitt. nu. de Chip, de Dijon, chap. V; — C. Peisaot, Hûtairi 
de la fottdatioiu... p. 84; — Castan, Notice, IJ, p, 101. 



QUÊTES ET TRIBUTS 



nî 



talent quelquefois d'exposer une croîx d'argent, qui re- 
présentait la Sainte-Trinité et renfermait une parcelle de 
la vraie Croix '. 




Fig. 6. — Croix des quêtes de Thôpital de Vaucouleurs, conservée à 

rhôpital de NeufchAteau. 

Ils avaient aussi de grandes pancartes en parchemin, 
destinées à être suspendues aux portes des églises. C'étaient 
des tableaux ornés de l'image de la Trinité, des armes 
de l'Ordre et des Souverains Pontifes ou de l'Empire, sur 
lesquels on lisait un sommaire des indulgences et privilèges 
accordés aux bienfaiteurs de l'Ordre ; d'autres fois c'étaient 



* La belle croix d*argent de Thôpital de Vaucouleurs, dont nous donnons ici 
le dessin, avait la mftme destination. 



i}6 mois ET pumids di l'orou 

des copies des balles pontificales elles-mêmes, ou des diplô- 
mes des souverains. Les archives de l'hôpital de Besançon 
possèdent encore onze de ces tableaux d'indulgences. Uua 
d'eux commence par ces mots : « S*ensujent les grandes 
grâces, pardons, indulgences, absolutions, rémissions, 
concessions et privilèges donnez et concédez de plusieurs 
saincts pères de Romme à tous les confrères, censeurs, 
assenseurs et bienffaicteurs des hospitaulz du Sainct-Es» 
périt de Romme et membres d'iceluy, esquelz tous lez 
jours continuelement, en l'honneur de nostre Saulveur Jésus- 
Christ, les œuvres de miséricordes à tous poures sont 
administrez '. ». 

Le prêtre qui accompagnait le convoi faisait convoquer 
les habitants au son des cloches, par le recteur de Téglise. 
La cérémonie commençait par une exhortation pathétique 
sur Taumône : donnez Taumône, afin que tout en vous soit 
purifié, car Taumône délivre de la mort ; elle purge les 
péchés et procure la vie étemelle. Comme Teau éteint un 
feu ardent, de même Taumône éteint le péché *. 

La publication des indulgences et Texplication des faveurs 
aussi nombreuses qu'importantes accordées aux bienfai- 
teurs de rOrdre, achevaient de disposer aux généreux 
sacrifices de la charité les populations chrétiennes, qui 
sentaient le prix de ces grands avantages spirituels, promis 
en retour de leurs sacrifices. On célébrait la messe solen- 
nelle comme aux grands jours de fête, et on vénérait les 
reliques. Les quêteurs parcouraient ensuite les rues, une 
clochette à la main ', recevant toutes les offrandes en 
argent ou en nature. Riches et pauvres, tous donnaient 



* Vers I5o^ Arch. de Vhàp. de Besançon, Casier C, Botte ( h. 

* Date igitur eleemosynam, ut omnia munda sintvobis; quoniam eleemosyna 
a morte libérât ; ipsa est quae peccata purgat, et facit invenire vitam aeternam ; 
quoniam sicut aqua ignem ardentem extinguit, tta eleemosyna peccato resistit. 
~ Nicol. IV CoMt I (Diplonu, \, p. n)- 

' Bulles de Jean XX, Sixte IV, etc, dans les Diplomata, 



QUÊTES ET TRIBUTS IJ7 

selon leurs ressources, désireux de participer aux bienfaits 
et aux œuvres si méritoires des hospitaliers. 

La tournée des quêtes achevée, on ramenait à Thôpital 
les châsses et les reliques, qu'on plaçait dans Téglise, en 
une place d'honneur *. 

Les grandes quêtes, accomplies avec la solennité que 
nous venons de décrire, étaient, avons-nous dit, Tapanage 
des maisons les plus considérables de TOrdre , en raison de 
leurs charges plus lourdes. 

Mais il aurait pu arriver que les collecteurs de plusieurs 
maisons, se trouvant ensemble au même lieu, se fissent 
une fâcheuse concurrence et provoquassent par des de- 
mandes importunes un refroidissement de la charité. 
Innocent III eut à cœur de prévenir tout d'abord ces in- 
convénients. A cet effet, il fixa, dans les termes suivants, 

a 

les limites du ressort des quêtes pour les deux maisons de 
Rome et de Montpellier : « Nous statuons, par le présent 
Privilège, que les frères députés à la collecte des aumônes 
pour l'hôpital de Sainte-Marie in Saxia, se contenteront 
de parcourir l'Italie, la Sicile, l'Angleterre et la Hongrie. 
Quant aux frères du Saint-Esprit de Montpellier, ils pour- 
ront établir des collecteurs dans les autres états ; et qu'ainsi 
chacun se contente de ses limites et n'envahisse point 
celles de son voisin *. 

C'est ainsi qu'Abraham mit fin aux rixes entre ses servi- 
teurs et ceux de son neveu Loth : Je vous en prie, qu'il n'y 
ait point de querellé entre vous et moi, entre vos pasteurs 
et les miens, car nous sommes frères. Si vous allez à 
gauche, je prendrai la droite ; si au contraire vous préférez 
la droite, j'irai à gauche '. 

Ces grandes limites ont toujours été respectées par les 



* D. Calmelet, loc. cit, 

* Const, ///(1204). Diplom,, I, p. 7. 

' GtMs.^t XIII ; Diplomata, Préface, p. III. 



1)8 Bans ET HtimiGIS M L*OKMtE 

grands maîtres, et les Papes ont eu soin de les renouveler 
dans leurs bulles. Ainsi Grégoire XI. si favorable à Mont* 
pellier, lui accorde les quêtes seulement dans les provinces 
citramontaines (il résidait à Avignon). Nous n^avons 
rencontré qu'une seule exception, en faveur de I*liâ]Htal 
de Rome. Encore fut-elle motivée par des droonstances 
particulièrement graves. Les bâtiments étaient menacés 
d'une ruine inuninente, si des réparations conadérables ne 
venaient la prévenir. Mais des char]ges fort lourdes absor- 
baient alors toutes les ressources du chef de TOrdre. Dans 
ces conjonctures difficiles, le pape Calixte III, qui, dans le 
but de se procurer des ressources pour la croisade contre 
les Turcs, avait retiré à tous les ordres religieux Tautorisa- 
tion de faire des quêtes, permit au seul hdpital de Sainte- 
Marie de quêter et de publier ses indulgences dans tout le 
monde chrétien *. 

L'hôpital de Rome, dès les premiers temps, fut en pos- 
session de louer le produit de ses quêtes pour des sommes 
fixes ; la règle semble au moins l'indiquer, quand elle 
recommande de ne confier cet emploi qu'à des personnes 
fidèles et honnêtes, sobres et chastes dans leur vie, de peur 
que leur déshonneur ne rejaillit sur l'Ordre lui-même *. 

Un registre mentionnait les marchés conclus. Il serait 
intéressant d'en posséder la série complète ; malheureuse- 
ment tous ceux antérieurs au xv* siècle sont détruits. 
Mais à cette époque les locations et baux sont nombreux. 
Les quêtes sont affermées à des religieux ou à des mar- 
chands, pour des gproupes de diocèses et moyennant des 
rétributions annuelles. En 1447, Nicolas Pasi, habitant de 
Spolète, afferme les quêtes des diocèses de Ferentino, 
Alatri, Veroli, Segni, Fondi, Gaête, moyennant une rede- 
vance de 60 ducats d'or, somme assez considérable '. Le 



* Bulle du i*' février 14^5. Diplomata^ I, p. 8(. 
■ Regtda, c. LXXXVII. 

* Arch, de VMp, du Saint-Esprit de Rome, Reg. 20, f^ 6 v». 



quAtes et tributs 139 

chapitre confie aux frères Anselme et Vénance les quêtes 
des diocèses de Florence, Pise, Pistoie, Lucques, Luna, 
Brugneto, pour trois ans, moyennant quinze ducats par 
an * ; au même frère Anselme, la province ecclésiastique 
de Naples, moyennant 12 ducats * ; à Gui et à Jean Cole, 
celles des diocèses de Brescia, Mantoue, Pergame et Cré- 
mone, pour trois ans, à 1 5 ducats par an % etc. En prenant la 
même moyenne pour tous les diocèses d'Italie et de Sicile, 
on arriverait à une somme considérable pour Tépoque, 
comme revenu annuel des quêtes ; il faudrait y ajouter 
encore celles d'Angleterre et de Hongrie, qui cependant 
devaient être moins fructueuses, à cause de l'éloignement 
de ces états. 

Il ne paraît pas que l'hôpital de Rome ait jamais con- 
cédé à d'autres maisons d'Italie le droit de faire des quêtes 
à leur profit dans une circonscription de quelque étendue. 
Il n'en fut pas de même en France. 

La maison-mère de Montpellier avait reçu d'Innocent III 
une part d'états bien plus considérable même que celle de 
Rome. Mais bientôt l'usage ou une concession explicite vin- 
rent morceler son immense domaine et le partager entre 
les plus puissants de ses membres. Auray, d'où sortirent 
de nombreux essaims, étendit son pouvoir dans les provin- 
ces de rOuest ; Besançon et Dijon sa rivale envoyaient 
leurs quêteurs dans les régions de l'Est et du Nord de la 
France et dans les Flandres, tandis que Montpellier con- 
servait les provinces méridionales. Il faut remarquer que 
ces trois prieurés conventuels : Montpellier, Auray et 
Besançon, furent les trois sources principales d'où sorti- 
rent tous les essaims de frères qui peuplèrent la France 
d'hospices florissants. Cependant le célèbre hôpital de 



• Ibid,^ Reg. ao, f> 7 vo. 

• Ibid,, Reg. 20, f» 9. 



I40 BIENS ET PRiriLÈGES DE L'ORDRE 

Besançon réussit à se faire dans les quêtes une part prépon- 
dérante. « La circonscription de ces quêtes embrassa, durant 
plus de trois siècles, un territoire extrêmement vaste, à 
savoir l'Angleterre *, les Flandres, la Picardie, le diocèse 
de Reims, la Franche-Comté, la Bresse, le Bugey, le 
diocèse de Lyon, la Suisse romande, le Dauphiné^ la 
Savoie et le Piémont* ». Aux xv* et xvi* siècles, toutes 
ces quêtes étaient amodiées. La Suisse romande, le Piémont 
et la Savoie rapportaient 1 60 florins d'or en moyenne^ et 
100 écus d'or en 1517 ' ; le diocèse de Metz, 130 florins* ; 
le diocèse de Besançon, 400 francs en moyenne * ; celui de 
Lyon, 70 francs •, etc. 

D'autres fois, les hôpitaux dépendants se chargeaient 
eux-mêmes de ces collectes^ en payant à leur chef la rede- 
vance accoutumée '. 

M. Castan estime à 7,500 francs j représentant au moins 
^OjOOO francs de nos valeurs actuelles, le revenu des 
quêtes à la fin du xv* siècle, pour la seule maison de Besan- 
çon ; et à la fin du xvn* siècle, lorsqu'elles ne s'exercèrent 
plus que dans le ressort du diocèse, à 3,000 francs, qui en 
vaudraient aujourd'hui 10,000 *. 



* Nous ne pensons pas que Besançon ait quêté pour son compte en Angle- 
terre, province qui faisait partie des territoires concédés à Thôpital de Rome. 

* A. Castan, Notice^ II, p. 200. Ajoutez le diocèse du Puy (i4$4), les évèchés de 
Metz, Toul et Verdun, le Luxembourg (1^40). Krch, de Vhôp. de Besançon, Cas. 
C. B. I 9. 

* Actes d*amodiations de 1419 à IS?^ Arch. de VMp. de Besançon, Cas. C, 
Boite I, chap. $>. 

* Actes de 1467 à 1^9* Ibid,, B. $*. 
» IJ45-1667. Ibid,, B. I, chap. S'. 

* i4$7-i$a7. Ibid, — Les Flandres, la Picardie et le diocèse de Soissons sont 
amodiés pour 600 francs (1511-1516). Ibid., B. $* ; — le diocèse de Reims, pour 
;o écus d*or (i489-i$8i). M., Ibid. 

^ En 14^9, Toul paie à Besançon 12 florins pour les diocèses de Toul et 
Verdun; Vaucouleurs et Neufchâteau prennent à bail le diocèse de Metz et le 
Luxembourg (1529-16^6). Ibid., B. I, chap. 8*, 9. — Steflîanfeldt se charge des 
localités de langue Allemande, et Toul de celles de langue française des 
Trois- Evèchés, moyennant 25 ducats chacun (1497)* Ibid. B. 1, chap. 5'. 

* Notice, II, p. 201. 



QUÊTES ET TRIBUTS I4I 

Si cette maison conserva pendant longtemps le monopole 
des quêtes en de vastes régions, ce ne fut pas toujours sans 
débats ni procès. Plusieurs rivales lui disputèrent des 
portions de territoire au XV« siècle. Dijon envoyait ses 
quêteurs dans les provinces de Sens, Tours, Bourges, Rouen, 
Reims, Lyon et Vienne ' ; or ces trois dernières apparte- 
naient à la circonscription de Besançon. De là, réclamations 
et interdiction par le commandeur Bisontin, frère Lambelet 
Vernier. Le débat, porté devant le grand maître, se 
termina, en 1449, par une sentence confirmant à Besançon 
les provinces contestées, à l'exception du diocèse de Châlons- 
sur-Mame *. 

Dans le même temps, la maison de Pont-Saint-Esprit 
lui faisait une redoutable concurrence dans le Piémont, la 
Savoie, la Bresse et le Bugey. Le grand maître, par une 
sentence du 19 mars 1434, donna droit encore à l'énergique 
recteur de Besançon ; mais celui-ci, par esprit de concilia- 
tion, céda ces quêtes à son rival, moyennant une indemnité 
annuelle de 40 florins, jusqu'à l'époque où la maison de 
Pont-Saint-Esprit tomba dans la décadence précoce des 
hôpitaux des provinces méridionales '. 

Dès la fin du XI V* siècle, Toul cherchait à enlever à 
Besançon le monopole des Trois-Evêchés. Il y réussit en 
partie et pour un temps, en vertu d'une bulle de Clément VII 
(1391), et moyennant un tribut annuel de 12 florins à son 
chef. Mais plus tard le diocèse de Metz demeura définiti- 
vement à Besançon *. 

Il ne faudrait pas croire que le produit entier des quêtes 
fût consacré uniquement aux maisons magistrales. Il 



* D. Calmelet, Hist, ms de Dijon^ chap. III. 

* En outre, Besançon échangeait les portions de territoire du Duché de 
Bourgogne appartenant à ce diocèse, contre celles de Franche-Comté qui 
dépendaient du diocèse de Langres. Arch, de Vhôp, de Besançon, B. I, ch. 5*. 

» Id.j Ibid, — Arch, de Vhôp, du Saint-Esprit de Rome^ Lib. 19, fol. 18. -^Diplom, 
II, p. ^84. 

4 Arch. de Vhôp, de Ses,, B. I, chap. 7, 8 a. 



142 BIENS ET PRIVILiOES DE l'oRDRB 

arrivait souvent que celles-ci venaient en aide à leurs mem- 
bres dans leurs calamités et leurs besoins, soit en leur 
donnant une partie du rapport, soit en les autorisant à 
quêter pour leur propre compte '. 

Le chapitre de Rome accordait aussi quelquefois la faveur 
de quêter dans les territoires réservés aux grandes maisons 
magistrales. Mais ces concessions étaient essentiellement 
transitoires et il fallait, pour les obtenir, des motifs de 
nécessité majeure *. 

Nous verrons plus tard que les souverains et les parle- 
ments, à partir du XV* siècle, s'arrogèrent le droit 
d'autoriser et d'interdire les quêtes. C'était là un empiète, 
ment abusif sur l'autorité spirituelle, dont l'histoire de notre 
ordre à cette époque ne nous offrira que trop d^exemples. 

Dans l'exposé que nous venons de faire, nous avons parlé 
surtout des quêtes de l'hôpital de Besançon. La perte des 
archives des autres commanderies magistrales ne nous eût 
pas permis d'entrer à leur égard dans des détails aussi 
précis. Néanmoins les documents qui survivent nous mon- 
trent leurs quêtes organisées de façon analogue à celles 
de Besançon. Nous pouvons donc conclure que les quêtes 
formaient l'une des principales sources de revenus de 
l'ordre du Saint-Esprit. 

TRIBUTS. — Il nous reste à signaler en dernier lieu les 
tributs, auxquels étaient tenus annuellement les membres 
inférieurs en faveur des maisons-mères, et les commanderies 



^ Ed 1472, frère Pierre Mathieu, commandeur de Montpellier, cède à ses 
suffragants le produit des quêtes (quasstuaria lucra) et les cens annuels. Arch. 
de Vhôp, du Saint-Esprit de Rome, Lib. 19, f» 175. — Affectation des quêtes du 
diocèse de Metz à la reconstruction de Thôpital de Vaucouleurs, détruit par les 
guerres (1498). Arch. hôp, de Bes,, B. I, ch. 9. — Voy. les Notices de Gray, 
Besançon, Neufchàteau, etc. 

* Permission (1500) à frère Bertin, recteur de Toul, de quêter dans les 
diocèses de Cambrai, Utrecht, Tournai, pour réédifier sa maison, brûlée par 
l'ennemi. Arch. du Saint-Esprit de Rome, Lib. A, f° 104. — Concession de 
quêtes en Allemagne, à frère Erhardus, recteur de Berne (1458}. Ibid,^ Lib. 22. 
!• 68, etc. 



QUÊTES ET TRIBUTS I45 

magistrales envers Thôpital de Sainte-Marie in Saxia. On 
appellait aussi ces tributs, canons et responsions. Ce 
dernier nom signifiait, dans les ordres militaires, la rede- 
vance annuelle dont les maisons, ainsi que chacun des 
chevaliers, s^acquittaient pour la défense des Lieux-Saints*. 

La responsion était une marque de dépendance ; c'est à 
ce titre que frère Michel de Cesis, visiteur général de 
rOrdre, rappelait cette obligation, en 1346^ aux membres 
de Besançon, qui cherchaient à s'y soustraire*. Elle se 
soldait au chapitre provincial annuel, auquel tous les 
recteurs suffragants étaient tenus d'assister. Le taux des 
canons variait avec l'importance des maisons '. 

A leur tour, les maisons magistrales, et celles qui rele- 
vaient directement de Rome, devaient au chef de l'Ordre 
un tribut proportionné à leur importance. Les visiteurs 
généraux recueillaient ces sommes et les faisaient parvenir 
ensemble à Rome, par l'intermédiaire de marchands ou de 
banquiers ; ou bien les recteurs les portaient en se rendant 
au chapitre général de la Pentecôte *. 

Beaucoup de communautés hospitalières et de monastères 
demandaient à l'Ordre la participation aux mérites spiri- 
tuels de ses œuvres ; une redevance annuelle était aussi la 
marque du lien qu'elles contractaient avec lui. On trouve, 
dans la liste de ces affiliations spirituelles, des hôpitaux et 



* Ducange, V» Responsio, 

' Arch. de Vhôp, de Bes,, chap. I, n^ i. 

' Voici ceux de quelques dépendances d Auray en 1^1$ et 1^18 : Coutances, 
lolivres tournois ; Mayenne, 1 5 livres ; la Plagne, 5 livres. Diplomataj II, p. ^78. 
Les redevances dues à l'hôpital de Besançon variaient de 3 à 10 frs. Voy. PUces 
iuslif,, n*» V. 

* Le montant du canon de Montpellier a varié de ; à la ducats d'or de caméra; 
Besançon payait 10 ducats d'or ou 15 florins, et 27 florins pendant l'annexion 
de Dijon (1440-14Ô0) ; Dijon, 15 ducats ou 9 ducats d'or de caméra ; Toul, la 
ducats d'or; Troycs, i ducat; Steffanfeldt, 40 florins d'or du Rhin pour sa part 
et autant pour ses membres ; Vienne (Autriche), 12 ducats d'or, Aalborg 
(Danemark), 12 florins du Rhin ; Memmingen, 12 florins d'or ; Carthagène 
(Amérique ou Espagne). 81 aurci ; Cusco (Pérou), 81 aurei, (Arch. de Vhôp, du 
Saint-Esprit de Rome. Tables des redevances). 



144 UE"s KT nnmioB de loumlb 

des monastères d'hommes et de femmes d^Italie, d'Equ^rne. 
de Portugal, etc., et jusqu'aux célèbres couve&ts du mont 
Athos et de Sainte-Catherine du mont Sinai en Egypte 
(1591) % preuve éclatante de la grande place occupée par 
Tordre du Saint-Esprit entre les grands instituts religieux. 
La redevance annuelle, pour ces hôpitaux, monastères on 
confréries étrangères, était d*un ducat d*or. Nous manquons 
d'éléments suffisants pour apprécier le revenu que pou- 
vaient retirer, soit les maisons conventuelles, soit l*hôpital 
de Sainte-31arie in Saxia. de ces diverses redevances. A 
supposerjque nous connaissions le taux des tributs de toutes 
les maisons, il resterait à établir l'évaluation des monnaies 
anciennes en valeurs actuelles, pendant plusieurs siècles 
et en différents états. C'est là une opération difficile et 
fort délicate, que nous n'essayerons pas d^entreprendre. 
Disons seulement que, selon l'estimation commune, les 
sommes de un à quinze florins ou ducats d'or, moyenne des 
tributs au XV* siècle, vaudraient aujourd'hui de vingt à 
deux cents francs. 



n. PRIVILEGES ET INDULGENCES 



Dès la plus haute antiquité, les Souverains Pontifes, 
pasteurs suprêmes de tout le peuple chrétien, ont soustrait 
à la juridiction épiscopale, des lieux, abbayes ou églises, 
et des personnes, pour les rattacher directement à leur 
autorité. Telle est l'origine des exemptions^ qui ont tenu 
une si gprande place dans TEglise. Toutefois, si un grand 
nombre de monastères avaient été placés par leurs fonda- 
teurs sous la protection de S. Pierre {sub liber tate B. 



' Arch. de l'hâp.dc Rome, Lib. V, f* 86 ; G, f* 146 ; S, (^ 4 ; "1 ^ I9 v», etc. 



PRIVILÈOBS ^ 145 

Petri)^ ils demeuraient longtemps encore sous la tutelle 
des évèques pour Tensemble de la discipline, soumis à sa 
visite, etc. Leurs privilèges, plus ou moins étendus, respec- 
taient encore la juridiction ordinaire. Mais les ordres 
mendiants qui parurent au XIIP siècle, firent prendre aux 
exemptions un immense essor. Les Dominicains et les 
Franciscains étaient des apôtres ; leur vocation n'était pas 
de fonder des églises ou des monastères stables, mais de 
se porter partout où TEglise et la religion avaient des 
intérêts à défendre, des âmes à gagner. Créés en dehors 
de toutes limites territoriales, ils ne pouvaient manifeste- 
ment dépendre que du chef unique de Tapostolat dans le 
monde, qui est le Vicaire de Jésus-Christ \ 

L'ordre du Saint-Esprit, objet constant de la sollicitude 
paternelle des chefs de TEglise, participa de très-bonne 
heure et dans la plus large mesure, à ces privilèges. Nous 
savons déjà les grâces nombreuses dont Innocent III le 
favorisa dès sa naissance. Le libre choix du grand maître 
par les chapitres de Rome et de Montpellier ; la soustraction 
de ce même grand maître à toute autre juridiction que celle 
du Pape ; la liberté de construire partout des oratoires et 
des cimetières à Tusage de la famille hospitalière ; le 
droit de requérir l'évèque diocésain pour les consécrations 
et les ordinations et de s'adresser à tout autre sur son 
refus ; l'autorisation de réciter l'office dans leurs églises en 
temps d'interdit ; l'exemption de tous décimes et impositions 
des laïques ou des ecclésiastiques, tandis qu'ils pouvaient 
accepter toutes les redevances qui leur étaient octroyées 
du consentement de l'évèque ; enfin^ l'établissement de 
quêtes générales annuelles, avec privilège pour les quêteurs 
de faire cesser l'interdit des églises où ils annonçaient leurs 
indulgences, et d'une confrériedont les membres jouissaient 



* D. Gréa, De l' Eglise et de sa divine constitution, p. 476 ; » R. P. Danzas, 
Etudes sur les temps primitifs de V ordre de Saint-Dominique, t. III, chap. I. 

10 



I-l^ B1E3KS ET PMTILÉCCS DE L'OUNtE 

de faveurs très notables : tels étaient les prhrilèges fort 
en\-îés que l'Ordre tenait de raffecdon du grand Pape *. 
Cependant ce n'est point encore l'exemption absolue. Les 
évéques conservent la juridiction sur les maiscms et les 
frères de leur diocèse ; le maître a le droit de leur présenter 
les chapelains destinés à desservir les chapelles et à admi- 
nistrer les sacrements aux malades; mais eux seuls peuvent 
confirmer ce choix par Tinstitution canonique *. Il faut aller 
jusqu'à Nicolas IV, en 1289, pour voir l'Ordre jouir d'une 
immunité complète : « De même, dit ce Pape, que nos 
prédécesseurs ont soustrait la personne du précepteur de 
Rome et de ses successeurs à toute juridiction, puissance 
et domination des ordinaires ou des autres personnes 
ecclésiastiques, quelles qu'elles soient ; de même nous 
exemptons et libérons absolument et pour toujours, de notre 
science certaine, les frères dépendant des membres de 
notre hôpital du Saint-Esprit de toute juridiction, autorité, 
puissance de tous ordinaires et autres personnes ecclé- 
siastiques Nous défendons par les présentes d*excom- 

munier ou de suspendre les frères eux-mêmes, ou leurs 
hôpitaux, églises, oratoires, chapelles, maisons et autres 
lieux consacrés par la piété, ni d'exercer une juridiction 
quelconque sur leurs personnes ou leurs biens ; déclarant 
d'avance nul et de nul effet tout ce qui sera tenté à rencontre 
de notre privilège. * ». 



* Ces privilèges font l'objet de la )* bulle d'Innocent III, do 18 loin 1204 
(Diplomata, I, p. $,) 

• Bulles dinnocent III (1198), d'Honorius III (1225), de Grégoire IX (122^ 
Alexandre IV (12(6), dans les Diplomata, 

' Nos vero, sicut personam preceptoris et successorum suorom predeces- 
sores nostri a jurisdictione, potestate, auctoritate et dominio quorumlibet 
ordinariorum, et aliarum ecclesiasticanim personanim eximere procuramnt ; 
sic etiam fratres membrorum hospitalium ab hospitali nostro predicto Sancti 
Spiritus ab omni jurisdictione, potestate, auctoritate, quorumlibet dominio 

ordinariorum, et aliarum ecclesiasticanim personarum totaliter et perpetuo, 

ac ex certa scientia prorsus eximimus, et liberamus omnino Presentium 

auctoritate Vobis precipimus, ut ipsos fratres excommunicâre aut suspendere, 
aut hospitalia, membra eorum, ecdesias, oratoria, capellas, domos et alia 



PRIVILÈGES 147 

Dès lors, l'ordre entier ne relève plus que du grand 
maître et du Pape ; les évoques ne peuvent s'immiscer dans 
les maisons que s'ils sont munis d'une délégation apostolique 
toute spéciale. Mais au contraire ils sont tenus, sur la 
demande du recteur, de lui prêter main-forte pour la 
répression des frères turbulents ou rebelles * ; ils doivent 
aussi donner aux collecteurs, toutes les fois qu'ils le 
demandent, des lettres de convocation pour la proclamation 
des indulgences ; déclarer et faire déclarer absous, par les 
curés, ceux que les frères ou leurs nuntii ont jugé bon 
d'absoudre, selon leurs prérogatives *. Si des prêtres 
veulent se vouer pour un an ou deux au service des pauvres 
dans les hôpitaux de l'Ordre, les évêques l'auront pour 
agpréable '. 

Les maisons du Saint-Esprit sont de véritables paroisses, 
où les prêtres de l'Ordre administrent les sacrements et 
chantent l'office canonial. Tout membre de la confrérie, et 
même tout fidèle qui en fait choix, est inhumé dans 
l'église ou le cimetière, sans aucune autorisation de sa 
paroisse *. L'ordinaire ne peut refuser aiJx frères son assen- 
timent pour le ministère delà prédication et de la pénitence 
dans tous les lieux où se trouvent des maisons de l'Ordre, 
non plus que dans le cours des quêtes et collectes *. 

Boniface VIII renouvelle et confirme de nouveau toutes 
ces faveurs et en ajoute de nouvelles. Certains ambitieux 
s'efforçaient de s'enrichir des dépouilles de l'Ordre en 
impétrant en cour de Rome ses hôpitaux et ses chapelles ; 



clesiastica seu pia loca ipsorum interdicere nullatenus presumatis.. • Bulle 
de Nicolas IV, du 1$ mai 12R9. (Dt^/cma/ai I,p. M) 
'Ibid. 

• Ibid. 

• Ibid. 

• Ibid, — Une sentence de l'Official de Besançoa (i^o) reconnut à Vhô- 
pital le droit d'inhumer les paroissiens de la Madeleine, sans les présenter à 
cette église, (Arch, de Vhôp, de Bes., Cas. D, B. I. 

• BulU de Nicolas IV, ibid. 



148 BIENS ET PRIVILÈGES DE l'ORDRE 

le Pape veut qu*à Tavenir toutes les impétrations qui ne 
feraient pas mention expresse de sa défense soient entiè- 
rement nulles *. Boniface exempte aussi les frères des 
dîmes qui revenaient aux paroisses. Déjà Innocent III les 
avait soustraits aux dîmes sur les possessions immobilières ; 
il s'agit ici des portions canoniques on justices^ c'est-à- 
dire, de la part qui revenait à Téglise paroissiale sur le 
blé, le vin, les lits, les étoffes et les animaux offerts par 
les fidèles ainsi que les droits des funérailles, lorsque les 
sujets des paroisses se faisaient enterrer à l'hôpital *. 

Le code des privilèges et exemptions de TOrdre ne s'est 
constitué que peu à peu. L'exemption totale de la juridiction 
des ordinaires lui est accordée au bout d'un siècle ; chaque 
Souverain Pontife, pour ainsi dire, apporte sa pierre à 
l'édifice de ses libertés; tous tiennent à honneur de 
favoriser davantage sa mission sublime. Après Innocent III, 
Ghrégoire IX, Boniface VIII, voici venir Urbain V, Dans 
un temps où l'excommunication jouait encore un très grand 
rôle dans la répression judiciaire, ce Pape accorde à tous 
les bienfaiteurs et confrères de l'Ordre la liberté de choisir 
parmi les prêtres rég^uliers ou séculiers, un confesseur 
capable, qui aura le pouvoir de les absoudre, une fois 
dans leur vie, de tous leurs péchés, même de ceux réservés 
au Souverain Pontife*. Les collecteurs au service de l'Ordre 
et les gardiens des troncs des églises participent à tous 
ces privilèges ; les légats du Saint-Siège eux-mêmes ne 
peuvent les excommunier ou les interdire sans un pouvoir 
spécial du Pape *. Ils ont le premier rang avant tous les 
autres collecteurs et une place de faveur pour leurs troncs 
et bassins dans les églises *. Et s'il arrive que des évoques 



* Bulle de 1294; Diplomata^ I, p. 4^ 

* Bulle de 1297. Ibid.j p. 47. 

* Vrb. V Const (n68). Ibid., p. 60. 

* Greg, XI Const, I fu72). Ibid., p. 67. 
» Ibid, 



INDULGENCES I49 

OU des curés interdisent les quêtes et la publication des 
indulgences, ils encourent ipso facto l'excommunication 
réservée au Saint-Siège \ Ordre est donné aux notaires et 
confesseurs d'exciter les mourants à des libéralités envers 
Tordre du Saint-Esprit et de faire parvenir au plutôt ces 
aumônes aux intéressés *. Enfin tous les moyens sont mis 
en œuvre pour amener les fidèles à collaborer au soutien 
des frères et des malades. Les privilèges concédés pendant 
les XV* et XVP siècles avaient surtout pour objet l'indépen- 
dance temporelle de TOrdre et la conservation de tous ses 
biens à la libre et entière disposition des grands maîtres 
contre les entreprises du clergé séculier et même des 
laïques, qui cherchaient à s'en emparer comme de bénéfices 
ordinaires. Mais malheureusement, les anathèmes multi- 
pliés des Papes restèrent souvent impuissants, et grand 
nombre de maisons, dans le midi de la France surtout, 
dans leurs efforts pour se rendre indépendantes de l'autorité 
de l'Ordre, finirent par tomber dans celle des municipalités. 

INDULGENCES. — Cette énumération des privilèges de 
l'Ordre serait incomplète, si nous n'ajoutions les faveurs 
spirituelles accordées aux frères et à leurs bienfaiteurs. 
Nous ne savons si l'on trouverait réunies dans un autre 
ordre religieux des indulgences si nombreuses et si impor- 
tantes. Les Papes se sont m ontrés vraiment d'une sainte 
prodigalité pour leur œuvre de prédilection. Nous ne 
pouvons tout citer ; la liste serait trop longue. Contentons- 
nous de rassembler dans un tableau général toutes ces 
faveurs spirituelles si précieuses. 

Les Papes eurent à cœur tout d'abord de combler de 
biens spirituels ceux qui n'avaient pas reculé pour les 
obtenir devant l'abandon des biens temporels. Les indul- 



• Urb. V Const., fbid., p 6x. 

• Sixti IV ConsL ///(1477). Ibid., p. 107. 



I50 BIEHS ST PRIYIliGES DE L^OKDIIE 

gences plénières étaient alors beaucoup plus rares 
qu'aujourd*hui ; elles étaient regardées par les fidèles 
comme d'un prix inestimable. Les frères du Saint-Esprit 
furent favorisés de plusieurs indulgences plénières et d*une 
multitude d*indulgences partielles considérables. En voici 
renoncé, tel que le rapporte une bulle d'Innocent VIII, 
en 1485 : 

Innocent III a accordé aux frères et aux sœurs de Tordre 
du Saint-Esprit un an et 40 jours d'indulgences ' tous les 
jours de Tannée ; 

Alexandre IV, 4000 ans et 800 quarantaines, et en même 
temps la rémission de la septième partie des péchés, le 
jour de la Pentecôte et tous les jours de son octave, ainsi 
que le second dimanche après TEpiphanie ; 

Le même pape accorde 3000 ans, 3000 quarantaines et 
la rémission du tiers des péchés tous les premiers dimanches 
de chaque mois ; plus 2000 ans et la septième partie des 
péchés tous les jours de Toctave de la Fête*Dieu; 

Célestin V, 100,000 ans pendant Toctave de TEpiphanie, 
et 30,000 pendant celle de la Nativité de la Sainte- Vierge ; 

Clément V, 2000 ans et 800 quarantaines pour Toctave 
de Pâques ; 8000 et autant de quarantaines pour celle de la 
Pentecôte, plus la rémission totale des péchés ; 

Boniface VIII, 2000 ans et 800 quarantaines les jours 
de Toctave de T Ascension; 

Innocent VI, 2000 ans et 2000 quarantaines le jour de 
TAssomption et pendant Toctave ; 

Benoit XII, 3000 ans et autant de quarantaines, depuis 
la fête de la Toussaint jusqu'à la Saint-Léonard. 



* Il n*est peut-être pas inutile de rappeler ici que, suivant Tinterprétation 
commune, une indulgence de dix, quarante, cent jours, de sept ans et sept 
quarantaines, etc., est la remise de la peine canonique qu'il aurait fallu accom- 
plir pendant le môme temps dans la primitive Eglise, ainsi que la rémission de 
la peine du purgatoire qu'on aurait rachetée devant Dieu par cette pénitence 
canonique. 



INDULGENCES I 5 ) 

Il faut ajouter la somme des indulgences attachées aux 
messes célébrées dans TOrdre, évaluées par Innocent VIII 
à 32000 ans chaque année, puis l'office des frères, équivalant 
à la même somme, et nous aurons un aperçu d'ensemble 
de ces grâces vraiment extraordinaires *. 

Les faveurs accordées aux bienfaiteurs ne sont pas moins 
remarquables. 

Ils gagnent une indulgence plénière le jour de la Pente- 
côte, plus 8000 ans et mille quarantaines, lorsqu'ils visitent 
un hôpital du Saint-Esprit dans l'octave de cette fête ; trois 
ans et trois quarantaines aux fêtes de Notre-Seigneur 
(Noël, Circoncision, Transfiguration, Pâques, Ascension), 
et à celles de la Vierge (Annonciation, Assomption, 
Nativité, Purification) ; — un an et 40 jours chaque 
jour octaval de ces fêtes, et tous les vendredis de l'année,^ 
en l'honneur de la Passion du Sauveur ; — la participation 
aux messes, matines, vigiles, jeûnes et aumônes qui se 
font et se feront dans l'Ordre à jamais ■. 

En outre, les collecteurs reçoivent le pouvoir de remettre 
tous les péchés, même ceux réservés au Saint-Siège, 
à celui qui donnera de ses biens à l'Ordre, selon sa fortune 
et la qualité de ses fautes, chaque fois qu'il sera en péril 
de mort ; on doit en croire les frères, ajoute Clément V, 
« car ceux-ci ne sont point quêteurs et n'abusent point, 
mais ils sont de véritables religieux approuvés et exempts 
par la grâce du Saint-Siège apostolique '. » 

Ils peuvent aussi composer avec les coupables touchant 
l'usure, les rapines, les incendies (à moins qu'il ne s'agisse 
de bien d'Eglise), les dommages causés, les biens mal 
acquis, lorsqu'il est devenu difficile de savoir à qui revient 
la restitution, ou de découvrir les ayants-droit; les legs 



' Voy. Innoc. VIII Const. I. (Dlplom., I. p. 119). 

* Bulles de Clément V et d'Innocent VlII^déjà citées. 

» Ibid. 



152 BI£NS ET PRIVILÈGES DE L'ORDRE 

faits pour de pieux usages, sans destination plus explicite; 
les commutations de vœux, sauf celui de Jérusalem; les 
sacrements profanés, les parjures ; les heures omises par 
les clercs ;le travail des dimanches et fêtes ; le rachat des 
pénitences imposées par les confesseurs ordinaires pour 
toutes sortes de fautes *. 

Les bienfaiteurs sont admis à la participation des stations 
et dédicaces de l'Eglise romaine, et du pèlerinage de 
Terre-Sainte •. 

Enfin, pour encourager Tœuvre des enfants délaissés. 
Innocent VIII accorde la rémission entière de leurs fautes, 
même réservées, à ceux qui retirent de Thôpital du Saint- 
Esprit un enfant pour le nourrir et Télever pendant un an 
et demi, à ceux qui prennent en mariage une des jeunes 
filles élevées dans les maisons de TOrdre, ou qui donnent 
en argent la somm e nécessaire à leur entretien ou à leur dot '. 

Tous ces privilèges et ces indulgences, renouvelés par la 
plupart des Souverains Pontifes, appartinrent à l'Ordre 
jusqu'au concile de Trente. Cette assemblée, entre autres 
abus, réforma ceux qui se commettaient au sujet des indul- 
gences, et Pie IV, conformément aux décrets du concile, 
interdit, en 1562, la publication de celles de l'ordre du 
Saint-Esprit, comme il le fit pour tous les autres ordres 
religieux. Mais deux ans après, ayant reconnu leur authen- 
ticité parfaite et leur nécessité pour le soutien des pauvres, 
il leva ses défenses et ordonna à tous les recteurs des églises 
de publier les indulgences de TOrdre sans aucun salaire *, 
Depuis cette époque, la possession de l'Ordre ne fut plus 
troublée jusqu'à son extinction. 



' Bulle de Jean XXII (1^28). Diplom,, I, p. ^4. 
* Bulle de Clément V. 

« Innoc. VIII, 4* bulle (1488). D^lom., I, p. i^i. 
' Bulle de Pie IV (1^64). Diplom.j I, p. 147. 




CHAPITRE IV 



CONFRÉRIE DU SAINT-ESPRIT 



SiW 



|N même temps qu'il fondai t Tordre du Saint-Esprit, 
Gui de Montpellier eut l'inspiration féconde de 
lui adjoindre une institution qui devait augmenter 
notablement et ses ressources et son influence. Le premier 
peut-être dans l'Eglise il conçut le projet de ces associations 
de personnes pieuses, qui, sans se lier par aucune règle 
religieuse ni aucun vœu, consacrent une partie de leur 
temps à des œuvres d'assistance et de charité. Nous savons 
d'une manière certaine à quelle époque fut fondée la con- 
frérie du Saint-Esprit : elle remonte à l'origine même de 
l'Ordre. Nous ne connaissons pas d'association de ce 
genre qui puisse par des titres sûrs faire remonter sa 
naissance à la fin du XII® siècle. La confrérie du Confalon, 
réputée la plus ancienne de Rome, fut approuvée par 
Clément IV en 1264*, c'est-à-dire plus de soixante ans 
après l'érection de celle de Sainte-Marie inSaxia, Celle-ci 
en eflFet se trouve citée dans la troisième bulle d'Innocent III, 
de l'année 1204: « Nous voulons, écrit le Pape, que les 



* Elle avait pour but le rachat des captifs.* Voy. l'Abbé Jouhanneaud, Dict. 
des indulgences, confréries et associations catholiques (Coll. Mignc), p. 26^ 



154 OOVrRÉUE DC SADKT 



receveurs ou collecteurs de vos oonfiréries soient placés 
sous la protection de saint Pierre et la nôtre, sauf le droit 
de leur seigneur, et que leur paix ne soit point troublée. 
Nous décrétons aussi que quiconque sera reçu dans votre 
confrérie, s'il arrivait qu'à sa mort Téglise paroissiale à 
laquelle il appartient se trouvât en interdit, la sépulture 
ecclésiastique ne lui soit point refusée '. n 

Dès cette époque, comme cette citation le démontre 
évidemment, la confrérie du Saint-Esprit était en plein fonc- 
tionnement, avec ses collecteurs et son organisation 
complète, non seulement à Rome, mais en beaucoup 
d'autres lieux. 11 y a plus, car nous sommes en mesure 
d'affirmer qu'elle existait à Montpellier avant que Gui ne 
vint se fixera Rome, et que par conséquent son institution 
remonte au berceau même de l'Ordre. La preuve nous en 
est fournie par le fait de son existence à 3larseille anté- 
rieurement à Tannée 1189, époque où les confrères 
fondèrent l'hôpital de cette ville *. Il est donc permis de 
croire que dès l'origine, chaque hôpital avait pour annexe 
indispensable une confrérie. Aussi la règle se préoccupe- 
t-elle de fixer l'ordre et la cérémonie des admissions. Un 
chapitre spécial expose : comment on doit accorder 
société à ceux qui la demandent. « Lorsque, lit-on, 
quelqu'un demandera à être associé aux frères et désirera se 
recommander à leurs prières, il se présentera au chapitre 
et se prosternera contre terre, pendant que le prieur ou 

un autre prêtre récitera sur lui les prières suivantes 

Cela fait qu'on lui accorde la société en lui faisant toucher 



* Decernimus insuper ut receptores fraternitatum vestrarum salvo jure 
dominorum suorum in beati Pétri et nostra protectione consistant, et pace in 
terris in quibus fuerint potiantur. Simili etiam modo sancimus, ut quicumque 
in vestra fuerit fraternitate receptus ; si forsan parochialts ecclesia, cujus ipse 
parochianus extiterit, a divinis fuerit officiis interdicta, eumque mort contigerit, 
ipsi sepultura ecclesiastica non negetur, nisi excommunicatus vel nominatim 
fuerit interdictus.(Di/?/om. I, p 7). 

* Voir à la troisième partie la notice de cet hôpital. 



CONFRÉRIE DU SAINT-ESPRIT 15; 

l'Evangile et Tétole, avec ces paroles : nous vous donnons 
société avec nous, par la participation à toutes nos prière s 
et au mérite de nos œuvres de charité. Les assistants 
répondent : Deo gratias. Ensuite le nouveau confrère 
recevra de tous les frères le baiser de paix et on inscrira 
son nom sur le livre de la confrérie *. » 

A vrai dire, c'est là tout ce que nous connaissons de la 
confrérie dans les deux premiers siècles ; les bulles ponti- 
ficales et les autres documents concernant l'Ordre ne font 
guère alors que constater son existence, sans entrer dans 
les détails de son organisation. Nous savons seulement 
qu'elle tenait une place distinguée à la tète des œuvres 
paroissiales. La noblesse et la riche bourgeoisie tenaient à 
honneur de se faire inscrire sur le registre des confrères 
et de s'associer aux bonnes œuvres de l'Ordre. 

Les quelques renseignements qui nous sont parvenus 
permettent toutefois de juger que son organisation était 
dès lors de tout point semblable à celle des temps plus 
récents. A partir du XV« siècle les documents abondent et 
nous révèlent très clairement toute son économie. Deux 
Papes se montrèrent à cette époque les restaurateurs zélés 
de la confrérie, dans son siège de l'hôpital romain ; ce 
furent Eugène IV (1446) et Sixte IV (1477). Leurs bulles, 
en nous faisant connaître la confrérie de Sainte-Marie in 
Saxia, nous découvriront en même temps l'organisation de 
toutes les autres, qui n'étaient que les membres, ou plutôt 
l'extension et le développement de la première. 

Eugène IV, en montant sur le trône pontifical, trouva 
la ville de Rome encore couverte des ruines occasionnées par 
le long séjour des Papes à Avignon et par l'anarchie qui en 
avait été la suite. L'hôpital du Saint-Esprit n'avait pas été 
épargné. Les bâtiments ruinés, les revenus anéantis, les 
vastes domaines en friche ou perdus, et par une conséquence 



* Régula, c. IV. Qualitcr societas nostra pctentibus detur. 



I>6 CONFRÉRIE DU SAlNT-fiSFRlT 

trop naturelle. Thospitalité supprimée presque totalement 
par suite du petit nombre des frères : telle était la situa- 
tion lamentable de cette institution si chère aux Papes. 
Eugène IV s'efforça de lui rendre son ancienne splendeur. 
Dans une bulle du 25 mai 1446, après s'être félicité du succès 
de ses efforts, il continue en ces termes : 

« Au nombre des meilleurs soutiens du renom de cet 
hôpital, et comme Tune de ses principales ressources, nos 
prédécesseurs avaient institué et enrichi d'insignes largesses 
spirituelles une confrérie célèbre, à Tusage des personnes 
des deux sexes, dont les noms se trouvent encore inscrits 
sur des livres très anciens . 

« Nous donc, qui, dès les premiers temps de notre élé- 
vation, avons pris un soin très exact des hôpitaux et de 
ceux qui les gouvernent ; afin de ne rien omettre de ce qui 
peut contribuer à Tomement et à la gloire de cette maison ; 
et aussi dans le but d'augmenter ses ressources par les 
aumônes d'un grand nombre de fidèles, attirés au moyen 
de faveurs de choix : voulant marcher sur les traces de nos 
prédécesseurs, nous restaurons cette confrérie presqu'en- 
tièrement interrompue depuis de longues années. A toutes 
personnes ecclésiastiques ou laïques des deux sexes, qui se 
feront recevoir de ladite confrérie et inscrire sur ses 
registres, en versant la somme de trois florins d'or à leur 
réception et chaque année un gros de dix au florin, entre 
les mains du camérier ou de ses députés, fious accordons 
les privilèges suivants, à savoir : 

« Tous les prêtres que les nouveaux confrères choisiront 
pour confesseurs, auront pouvoir de leur accorder la rémis- 
sion entière de tous leurs péchés, à l'article de la mort, 
s'ils s'en confessent avec un cœur contrit. 

« De plus, en vertu de notre présente concession, ces 
confesseurs pourront, dans les deux mois qui suivront la 
réception des confrères et une fois seulement pour leur 
vie, leur donner Tabsolution pleine et entière de tous leurs 



CONFRÉRIE DU SAINT-ESPRIT I $7 

péchés, crimes et excès, même des cas réservés au Saint- 
Siège. Ils auront soin toutefois de leur imposer une péni- 
tence convenable, afin que notre indulgence ne leur facilite 
point le retour à leurs égarements. » 

Le Pape ajoute, en faveur des pauvres, qu'ils pourront 
être reçus malgré l'impossibilité de solder la cotisation ; 
qu'ils n'auront seulement pas droit à l'absolution plénière ^ 

On voit par les paroles d'Eugène IV, que la confrérie 
était depuis longtemps célèbre, grâce aux nombreux pri- 
vilèges dont l'avaient favorisée ses prédécesseurs. Nous 
possédons en effet une bulle d'Urbain V, qui, près d'un 
siècle auparavant, lui concède aux mêmes conditions les 
faveurs que celui-là ne fit que renouveler. Seulement, il y 
avait joint une disposition spéciale, inspirée par les circons- 
tances : les revenus de la confrérie devaient être partagés 
en deux parts, dont la première serait réservée à l'entretien 
des hôpitaux de l'Ordre, et la seconde au soutien des Croi* 
ses de Terre-Sainte*. 

Le registre dont parle Eugène IV, et sur lequel devaient 
être inscrits les noms des confrères, existe encore aux 
archives de l'hôpital du Saint-Esprit de Rome. C'est un 
beau manuscrit petit in-folio en parchemin. 

Les premières pages, ornées d'initiales à miniatures, sont 
occupées par la bulle d'Eugène IV. Viennent ensuite les 
noms des nouveaux confrères, et en premier lieu celui du 
Pape, écrit de sa propre main, avec promesse d'une subven- 
tion de 200 ducats pendant sa vie et looo après sa mort. 
Dix cardinaux, suivant l'exemple du Pontife, ont signé • 
après lui, et promis annuellement dix ducats. Les exemples 
sont plus efficaces que les exhortations : bientôt abondent 
les signatures d'archevêques, d'évêques^ de membres de la 
cour pontificale, de personnages illustres et princiers. 



* Voy. le texte de la bulle : Diplomaia, l, p. 77. 

* Bull« du }i mars ij68. Diplom., l, p. 59. 



158 CONFRÉRIE DU SAINT-ESPRIT 

Trente ans plus tard, Sixte IV, non content d^avoir fait 
réédifier entièrement Thôpital de Sainte-Marie, voulut 
donner à TOrdre une autre marque de sa sollicitude, en 
érigeant à nouveau la confrérie. Une longue bulle, insérée 
par son ordre au livre de Tassociation, renouvelle tous les 
privilèges accordés par ses prédécesseiurs et en ajoute de 
nouveaux. Dans cette nouvelle forme, la cotisation n'est 
plus fixée, elle est laissée à la libéralité de chacun. L'empe- 
reur, les rois et les reines, les princes et les seigneurs, les 
patriarches, archevêques, évéques, abbés, grands maîtres, 
communautés religieuses, reçoivent la faculté de se faire 
inscrire par procureur, sans être tenus de se présenter en 
personne. 

Après avoir confirmé les privilèges antérieurs, le Pontife 
accorde aux confrères éloignés de Rome la participation 
aux indulgences des Stations de la Ville-Sainte et des 
bénédictions papales. Pour augmenter Téclat de la pieuse 
association, il donne à l'église de l'hôpital des reliques in- 
signes : un bras de S. André, une articulation de la main 
de S. Paul, un doigt de Ste Catherine, enfermés dans des 
reli quaires d'argent et d'or enrichis de pierres précieuses. 
Ces reliques étaient destinées à être portées à la procession 
du lundi de la Pentecôte, à Tissue de laquelle le Pape 
devait, autant que possible, célébrer la messe pontificale. 
Ce jour-là, tous les fidèles qui visitaient l'église gagnaient 
une indulgence plénière et les confrères pouvaient recevoir 
l'absolution générale. 

La sollicitude du Pontife s'étendit jusqu'aux funérailles 
des confrères. Suivant ses ordres, deux draps funèbres, 
qu'il avait donnés lui-même, devaient servir à leurs 
obsèques ; l'un, plus riche, réservé aux nobles, l'autre au 
commun des confrères. Seize membres de l'association, 
portant des torches et quatre chandeliers d'argent, devaient 
accompagner le corps jusqu'à la tombe. Un service funè- 
bre devait être célébré à la mort de chaque associé ; et tous 



CONFRÉRIE DU SAINT-BSPRIT I 59 

les jeudis, une messe dite pour les membres vivants et 
défunts 

Sixte IV termine en recommandant avec les plus vives 
instances l'hôpital et la confrérie du Saint-Esprit à toute 
la sollicitude de ses successeurs, les priant surtout de ne 
point les donner en commende, sous peine de consommer 
de nouveau la ruine d'institutions si nécessaires '. 

A l'exemple d'Eugène IV, il signa de sa propre main au 
registre de la confrérie et écrivit quelques lignes pour 
confirmer la bénédiction apostolique et tous les privilèges 
de sa bulle *. Vingt et un cardinaux souscrivirent après 
lui ; à leur tète étaient Guillaume d'Estouteville, arche- 
vêque de Rouen, et Julien de la Rovère, neveu du Pape et 
protecteur de l'Ordre. Dès lors et pendant deux siècles, 
les pages se couvrent des noms les plus illustres. Henri VII, 
roi d'Angleterre, se fait inscrire (1494) avec la comtesse 
de Richemond sa mère et la reine Elisabeth ; Marguerite 
de Bourgogne, fille de Charles le Téméraire, se fait porter, 
peu de temps avant sa mort tragique, par l'évêque de 
Cambrai, Henri de Berghes, qui inscrit en même temps le duc 
Adolphe de Clèves et son fils, ainsi que le comte Engelbert 
de Nassau. Ce sont ensuite Alphonse d'Aragon, duc de 
Calabre, inscrit pendant un séjour qu'il fit à Rome en 1484; 
Charlotte, reine de Chypre (7 mars 1478); Charles VIII, 
roi de France, que le grand maître inscrit en sa présence 
(4 juin 1495) avec sa suite, dans laquelle on distingue les 
deux évêquesjean et Louis d'Amboise, Imbert de Batarnay, 
le comte de Fézensac, etc ; — Jean et Christine de Dane- 
mark et Christian leur fils (1503); Jacques IV d'Ecosse 
(1503) ; Sigismond, archiduc d'Autriche {1478) ; l'empereur 
Maximilien(i483) ; Blanche Marie, impératrice des Romains 
(1503); les familles souveraines de Bavière, de Clèves, de 



* Bulle du 21 mars 1477^ Diphmata, l, p. 99. 
' Le 21 mai 1478. 



l6o CONFRÉRIB DU SAnfr-UPUT 

Thuringe; la reine de Pologne (1495) ; le grand maître de 
Prusse; enfin le roi Louis XII (17 mars 1506) ^ Nous 
passons les grandes familles italiennes, qui toutes 7 eurent 
des représentants. Il nous est impossible de citer toutes 
les maisons illustres qui ont voulu figurer sur la liste de 
notre confrérie * ; on peut dire sans exagération que cette 
liste est comme un tableau où Ton trouve réunies toutes les 
gloires du XV et du XVI* siècle. 

Les privilèges de la confrérie étaient trop nombreux 
pour que nous puissions les rapporter tous dans le détail ; 
il faudrait pour cela citer 1 es bulles aussi élogieuses qu^é* 
tendues de Nicolas IV, Clément IV, Léon X, Clément VII, 
Paul IV, Pie IV, Innocent VIII, et particulièrement 
Jules III'. C'étaient des indulgences plénières et partielles ; 
la participation aux privilèges des stations de Rome, des 
bénédictions papales, des grands pèlerinages, même de celui 
des Lieux-Saints ; la faculté de choisir un confesseur avec 
pouvoir d'absoudre une fois dans la vie de tous cas réservés, 
de dispenser des serments et des vœux à peu d'exceptions 
près, et ^grâce plus importante encore, dans un temps ou 
beaucoup de seigneurs n'étaient justiciables que de leur 
conscience) le pouvoir poiu" tous les frères de l'Ordre 
d'imposer des compensations à leurs pénitents coupables 
d'injustices et tenus à restitution. 

Nous l'avons dit, la confrérie *du Saint-Esprit n^existait 
pas seulement à Rome ; elle avait le don de se multiplier 
en étendant partout d'innombrables rameaux. Les Souve- 



* Liber eonfraicrnitatis SancH Spiritus (Arch. de l*h6p. du S. Esprit de Rome, 
no j5). 

' Voy. les noms cités dans le Diplomata ,1, 76, 98 et dans Saulnier, p. 106-108. 

Le dernier nom historique inscrit sur le ms est celui de la reine d Italie, 
Marguerite de Savoie, qui dans une visite au célèbre hôpital, en 1879, voulut 
donner cette marque d'intérêt à la grande institution des Papes. 

' Bulle du jo octobre 1552 et non pas du aa janvier 1555, ainsi que le dit 
Saulnier, p. 51, 109. Elle ne se trouve pas dans le Diploauûaf mais bien dans 
le Compendio dtlUPriviUggL Viterbe, 1584. 



PLANCHE VII 




SCEAUX DE L ORDRE DU SAINT-ESPRIT 



c6nfr£rib du saint-esprit i6i 

raîns Pontifes avaient concédé à l'Ordre le pouvoir de 
l'ériger partout, avec les mêmes privilèges qu'à Rome *. 

Les frères usèrent largement de la concession : partout 
où s'établissait un hôpital, on voyait naître en même temps 
une confrérie, et les églises du voisinage, jalouses de la 
posséder à leur tour, formaient bientôt comme une cou- 
ronne autour de la maison hospitalière. Dans des villages 
même ou des hameaux qui ne possédaient ni église ni 
chapelle, on vit la pieuse association se former, prendre 
en main la garde des intérêts religieux des populations, 
obtenir des patrons et des ordinaires la construction de 
chapelles qu'elle entretenait de ses deniers : telle est l'ori- 
gine constatée d'un certain nombre de paroisses de Franche- 
Comté. Aux XI Ve et XV« siècles, les confréries paroissiales 
du Saint-Esprit étaient extrêmement multipliées dans la 
France entière, grâce aux hôpitaux alors nombreux et 
florissants*. Les quêteurs, en faisant connaître partout 
l'Ordre, contribuaient notablement aussi à la propagation 
de la confrérie. Le clergé paroissial s'empressait d'en fa- 
voriser l'établissement, car elle rendait partout d'éminents 
services, que nous allons bientôt énumérer. Les personnes 
des deux sexes étaient admises à en faire partie. Une vie 
honnête et chrétienne, un léger don et une minime 
cotisation annuelle, étaient les seules conditions requises. 
Les exercices spirituels consistaient en réunions hebdoma- 
daires ou mensuelles à la chapelle de la confrérie ou à 



' C'est ce que rappelle la bulle de Jules III : Et successive ne propter 
locornm distantiam fidèles ipsi eorum piis desideriis frustrarentur» Confrater- 
nitatem cum omnibus et singulis concessionibus, indultis, facultatibus, indul- 
gentiis et peccatorum remissionibus, illius confratribus pro tempore existentibus 
concessis ad omnia et singula membra, ecclesias et loca tam ab ipso hospitali 
pro tempore dependentia, quam alia in quibus similes confraternitates per 
Preceptorem dicti Hospitalis pro tempore existentem, seu ejus commissarios, 
nuncios vel procuratores pro tempore ad id specialiter deputatos institue- 
renturet erigerentur, [Predecessores nostri] extenderunt et ampliarunt, etc. 

* Voy. à la Quatrième partie, les notices des hôpitaux, — Nous donnons, 
aux PP, fuiti/.f n» XVI, la liste des nombreuses confréries dont nous avons 
constaté l'existence dans le Jura seulement. 

11 



l62 COHPRi&IB DU SAOrr-fSHIT 

Téglise, en processions et messes solennelles aux fîtes 
principales^ et en services pour les défunts. Tons les 
confrères assistaient à ces offices, les dignitaires portant 
les cierges de la confrérie, les autres membres tenant des 
flambeaux allumés. Le jour delà Pentecôte, fête patronale 
de la confrérie, ou le lendemain, des agapes firatemelles 
réunissaient les confrères. Le banquet commun était chose 
essentielle au moyen-âge dans toutes les associations ; il 
servait à maintenir dans une intimité qui rapprochait les 
diverses conditions sociales, Tunion cordiale entre tous les 
membres. Tout était réglé d'avance dans ces repas, le 
nombre et la qualité des mets, aussi bien que les prières 
qui toujours les accompagnaient *. Malheureusement ces 
banquets finirent par dégénérer en véritables festins, qui 
enlevaient le plus clair des revenus à leur destination 
charitable. L'autorité ecclésiastique s'efforça de réprimer 
ces excès ; elle en vint même, dans les règlements Su XVH* 
siècle, à supprimer habituellement ces repas '. 



' Voici, à titre de curiosité, le menu des banquets de la confrérie de PoUgny 
d'après un règlement de 1588 : 

« Premier. Le jour de feste Pentecoste au diner. La fricassée de -foye de 
veau en un plat, quatre à quatre, avec un chacun confrère un goubelet, le 
miolet d*œuf el trois cloz de gerofle dedans ; la pièce de bœuf pour quatre, 
la moutarde, Thaut côté, ou poitrine de mouton [là u chante le Veni Creator]. 
A chacun confrère une écuelle de ris, une pomme et un quartier de fromage. 

< Led. jour au souper. A un chacun confrère une écuelle d*orchepot de veau 
bien étouifé, les pieds de môton à la vinaigrette pour quatre, le veau routi, le 
moton routi, la saulce verde, les pommes et le fromage. 

« Le dîner du lendemain qu*on nomme le banquet de la langue de bœuf se fait 
à la volonté du prieur ou il appelle les sieurs Mayeurs et Eschevins, et autres 
tels qu'il luy plait. 

c Pour le lundi lendemain dud. jour de feste de Pentecôte au souper. La 
salade de laitues pour quatre; un pigeon et un poulet pour quatre, au lieu de 
bez chapplé (hAchis) la pièce de bœuf, la moutarde [La prédication par un des 
Frères Prescheurs], la gelée de couchon, la tartre auxchoz sucrés. 

« A chacun desd. trois repas se donne pain, vin et pitance a chacun des clercs 

allants à la grande école Les sieurs chanoines sont les premiers servis, 

les confrères après, les chapelains et familiers après, et les choriaux les der- 
niers. Les confrères se doivent asseoir en Tordre de leur réception. » — (Ctoa- 
lier, Hist, de Poligny, t. Il, p. 670). 

* c Ne seront faictz cy après par led. prieur ny aultre aulcune dépense 
de bouche aud. jours de feste Penthescotte; comme Ton souloit (aire du passée 



CONFRÉRIE DU SAINT-BSPRIT l6} 

Le même jour de la Pentecôte, le conseil ou tous les 
membres présents élisaient deux prieurs, « les plus idoines 
et capables, » pour présider les réunions et administrer les 
biens et revenus de la confrérie ; les prieurs sortants ren- 
daient en même temps un compte exact de leur gestion ; 
quatre confrères étaient délégués pour faire une vérification 
rigoureuse des revenus et des dépenses. Les prieurs sortants 
n'obtenaient quittance qu'après cette vérification *. 

La confrérie du Saint-Esprit avait un double objet: 
l'augmentation des revenus des hôpitaux et l'assistance 
paroissiale. 

Le premier de ces deux buts était atteint par le moyen 
des redevances annuelles que les confréries payaient, soit à 
la maison dont elles dépendaient, soit au chef même de 
l'Ordre. Nous possédons à ce sujet un bon nombre de 
documents. Souvent, ces redevances étaient assez minimes ; 
mais, par leur multiplication, elles ne laissaient pas de 
former un total important. En outre^ partout où existait 
la confrérie, les quêtes annuelles étaient nécessairement 
plus fructueuses et les aumônes plus abondantes. Les 
prieurs étaient les gardiens naturels des troncs et bassins 
des églises ; ils en remettaient le produit, en même temps 
que leur prestation, entre les mains du commandeur ma- 
gistral. 

L'ordre entier avait donc grand intérêt à multiplier les 
associations. Mais les paroisses en tiraient des avantages 
bien plus considérables encore. La confrérie remplissait, 
mais sur une plus vaste échelle, un rôle analogue à celui de 
nos sociétés de Saint- Vincent de Paul. L'assistance des 
pauvres, la visite des malades et des infirmes étaient les 
premiers devoirs des confrères*. Une part des revenus 



tins s'appliquera tout le revenu à œuvres pieuses. » — Confrérie de Rochefort 
(Jura), ibis. 

• Voy. aux Pièces l'ustif. no^ VII, VIII, IX, les règlements de trois confréries. 

* En i$87, année de disette, le Conseil de la vUle d'Arbois décide, entre 



i64 camrwkÊm mi SAorr-nnur 

était réservée à cet usage diaritable *. La seconde partie 
servait à l'entretien de la maison et de la diapeUe de la 
confrérie. Souvent, dans les campagnes, la confirérie prenait 
à sa charge tons les firais d*entretien du coite. Dans les 
^lises plus riches, elle oontriboait à la décoration, four- 
nissait le laminaire aux fêtes solennelle», fusait oélâxer 
des offices somptueux, se diargeait de faire venir des pré* 
dicateurs de renom, etc. Ajoutons enfin que la confirérie 
contribuait puissamment au maintien de la paix et de la 
concorde parmi les citoyens ; les r^lements faisaient aux 
confrères un devoir de soumettre tous leurs différends à 
l'arbitrage des prieurs et de mettre avec zèle toute leur 
influence au service de la paix publique *. 

On voit par là de quel secours étaient ces pieuses asso- 
ciations pour les lieux où elles étaient établies. Si Ton 
ajoute que partout les principaux habitants tenaient à 
honneur d'en faire partie ; que les revenus dont elles dis- 
posaient, augmentés chaque année par les dons et les legs 
des confrères, montaient souvent àdes sommes importantes 
même dans de simples villages, on comprendra quels services 
elles devaient rendre, et quelle faveur devait les accueillir. 



autres mesures, que pour subvenir aux nécessités des malheureux, la confrérie 
du Saint-Esprit sera réorganisée. — Bousson de Mairet, Annales (tArhois, p. 209. 

* Dans le courant de Tannée 1489, la confrérie d*Arbois distribua aux pau- 
vres de la ville 80 quartaux de froment. — Arch, de Chôp,, E. 194. 

' Voy. les règlements transcrits aux PQces justi/catipes. 

Les confrénes du Saint-Esprit fonctionnèrent régulièrement jusqu'à la 
révolution dans la Franche-Comté et la Lorraine, pays où TOrdre sut se 
maintenir longtemps florissant. — c II est avéré, dit M. Léon Maître, qu'au 
XVI 1* siècle les confréries tenaient (en Normandie) leurs assemblées comme 
dans les siècles antérieurs » (Assistance publique dans la Loire Inférieure, chap. 
VI). — On trouve aussi, dans les archives municipales et hospitalières deTou- 
Ion et Clermont, des preuves multipliées de leur existence dans ces régions 
au cours du XVIU* siècle. On peut donc conclure que ces institutions, après 
être devenues indépendantes de Tordre du Saint-Esprit, continuèrent un peu 
partout en France leurs exercices pieux et chariubles jusqu'à notre époque. 
Nous connaissons même dans le Jura deux confréries (à Rochefort et à 
Vadans) qui ont traversé tous les orages. Ces épaves précieuses de la plus 
ancienne des institutions de charité sont aujourd*hui de simples congrégations 
paroissiales, mais qull serait facile de rendre à leurs anciennes observances. 



CONFRËRIB DU SAINT-ESPRIT l6; 

L'ordre du Saint-Esprit avait ainsi réussi à développer 
dans des proportions gigantesques ses œuvres de charité ; 
par l'admirable institution de sa confrérie, il avait résolu, 
dès le XIII* siècle, le grand problème de l'assistance, 
non-seulement dans les centres populeux, mais jusque dans 
les plus humbles hameaux. Ce n'est certes point là un 
petit honneur I 




DEUXIÈME PARTIE 



SPLENDEUR & DECADENCE DE L'ORDRE 






CHAPITRE I 



DÉVELOPPEMENT MERVEILLEUX DE L'ORDRE 
EN FRANCE AU XIII* SIÈCLE 




E XIII* siècle est, sans contredît, Tépoque où les 
idées qui caractérisent le moyen-âge s'affirmèrent 
avec le plus d'énergie et entrèrent le plus univer- 
sellement dans la pratique chez les nations Européennes. 
Alors, les institutions sociales et politiques s'inspiraient 
des vérités du dogme et de la morale catholiques. Alors, au- 
dessus des rois s'élevait l'autorité ecclésiastique du Pontife 
romain ; quelques-uns, comme les empereurs d'Allemagne, 
la supportaient assez impatiemment ; mais personne ne 
songeait sérieusement à la récuser. Les princes et les peu- 
ples se groupaient autour du Pape, comme des enfants 
autour de leur père, et attendaient de lui, soit la confirma- 
tion de leurs droits, soit la protection s'ils étaient opprimés, 
soit l'arbitrage de leurs différends. A la voix du vicaire de 
Jésus-Christ, les discordes s'apaisaient, la paix renaissait 
entre ces peuples que l'Eglise, après huit siècles d'efforts 
constants, était parvenue à tirer de la barbarie primitive 
pour les faire jouir de la civilisation chrétienne. Il n'est pas 
étonnant que, dans un tel milieu, la vie chrétienne ait pris 



170 DÉTELOPPEMENT MERVEILLEUX DE L'OEDRB 

un grrand développement et se soit manifestée au dehors 
par beaucoup d'œuvres et d'institutions pieuses. 

Des armées véritables de pauvres volontaires se lèvent 
à la voix du séraphique François d'Assise ; des légions 
d'apôtres s'enrôlent sous la bannière du saint apôtre Domi- 
nique. De toutes parts, à leur exemple et à leur parole, 
l'amour de Dieu et du prochain s'enflamme d'une nouvelle 
ardeur. On voit, sur tous les points de la chrétienté, surgrir 
à la fois plusieurs milliers de petites congrégations reli- 
gieuses consacrées au seul soin des pauvres malades ^ Les 
riches se dépouillent d'une portion de leurs biens, pour 
imiter la pauvreté de leur Seigneur Jésus-Christ et le sou- 
lager dans la personne des indigents ; les pauvres, avec 
une générosité plus héroïque encore, donnent leur liberté et 
leur vie pour le service de leurs frères souffrants. Spectacle 
incomparable et que nul autre siècle n'aura la joie de con- 
templer ! 

Dans un bon nombre des congrégations hospitalières 
qui se fondèrent à cette époque, la décadence malheureuse- 
ment fut prompte ; il leur manquait un lien solide, capable 
de maintenir comme en un seul faisceau tous les dévoue- 
ments appelés à concourir à l'œuvre commune ; il leur 
manquait une organisation sage et forte qui s'opposât au 
relâchement'. 

Gui de Montpellier en comprit la nécessité : c'est là son 
grand mérite et le secret de la prospérité de son ordre pen- 
dant trois siècles ; c'est là ce qui fit de la fondation de cet 
ordre un des plus grands événements de l'histoire de 
l'Eglise. 

Nous allons esquisser brièvement l'histoire des progrès 



* L. Gautier, Histoire de lâchante^ p. 60. 

' c Ils [ces hôpitaux] ne formaient pas une seule communauté gouvernée 
par les mêmes lois et dirigée par le même chef. Autaot de Maisons-Dieu, 
autant de communautés différentes. Cétait le vice de cette organisation ; ce 
fut une des causes de ta ruine. • — L. Gautier, ibid. p. h* 



EN FRANCE AU XIIP SIÈCLE I7I 

admirables que fit au XIII* siècle Tordre du Saint-Esprit . 
La matière est abondante, et noM$ devrons passer sous 
silence un grand nombre de fondations secondaires, pour 
ne nous occuper que des principales. Nous espérons du 
moins en dire assez pour convaincre nos lecteurs que notre 
ordre reçut une large part des bénédictions célestes qui, 
répandues alors par la Providence, produisirent tant et de 
si beaux fruits de vertu et de charité chrétiennes. 

Nous avons parlé, en notre premier chapitre, de la pre - 
mière floraison de l'Ordre. 

Du vivant même de Gui, il avait produit de nombreux 
rejetons pleins de sève et de vigueur. En 1198, la maison 
de Montpellier avait déjà envoyé des essaims dans neuf 
villes voisines. Marseille, Tune des premières, s'était em- 
pressée de demander à Gui une colonie de ses enfants . 

La confrérie s'y établit d'abord et fut accueillie avec 
une si grande faveur, qu'elle fut bientôt en état d'élever un 
hôpital. L'abbesse de Saint-Sauveur et le vicomte de Mar- 
seille aidèrent les bourgeois dans cette œuvre grandiose . 
Cette maison devint bientôt Tune des plus florissantes de 
l'Ordre et contribua puissamment à le répandre dans les 
provinces méridionales, en peuplant les maisons de Saint- 
Geniez aux Martigues (avant 1193), de l'Ile Saint-Etienne 
(Pomègue en Frioul), d'Aubagne, de Bausset, du Castelet, 
etc., ainsi que de nombreuses confréries *. 

L'année même où Innocent III dotait l^i capitale de la 
chrétienté de l'hôpital de Sainte-Marie (1204), le duc de 
Bourgogne, Eudes III, lui demandait des frères du Saint- 
Esprit pour les mettre à la tète de celui qu'il venait de 



* M. Mortreuil, auteur d'une notice sur l'hôpital de Marseille, dénie à 
Tordre du Saint-Esprit la possession de Thôpital de Marseille, en s*appuyant 
sur ce que les confrères qui l'ont fondé n'étaient pas religieux ; son erreur 
vient de ce qu'il a confondu, à la suite d'autres historiens, la confrérie du 
Saint-Esprit avec l'Ordre lui-même. Nous parlerons plus au long de cette 
erreur dans la notice consacrée à l'hôpital de Marseille. 



■73 oÉTeuwraun' hertebihix m l'ousi 

construire i Dijon, avec tme xomptoositA ^^pt^ de la pnis' 
sauce. Des agrandissements soccesHfs, dûs aax libéralité 
de ses sncoesseors et des particnlien, en firent on établisse- 
ment considérable dans la suite. Les reKgieax paraîsaent j 
avoir été, dès Torigine, en assez graad aambn. car 
plnsieiirs essaims en sortirait bientAc *. 




t^ig. 7. — HAp. du S«iiit-E$prit de Dijoa, an XV* Siècle, d'tpris D. Calmelet. 

La première colonie de Dijon fat très-probablement la 
maison de Tonnerre. Cette maison fut fondée, selon les 
historiens locaux, par Eudes III lui-même, vers 1209, au 
faubourg Bourgberault *. On ignore les circonstances qui 
déterminèrent cet acte et les conditions dans lesquelles il 
fut accompli, car tous les anciens titres de cet établissement 
ont disparu. Cet hôpital vit plus tard son développement 
entravé par l'érection du célèbre Hôtel-Dieu des Fonte- 



' HiHoire m* 4e CkipUal dt Dii«g, par )• frère Calmelet, clwp. I. 
■ G. Jolivot, Etaitginirtax de Ifjf. fUekereha tar Catumbtie Jet kabitanlt 
de Tomterre. Auxerre, 1B76, p. 69. 



EN PRANCB AU XIII* SIÈCLE IJ} 

nilles ( 1 2 93), dû à la mv nificence de la reine des Deux-Siciles, 
Marguerite de Bourgogne '. 

Au mois de mai 12 15, Henri, seigneur de Fouvent-le- 
Châtel, donnait au maître de Dijon Thôpital qu'il venait 
de construire en ce lieu. Dans sa charte de fondation, il 
abandonne aux frères et aux pauvres de sa maison les meix 
adjacents ; il leur assigne par chaque année deux muids de 
grain, moitié froment, moitié avoine; il leur abandonne les 
langues de tous les animaux qui seront tués dans son 
bourg ; plus Tusage dans les bois, les champs et autres 
biens de la terre ; plus deux hommes avec leurs familles, 
désignés et pris entre ses justiciables; plus les revenus des 
foires qui se tiendront à la fête des apôtres S. Pierre et 
S. Paul ; plus les mets et autres restes qui sortent de dessus 
sa table et de celle de ses successeurs * » . Dans le même 
acte, Henri de Fouvent ratifie la donation qu'avait faite à 
la maison de Dijon, au mois de mai précédent, Girard 
d'Achey, du fief de Diélosse, avec la justice, les bois, 
terres arables, prairies, four banal et moulin, le tout 
mouvant de la seigneurie de Fouvent. 

On ignore la date précise où Thôpital de Bar-sur- Aube 
fut fondé : mais ce fut vraisemblablement vers la même 
époque, car une bulle d'Alexandre IV le cite en 1256. Ces 
trois maisons n'ont jamais cessé d'appartenir au comman- 
deur magistral de Dijon, qui les entretenait de frères et en 
nommait les recteurs '. 

« Un pieux chevalier, nommé Jean de Montferrand, 
introduisit à Besançon les religieux de Montpellier et leur 
assigna, dans le bourg, un vaste terrain, franc de toute 
servitude On attribue généralement cette fondation à 



' C. Dorfflois, Notes historiques sur l'hôpital de Tonnerre, Auxerre, i8n* 

* Histoire ms, de l'hôpital de Dijon, par le frère Calmelet, chap. I. — Voy. 
t^ccj justif., no XI. 

' Hist, ms. de Di/on,. chap. I. 



174 DiriLOPPiMnrT imtTinxiiix di l'ouio 

Tannée 1 203 ; elle est, à coup sûr, antérieure an 30 aoftt 
1207, époque précise delà mort de Jean deMontferrand* n: 
Les comtes de Bourgogne reçurent les frères duSaint-Esprit 
avec faveur et les dotèrent de privilèges, de rentes et de 
terres ; mais ce fut surtout chez la classe moyenne, dans la 
bourgeoisie et la commune* qu'on leur fit le meilleur 
accueil : « La plupart fils de bourgeois on d^artisans, tou- 
jours en contact avec les gens du peuple, auxquels ils se 
consacraient tout entiers, oesreligieuxmendiants conquirent 
de suite leurs sympathies, et, chose singulière, dorent à 
leurs libéralités la plus grande partie de leur dotation *. Cest 
ainsi que se fonda Thôpital conventuel le plus important 
de France, siège habituel des visiteurs généraux et gar- 
dien, jusqu'à la fin, de la régularité de la discipline, alors 
que la plupart des autres avaient succombé au relâchement. 
La maison fut bientôt peuplée d'un grand nombre de frères 
et de sœurs, heureux de se dévouer à une si belle œuvre ; 
la noblesse fut prise du même enthousiasme, et le trop- 
plein de l'hôpital de Besançon ne tarda pas à s'écouler 
non seulement dans toute la Franche-Comté, mais dans 
les Vosges, la Lorraine et la Suisse romande. 

« Un pieux bourgeois de Gray, nommé Grirard d'Arc, 
fit, au mois de février 1238, donation au Saint-Esprit de 
Besançon d'une maison, meix et dépendances, situés sur les 
bords de la Saône, non loin d'une des portes de la ville, 
entre la rue du Pont, la maison du garde-péche et les 
murailles de Gray. En reconnaissance de ce bienfait, frère 
Benoit, alors maître de l'hôpital de Besançon, s'engagea à 
fournir au donataire, à sa femme et à ses enfants, les 
vêtements et la nourriture comme aux autres religieux du 
Saint-Esprit, s'ils faisaient profession dans l'Ordre, soit à 
Gray, soit ailleurs. » Le recteur de Besançon « prit de 



* A. Castan^ Notice sur Vhôpitcd de Besançon, I, p. 162. 

* J. Gauthier, Notice sur l'hôpital de Gray, p. 2. 



EN FRANCS AU XIII* SIÈCLE 17; 

suite possession de la maison de Girard d'Arc. L'hôpital 
du Saiot-£sprit de Gray était fondé. ' » 




Poligny dut apparemment aux comtes de Bourgogne 
sa colonie de frères. La petite ville de Neufchâteau en fut 
dotéepar son souverain, le duc Mathieu II de Lorraine ( 1 236}. 
La construction des bâtiments fut terminée seulement en 
1361, ainsi que l'atteste une inscription encore conservée. 
Ces deux maisons devaient avoir, seules, hélas! le glorieux 
privilège de perpétuer le nom de l'Ordre jusqu'à nos jours. 

Ce fut dans les mêmes circonstances à peu près qu'on 
vit s'élever les maisons hospitalières de Dole, Chaussin 
('239)1 Vaucouleurs {1270), Toul (1238), Saint-LiefFroy 
(1225), les Longeaux ', etc. Toutes ces fondations, effec- 
tuées à très peu d'intervalle, témoignent de la faveur 
prodigieuse avec laquelle l'Ordre fut accueilli dans ces 



' J. Gauthier, ibid., p. 1. 

* Noos ranvoyons, pour Ici preuves de ces fondations, ainsi que de toates 
Cfltet qui vonl suivre, aux aoticet Spéciales qui lenniaeat l'oun-tgc. 



176 DévSLOPPBlIBNT MBRYllUlinL DB e'OEDRB 

provinces et la vitalité puissante de la maison magistrale 
de Besançon. Cette force d'expansion ne s'arrêtera qu'au 
XV* siècle, alors que partout ailleurs les maisons encore 
debout auront grand'peine à se maintenir. 

A l'autre extrémité du territoire^ la maison conventuelle 
d'Auray devient un centre non moins important. Nous 
ignorons l'année de son établissement ; mais un bref 
d'Honorius III, du 23 novembre 1220, énumère jusqu^à 
vingt-deux hôpitaux de régions fort diverses, qui lui 
devaient l'existence. Au nombre de ces maisons» il faut 
citer celle de Coutances, fondée au mois de mai 1209, P^ 
l'évèque Hugues de Morville, avec le concours du chapitre, 
en faveur des pauvres, des enfants trouvés, des matelots 
et des pèlerins qu'attirait le sanctuaire du Mont-Saint- 
Michel '. Cette fille d'Auray devint, elle aussi, le centre 
d'une province normande d'établissements hospitaliers, 
grâce au concours de la confrérie de l'Ordre, fondée 
simultanément pour lui servir d'appui *. Nantes, Saint- 
Malo, Mayenne, Saint-Girons, Montmorillon, Saint- 
Jean-d'Angely, Millau, libourne, Bergerac, étaient les 
principales dépendances d'Auray, tandis que Saint-LÔ 
et Valognes se rattachaient à Coutances. 

Pour suivre un mouvement si puissant et si rapide, il 
faudrait parcourir la France entière et montrer, au centre, 
Angers avec ses quinze sufiFragants ; au midi, Aix, Agen, 
Toulouse, Montauban, Bordeaux, Angoulème, Vienne, 
Arles, Nîmes, Narbonne, Grenoble, Fréjus, Draguignan, 
Clermont, le Puy, etc., foyers féconds qui propagent l'Ordre 
partout autour d'eux. Mais comment énumérer tous ces 
asiles charitables, qui s'élèvent et germent comme par 
enchantement sur le sol de la France ? Du nord au midi. 



* GaXUa Christ, t.XI^ col. 251, Instrum. XXVII. 

> Hist. m de t hôpital de Neuf château, par Tabbé Renard, cbap. VII. 



PLANCHE VIII 




SCUUX DE L ORDRE DU 8AINT-E8P|tlT 



;- sj *- *■-• 






'^ r.- 




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p— 



EN FRANCE AU XIII* SIÈCLE \^^ 

de Test à l'ouest, c'est partout le même spectacle d'une 
expansion bien faite pour confondre Timàgination. 

Pour se rendre compte de l'accroissement subit de 
l'Ordre, il faut savoir que bon nombre d'hospices et de 
maladreries, fondées antérieurement, passèrent sous sa 
direction. Les seigneurs et les habitants, qui appelaient les 
religieux à la tête de leurs hospices, trouvaient dans ce 
changement les avantages d'un service plus éclairé et 
d'une charité plus généreuse, en même temps qu'ils assu- 
raient à leurs hospices un personnel plus stable. Chose 
étonnante, non seulement l'Ordre succéda au clergé 
paroissial et à des communautés particulières ; mais deux 
ordres très répandus, l'ordre de Saint-Jacques et celui des 
Frères Pontifes, lui cédèrent leurs hôpitaux. 

Nous touchons ici à des questions que la rareté des 
documents rend difficiles à traiter. Nous croyons pourtant 
devoir nous arrêter à des faits qui, établis d'ailleurs quant 
au fond, ne sont pas sans importance pour le sujet qui nous 
occupe. 

On connaît l'origine de l'ordre de Saint-Jacques. 

La découverte du tombeau de l'apôtre, au IX* siècle, 
dans la ville d'Espagne qui porta plus tard son nom, attirait 
en ce lieu un concours infini de pèlerins de toutes les 
nations, surtout de l'Espagne et de la France. Les Maures, 
encore maîtres d'une grande partie de l'Espagne, malgré 
les victoires de Ramire, leur tendaient de continuelles 
embûches et les dépouillaient impunément. Les chanoines 
de Saint-Eloi, qui avaient un monastère au royaume dé 
Galice, bâtirent de leurs revenus, qui étaient fort considé- 
rables, des hôpitaux sur le chemin qu'on appelle commu- 
nément Voie française^ pour y loger les pèlerins '• Peu 
de temps après, vers 1170, treize gentilshommes s'unirent 



• p. Hélyot, t. Il, p. a57-2$8. 



178 DÉVELOPPBIIBMT IIBRVEILLBUX DB L'oRDRE 

aux chanoines et s'engagèrent par vœu à conduire les 
pèlerins et à les défendre contre les infidèles. Telle est 
l'origine de Tordre militaire de Saint-Jacques de TEpée 
Rouge, si célèbre dans l'histoire d'Espagne. AlexandrelII 
l'approuva en 11 75 et Innocent III en 1198 *. 

Le zèle des hospitaliers de Saint-Jacques ne se borna 
pas à l'Espagne. La fin du XII* siècle et le commencement 
du XIII* nous les montrent en possession d'un grand 
nombre d'hospices dans le midi de la France. La Gascogfne 
en particulier, lieu de passage des pèlerins, possédait des 
maisons de secours échelonnées le long des deux grandes 
voies romaines qui reliaient l'ouest de la France à l'Espagne. 

On appelait ces chemins « les chemins roumiens », ou les 
chemins de Saint-Jacques * ; les commanderies, hôpitaux 
et auberges qui les bordaient, portaient le nom d'hôpitaux 
de Saint-Jacques ou deSpatha (de l'épée). 

Le premier itinéraire des pèlerins partait de Toulouse 
et, traversant la Gascogne de l'est à l'ouest, aboutissait à 
Saint-Jean-Pied-de-Port, et poursuivait à Astorga, Léon et 
Compostelle. Il est mentionné pour la première fois entre 
Toulouse et Auch en 11 80; des hospices se trouvaient, sur 
cette route, à Maubourguet, Montesquiou, l'Isle-de-Noé, 
Serregrand, la Gors, Auch, Aubiet, Saint-Jean-le-Vieux, 
Le Luc, Armeau, Orthez, l'Hôpital d'Orion, Orion, Sauve- 
terre, Saint-Jean-Pied-de-Port. 

La seconde voie partait de l'abbaye du Grand-Sauve et 
traversait les Landes par deux routes diflférentes. Ceux qui 



« p. Hélyot, ibid, — F. Bladé, Ordres religieux et milit, de la Gascogne (Revue 
de Gascogne, t. XVIII, 1R77, p. j4Ç-?55)» 

Les constitutions de l'Ordre, confirmées par Honorius III en 12; i, étaient 
empruntées à la règle de saint Augustin. La marque distinctive des chevaliers 
de Saint-Jacques était une épée de drap rouge à la garde en forme de croix, 
cousue sur la poitrine du côté gauche : c'était le symbole de leur vocation à 
la fois guerrière et charitable. (Hélyot, ihid. — Hermant, Hisi, des religions ou 
ordres militaireSt 1704, p. $7-59.) 

' Adrien Lavergne, Les chemins de S. Jacques'en Gascogne (Revue de Gas- 
cogne, t.tXX, X879, p. )())), 



EN FRANCS AU XIII* SIÈCLE I79 

voulaient aller à Compostelle par mer, se rendaient à 
Cap-Breton, dans les Landes, par Langoiran, Portets, 
THôpital. de Bessaut (écart de Lencouacq) , Mont-de-Mar- 
san. Ceux qui préféraient la voie de terre passaient par 
Bordeaux, THospitalet de Bélîet, Muret, Vieux-Boucau, 
Bayonne, Saint-Jeàn-de-Luz, et suivaient de là le premier 
itinéraire ^ 

Tous les lieux cités possédaient des hospices de Saint- 
Jacques, stations naturelles des pieux voyageurs *. Comment 
la plupart de ces maisons, sinon toutes, sont-elles venues 
en possession de l'ordre du Saint-Esprit dès le commen- 
cement du XIII« siècle (avant 1220)? Nous ne l'avons pu 
découvrir. Il est probable toutefois que Tordre de Saint- 
Jacques, après avoir fondé tant d'hospices, se sera trouvé 
impuissant à les desservir et aura été tout heureux de 
trouver, dans les enfants de Gui de Montpellier, de pré- 
cieux auxiliaires. Telle est du moins l'explication qui nous 
parait la plus naturelle '. 

Une question plus difficile encore, est celle des relations 
dé Tordre du Saint-Esprit avec celui des Frères Pontifes. 
Elle a été posée par Pierre Saulnier en ces termes : « Si 
dans cet ouvrage il m'était permis de donner quelque place 
à la conjecture, je ne penserais pas errer beaucoup, eti 
revendiquant pour Tordre du Saint-Esprit, saint Jean 
Benezet, le thaumaturge de TOccitanie, le constructeur 
Pontife d'Avignon, l'architecte inspiré du ciel pour un 
ouvrage digne de la force de Samson *. » Il apporte ensuite 



' L*abbé Pardiac, Histoire de saint Jacques le Majeur et du pèlerinage de 
Saint-Jacques de Compostelle (Rewue de Gascogne, t. IV-VI, 1873-1875). 

* Outre les hospices de ces voies principales, l'Ordre en possédait dans 
bien d'autres lieux, comme nie-en -Jourdain, Boulac, Thésicrs, Gaillac, etc. 

' On a confondu souvent les chevaliers de l'Epéc Rouge avec les chevaliers 
de S. Jacques de la Foi et de la Paix^ créés aux XI 11* siècle par Amanieu I, 
archevêque d'Auch, pour combattre les Albigeois, et dont les derniers survi- 
vants se donnèrent à l'ordre des Feuillants en i66). Les documents du XVII* 
siècle concernant l'ordre du Saint-Esprit témoignent plus d'une fois de cette 
confusion. 

* De capite sacri ordinis,,, p. 64. 



l80 DÉVELOPPEMENT MERVEILLEUX DB L'ORDRE 

diverses raisons à Tappui de sa thèse. Sans aller aussi loin 
que le premier historien de TOrdre, nous ne sommes pas 
sans apercevoir, nousaussi, des liens mystérieux entre les fils 
de Gui et ceux de Benezet. Si nous demeurons impuissant 
à les définir clairement, du moins nous espérons apporter 
quelques documents, qui permettront à des historiens mieux 
placés de résoudre définitivement le problème. 

Dans le courant du XII* siècle, l'Italie avait vu naître, 
dans la ville de Lucques, un ordre religieux destiné à faci- 
liter aux voyageurs le passage des rivières, par l'établis- 
sement de bacs et de ponts. On l'appelait l'ordre de 
Saint-Jacques du Haut-Pas'. A la même époque, la France 
était, elle aussi, en possession d'un ordre de Pontifes. La 
fondation des deux ordres de but identique fut-elle indé- 
pendante, ou bien l'un n'était-il qu'une branche de l'autre'? 
Il est probable qu'on ne le saura jamais au juste. Quoiqu'il 
en soit, voici comment les traditions locales rapportent 
l'établissement des frères Pontifes français. Un simple 
berger, Benezet, originaire soit de Millau*, soit d'Hauvillar 
enVivarais % s'offrit, sous l'inspiration de Dieu, à construire 
un pont sur le Rhône à Avignon. Après avoir triomphé 
par ses miracles de toutes les résistances, il se mit à 
l'œuvre, en 1177. Il mourut, dit-on, avant l'achèvement de 
son entreprise * ; mais ses disciples la menèrent heureuse- 
ment à terme. 

Peu après l'achèvement du pont d'Avignon, ils entre- 
prenaient, sous la conduite d'un frère nommé Etienne, « la 



* L'hôpital de Saint-Jacqucs du Haut-Pas, bÂti par Philippe-le-Bel à Paris, 
appartenait à cet ordre, selon Du Breul et d'autres historiens. — Voy. Du 
Breul, Théâtre des antiq, de Paris, liv. II, p. 579 ; Hélyot, t. II, p. 278-281. 

* Le P. Hélyot et Tabbé Grégoire font des Pontifes français une branche de 
ceux de Lucques. — Abbé Grégoire, Recherches histor. sur Us frères Ponti/a, 
1818, p. 16-25. 

' Saulnier, p. 6$. 

* L'abbé Grégoire, op. ciL, p. xi. 

* Théoph. Raynaud, Opéra, t. VIII, p. 148, dans Hélyot, t. II, p. 28;. 



EN FRANCE AU XIII* SIÈCLE l8l 

fabrique du pont du Rhône », à Lyon ^ Puis les villes de 
Vienne ' et de Saint-Saturnin-du-Port * reçurent le même 
bienfait, et les frères construisirent le pont de laDurance, 
au lieu appelé depuis Bonpas ^ Il est à croire que là ne se 
bornèrent pas leurs travaux et que bien d'autres pays leur 
durent des communications plus faciles, bien que les 
historiens n'en fassent pas expressément mention. 

Les frères Pontifes ne se contentaient pas de construire 
des ponts ; ils avaient soin d'élever, tout auprès, des 
hôpitaux, où ils recevaient les passants. Ainsi les cinq ponts 
cités plus haut jouissaient de cet utile complément. Or, chose 
remarquable, trois de ces hôpitaux au moins sur cinq, ont 
appartenu à Tordre du Saint-Esprit, comme il nous sera 
facile de l'établir. 

D'abord, en ce qui concerne Avignon, on sait que 
l'hôpital du pont, ainsi que sa chapelle, étaient dédiés au 
Saint-Esprit et que la fête de la Pentecôte y était célébrée 
avec im grand concours de peuple *. Il est certain d'autre 
part que l'ordre du Saint-Esprit possédait à Avignon, dès 
le XIII* siècle, un hôpital du même vocable. Comment 
deux maisons de même nom auraient-elles pu se fonder 
en même temps dans la même ville ? Ajoutons que les 
Papes attribuaient à l'Ordre tous les hôpitaux dédiés au 
Saint-Esprit*. De plus, Pierre Saulnier rapporte qu'on 



* Bulle de Lucius III, ii8}. — Guiguc, Notre-Dame de Lyon» Recherches sur l'ori- 
gine du pont de la Guillotière et du grand Hôtel-Dieu {Mém. de la Soc. Littéraire 
de Lyon, 1877, p. 201). 

* Leblanc, Pont du Rhône entre Vienne et Sainte-Colombe {Congrès Archéol. de 
France, 1879, p. 96. 

' P. Hélyot, t. II, p. 286. — Les enfants assistés au Pont-Saint-Esprit, (Bull. 
de la Soc. Dép. d'Archéologie, t. XVII, 188^, p. j20-pj). 
*Abbé Grégoire, Op. cit., p. 25. 
' Saulnier, p* 65. 

* Bulle de Sixte /V, 1470 : Nos.... omnia et singula alia hospitalia dicti or- 
dinis, et sub vocabulo Sancti Spiritus intitulata, ab ipso nostro Hospitali In 
Saxia dependere, mullique alio monasterio, hospitali,.... ctiam si longeva 
consuetudo aut submissio alia repugnarent.... decernimus pariter et declara- 
mus {Diplom,, I, p. 96). 



|83 DÉVELOPPEMBNT MERVEILLEUX DE l'ORDRE 

voyait encore de son temps la double croix sculptée sur la 
porte d'une grange de Malossène, appartenant à Thôpital 
d'Avignon '. 

S'il est difficile de refuser à Tordre du Saint-Esprit la 
possession de l'hôpital du pont d'Avignon, il y aurait plus 
de difficulté encore s'il s agissait de celui de Lyon. 

Il existait à Lyon un hôpital du Saint-Esprit apparte* 
nant à l'Ordre, car on lit dans l'acte de visite de frère Jean 
Monette, visiteur général en 1288, les lignes suivantes: 
« Selon l'invitation qui nous en a été faite par le précep* 
teur lui-même, nous avons vu et visité la maison hospi" 
talière du Saint-Esprit de Lyon, de la collation de Dijon. 
Pendant notre séjour, nous avons constaté, d'après les 
registres des propriétés et les comptes des dépenses, que 
les Statuts de l'Ordre n'y sont pas observés assez religieu- 
sement, tant au spirituel qu'au temporel ' » Mais Lyon 

possédait au moyen-âge trois hôpitaux : lequel des trois 
appartenait à l'Ordre ? Il est incontestable que ce fut celui 
des frères Pontifes, bâti à la tète du pont de la Guillotière, 
c'est-à-dire, sur l'emplacement actuel de THôtel-Dieu. 

Nous en trouvons la preuve dans un mémoire fort étudié 
de M. Guiguepère. On y voit en eflfet que la chapelle de 
l'hôpital du pont était dédiée au S. Esprit * ; — que le 
pont, de même que celui de Saint-Saturnin-du-Port, 
s'appelait quelquefois le pont du Saint-Esprit * ; — que 
tout auprès était un bâtiment, appelé VAumônerie du 
Saint-Esprit du Pont du Rhône. C'était l'entrepôt « où 
se centralisaient et se répartissaient les offrandes faites à 



* Saulnier, p. 66 

* Secundum invitattonem ab ipso Praeceptore nobis factam, vidimusac visita- 
vimus domum hospitalariam Sancti Spiritus de Luçduno, collationis de Divione, 
in qua commorati fuimus; cujus ac pertinentiarum suarum nobis impense 
rationibus relatis, recognovimus statuta ordinis in illa non satis religiose obser- 
vari, tam pro temporali, quam pro spirituali (Diplom», II, p. ^72). 

* Guigue, Notre-Dame de Lyon^ p. 208. 



EN FRANCE AU XIII» SIÈCLE |8) 

l'œuvre du pont et de l'hôpital*. » Le savant érudît se 
demande ensuite quels étaient les administrateurs de 
Tœuvre du pont et de l'hôpital et conclut, sur des témoi- 
gnages précis, que ce soin revenait à la confrérie du 
Saint-Esprit, qui fonctionnait à Lyon au XIII* siècle, sans, 
dit-il, qu'on en connût l'origine '. Si M. Guigue avait 
connu l'acte de visite de frère Mouette et l'existence d'un 
hôpital du Saint-Esprit à Lyon, il eut été bien plus affir- 
matif encore, et l'origine de la confrérie ne l'eut pas 
embarrassé, comme il avoue l'avoir été '.. 

Quant à l'hôpital du pont jeté par les frères Pontifes 
entre Vienne et Sainte-Colombe, nous ne saurions affirmer,, 
en l'absence de témoignages précis, que le Saint-Esprit en 
ait joui. Il n'y aurait là cependant rien d'invraisemblable;" 
ce qui est certain, c'est que notre ordre possédait un 
hôpital à Vienne au XIII® siècle et que la confrérie était 
alors florissante dans tout le voisinage*. 

La ville de Saint-Saturnin-du-Port fit construire, elle 
aussi, un pont par les frères Pontifes, qui le dédièrent au 
S. Esprit : de là vient à la ville son nom actuel de Pont- 
Saint-Esprit *. L'hôpital de ce pont a appartenu à l'ordre 
du Saint-Esprit, comme ceux d'Avignon et de Lyon, et 
même il est resté plus longtemps sous sa dépendance. Sans 
parler des nombreux témoignages qui trouveront place 
dans la notice particulière de cette maison, citons seule- 
ment une bulle de Nicolas V (i 448), ratifiant les indulgences 
accordées par les Pères du Concile de Bâle « en faveur de 



* Ibid,, p. 209, 215. 

• Ibid,f p. 217. 

' En i^oQ, rtfrchev6que Pierre de Savoie enleva aux frères du Saint-Esprit 
la direction de Thôpital et de Tœuvre du pont, pour la confier aux religieux 
d'Hautecombe ; les consuls la rendirent à la confrérie vers la fin du même 
siècle. Mais à ce moment, la confrérie restaurée paraît avoir été indépendante 
de Tordre du Saint-Esprit. — Voy. à la III* partie la notice sur Thôpital de Lyon. 

* Visite de frère J. Monette, Diplom,^ II, p. ^72. 

• P. Hélyot, II, p. 286. 



184 D^ELOPPBMBNT MERVEILLEUX DE L*ORDRE 

Thôpital, chapelle et pont du Saint-Esprit *. » On voit par 
ce document que toutes les œuvres des hôpitaux de Gui de 
Montpellier étaient florissantes dans celui de Pont-Saint- 
Esprit. Il rapporte d'abord la légende d'Avignon, qu'il 
applique à Saint-Saturnin, puis il continue ainsi: « Là 
sont reçus les étrangers, nourris les pauvres et soignés les 
malades ; là viennent faire leurs couches les femmes indi- 
gentes ; là sont allaités par des nourrices à gages les 

enfants exposés la nuit en secret » L'hôpital avait 

aussi fondé dans la ville et dans les environs de nombreuses 
confréries du Saint-Esprit, qui se maintinrent longtemps 
dans un état prospère. 

Il est temps de tirer une conclusion de tout ce qui précède. 
Si le lecteur a prêté quelque attention aux faits rapportés 
plus haut, il aura dû être frappé comme nous-mème de la 
coïncidence qui mit les frères du Saint-Esprit en présence 
des Pontifes partout où la tradition place des ouvrages de 
ces derniers. Il est difficile d'admettre que cette coïncidence 
ait été purement fortuite, puisqu'il est certain que, dans 
trois villes au moins sur cinq : à Avignon^ à Lyon et à 
Pont-Saint-Esprit, les hospitaliers prirent la place des 
Pontifes. Mais comment l'expliquer ? 

Remarquons d'abord que saint Benezet naquit non loin 
de Montpellier et qu'il fut contemporain de Gui *. Les 
deux vénérables personnages se connurent certainement ; 
Benezet fut témoin des œuvres magnifiques opérées dans 
les premières maisons de l'Ordre ; peut-être y puisa-t-il la 
première idée de son institut, destiné au secours des voya- 
geurs. Les frères Pontifes auraient-ils été une branche de 
l'ordre du Saint-Esprit, adonnée à une vocation plus 
spéciale ? Il n'est pas déraisonnable de le penser, avec 
Pierre Saulnier *. Si l'on ne veut point aller jusque-là, il 



* Les Enfants assistés au Pont-Saint-Esprit, p. ^21. 
' P. Saulnier, p. 65. 
> Jbid., p. 64. 



EN FRANCE AU XIII* SIÈCLE l8$ 

faut du moins admettre que les hôpitaux des frères Pontifes 
ont passé à l'ordre du Saint-Esprit, soit par suite d'une 
décadence très prompte, soit en vertu d'une association 
entre les deux ordres, le premier se retirant après l'achè- 
vement de l'œuvre des ponts et laissant à l'autre le soin 
d'exercer l'hospitalité ordinaire. Nous avouons que cette 
dernière conclusion nous sourit davantage ; caria décadence 
des Pontifes ne commença, d'après les historiens, qu'à la 
fin du XIII* siècle, et nous voyons leurs maisons occupées 
par les hospitaliers du Saint-Esprit dès le milieu de ce 
même siècle. 

Le lecteur nous pardonnera cette digression, un peu 
longue peut-être, s'il veut bien considérer qu'aucun histo- 
rien n'a connu les relations de notre |ordre avec ses deux 
contemporains ; et que ces annexions de maisons étrangères 
sont d'ailleurs une marque éclatante de la renommée qu'il 
s'était acquise dès ses premières années par la perfection 
de son organisation et la vertu de ses membres. 






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CHAPITRE 11 



EXTENSION DE L'ORDRE EN EUROPE 




E simple exposé que nous venons de faire de l'exten- 
sion si rapide de l'Ordre en France suffit déjà à 
donner une haute idée de sa puissance. Mais ce 
n'est point assez ; nous devons, sous peine de demeurer 
trop incomplet, suivre la marche de son développement à 
travers des contrées plus lointaines, car il n'est aucune 
région de l'Europe qui n'ait reçu quelques-uns de ces 
conquérants pacifiques, qui s'appelaient les frères du Saint- 
Esprit. 

En Italie, dans la seconde patrie de l'Ordre, les Papes, 
en pères tendres et prévoyants, ne négligeaient aucune 
occasion d'augmenter son patrimoine, en ouvrant de 
nouvelles maisons à son zèle et en lui ménageant en 
même temps de nouvelles ressources. Les événements les 
plus indifférents en apparence étaient tournés par eux au 
profit de l'Ordre et des peuples qui le recevaient. Un 
touchant épisode de la guerre parricide de Frédéric II 
contre la Papauté nous en montre un exemple frappant. 
Les Pisans avaient pris parti pour l'Empereur et l'avaient 
aidé à s'emparer de la majeure partie des évèques et de 
deux légats appelés à Rome en concile. Las enfin d'une 
lutte sacrilège, ils implorèrent, en 1257, la grâce du 



|88 EXTENSION DE L*ORDRB EN EUROPE 

Pontife, se rendirent à sa merci et offrirent les réparations 
les plus complètes. Alexandre IV, n'écoutant que les sen- 
timents de la plus tendre charité, pour toute vengeance, 
obligea ces enfants prodigues à bâtir et à doter, en faveur 
des pauvres de la cité, un hôpital du Saint-Esprit ; et sur 
leur promesse, il leva toutes les censures qu'ils avaient 
encourues par leur longue rébellion. L'hôpital fut bâti, 
doté d'une somme de dix mille livres de Pise, versées en 
cinq annuités, déclaré exempt, comblé de privilèges ponti- 
ficaux et placé à la tète de tous les autres hôpitaux de la 
ville et du diocèse. Il porta le nom du pontife qui en avait 
provoqué la création, et les hospitaliers arborèrent dès lors 
la croix double, de couleur rouge, sur leur robe et leur 
manteau * . 

Un grand nombre de villes Italiennes, de la Lombardie 
au fond de la Sicile, avaient reçu, avant Pise, des colonies 
de frères de la colombe^ comme on les appelait alors, ou 
en reçurent à la même époque. Il nous suffira de citer, 
entre beaucoup d'autres, l'hospice d'Acquapendente, illustré 
par le séjour, l'héroïque charité et les miracles de S. Roch " ; 
ceux d'Anagni, d'Aquila, d'Ascoli, d'Atri, de Casale, de 
Chieti, de Corneto, de Crémone, de Palerme,dePouzzoles, 
de Lecco, de Terni, de Florence, de Sinigaglia, deViterbe, 
etc., dont la fondation remonte au XIIP siècle '. 

C'est dans l'hôpital du Saint-Esprit de Palerme que se 
passa, le lundi de Pâques, 30 mars 1282, un horrible drame, 
qui le rendit tristement célèbre. Le peuple s'était porté 
en foule pour assister à l'office de Vêpres, selon la cou- 
tume, et gagner les indulgences; le son des cloches de 
l'église monumentale de San Spirito fut le signal de 



^ Ughelli, //a(<a Sacra, t. III, p. 5x9, ^21. 
• P. Saulnier, p. 66-67. 

" Italia Sacra, t. I., p. 820 ; IV, p. 628 ; V, p. ;i6; IX^ p. 91* — Saulnier, 
p. 81-82. — Voy. aussi les bulles pontificales. 



EXTENSION DE l'oRDRE EN EUROPE 189 

Thorrible massacre, appelé Vêpres Siciliennes ^c\a\ inonda 
la Sicile entière du sang français *. 

Au XIII* siècle, les provinces septentrionales de 
TEspagne et le Portugal étaient seuls ouverts à la charité 
chrétienne. Nos hospitaliers y fondèrent des établissements 
dont la prospérité fut longue et marquée par de nombreux 
bienfaits ; les hôpitaux de Porto, de Calata3rud, de Jaën, 
de Lérida, de Barcelone, de Ségovie, de Valence, de 
Soria, et bien d'autres encore, envoyèrent des colonies 
dans les diverses parties du royaume, à mesure que la 
valeur des rois de Castille et d'Aragon en expulsait les 
Maures % 

En Allemagne, la propagation de l'Ordre ne fut pas 
moins rapide. A peine le pieux fondateur avait-il rendu le 
dernier soupir, quand le mouvement commença. Un riche 
seigneur, du diocèse d'Halberstadt, le comte de Blankem- 
bourg, se trouvant à Rome dans les premiers mois de 
l'année 1208, y avait admiré la parfaite organisation de 
l'hôpital de Sainte-Marie in Saxia, Il conçut dès lors et 
communiqua au souverain Pontile son projet de construire 
dans son pays, près de l'abbaye cistercienne de Saint- 
Michel, un hôpital semblable, pour y recueillir les malades 
et les pauvres. Il promit de lui donner dix-huit manses 
d'excellentes terres, situées à Elikestorp ; plus la dîme 
dudit lieu, avec l'agrément de l'évèque d'Halberstadt; plus 
cent marcs d'argent pour les frais de la construction ; à la 
condition toutefois qu'elle ne serait pas faite en son nom, 
mais au nom du Pape. Le Vicaire de Jésus-Christ accepta 
ces offres, en stipulant que la nouvelle fondation dépen- 



* Raynaldt, ad ann, 1281. — Chrôn, de. Bernard cTEscbt, chap. LXXXI ; — 
Conspiration de Jean Prochyia^ éd. du Panthéon littéraire, t. I, p. 745. 

* Yoy. les bulles pontificales, Diplom,, I, p. ^5, |6, 41, 42, etc.— Sauloieri p. 8;. 



IÇO EXTENSION DE l'oRDRE EN EUROPE 

drait de la maison du Saint-Esprit in Saxia et lui paierait 
chaque année un cens de deux marcs d'argent. 

Innocent III confia à Tabbé de Saint-Michel la mission 
de faire bâtir, conformément aux desseins du pieux fonda- 
teur, le nouvel hôpital, et promit de lui accorder des 
privilèges, aussitôt qu'il serait terminé et organisé *. 

Six mois plus tard, le même pape, comme nous le voyons 
par ses lettres, avait le bonheur d'approuver et de bénir la 
fondation d'une nouvelle maison du Saint-Esprit à Vienne. 
L'auteur de cette œuvre charitable, un certain Gérard, sur 
la renommée de l'hôpital de Sainte-Marie in Saxia^ 
patronné d'ailleurs et encouragé par le duc d'AutrichCi 
s'adressa au souverain Pontife et ofiFrit de remettre aux 
mains des frères du Saint-Esprit la maison qu'il avait bâtie 
pour les pauvres danà un faubourg de la ville de Vienne. 
Il lui assurait une dotation de dix-neuf acres de terres, sur 
laquelle elle paierait à la maison de Rome une redevance 
d'un marc d'argent par an. « Disposé à écouter favorable- 
ment votre prière et celle du duc d'Autriche, lui écrivait le 
Pape, nous recevons sous la protection de saint Pierre et 
la nôtre la dite chapelle, avec toutes ses possessions légi- 
times, actuelles ou futures, tant ecclésiastiques que sécu- 
lières, ainsi que les personnes qui l'habitent ; et nous 
l'annexons à notre hôpital du Saint-Esprit, sous la condition 
du cens annuel convenu. Nous ordonnons en outre, en 
vertu des présentes, que cette fondation reste, comme elle 
l'a été jusqu'alors, sous votre direction, jusqu'à ce que le 
maître de l'hôpital susdit en dispose comme il le jugera 
utile, selon Dieu et sa règle *, par lui-même ou par un 
visiteur. 

Nous nous sommes étendu sur les deux fondations 
précédentes, parce que les lettres du Pontife jettent plus 



' Innoc, /// Epist, lib. XI, n* 69, 21 avril Xio8 (Coll. Migne). 
^Innoc. in Epist. lib. XI, n«i69, 22 octobre 1208 {ColL Migne). 



EXTENSiON DE l'oRDRE EN EUROPE I9I 

d'un rayon de lumière sur la propagation des hôpitaux 
du Saint-Esprit. On y voit comment la réputation de 
dévouement de l'Ordre faisait rechercher les frères, soit 
pour la direction d'établissements déjà existants, soit pour 
le gouvernement de nouvelles fondations appelées par les 
nécessités des pauvres. On remarquera aussi avec quelle 
vigilance le Pape maintient les droits du chef de l'Ordre, 
en lui laissant l'entière disposition des nouvelles maisons, 
et surtout en établissant un lien de subordination filiale, 
au moyen du tribut annuel exigé de tous ses membres. Il 
est donc avéré que, dès l'origine, il existait dans l'Ordre, 
entre les personnes et les maisons, une hiérarchie, qui n'a 
pas peu contribué, sans doute, au maintien de la discipline 
et de la ferveur pendant plusieurs siècles. 

La maison de Vienne révéla bientôt jusqu'en Pologne sa 
consolante fécondité. L'hospice de Cracovie, fondé dans le 
voisinage de cette capitale, à Pradnick, par l'évèque Yves, en 
Ï221, reçut en même temps des frères du Saint-Esprit. Mais 
comme son fondateur remarquait que sa situation écartée 

était préjudiciable à sa prospérité, il résolut de la mettre 
plus à portée des personnes pieuses et la transféra, vingt 
ans après (1244), au sein même de la capitale *. 

Débordant à son tour comme une ruche laborieuse, la 
maison de Cracovie envoya deux essaims d'hospitaliers 
pour desservir les maisons de Sendomir, en 1222, et de 
Kalisch, en 1283'. L'hôpital de Vienne donna également 
naissance à plusieurs autres, disséminés dans les contrées 
germaniques ; mentionnons Glogau, Ratisbonne, Rouffach, 
Stendal (1255), Kœnigsberg, Stephansfeld. Là, dans sa 



* L'historien polonais Albert Basœus, et Saulnier après lui, ont placé en 120 j 
la fondation de Cracovie. Cette date ne peut être juste'', Thôpital de Cracovie 
s*étant toujours regardé comme fils de Vienne, lequel remonte à Tannée 1208. 
C*est ce qui nous a fait adopter la date de 1221, donnée par Hélyot, t. II, 
p. 217 ; — Xenodockium, par Albert Basseus, reliçienx polonais de l'Ordre, 
cité par Saulnier, p. i). 

* Albert Basœus, dans Saulnier, p. 2. 



192 nmisioif D( l'oumli di mon 

maison decampagne, près de Bmmath, le landgrave, Etienne 
de Wcnt, comte d*£giiishem, bAdt on hospice ponr les 
vieillards indigents et les enfants trouvés '. ISbércSne 
de la charité dans TAllemagne du moyen-Age, sainte 
Elisabeth de Hongrie, jugeant les frères da Saint-Esprit 
dignes de s*associer à ses œuvres admirables, leur bfttit un 
hôpital i Eisenach en 1226 *. Nous devons dter aussi avec 
quelque détail la fondation de la maison de Memmingen, 
en raison de la glorieuse prérogative qu^elle eut de demeurer 
seule debout en Allemagne, au milieu des ruines du pro- 
testantisme : hommage précieux rendu au zèle et au 
dévouement de ses membres ! « Sachent tous, dit Tacte de 
fondation (novembre 12 10), que moi, Henri de Vhissenhom, 
voué général de la province de la Haute-Souabe, mû de 
dévotion au Saint-Esprit et pressé par la charité, du con- 
sentement volontaire et mûrement délibéré d^Hedwige 
mon épouse^ puisque nous avons le malheur de n'avoir pas 
d'héritiers^ j*ai construit, en vue du salut de nos âmes, de 
celui de nos ancêtres et de tous les fidèles, un hôpital situé 
dans la vallée, devant la porte de la cité de Memmingen, 
au diocèse d*Augsbourg. Cet hôpital, je Tai donné aux 
frères du Saint-Esprit de Rome, en le remettant entre les 
mains de frère Etienne, qui en est le premier précepteur 
ou maître *. » 

Le comte, en effet, investit frère Etienne de Rome, 
comme on l'appelait, des insignes de la double supériorité 
claustrale et hospitalière de son Hôtel-Dieu. Mais ce reli- 
gieux, venu de Sainte-Marie in Saxia^ exerça peu de 
temps les fonctions de sa charge ; deux ans plus tard, il 
échangeait les travaux de cette vie contre le repos de 



* Sâulnier, p. a, 8a ; -« Jacques de Kœnigshoven, Chronique de Sirashourf, 
Chap. III, p. 194; — Baquol, V Alsace ancienne et moderne^ }*éd , 1865, p. 78. 
< Montalembert, Hist. de sainte Elisabeth, chap. XIII. 
' Holstenius, Codex regularum, U V» p. 499 et sqq. 



EXTENSION DE l'ORDRE EN EUROPE rç^ 

l'éterilité. Le cens annuel dû par le nouvel hospice, en 
signe de dépendance envers la maison-mère de Rome, 
était de sept besans d'or *. 

Ce fut en 1251 seulement que la ville de Munich eut son 
hôpital du Saint-Esprit ; mais il devint fort célèbre dans 
la suite. Le duc Othon le fit construire et le dota magnifi- 
quement ; il y employa les droits d'octroi perçus à Tune des 
portes de la ville. Onze ans plus tard (1262), une bulle 
d'Urbain IV le mit sous la protection du S. Siège et 
l'exempta de toute dîme. En 1270, Conrad II, évéque de 
Frisingue, fractionnant cette maison de Munich, en établit 
à Landshut une colonie, qu'il rendit indépendante et enrichit 
de privilèges •. 

Fulda, la ville de S. Boniface, ouvrit aussi pour les 
pauvres et les nécessiteux de tout genre un établissement 
du Saint-Esprit, de 127 1 à 1290, sur l'initiative du prince- 
abbé. Avant 1250, un autre avait été bâti à Wimpfen*. 
Précédemment encore, à des dates rapprochées, des 
hôpitaux avaient été créés à Worms, hors de la porte 
lie Spire *, à Groningue dans le Wurtemberg, à Pforzheim 
dans le diocèse de Spire, à l'entrée de la Forêt-Noire et en 
dififérentes autres villes allemandes, telles que Hœxter 
(12 18), Neumarkt, Stettin, Herlingshausen, Francfort- 
sur-le-Mein *. Mais cette terre hospitalière nous a retenu 
trop longtemps ; hâtons-nous de poursuivre notre route. 

Dès le XIII* siècle, les glaces de la Scandinavie ont 
connu l'ordre du Saint-Esprit : « Les frères de la Colombe 



* Suipia eccles,t 1669, p. 609-612 ; ^ Arch, de Vévichè (fAugsbourg, Catal. des 
£piques, 

* Carl. Meichelbeck, Hist. Frising.^ 1739, t. II, p. 74-88. 

* En 1250, un bourgeois fait donation d'une propriété| sous la clause qu'elle 
serait inaliénable (Holstenius, loc. cit,), 

* Schannat, Hist. Episc. WormaUscensis, 1794, t* h P* ^7* 

■ HOrter, Tableau des institutions et des mœurs au moyen-âge, t. II, p. 49^-502 ; 
«- Suevia eccles,, pp. h^» 3^7f 564, ^65, 89O, 877. 

13 



194 EXTENSION DE L'oRDRE EN EUROPE 

et les Priants du Saint-Esprit », tels étaient les beaux 
noms sous lesquels ils étaient connus dans ce pays *. De 
1250 à 1300, neuf de ces établissements de charité abritaient 
déjà en Danemark les pèlerins et malades pauvres, ainsi 
que les autres personnes trop infirmes pour aller chercher 
leur nourriture de maison en maison •. A leur tète bril- 
lèrent, par les noms de leurs fondateurs et la richesse de 
leur dotation : et Thôpital de Rœskilde, fondé et doté 
avant 1253 par Tévêque Jacques Erlandsen' ; et l'hôpital de 
Copenhague, fondé avant 1296 par un autre évêque de 
Rœskilde, sur la place où Téglise du Saint-Esprit subsiste 
encore ; et l'hôpital d'Odensée, qu'entourèrent dès lors son 
église, un grand cimetière et la maison du prieur ; le 
sanctuaire et les reliques du grand patron du Danemark, 
S. Canut, y attiraient des pèlerins venus de tous les pays 
Scandinaves ; enfin, l'hôpital de Ribe en Jutland, qui 
nous apparaît, à la fin du XIII* siècle, desservi par une 
double communauté de frères et de sœurs du Saint-Esprit*. 
Si nous étudions les fondations faites dans les pays plus 
septentrionaux encore, la Suède et la Norvège, nous 
voyons ces régions de glace inondées, elles aussi, par les 
rayons bienfaisants de la charité. « Ce soleil des âmes et 
des pauvres, comme celui du firmament, ne laisse rien 
échapper à sa chaude influence*^. » L'hôpital de Sœderkœping 
dut son existence à Svantepulk et à sa femme Bénédicte^ 
sœur de la reine Catherine et belle-sœur du roi Eric-le- 
Bègue. Ces souverains moururent sans postérité (1250) ; 



* Eric Wcnnerhalem, Dissert, de ordint Spiritus SancH in Saxia de Urbe, 
Upsflliœ, 1791, § IV ; — Pontoppidan, Annales Eccles, Dan,, t. I, p. 517; — 
Horger Fr. Rordam, Les églises et couvents de Copenhague au moyen-âge. Co- 
penhague, 1859-X863. 

> Engelstoft, HisL des paroisses d'Odensée^ 1852; Bist, d^Odensée, 186^ 

> Monter, Hist, eccles. du Danemark et de laNorvhge^X. II, p. 656. 

* Engelstoû, op, cit. — Daugaard, Des coutrents Danois au moyen-âge, 
Copenhague, 18)0, p. 190, 429 ; — Horger Fr. Rordam, op» cit. 

* Ps. XVIII ; TAbbé Renard, Hist. ms. de Vhôp. de Neufchâteau, chap. VU, 



EXTENSION DE L*ORDRB EN EUROPE I95 

un legs royal s'ajouta aux dons déjà faits en faveur des 
pèlerins, des orphelins et des enfants exposés, et leur cons- 
titua une dotation opulente. Les hôpitaux de Stockholm, 
d'Upsal, d'Arboga, d'Enkœping, de Skeninge, de Lin- 
kœping, de Lund, de Malmœ, de Landskrona et de plu- 
sieurs autres villes, notamment des cités épiscopales, fon- 
dés soit précédemment, soit postérieurement, naquirent 
et grandirent dans des conditions moins favorables de 
fortune ; aussi les frères de l'Ordre suppléaient-ils par des 
quêtes à l'insuffisance des ressources, pour entretenir leurs 
pauvres *. De toutes les fondations faites en Norvège à 
l'époque primitive, une seule, celle de Halsnoë, située dans 
Une île près de Bergen, sur la côte occidentale, a laissé 
quelques traces historiques dans le naufrage général des 
documents anciens, perdus ou détruits au moment de la 
Réforme. D'après l'aspect de ses ruines, au dire du cons- 
ciencieux historien des couvents de la Norvège au moyen- 
âge, l'hospice de Halsnoë remontait au milieu du XIII* 
siècle •. Il se rattachait à une chaîne d'hospices, reliant 
entre elles les villes, assez éloignées les unes des autres, 
dans ces contrées vastes, montagneuses et peu peuplées, 
mais sillonnées constamment par les chrétiens qui se ren- 
daient à Drontheim, au tombeau vénéré de S. Olaf, patron 
de la Norvège. Ces haltes bienfaisantes, échelonnées çà et 
là sur de longues routes désertes, semblaient comme les 
bras des villes, charitablement tendus vers les solitudes, 
pour y chercher et étreindre les nécessiteux '. 

La Belgique tenait de trop près à la patrie de Gui de 
Montpellier pour ne pas jouir de son institution. Il existait 



* Rhyzelius, MonasLStuCt P- 80, ^24 ; ^ Spegel, Hist, eccles., p. 98 ; — 
Pontoppidan, op. cit., t. 1, p. 517. 

' Christian C. A. Lange, Hist. des coupenU de la Norvège aumoyen-àge. Chril- 
tiana, 1847, P* 20, 67. 
' Journal du Nord pour la connaissance des Antiquités^ ;• liv. p. 2^0. 



IÇÔ EXTENSION DE l'ORDRE EN EUROPE 

à Douai, en 1267, ^^ hôpital du Saint-Esprit*. « Mais 
dans la plupart des villes de Flandre, ce n'était pas le plus 
particulièrement sous la forme d'hôpitaux, qui n'y man- 
quaient pas, au surplus, que la charité s'exerçait en l'hon- 
neur du Paraclet, du Suprême Consolateur : c'était surtout 
par des secours distribués aux indigents, au moyen d'insti- 
tutions nommées Tables despauvres ou duSainUEsprit..^ 
Nous pouvons citer les tables du Saint-Esprit de Douai, 
Bruges, Ypres, Poperinghe,Tirlemont, Bruxelles, Malines, 
etc '. » 

Nous voudrions pouvoir terminer l'aperru des fondations 
par celles de l'Angleterre ; mais les documents sont trop 
peu explicites. Nous savons cependant que le roi Jean 
donna à l'ordre naissant l'église de Wirtel avec tous ses 
revenus. Innocent III, en partageant l'Europe entre Rome 
et Montpellier, au sujet des quêtes, réserva au premier 
l'Angleterre, comme dépendante du Saint-Siège. Avec les 
nombreuses relations qui unissaient alors l'Angleterre à 
Rome, il serait impossible que l'Ordre ne s'y fût pas im- 
planté, comme partout ailleurs. Aussi, d'après le témoignage 
de Saulnier, il y possédait de nombreuses maisons ', et les 
documents citent souvent des frères appartenant à cette 
nation alors si chrétienne. 

Quel spectacle admirable que celui d'un aussi merveilleux 



* Tailliar, Recueil d* actes en langue Romane-Wallonne, Douai, 1849» p. 285. 

* Reifuc Belge de Numismatique^ 1884, p. i6^ ~ Sur les Tables du Saint-Esprit 
de Belgique, voy. Tailliar, op, cit., p. LXI-LXIIl ; — A. de Schoodt, 
Méreaux de bienfaisance ecclésiastiques et religieux de la pille de Bruges^ p. j-15 
Q\ Revue Belge de Numism. 185;, p. p^-H5 ; — Alph. Vanden Peereboom, 
Essai de Numism, YproisCt p. 246; — Art. de M. C. Vanden Broeck sur Iti 
Table de Bruxelles, Revue Belge de Numism, 1879, p. 72 ; — Descript, du 
cabinet des jetons hist, formé par L. de Coster, x88^, p. 4, etc. 

Toutes ces Tables du Saint-Esprit nous paraissent avoir été de simples 
confréries de nptre ordre, Mais comme elles se rendirent assez promptement 
indépendantes, on en est arrivé de nos jours à perdre de vue leur origine. 

' P. Saulniçfi p. 8;. 



EXTENSION DE l'ORDRE EN EUROPE I97 

développement ! Quelle marque éclatante de la bénédic- 
tion divine répandue abondamment sur l'ordre du Saint- 
Esprit. Oui, ils étaient animés de l'esprit de Jésus-Christ, 
ces hommes généreux, qui savaient faire de leurs richesses 
un si bel usage, en faisant grande et surabondante la part 
des pauvres et des malades ! Elles avaient ressenti la 
sainte contagion de la charité chrétienne, ces âmes qui, à 
défaut de leurs biens, payaient de leur personne, dans 
l'exercice d'un dévouement obscur et de tous les jours, au 
service des membres souffrants de Jésus-Christ. Gui de 
Montpellier, comme Abraham, était devenu le père d'un 
grand peuple ; il avait rempli de ses iils spirituels, animés 
tous de son esprit, ces Maisons-Dieu que nos ancêtres 
avaient répandues sur la terre de France et sur l'Europe 
entière avec une profusion si magnifique. Entreprise gran- 
diose et digne de ces époques où l'on ne connaissait que la 
vraie philanthropie, celle qui nous ordonne d'aimer et d'as- 
sister les hommes, parcequ' ils sontnosfrèresen Jésus-Christ! 











^ 












CHAPITRE m 



ROME ET MONTPELLIER 




'est ici le lieu de parler d'une querelle célèbre dans 
l'histoire de l'ordre du Saint-Esprit, et qui nous 
montrera, après les merveilles opérées par l'esprit 
de Dieu, les tristes effets de la faiblesse humaine, que l'on 
retrouve mêlée aux œuvres même les plus saintes. Il s'agit 
de la rivalité des maisons de Rome et de Montpellier. A 
vrai dire, cette rivalité ne se manifesta pas tout d'abord ; 
elle fut même longtemps sans produire des effets bien 
funestes. Mais à mesure que le zèle et la ferveur dimi- 
nuaient, elle suscita des discordés au sein de l'Ordre, 
empêcha une partie du bien qu'il aurait dû faire, et fut une 
des causes qui hâtèrent sa décadence. 

L importante question de la préséance entre les deux 
maisons a été défigurée à l'envi par les défenseurs de 
rOrdre en France aux deux derniers siècles. Ceux mêmes 
qui apportaient aux débats les meilleures intentions ont 
erré d'une façon lamentable, aveuglés qu'ils étaient par 
les préjugés gallicans. Grâce à Dieu, le temps des doc- 
trines gallicanes est passé, et la question qui va nous 
occuper n'offre plus aujourd'hui qu'un intérêt rétrospectif. 
Il nous suffira, pour établir la vérité, d'exposer simplement 
les f^its. 



200 ROME ET MONTPELLIER 

Innocent III, en confiant à Gui de Montpellier Thôpital 
de Sainte-Marie in Saxia, en 1204, avait décidé que les 
deux maisons de Rome et de Montpellier demeureraient 
unies sous le gouvernement du grand maître de l'Ordre, qui 
aurait le devoir de les visiter une fois chaque année. A la 
mort du grand maître, celle des deux maisons où il serait 
décédé avertirait l'autre d'envoyer deux délégués pour 
l'élection d'un successeur. Du vivant deGui, cette disposition 
s'imposait. Fondateur de Montpellier, attaché à cette mai- 
son comme au double berceau de sa famille et de l'Ordre ; 
placé d'autre part à la tète de Sainte-Marie in Saxia par 
la confiance du Pape, il devait conserver la supériorité 
immédiate des deux hôpitaux. Mais il était facile de prévoir 
que ce régime ne pouvait subsister après lui sans de graves 
inconvénients. Gui lui-même paraît l'avoir compris. Dès 
l'année 1 197, il avait quitté sa patrie et servait les pauvres à 
Rome, dans ses maisons de Sainte-Agathe et de Sainte- 
Marie au delà du Tibre, tandis qu'un simple vicaire 
administrait celle de Montpellier. S'il séjourna ensuite 
quelquefois dans cette dernière ville, sa demeure habituelle 
fut Rome, et c'est à Rome qu'il mourut, au commence- 
ment de l'année 1209. Peut-être, a vaut de mourir, conseilla- 
t-il lui-même aux frères de Montpellier de renoncer à un 
privilège honorable, mais qui devait nécessairement 
entraîner des lenteurs regrettables dans l'administration. 
Toujours est-il que les frères de Montpellier, envoyés à 
Rome pour l'élection de son successeur, s'entendirent avec 
ceux de Sainte-Marie pour faire cesser l'égalité qui existait 
entre les deux maisons. Nous en trouvons la preuve dans 
le bref suivant, qu'Innocent adressa à l'assemblée, le 8 
juin 1209 : 

« Innocent, évêque aux frères des hôpitaux du 

Saint-Esprit voués au service du Seigneur dans les villes 
de Rome et de Montpellier. A la mort de Gui, d'heureuse 
mémoire, qui fut l'instituteur et le premier recteur de vos 



ROMB ET MONTPELLIER 20 f^ 

hôpitaux, plusieurs de vos frères, envoyés de Montpellier, 
étant venus, ainsi que quelques-uns de ceux de Rome, en- 
notre présence ; de leur avis et consentement, et parce que 
la chose paraissait être de la plus grande opportunité, 
nous avons statué que le chef et le magistère de votre 
ordre demeurera à Rome, près Thôpital de Sainte-Marie 
in Saxia^ de telle sorte que le recteur de cette maison soit 
préposé en même temps à tous les frères de l'Ordre, tant 
présents que futurs, et que tous soient tenus de lui rendre 
Tobéissance et la révérence régulières. Lorsqu'il y aura lieu 
d'élire un recteur de l'hôpital de Montpellier, qu'il soit élu 
avec le consentement du maître de Rome. C'est pourquoi, 
ayant fait élire nous-méme, selon la forme de vos consti- 
tutions, notre cher fils, frère Pierre de Graneirio^ 
comme recteur suprême de l'hôpital du Saint-Esprit in 
Saxia, nous ordonnons que celui de Montpellier soit élu 
avec son consentement et son avis exprès. C'est pourquoi 
nous vous avertissons universellement, par cet écrit 
apostolique, d'observer inviolablement, vous et vos succes- 
seurs, ce que nous avons établi pour votre bien ; toutes les 
autres choses exprimées dans notre précédent privilège 
demeurant en leur vigueur. Donné à Anagni, le six des 
ides de juin, la onzième année de notre pontificat* ». 

Un témoignage si formel ne peut laisser place à aucun 
doute. La maison de Montpellier, par le consentement 
exprès de ses membres, renonçait à être l'égale de la 
maison de Rome. Sans doute elle conservait l'honneur 
d'avoir été le berceau de l'Ordre ; mais elle n'en était plus 
le chefj la tête ; son recteur ne possédait plus le magistère 
souverain. Elle devait désormais prendre rang en tête des 
maisons magistrales, et, en même temps qu'elle exerçait 
des droits sur ses nombreuses dépendances, elle avait des 
devoirs d'obéissance à l'égard du chef de l'Ordre. 



* Diplomata, I, p. 9. 



202 ROME ET MONTPELLIER 

En dépit des déclamations intéressées de leurs succès* 
seurs vrais ou prétendus des XVII* et XVIII* siècles, on 
ne peut nier que les frères de Montpellier aient eu toute 
liberté de renoncer à leur privilège, et que le Souverain 
Pontife ait usé d'un pouvoir légitime, en fixant dans la 
maison romaine le généralat de TOrdre ; c'était là une 
simple mesure disciplinaire et administrative, dont les 
papes ont usé dans d'autres occasions et d'une manière 
assurément fort légitime. Depuis longtemps les généralats 
de tous les grands ordres religieux sont centralisés à 
Rome : c'est là leur place naturelle. 

Dans les trois bulles qu'Honorius III adressa à l'Ordre, 
il eut soin de supprimer le passage relatif à l'union 
primitive des deux maisons * . déclarant cette union « per- 
nicieuse et dommageable tant au spirituel qu'au temporel » 
de l'un et l'autre établissement'. Montpellier nous apparaît 



* Cœterum quoniam unionem cjusdem hospitalls Sancti Spiritus in Monte 
Pessulano vobis et hospitali vestro, tam in spiritualibus quamin temporalibus, 
perniciosam cognovimus et damnosam ; ipsam de Fratrum nostrorum consilio 
providimus dissolvendam. Statuentes ut nec istud illi, ncc illud isti in aliquo 
teneatur, nec vobis et illis aliquid sit commune : non obstante Privilegio dicti 
Predecessoris nostri, vel nostro^si quod super unioncista apparuerit impetra« 
tum. Honor, III Const. I (Diplom., I, p. 12). 

' L'auteur des Di^/o/mi/a affirme qu'Honorius III, c convaincu par lui-mcme, 
et sur Us remontrances de Philippe Auguste^ que l'on ne pouvoit éteindre en 
France un généralat qui y avoit pris naissance, sans Taveu du Roy, contre 
les droits du Fondateur, sans le consentement de toutes les parties, cassa 
Tunion qu'Innocent III, son prédécesseur, avoit faite: déclara Thûpital du 
Saint-Esprit de Montpellier chef de tout l'Ordre en deçà Us MonU, rendit les 
oommandeurs de ces deux hôpitaux indépendans l'un de l'autre et les soumit 
immédiatement au Saint-Siège. » (Diplom. y Préface et observ. sur les bulles, 
p. 10, 12, 14, etc). — En vérité, le docte auteur a pris ici ses désirs pour la 
réalité. Le texte de la bulle d'Honorius, que nous citons ci-dessus, ne fait que 
confirmer purement et simplement la désunion opérée par son prédécesseur, 
sans conférer à Montpellier aucune autorité en deçà des Monts et sans dire 
mot de son indépendance prétendue à Tégard de Rome. Quant aux protesta- 
tions de Philippe Auguste, au nom des c droits de nos Rois • et des « Libertés 
de l'Eglise Gallicane », elle sont pour le moins fort hypothétiques, vu qu'au 
XIII* siècle et jusqu'en 1549, Montpellier appartenait à l'Espagne, et que 
d'autre part, les fameuses « Libertés » étaient, heureusement, loin encore 
d'être écloses du cerveau des jurisconsultes. — On nous pardonnera de nous 
être arrêté à réfuter des objections aussi futiles : nous devions le faire une 
fois pour toutes, car ce sont là les seuls arguments des défenseurs dç Pind^* 
pendance de Montpellier, aux deu?ç derniçrs siècles. 



ROME ET MONTPELLIER 20} 

simplement dans ces bulles comme une maison magistrale 
et conventuelle importante, dont le maître étend son 
pouvoir sur onze rectories filiales ' . 

Le 15 mars 1228, Grégoire IX confirma les termes du 
bref d'Innocent III, déclarant de nouveau que le chef et 
le magistère de l'ordre entier aurait toujours son siège à 
Rome *. L'occasion de cette reconnaissance fut la soumis- 
sion « spontanée et volontaire » que le recteur de Montpellier 
fit de sa personne, de son hôpital et de tous ses biens, par 
procureur, au grand maître Jean, entre les mains de deux 
cardinaux députés à cet effet par le Pape. Le fait est 
rapporté dans une constitution d'Alexandre IV '. 

Longtemps d'ailleurs, les recteurs de Montpellier parais- 
sent s'être soumis à l'autorité du commandeur de Sainte- 
Marie in Saxia^ à Rome, auquel les papes, même pendant 
leur séjour à Avignon, adressaient toutes leurs bulles *. 
Mais Grégoire XI se laissa surprendre par un recteur de 
Montpellier, que l'amour de l'indépendance ou l'ambition 
poussaient à contester au maître romain un titre si bien 
établi. Le 12 août 1372, il lui accorda la dignité de grand 
maître, au même titre que celui de Sainte-Marie, et l'investit 
du gouvernement de tous les hôpitaux situés en dehors de 
l'Italie, de la Sicile, de l'Angleterre et de la Hongrie, 
nonobstant toutes coutumes, même anciennes, et toutes 
soumissions contraires*. Nous retrouvons ici les délimi* 



* Diplomata, I, p. 17. 

* Ibid,, I, p. 19. 
' Ibid., I,p« 24. 

* Les actes pontificaux ont toujours été adressés au mattre romain. Cela ne 
laisse pas que d*embarrasser Tauteur des Diplomata ; il se contente de dé- 
clarer qu'il admet ces actes au Bullaire, malgré cette usurpation de titre, 
parceque les pririlèges qu'ils contiennent s'adressent à Tordre entier. Mais il 
ne remarque pas son inconséquence : si Montpellier ne s'était point soumis à 
Rome, tous les privilèges étant accordés au grand mattre de Rome et à ses 
frèresen communion avec lui, les schismatiques n'y auraient eu aucune part, 
ni aucun droit, pas plus que les branches détachées du tronc n'en reçoivent 
la sève. 

* Diplomata, 1, p. 62. 



204 KOHE ET lfOirrPEUJE& 

talions établies par Innocent III , lorsqu'il avait partagé la 
chrétienté entre les deux hôpitaux, mais pour les quêtes 
seulement. Il est probable que Tastucieux recteur se 
servit des termes de cette bulle pour surprendre la bonne 
foi du pontife et lui faire croire à un empiétement de 
pouvoir de la part du grand maître de Rome. 

Nous ne savons si Tacte de Grégoire XI, qui dérogeait 
à un état de choses accepté depuis cent cinquante ans, 
obtint son exécution ; mais tout nous porte à croire qu'il 
n'eût aucun effet. Ou bien le Pape le retira, ou bien le 
grand maître de Montpellier n*eut pas la puissance de 
briser le lien qui rattachait à Rome les autres provinces. 
Nous avons des preuves qu*en France même, les maisons 
de Besançon, de Dijon et d'autres hôpitaux notables con- 
tinuèrent comme auparavant à soumettre leurs élections au 
grand maître, à lui payer les tributs annuels, à recourir à 
son tribunal : enfin à lui donner toutes les marques d'une 
obéissance filiale '. S'il en fut ainsi pour la France, à plus 
forte raison les hôpitaux de l'Allemagne et des régions 
septentrionales, presque tous fondés par la maison romaine, 
lui restèrent-ils fidèles. 

Les prétentions des recteurs de Montpellier à la grande 
maîtrise reçurent, en 1454, de Nicolas V, un échec décisif, 



' Nous croyons utile, afin de bien montrer cette continuité d'obédience au 
grand mattre romain, soit avant, soit après la bulle de Grégoire XI, d*en rap- 
porter ici quelques exemples. En 1^17, une sentence du grand mattre Simon 
Orsini condamne à la détention perpétuelle un recteur de Dijon (Arch. de 
Vhâp. de Besançon^ cas. C, B. I*). — En 1^4$, le mattre de Montpellier, 
présidant un chapitre de sa province, sMntitule simplement « Précepteur géné- 
ral de Montpellier et de tous ses membres et droits » ; c*est le titre que 
prenaient les recteurs magistraux de Besançon* d'Auray, etc. {Diplom., Il, 
p. ^81). — Une délibération du chapitre général de TOrdre, à RomCf replace 
Toul sous la juridiction de Besançon, en 141B (Arch, de Bes.^ cas. C, B. le).— 
Au temps même où le recteur de Montpellier venait de recevoir la buUe de 
Grégoire XI, il chercha à profiter de la vacance du rectorat de Dijon pour 
faire reconnaître sa juridiction dans cet hôpital; mais ses efforts échouèrent 
et les religieux firent confirmer leur élection par le grand mattre de Rome 
(D. Calmelet, chap. 111). — Voy. aussi au chap. IV de la première partie, 
p. M^ les droits de responsion payés à Rome. 



ROME ET MONTPELLIER 20$ 

dont ils ne purent se relever. La querelle s'était rallumée 
entre Guérin Teler, de Montpellier, et Pierre Mathei de 
Capoccinis, de Rome. Ce dernier exigeait du recteur de 
Montpellier l'obéissance et toutes les autres soumissions, 
pour lui et ses membres. Teler s'y refusa et se rendit au 
chapitre général de 1450, pour soutenir ses droits. Deux 
cardinaux furent chargés parle Pape de présider l'assemblée ; 
mais la controverse demeura indécise. Sur ces entrefaites, 
Guérin Teler vint à mourir à Rome. Nicolas V nomma, pour 
lui succéder, frère Déodat Richard, apparemment un de 
ses compagnons. Celui-ci ne se montra pas moins opiniâtre 
à refuser toute soumission. Pour en finir avec une querelle 
si .préjudiciable à l'Ordre, le Pape chargea le cardinal 
Antoine de Lerida de rendre une sentence définitive. Le 
nouveau juge, après une ample information de la cause, 
ayant pris l'avis de jurisconsultes habiles, rendit son arrêt, 
contresigné par les deux cardinaux mentionnés ci-dessus. 
La sentence portait : « Que le précepteur du Saint-Esprit 
de Montpellier, présent et futur, serait précepteur général 
des maisons ci-après inscrites, soumises immédiatement à 
l'hôpital de Montpellier comme ses membres, et situées 
dans les provinces de Narbonne, Auch, Bordeaux, Tou- 
louse, Arles et Aix ; qu'il aurait en ces lieux tout pouvoir 
et puissance d'instituer, de destituer, de corriger, de punir, 
de changer et transférer, sauf, en tous cas, la juridic^ 
tion du grand maître général de Vordre du Saint- 
Esprit. » 

La sentence énumère vingt-deux hôpitaux appartenant 
à la province magistrale de Montpellier. Puis elle ajoute 
que le précepteur de Montpellier peut user, dans ces 
maisons, de tous les privilèges, exemptions, immunités, 
franchises et indulgences, dont use le grand maître de 
rOrdre, mais doit se soumettre à ce dernier pour l'ins- 
titution, la correction et là visite, et lui rendre la révérence 
et Tobédience régulières, comme touç les autres religieux. 



206 ROME ET MOUmUlEA 

Il doit aussi payer à lliôpital romain, chaque année, un cens 
de trois florins d'or de Caméra^ tribut moindre que celui 
qui était payé auparavant ; assister enfin, tous les ans, au 
chapitre général, à Rome, et y occuper la seconde place, 
à la suite du grand maître. 

Telles sont les dispositions de cette sentence, qui maintint 
définitivement la suprématie traditionnelle de Rome, 
reconnue d'ailleurs de tout temps par les provinces magris- 
trales, autresqueMontpellier. Nicolas Via rendit exécutoire, 
et menaça d'excommunication et du bras séculier ceux qui 
oseraient dans la suite y contrevenir '. 

Cette solution vigoureuse porta ses firuits. Nous voyons, 
en 1470, frère Martin Carrière, recteur de Montpellier, 
recevoir du grand maître, en présence du chapitre, l'in- 
vestiture de sa charge par l'imposition du hirretutn et le 
baiser de paix, et lui promettre en même temps obéissance 
et fidélité *. Frère Jean Clausel eut recours au grand maître 
en 1494, dans un procès intenté à deux laïcs au sujet de 
droits dus à son hôpital *. Son successeur, Jean Bertrand, 
fit, par procureur, au chapitre de 1498, acte d'obédience au 
grand maître, pour lui et ses frères, avec promesse du cens 
annuel *. A partir de cette époque, les tributs de Montpellier 
et de ses membres furent payés exactement à Rome 
comme ceux des autres provinces. Cette soumission tardive 
ne paraît plus avoir cessé, jusqu'aux jours malheureux où 
des aventuriers, usurpant le titre de frères et les biens de 
rOrdre, tenteront de renouveler à leur profit des préten- 
tions depuis longtemps abandonnées. Mais avant d'arriver 
à ce pénible sujet, il nous faut reprendre de plus haut la 
suite de notre histoire. 



* Diplomaia, I, p. 79. — L*irrêt du cardinal de Lerida est contenu dân» ià 
bulle conârmative de Nicolas V. 

* Arch. du Saint'Esprit de Rome, Lib. 20, (• 184 ; lib. 24, (^ 55. 
*Ibid., Lib. j, f».... 

* IM,, Lib. 19, f 17Ç ; Hb. rub. (216), (^ 158 v», lib. C, ^ J8, 167 ; lib. A, f U. 




CHAPITRE IV 




LES GRANDS MAITRES, DU XIII* AU XV SIÈCLE. 

PROTECTION ET FAVEURS 
ACCORDÉES PAR LES PAPES 

^HISTOIRE nous a conservé les noms des grands 
maîtres de Tordre du Saint-Esprit, mais elle a 
retenu peu de détails saillants, peu de traits 
intéressants de leur vie. Sans doute ils ont vécu dans Tin- 
teneur de TOrdre, attentifs seulement aux œuvres de cette 
charité, dont il a été dit qu^elle ne s'enorgueillit point, et 
ne cherche pas à se faire valoir. Ils ont cherché avant tout 
à guider, à encourager leurs subordonnés dans Texercice 
de leur sainte vocation, à réaliser dans la plus large 
mesure les intentions charitables du pieux fondateur. Si la 
gloire humaine les a oubliés au fond de leur hôpital, Jésus, 
leur maître, pour qui seul ils travaillaient, leur a donné la 
récompense promise au serviteur bon et fidèle. 
. Le premier successeur de Gui de Montpellier est appelé, 
dans le bref d'Innocent III, de 1 20g, Pierre de Graneirio. 
Nous ne savons pourquoi Saulnier et Calmelet * identifient 
ce personnage avec le grand maître Cynthius. Il est 



* p. Sauiniçr, p. h '1 ^ D* Calmelet, chip, u 



208 LBS CHAUDS MAJULES, DU XUI* AU Xf «ÉCLE 

possible que cette dernière appellation ne soit qu'un surnom 
de Pierre. C'est à lui qu'Honorius III adressa la première 
des bulles dont nous avons parlé au chapitre précédent (i^ 
mai 12 17). Le Souverain Pontife y confirme solennellement 
tous les privilèges octroyés à l'Ordre par son prédécesseur. 
Le même pape, dans deux autres bulles, mit sous la garde 
de S. Pierre les possessions des maisons de Coutances et 
d'Auray (1220) * ; cinq ans plus tard, il accorda la même 
faveur à Montpellier, dont le frère Bernard était alors rec- 
teur ; mais, nous Tavons déjà dit, sans faire la moindre 
allusion à une situation exceptionnelle et privilégiée de 
cette maison. 

Après Bernard, vint le frère Accuritnhonus^ auquel 
Alexandre IV confirma, en 1255, Tusage de la station 
solennelle et de la procession instituée par Innocent III*. 
On a conservé de ce grand pape deux autres bulles ayant 
trait à TOrdre ; dans la première * (14 juin 1256), il prend 
Tordre entier sous sa protection et renouvelle les privilè- 
ges concédés par ses prédécesseurs ; nous en avons cité plus 
haut le passage important, relatif à la soumission de Mont- 
pellier. Dans la seconde % un mois plus tard, il permet à 
rOrdre de recevoir les vœux des religieux de tous les 
ordres, les Chartreux exceptés. C'était, dit-il, sur la 
demande des frères : les fondations se faisaient si nom- 
breuses et la moisson si abondante, qu'il y avait disette 
d'ouvriers. 

Frère Jean^ cinquième grand maître, reçut du roi Jean 
d'Angleterre l'église de tous les Saints et la chapelle Saint- 
Nicolas de Wir tel (1272). 

Ses successeurs furent les frères Paul, Raymond de 



' Dîpbmata, I, p. i^, 16. 

* Saulnier, p. ^4. — Nous empruntons à cet auteur (p. jsetsv.) la nomencU' 
ture des grands maîtres. 

' Diplomaia^ I. p. 23. 

* Ihid,f p. 19. .... 



PROTECTION ET FAVEURS DES PAPES 209 

Trehiy Cynthius 11^ Sylvestre^ qui le premier prit le titre 
de Prieur de tout l'Ordre^ à la manière des Chartreux, 
des Carmélites et d'autres, yi'an // augmenta notablement 
les possessions de Sainte-Marie ; Ventura continua ces 
agrandissements et fut suivi de 5/wo«, de l'illustre famille 
des Orsini. Ce grand maître, dont le mérite égalait la nais- 
sance, pendant un gouvernement de plus de vingt-cinq 
ans (i 295-1 321), fit jouir sa maison d'une longue prospérité. 
C'est sous son rectorat cependant, que les frères du Saint- 
Esprit furent mis à une rude épreuve, par l'apparition de 
la peste qui désola l'Europe et fit périr, dit-on, un tiers des 
habitants. 

Ce terrible fléau fit en même temps éclater la charité 
héroïque d'un des saints les plus illustres du siècle. Nous 
voulons parler de saint Roch, né à Montpellier vers 1295. 
Il n'a pas, que l'on sache, appartenu à l'ordre du Saint- 
Esprit, sinon peut-être en qualité d'oblat temporaire ; 
mais du moins, ouvrier volontaire, il accomplit dans nos 
hôpitaux la plus grande partie de sa carrière. Sans doute 
il avait puisé dès sa jeunesse, dans l'hôpital de sa ville na- 
tale, qui jetait alors un si vif éclat, le germe de cette voca- 
tion qui allait illustrer sa vie. A la nouvelle du fléau qui 
pénétrait dans les ports de l'Italie, sa vocation s'éveilla ; il 
partit pour ce malheureux pays, en offrant partout ses ser- 
vices dans les hôpitaux qu'il rencontrait. La maison du 
Saint-Esprit d'Acquapenden te eut le privilège de le retenir 
le plus longtemps. Son héroïque charité donnait courage 
à tous ceux qui en étaient témoins, et Dieu se plaisait à 
multiplier les guérisons par les mains de son serviteur. Sa 
mission terminée dans cette ville, il suivit plus loin le fléau: 
Césène, Rimini et toute la Romagne, Rome même, eurent 
part à ses bienfaits ; puis la peste étant passée en Lom- 
bardie, il franchit de nouveau les Apennins et parcourut les 
villes de Forli, Novarre, Plaisance, semant les guérisons 



14 



210 LES GRANDS MAITRBS, DU Xm* AU XY« tlfiCLE 

sur son passage '. Bien souvent les frères da Saint-Eqirit 
furent les heureux témoins de son ardente charité. Combien 
un tel exemple devait les enflammer au service des malheu- 
reuses victimes du fléau ! 

Cependant les papes ne cessaient de donner à TOrdre 
de nombreux témoignages de leur estime et de leur bien- 
veillance. Nicolas IV, en deux bulles, accorda de précieu- 
ses faveurs aux frères quêteurs *. Boniface VIII, en don- 
nant à rOrdre un Cardinal Protecteur, Texempta de toute 
juridiction des ordinaires et déclara nulles les impétrations 
de ses biens, faites en cour de Rome '. Clément V % Jean 
XX % Clément VI *, Urbain V % ouvrirent libéralem^it 
les trésors de TEglise et répandirent à pleines mains les 
largesses spirituelles sur les bienfaiteurs et les confrères. 
Nous nous contentons d'indiquer ici ces faveurs pontificales, 
auxquelles nous amène la suite de notre récit ; il serait 
oiseux d'en parler plus longuement, après le chapitre spé- 
cial que nous leur avons consacré dans la première partie 
de l'ouvrage. 

Nous n'entrerons pas davantage dans le détail de la vie 
et de Tadministration de chacun des grands maîtres *, car 
ces choses intéressent surtout, on le comprend, l'histoire 
particulière de l'hôpital romain. Rapportons cependant un 
épisode bien propre à montrer quelle influence ils s'étaient 
acquise par leurs continuels bienfaits. 

En 1330, au milieu de l'anarchie et des désordres causés 



' p. Saulnier, p. 67. 

* Bulles de 1289 et 1391, Diplomata^ I, p. ^o, m* 
'Bulles de 1394 et 1397, ibid., p. 40, 4^, 47. 

* Bulle du 50 janvier :^o6, ibld,^ p. 48. 

' Bulles des 39 mai ijoS et 11 mai 1538, ibid.^ p. 51, 

* Bulle du 4 juillet 1^43, ibid,^ p. 5$. 
"* Bulle du ;i mars 1568, ibid., p. 59. 

* On trouvera, aux PUccs Justif., la liste chronologique des grands mattres. 
Pour le détail de leur administration, voir P. Saulnier, chap. VI, pp. 50-68. 



PROTECTION ET FAVEURS DES PAPES 211 

par Tabsence des papes, un légat de Clément VI, le cardi- 
nal Annibal Ceccano, arrivait à Rome. La foule, hostile à 
tout ce qui venait d'Avignon, se pressait jusque dans la 
cour de son palais. Un des serviteurs, impatienté, met tout 
le monde dehors et ferme les portes. Rendus furieux par 
cette déconvenue, les curieux s'arment de pierres et les 
lancent contre le palais ; bientôt leurs cris rassemblent 
toute la populace en armes et le siège du palais commence. 
Le légat épouvanté veut en vain les haranguer : sa vie 
court les plus grands dangers, quand arrive le grand 
maître du Saint-Esprit, frère Jean de Luca, A sa vue la 
fureur populaire se calme comme par enchantement ; tous 
se retirent sur la place voisine de Saint-Pierre, puis retour- 
nent à leurs foyers *. 

C'est là un exemple frappant de l'ascendant exercé par 
les grands maîtres de l'hôpital du Saint-Esprit sur le 
peuple romain. Malheureusement leur prestige ne fut pas 
toujours assez fort pour faire respecter le domaine des 

pauvres. En 1409, une des factions qui se disputaient la 
ville de Rome s'empara de Thôpital et s'y retrancha 
comme dans une forteresse, pour assiéger de là le château 
Saint-Ange. Iva tour du clocher servait de donjon, et deux 
cents soldats campaient dans l'église. Pendant plusieurs 
années, le grand maître Lellutius de Castro demeura, 
avec trois frères seulement, dans sa maison dévastée. 
Voyant que ces maux ne finissaient pas, il prit, en 141 7, le 
parti de se retirer, jusqu'au jour où la présence du car- 
dinal légat de Saint-Ange lui permit de reprendre posses- 
sion de l'hôpital. 

Mais, après une si rude épreuve, l'établissement chari- 
table fut longtemps à recouvrer sa prospérité et ses biens. 
Eugène IV, dans une bulle du 25 mars 1446, en fait ce 
triste tableau : « Cet hôpital, dit-il, érigé et doté avec opu- 



* p. Saulnier, p. )7. 



212 LES GRANDS MAITRES, DU XIII* AU XV* SIÈCLE 

lence par nos prédéœsseurs, était parvenu à un tel degré de 
renommée, grâce à son observance parfaite, que de toutes 
parts accouraient de grandes multitudes de personnes, qui 
toutes y étaient secourues en leurs nécessités. Mais depuis, 
à cause des guerres et de Tabsence de nos prédécesseurs, 
nous avons trouvé, à notre élévation, ses édifices en ruine, 
ses revenus presque entièrement perdus ; la rég^ularité 
anéantie à tel point, que l'hospitalité n'était,pour ainsi dire, 
plus exercée ; les domaines en friches et aliénés en grande 
partie ; les quelques religieux et serviteurs qui y restaient, 
sans zèle et sans activité ». Une situation si lamentable 
était bien faite pour toucher le Pontife. Il se mit à Tœuvre 
sans perdre de temps : « Avec Taide de Dieu, nous avons 
relevé les bâtiments, réformé les religieux, augprnenté le 
nombre des serviteurs et des ministres des pauvres, récu- 
péré et augmenté les possessions et les revenus, non sans 
beaucoup de peines et de grandes dépenses. Mais gfrâces 
au Seigneur, nous avons réussi avec tant de bonheur, que 
jamais le concours des pauvres n'a été si grand, le service 
fait avec plus de diligence, l'hospitalité mieux observée'. » 
La confrérie attira ensuite son attention ; il la rétablit 
entièrement sur de nouvelles bases, afin qu'elle pût de 
nouveau rendre à l'Ordre les éminents services qu'il était 
en droit d'en attendre '. 

Pierre Barbo, neveu d'Eugène IV, était alors grand 
maître. Avait-il reçu cette charge de la main du Pape, cela 
est probable, car il n'appartenait pas à l'Ordre et ne fit 
profession qu'après sa nomination *. Quoi qu'il en soit, ce 
grand maître n'apportait pas à ses fonctions tout le zèle 
désirable, «distrait apparemment par le tumulte des affaires 
qui ont coutume d'accabler les neveux des Pontifes. » Des 



* Bulle d'Eugène IV, Diplomata, t. I, p. 76. 

• Ibid. 

' Ce fut le premier exemple d'un grand mattre pris en dehors de j'Ordré 
{Saulnierf p. 42). 



PROTECTION ET FAVEURS DES PAPES 21} 

plaintes arrivèrent jusqu'à l'oreille du Pape. Jaloux de la 
prospérité de son hôpital, Eugène nomma son neveu à 
l'évèché de Vicence et prit lui-même, pendant quelque 
temps, la direction de la maison, faisant toutes les fonctions 
d'administrateur et de grand maître. Pierre Barbo devint 
plus tard cardinal et enfin, en 1466, pape sous le nom de 
Paul II. On avait donc pu voir, dit Saulnier, cette chose 
étonnante : l'un, de Souverain Pontife, devenu grand 
maître ; l'autre, de grand maître devenu Souverain Pontife '. 
L'ordre du Saint-Esprit doit beaucoup à Eugène IV, qui, 
ainsi qu'on vient de le voir, lui donna des marques d'un 
rare attachement. Les historiens attribuent au même pape 
l'initiative de l'assujettissement de l'Ordre à la règle de 
saint Augustin. Le sens et la portée de cette mesure ont 
été mal compris. Après les désordres de toutes sortes, 
introduits par les guerres et les dissensions civiles dans 
l'hôpital de Sainte-Marie, le Pape avait senti le besoin de 
ramener les frères à l'observance exacte de la régularité. 
Supprima-t-il la règle de Gui, imposée à l'Ordre par 
Innocent III et suivie pendant près de trois cents ans ? Les 
faits s'opposent à cette conclusion, ainsi que nous l'avons 
montré plus haut, en exposant la règle. L'appellation de 
« membres de l'ordre de Saint-Augustin », donnée à nos 
religieux par Eugène IV et ses successeurs, était en usage 
longtemps auparavant et n'indique aucunement que des 
modifications sérieuses aient été apportées à cette époque 
à la constitution de l'ordre du Saint-Esprit. 



* p. Saulnier, p. 42. 




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CHAPITRE V 



VIE INTÉRIEURE DE L'ORDRE 
AUX XIV & XV SIÈCLES 



NOUVELLES FONDATIONS 




('est ainsi que, sous la protection des pontifes 
romains, Tordre du Saint-Esprit continuait dans 
la chrétienté sa mission bienfaisante. Partout il 
offrait le spectacle d'une régularité exemplaire, unie à la 
pratique de toutes les œuvres de la charité ; partout aussi 
la sympathie la plus vive, traduite par des fondations 
nombreuses et d'abondantes aumônes, répondait à son 
dévouement. D'un côté les œuvres de la charité, de l'autre 
les libéralités de la reconnaissance, tel est pédant long- 
temps le résumé de l'histoire de notre ordre. 

Sans doute, par suite du malheur des temps, par suite 
des guerres et des dissensions intestines si fréquentes au 
moyen-âge, beaucoup d'hôpitaux voyaient leurs œuvres 
entravées momentanément; mais les fléaux une fois passés, 
les ruines étaient réparées et l'hospitalité chrétienne refleu- 
rissait avec une nouvelle vigueur. 

Les services rendus par les innombrables maisons du 
Saint-Esprit sont incalculables. Le seul hôpital de Dijon, 



2l6 VIB INTÉRIEURE AUX XIV* ET XV« SlftCLB 

dans une année de disette et d*affreuse mortalité, hébergea 
jusqu'à douze mille pauvres ; dix mille, en cette même 
année, furent enterrés dans son cimetière, ainsi que le 
constate une lettre envoyée au grand maître quelque temps 
après *. 

Les bulles pontificales, les chartes des seigneurs et les 
donations particulières ne tarissent pas d'éloges sur les 
services rendus par les frères ; nous en avons cité déjà plus 
d'un exemple; en voici d'autres: « L'hôpital du Saint- 
Esprit de Besançon, écrit l'archevêque Vital, en 1313, est 
le réceptacle et le filet qui reçoit tous les pauvres de notre 

diocèse et de ceux qui l'entourent ■. » Un siècle plus 

tard (1435), Eugène IV et un archevêque de Lyon en font 
le même magnifique éloge : « Chaque jour, dit le premier, 
les devoirs multiples de la charité y sont exercés * » ; et 
le second ajoute : « Les pauvres infirmes y sont sustentés ; 
les orphelins nourris et instruits, aux frais de la maison, 
dans les arts propres à leur permettre de défendre leur 
vie contre les besoins ; les femmes en couches y reçoivent 
tous les soins nécessaires; tous les passants, de quel- 
qu'état et condition qu'ils soient, y sont accueillis sans 
préférences, avec piété et miséricorde ; les jeunes filles 
y reçoivent une dot qui leur permet de se marier honora- 
blement *. » 



* L'obituaire de Dijon constate le fait en ces termes : « Anniversaire géné- 
ral pour tous les bienfaiteurs de Thospital de céans, tant vifs que morts, et 
pour tous les trespassez dont les corps sont inhumez au cimetière dud. hos- 
pital, dont il y en a eu en la mortalité qui fut en I4^8« dix mille inhumes. 
Animœ eorum requiescant in pace ». — D. Calmelet, ms., chap. IV. 

* Hospitalis Sancti Spiritus Bisuntini pauperum nostre dyocesis et alie- 

narum ibi confluentium... receptaculum et sagenam.... A. Castan, Notice, l,p. i6|. 

* Bulle d'Eugène IV, à Thûp. de Besançon, 6 décembre 14^$. — A. Castan. 
loc. cit. 

* Pauperes infirmi in eodem sustentantur, orphani outriuntur et artibus 

debitis quibus vitam deflendant inopem, expensis dicte domus, înstniuntur, 
mulieres in puerperio jacentes relevantur; omnesque ibidem transitum facien- 
tes, cujuscumque status et conditionis existant, indistincte, pietatis et miseri- 
cordie intuitu, recipiuntur, et virgines maritantur.... (Mandalum Amedei de 
Talaru, archiep. Lugdun., 17 jul. 1437 —A. Castan, loc, cit.). 



NOUVELLES FONDATIONS 217 

On serait tenté de croire que, pour suffire à des charges 
qui paraissent si nombreuses et si lourdes, le personnel des 
hôpitaux dût être très nombreux dans notre ordre, comme 
dans beaucoup d'autres fondations du même temps. Il n'en 
est rien ; au contraire, il a toujours été dans l'esprit de 
l'Ordre de restreindre le plus possible le nombre des reli- 
gieux dans chaque hôpital, et cela dans un double but fort 
sage et louable: les frères évitaient ainsi le reproche d'em- 
ployer à leur entretien la meilleure partie des revenus 
destinés aux pauvres ; et puis, leur petit nombre les tenant 
sans cesse en haleine, il leur était plus difficile de se laisser 
aller à la négligence et à la paresse. Dijon, dans le cours 
des XIV* et XV' siècles, n'eut jamais que de six à douze 
religieux ; Besançon ne paraît pas non plus avoir dépassé 
ce nombre*. Les sœurs se trouvaient dans des proportions 
habituellement un peu supérieures ; la présence des en- 
fants et des orphelins à demeure leur donnait des occupations 
plus nombreuses. 

La charité du prochain ne va pas sans l'amour de Dieu ; 
celui-ci en est la source et le mobile. Il n'est donc pas 
étonnant que nos frères aient été des hospitaliers pleins de 
dévouement, alors qu'ils se montraient des religieux zélés 
pour la régularité monastique. « L'office divin et les 
heures canoniques, tant diurnes que nocturnes, y sont 
célébrés chaque jour d'une manière très louable ■. » Les 
frères de Dijoiï s'acquittaient avec tant d'exactitude de cette 
importante fonction, que le duc de Bourgogne Philippe- 
le-Bon se plut à en rendre témoignage au grand maître '. 
Ces témoignages abondent pour toutes les maisons et il 
nous serait facile de les multiplier. 



* Voy. D. Calmeiet, Histoire mSf passim; -^ A. Castan, II, p. 194. 

' Divinum officium et hore canonice, tam diurne quam nocturne, singulis 

diebus laudabiliter exsolvuntur.... {hfandatum Amedei de Talaru^ A. Castan, 
loc, cit.) 

' Uttre de PhUippe-le-Bon, 1455 ; D. Calmeiet, chap. IV. 



2i8 TiE DrTÉunntE acx znr* sr 

La sainteté dnt fleurir abondammait dez ces li^iU^a^ 



rel%ieiix et leligienses, dont la TÎe était ainsi partagée 
entre la prière et la diarité. Si Dien a jngé k prapos de 
laisser un grand nombre de ces saintes âmesdans rofascnrité 
et llmmilité qa*elles avaient diotsies par amour pour loi, 
il a pourtant favorisé de grâces eztérienres édatantes 
plusieurs des enCants de Gui deHontpellier. 

Déjà, au XIII* siècle, saint Face ou Foffio s*était 
distingué au nombre des saints personnages qui d annèi e n t 
à cette époque un éclat et une ph jskmomie uniques dans 
lliistoire. 

Il naquit à Vérone, au milieu des troubles civils du 
commencement du siècle. Des persécutions longues et 
acharnées le forcèrent à aller exercer sa profession d' orf è vr e 
à Crémone, vers 1226. Là-comme dans son pajrs natal, la 
charité occupait la plus grande partie de son temps, si bien 
qu*on finit par lui confier le soin de la distribution des 
aumônes de la ville. Pendant qu'il était tout entier adonné 
à ses œuvres de miséricorde, il apprit que Vérone était 
plongée à nouveau dans toutes les horreurs des dissensions 
civiles ; il y alla aussitôt, et se fit Tai^e de la paix au 
milieu de ses concitoyens. Mais, comme il arrive trop 
souvent, son zèle était trop désintéressé pour être regardé 
comme sincère ; des calomnies se répandirent, qui dénatu* 
raient perfidement toutes ses démarches ; on finit par le 
jeter en prison. C'est là que Dieu se réservait de faire 
éclater sa vertu ; les cachots étaient remplis : plusieurs des 
prisonniers, minés par les privations de la captivité, se 
mouraient. La prière du saint les guérit. Le bruit de ces 
prodiges se répandit bientôt et on se hâta de le remettre 
en liberté. Voyant cependant que tout son zèle était impuis- 
sant devant Tobstination de ses concitoyens, il reprit le 
chemin de Crémone, y construisit un oratoire et un hôpital 
du Saint-Esprit, et s'y livra, avec de pieux émules, à toutes 
les œuvres de miséricorde. Plus tard, il fit le pèlerinage 



NOUVELLES FONDATIONS IIÇ 

de Rome et de S. Jacques, et, de retour dans sa seconde 
patrie, fut nommé par Tévêque Visiteur Génçral des 
monastères de son diocèse. Il mourut en 1272, dans son 
hôpital, auquel il avait donné tous ses biens. De nombreux 
miracles, opérés pendant sa vie et après sa mort, attestèrent 
sa haute sainteté ' . 

L'hôpital de Foligno, donné à l'Ordre par Clément V, en 
131 1, fut le théâtre sur lequel brilla la sainteté d'un autre 
serviteur de Dieu. Le jubilé de 1350, proclamé par Clé- 
ment VI, avait attiré à Rome des multitudes infinies, 
venues de tous les pays d'Europe. Au nombre des pèlerins 
se trouvait un jeune homme que n'avait pas effrayé le 
voyage de la Hongrie à Rome. Il se nommait Antoine ; 
comme on ignorait son nom de famille, le peuple l'appelait 
Antoine le Hongrois. La piété l'avait fait entrer dans les 
rangs du Tiers-Ordre de S. François. Ayant achevé ses 
dévotions à la ville éternelle, il se mit, suivant le pieux 
usage des pèlerins, à parcourir les principaux sanctuaires 
de l'Italie. Arrivé à Foligno, une fièvre maligne le saisit. 
On le reçut à l'hôpital du Saint-Esprit, où les soins em- 
pressés des frères le ramenèrent à la santé. Mais il fut si 
touché de la charité de ces bons religieux, qu'il résolut de 
passer sa vie dans leur maison , au service des pauvres, en 
qualité de frère oblat. Pendant vingt-sept ans, il y donna 
de tels exemples de charité, de douceur et de patience dans 
le soin des pauvres, des malades et des orphelins, qu'il 
faisait l'admiration de tout le peuple. Ses avis étaient 
écoutés comme les oracles de Dieu même. Sa bienheureuse 
mort, arrivée le 13 mai 1398, fut un deuil public, et bientôt, 
à la suite des miracles opérés sur son tombeau, on le 
regarda comme un saint, et l'on réclama de toutes parts 
sa canonisation. 

Pour honorer la pureté et la charité de son humble 



* ActaSS, BoUand. (164^), jan, 11^ 3x0-311 (éd. 3a, 574-$7$)* 



220 TIB IMTÉRIKURE AUX XIT* ET ZT* SiftCUES 

serviteur, Dieu ne permit pas que la corruptioii eût prise 
sur son corps. On le voyait, absolument intact^ reposant 
dans une châsse magnifique, donnée par le prieur Meldikir 
de la Vallée, en 1608^ et placée sur Tautel majeur de 
Téglise de Thôpital, à Foligno *. 

On le voit par ces exemples, la sainteté n'était pas rare 
dans rOrdre ; témoin encore la vénérable Sœur Angèle 

Romaine, célèbre entre toutes les autres religieuses 
moniales du Saint-Esprit et dont le commandeur de Dijon, 
frère Guillaume Sacquenier, étant à Rome, avait envoyé 
un portrait à ses religieuses, afin de les encourager, par 
ses exemples, à se sanctifier dans les exercices de leur 
vocation ". Accepter une vocation si humble, si pénible, si 
opposée aux goûts de la nature ; la suivre pendant toute sa 
vie avec zèle et piété : n'est-ce point là déjà, dans les frères 
et les sœurs du Saint-Esprit, le signe d'une éminente 
vertu ? L'histoire nous autorise à étendre à Tordre entier 
cet éloge que M. Castan adresse aux recteurs de Besançon: 
« En général, ces recteurs furent d'une piété sincère et 
profondément dévoués à leur mission charitable '. » Piété 
et dévouement sans bornes, c'est là le plus bel éloge que 
Ton puisse faire de notre institut. 

Aussi voyons-nous partout les populations répondre par 
leur reconnaissance et leur confiance aux bienfaits de 
l'ordre du Saint-Esprit. 

La maison conventuelle de Besançon, à cette époque 
comme au XIII'' siècle, brille entre toutes par sa longue 
fécondité. Les nombreux novices ou frères oblats qu'elle 



* Le B. Antoine le Hongrois est honoré spécialement dans Tordre Francis- 
cain. (Voy. Acta SS. Bolland. (1680), maii III, p. 251 ; ei. ia, p. 250-251 ; — 
[Prileszki], Acta SS. Ungar, (174?), 1. 1, p. 284-285. ; — Wading, Annal. Frair. 
Minor., t. IV, p. 251 ;— P. Saulnier, p. 09 ; — Ms de la VisiU générali de 
Melchior de la Vallée, Arch. hôp» de Besançony B. 14, chap. II, n« i). 

* D. Calmelet, Histoire ms^ chap. IV. 
' Notice, II, p. 194. 



NOUVELLES FONDATIONS 221 

forma à la vie religieuse et hospitalière, lui permirent de 
satisfaire à toutes les fondations que les seigneurs de 
Franche-Comté semaient à profusion dans cette province. 
Les princes de la Maison de Châlon se faisaient remarquer 
dans ce temps par TafiFection sincère qu'ils portaient à 
leurs sujets. Non contents de leur octroyer des chartes de 
franchises très libérales, ils prenaient à cœur de venir en 
aide aux pauvres, en dotant les maladreries et hôpitaux 
déjà existants, et en élevant de nouvelles maisons chari- 
tables dans tous leurs domaines. Jean de Châlon-Auxerre 
avait fait bâtir, en quelques années, cinq hôpitaux dans ses 
bourgs de Rochefort, Monnet, Orgelet, Saint-Julien et 
Arinthod. Une pareille générosité mérite bien que nous 
nous y arrêtions un instant, en rapportant les termes de 
Tacte de fondation : 

« Nous, Jean de Châlon, comte d'Auxerre et seigneur de 
Rochefort, faisons savoir à tous présents et futurs, que 
nous avons fait édifier et construire, en nos villes de 
Rochefort, Monnet, Orgelet, Saint- Julien et Arinthod un 
hôpital avec un autel en l'honneur de la glorieuse Vierge 
Marie, à nos propres frais et dépens, afin que les pauvres, 
les infirmes et les malheureux qui sont dans le besoin y 
soient admis et hébergés ; qu'ils y trouvent, pour le remède 
de notre âme, de celle de nos parents, ancêtres et succes- 
seurs, le nécessaire selon les exigences de leurs besoins et 
les ressources de ces maisons, et que les divins offices y 
soient célébrés par leurs maîtres ou recteurs. Nous voulons 
et ordonnons que ces cinq hôpitaux soient soumis, pour le 
spirituel comme pour le temporel, au recteur et gouver- 
neur de l'hôpital de Besançon. Voulons aussi que ledit 
recteur institue et place, en chacune des maisons susdites, 
pour les gouverner, des maîtres ou recteurs dignes et 
fidèles, élevés au sacerdoce, et qui portent l'habit de 
l'Ordre. Ils célébreront les saints offices auxdits autels 
pour notre âme, comme il est ordonné ci-dessus, et rece- 



322 TIB IKTÈKUUMM, AUX lOW ET Tf SfiCUS 

vront miséricordieusement les pauvres. Nous retenons 
lesdits cinq hôpitaux sons notre garde et celle de nos 
successeurs, de même que la justice temporelle a perpétuité. 
En témoignage de quoi nous avons fait apposer à ces 
présentes notre sceau. Donné en Tan du Seigneur 1301, 
au mois d'août * ». 

De ces cinq hôpitaux, deux, ceux de Monnet et de Rodie- 
fort, furent ruinés par Louis XI en 1479 et ne purent se 
relever ; leurs biens furent réunis à la maison-mère de 
Besançon . Les trois autres rendirent aux populations de plus 
longs services ; il fallut tous les désordres occasionnés par 
Tordre de Saint-Lazare, au XVII* siècle, pour consommer 
leur ruine. 

Dans le même temps, le comte de Montbéliard, Renaud 
de Bourgogne, laissait, par un codicille daté de 13 14, à son 
hôpital du Saint-Esprit de SellièreSj une somme de cent 
vingt livres pour en acquérir des rentes et nourrir les 
pauvres. Il lui donnait de plus ses robes, son lit, ses draps 
oulinceuils et le pourtour de son lit. Son chapelain, Messire 
Jean de Sirod, était chargé de Texécution de ses volontés*. 

Une bulle de Boniface VIII, obtenue en 1301 i>ar 
Hugues de Châlon, dit le Sourd, évêque de Li^e, puis 
archevêque de Besançon, confirma la fondation de Thôpital 
éCArlay % due à Ponce II d'Arlay, chevalier. Ses fils 
Pierre et Renaud complétèrent son œuvre, que la mort 
Tavait empêché d'achever ; ils installèrent Thôpital dans 
leur propre maison, qui était entourée d'un vaste enclos. 
Par un acte daté de 1327, ils voulurent que cet hôpital 
appartint à Tordre du Saint-Esprit établi à Rome — de 
societate Spiritus Sancti Rome — et chargèrent le frère 
Nicolas, qui en était recteur, et ses successeurs, de payer 



* Arch, de Vhôp.de Besançon, cas. C, chap. I, n« 11. 
' Arch, municipales de Sellières, I. 18, n*' 299-^5. 

* Roussit, Dlct. hist da communes du JurOf U I, p. 88. 



HOUVELLES FONDATIONS 22) 

dix sols de cens au maître recteur de Besançon, auquel ils 
soumettaient leur fondation '. Une élégante chapelle, qui 
subsiste encore en partie, fut élevée à la fin du même 
siècle. Les libéralités de la famille d' Arlay et des habitants 
accrurent les biens de la nouvelle maison au point qu'à la 
fin du XV* siècle elle était Tune des plus riches de la 
province •. 

L'hôpital du Saint-Esprit de Lons-le- Saunier existait 
déjà au commencement du XIV' siècle ; il occupait un vaste 
emplacement entre la ville et le faubourg Saint-Désiré '. 
Mais il rompit de très bonne heure les liens qui le ratta- 
chaient à rOrdre, par l'usurpation des échevins de la ville. 
Il faut en dire autant de ceux de Montfleur * et de Mont- 
morot\ Toutefois la confrérie du Saint-Esprit s'y maintint 
toujours florissante, comme pour attester leur origine. 

Toutes les maisons que nous venons de citer appartien- 
nent à la Franche-Comté ; mais les commandeurs de Besançon 
envoyèrent plus loin des colonies. En 131 2, Renaud, dit 
Sauvet, chanoine de Neufchâtel en Suisse, remettait entre 
les mains du délégué du recteur Bisontin l'hôpital de cette 
ville, dont il avait eu la garde jusqu'alors •. — Frère Jean 
Voley, de Choyé, quitta la maison-mère, pour aller diriger 
l'hôpital de Met:^ (vers 1 390) ; il s'obligeait, lui et ses 
successeurs, pour marque de sa filiation, à venir chaque 
année au chapitre provincial et à payer un tribut de trois 
florins. Ruiné à plusieurs reprises par les guerres, notam- 
ment par le siège de 1552, cet hôpital, assez considérable, 
fut abandonné et les bâtiments loués à l'administration de 
l'artillerie française, par le recteur de Besançon \ — Un 



' Abry-d*Arcier, Hist. du Bourg d'Arlay^ip, j8o. 

• Ibid,, p. J79. 

' Rousset, Dict, hist des communes du Jura, t. III, p. 62^ 

• Fondé vers ij6o (/6irf., t. IV, p. 294). 

• Ibid,, t. IV, p. J59. 

• Arch, de Vhôp. de Besançon, cas. C, chap. I, n« 12. 
' Ibid»^ chap. x, 0*7. 



224 ^^ nrriEiEURC aux xit^ it xi* 

antre religieux* Vanltrin Bertrand d'Amncf^^sw^itTiédiU 
à nouveau, en 141 3, l'hôpital deMarvillérà^nsYéwédbé de 
Trêves. Il le rendit à la maison de Tool (1419), doot S 
dépendait depuis sa fondation '. 

Les autres provinces de France participaient anssi an 
mouvement des fondations. A la fin du XTTT* siècle et an 
commencement du XIV*, se place rétablissement des 
maisons de Carcassonne, de Toulon, de Béziers« de Lodève, 
de Toulouse, d*Orthez, de Nérac, de Libonmey d^Angoo- 
lème, d* Angers, de Confolens, et bien d*autres dont la 
date est incertaine. 

Dans les autres pays d*£ur3pe« TOrdre jouit d*nne 
extension continue jusqu*à la fin du XV* siècle. CittMis, au 
nombre des nouvelles fondations, les maisons de Saint- 
Hippoljte, près de Vienne % de Aarhus (1388), Naksikow, 
Flensburg (1325)% Aalborg, Randers (1434), Landskrona 
(1440), dans les pays Scandinaves ; Alost (1474) en Belgique; 
Sandeck en Pologne *. 

Nous n'avons pas encore parlédeThôpital du Saint-Esprit 
de Paris ; nous devons cependant à cet établissement plus 
qu'une simple mention. Les historiens de Paris * rapportent 
que les bourgeois de la ville fondèrent, en 1362, sous Tin- 
vocation du Saint-Esprit, une confrérie et un hospice pour 
les orphelins nés de légitime mariage, et quMls en firent une 
création purement municipale, sans aucun rapport avec 
Tordre du Saint-Esprit. Cependant Tabbé Lebeuf, consta- 
tant, par le Pouillé de TOrdre, que celui-ci possédait dès le 
XIII* siècle une maison à Paris, inclinait à croire qu'il y 
aurait eu dans la capitale deux hôpitaux de ce nom. 



' Areh No/., S. 4907; — Abbé Clouet, Histoire de Verdun, t. III, p. 021. 
• Arch. de Vhôp. du S.-E. in Saxia, Lib. I, fo 29. 
' Daugaard, Des couvents Danois au moyen-Age, pp. 142, ^89, 445. 
' L'abbé Renard, Hist. ms de Vhôpital de NeufcUteau. 
■ Du Breul, Théâtre des antiquités de Paru (16^9), p. 740;— Abbé Le 
Beuf, Hist. du diocèse de Paris (éd. Cocheris), t. I, p. ^14. 



NOUVELLES FONDATIONS 225 

De nouvelles données nous permettent de reprendre la 
question et nous mettent en mesure, croyons-nous, de 
démontrer que Thôpital fondé en 1362 a succédé à un 
établissement plus ancien et qu'il fut, comme celui-ci, une 
dépendance de Tordre du Saint-Esprit, 

La relation de la visite générale de frère Jean Monette, 
en 1288, nous fournit la preuve de l'existence d'un hôpital 
de rOrdre à Paris, dès le courant du XIII' siècle. Voici en 
effet ce qu'on lit dans cet acte : « Nous avons vu et visité 
la maison conventuelle et hospitalière des enfants 
exposés du Saint-Esprit de Paris; la régularité et l'hos- 
pitalité 7 sont observées avec grand soin. Nous avons aussi 
examiné les dépenses des maladreries de Pantin et de 
Fontenayj qui dépendent de ladite maison, et nous avons 
constaté qu'elles ont été faites pour le service des pau- 
vres *. » D'après ce texte remarquable, l'hôpital devait 
être déjà de quelque ancienneté, puisqu'il était alors assez 
considérable pour entretenir une communauté conventuelle. 
De plus, son titre indique qu'il était exclusivement réservé 
aux enfants exposés. On comprend cette destination 
spéciale, dans une ville qui possédait déjà des maisons 
destinées à recevoir les malades, les pèlerins et les 
voyageurs. 

Où était situé l'hôpital du Saint-Esprit? Il est difficile de 
le savoir sûrement. Le rédacteur du très curieux ms.11778 
de la Bibliothèque nationale affirme, il est vrai, avoir lu 
des lettres passées au Châtelet , des 9 et 1 6 avril 1 364, « comme 
l'hospital du Sainct-Esprit ieust primitivement institué en 
la rue de l'arbre sec près la croix du tiroir, nommé et intitulé 
la charité et confrérie et hospital du Sainct-Esprit*, » 



* Vidimus ac visitavîmus domum Sancti Spiritus conventualem ac hospita- 
lariam infantium expositorum Lutecias Parisiorum ; in qua regularitas et hospi- 
talitas accurate observatur; cufus ac malederiarum seu leprosariarum de 
Pentino, Fontenayo ab ipsa domo dependentium, impensas vidimus^ examina- 
vimusacrecognoviffius in usum paupenim reflectavisse. — Diplomata, t.H, p. ^71. 

*BitL nat.j mss fr. 1x778, rédigé en i$j7, 

15 



226 VIE INTÉRIEURE AUX XIV* IT XV SIÈCLES 

Mais, d'autre part, Tabbé Lebeuf a recueilli une tradition 
qui \e place dans le haut de la rue Geoffroy TAsnier •. 
Quoi qu'il en soit de son emplacement primitif, sa décadence 
dut être rapide, car il ne recevait plus d'enfants en 1362. 
A cette date, un mandement de Tévèque de Paris rapporte 
que, depuis deux ans surtout, un très gn'^^^^ nombre de 
pauvres, particulièrement les enfants et les jeunes filles, 
étaient réduits par les calamités publiques à errer sur les 
places et dans les rues sans le moindre abri. Il existe, dit 
le prélat, des hospices pour les vagabonds; THôtel-Dieu 
reçoit les malades ; mais les femmes, les jeunes filles et les 
enfants orphelins n'ont aucun asile*. 

Les échevins s'émurent d'un tel abandon et résolurent 
d'y porter remède : « Et bientôt après, continue le ms. cité 
plus haut, par l'advuis et délibération du prevost des mar- 
chans, eschevins de la ville et bons bourgeois de Paris, 
meus de grande charité, pitié et dévotion pour lors fort 
requise, car il feust incontinent après les guerres, peste et 
famine, et la mort du roi Jehan, qui trespassa en l'an mil 
trois cens soixante troys, lesdictz prevost et eschevins 
prenans exemple et similitude au grand hostel Dieu qui est 
près la grand église et lieu espécial de Paris, voUurent et 
assirent la chappelle, confrarie et hospîtal du Sainct-Esprit 
près leur maison et hostel de ville, dict auparavant l'hostel 
du daulphin de Vienne ; comme non ayans peur ne crainte 
de peste ny malladie dangereuse, mais ayant seullement 
les poures membres de Dieu aucoques eulx, et devant 
leurs yeulx, pour plus facillement exercer les œuvres de 
piété et miséricorde, selon l'évangille qui dict : Semper 
pauperes habetis vobiscum '. » 



* HUt. du diocèse de Paris (éd. Cocheris),t. I. p. n4* 

* Ordonnance du 17 février 1^62, pour la fondation de l*h08pice du SainU 
Bsprit. Arch. de Vhôp, du Saint-Esprit de Paris, 

» Bibl. nat., mss. fr. 11778, f» 80 r« et v». 



NOUVELLES FONDATIONS 227 

C'est ce rétablissement de l'hôpital du Saint-Esprit sur 
la place de Grève et joignant l'Hôtel de Ville, avec sa con- 
frérie, annexe inséparable des maisons de l'Ordre, que les 
historiens ont pris pour une fondation proprement dite. Dans 
les actes qui le concernent, on voit, il est vrai, que les 
échevins s'attribuent la haute direction de l'établissement, 
sans qu'il soit fait mention de l'ordre du Saint-Esprit ; mais 
il faut remarijuer que d'autres villes, Marseille par exemple, 
s'étaient dès lors arrogé la direction de leurs hôpitaux, 
sans que pour autant les religieux eussent quitté le soin des 
enfants et des malades. Ces empiétements de pouvoir ne 
prouvent donc point que les frères et les sœurs du Saint- 
Esprit n'eurent pas la charge de l'hospice municipal. Au 
contraire, des documents précis vont nous montrer qu'il 
appartenait à notre ordre. D'abord, il est mentionné dans 
la bulle de Grégoire XI, de 1372'. En 1542, le grand 
maître romain, François de Landis, accorda, sur leur 
demande, l'association à la confrérie de Sainte-Marie, à 
Messires Ludovic Piert, président du Parlement, et Engel- 
bert Claîsse, conseiller, sous la condition qu'ils paieraient 
chaque année un ducat et demi d'or de la Chambre à la 
maison de Paris •. Si cette maison n'eut pas été de l'Ordre, le 
grand maître ne lui eut pas réservé la destination de cette re- 
devance. Deux ans plus tard, le même grand maître nom- 
mait à Paris le frère Mathieu Le Roy, profès de l'Ordre, 
auparavant recteur de Troyes^*. Le 13 octobre 1556, Ber- 
nardin Cyrilli, grand maître de Sainte-Marie, instituait 
l'officialde Saint-Denis et le chancelier de Sainte-Geneviève, 
à l'efifet de destituer le recteur, frère Gui Duval, qui 
employait à son usage les revenus de la maison^ et d'établir 
à sa place frère Jean Marcel, profès de l'Ordre *. Ajoutons 



* Diphmaia, l, p. 65. 

* Arch, de SainU-AfarU in Saxia^ lib. K, î^ 27. 

*Jbid., Vib O, fo8^ 



228 TIE INTÉRIEURE AUX XHT* ET XT* SliCLES 

qu une bulle d^rbain VIII (1625) ' et le R^lement 
Général de Louis XIII ^1626) * attribuent à TOrdre la 
maison de la place de Grève, et qu^enfin un arrêt du Grand 
Conseil, rendu le 27 janvier 1670, condamna le commandeur 
de la même maison à faire soumission au grrand maître 
français, Bonaventure Rousseau de Bazodies^ évêque de 
Césarée*. 

Tels sont les titres qui appuient notre sentiment. Nous 
les voudrions plus nombreux ; mais ils suffisent^ pensons* 
nous, pour nous autoriser à conclure qu41 y eut à Paris un 
seul hôpital du Saint-Esprit, qui, après comme avant son 
transfert en place de Grève, ne cessa d'appartenir à TOrdre. 



Arrêtons un instant notre récit et jetons un coup d^ceil 
d'ensemble sur le chemin que nous avons déjà parcouru. 
L'ordre du Saint-Esprit nous apparaît, pendant le XIV* et 
le XV' siècles, comme une puissance grandiose et imposante^ 
tout à la fois par le nombre de ses établissements et par 
la perfection de son organisme. Dès la fin du XIII* 
siècle, et pour la France seulement, nous voyons le frèrç 
Jean Mouette procéder à la visite de près de cent quatre- 
vingts hôpitaux, maladreries, prieurés et maisons conven- 
tuelles. Encore prend-il soin d'ajouter, en terminant sa 
relation, qu'il a été forcé de remettre à une autre année la 
visite de nombreuses maisons. Un siècle plus tard, ce 
chiffre est bien augmenté : ce n'est plus cent quatre-vingts, 
mais QUATRE CENTS hôpitaux, dont nous constatons l'exis- 
tence dans notre patrie ; Tltalie, seconde patrie de l'Ordre^ 
vient ensuite avec ses deux cent quatre-vingts maisons ; 
l'Espagne et le Portugal en offrent cent vingt-huit, l'Aile- 



' Diplomaia, I, p. i$o. 
•Ibid., II. p. $j. 
» /Wi., II. p. 105. 



NOUVELLES FONDATIONS 229 

magne^ trente-sept^ les pays septentrionaux^ quarante *. 
C'est donc un ensemble de près de NEUF CENTS hôpitaux 
et maisons de charité, qui répandent incessamment sur 
l'Europe entière leurs innombrables bienfaits. Que pour* 
rions-nous ajouter de plus éloquent que ce simple chi£fre ! 
Dans tous ces hôpitaux^ c'est la même règle, le même 
esprit, le même but charitable. Une hiérarchie aussi 
simple que bien entendue donne à l'ensemble un caractère 
d'étroite unité. Chaque maison est administrée par un 
recteur, qui ne peut prendre de mesure importante sans 
l'avis du chapitre hebdomadaire. Le recteur relève du 
commandeur^magistral de la maison-mère : profès de cette 
maison, et placé à la tête d'une dépendance par l'autorité 
du commandeur, il continue cependant à être son sujets à 
lui devoir l'obéissance comme un simple' religieux. Les 
recteurs des maisons-mères ont une grande puissance ; mais^ 
appelés au commandement par la confiance des frères, leur 
pouvoir n'est pas absolu; ils le partagent, eux aussi, avec 
leur chapitre et en rendent compte au grand maître . De 
plus, un visiteur général, choisi parmi les plus vertueux, 
fait de fréquentes tournées, inspecte les lieux réguliers, 
examine les contrats, voit si les revenus ne sont employés 
qu'au service des pauvres, reçoit enfin les plaintes des plus 
humbles d'entre les frères et rend ses sentences au nom du 
grrand maître, à qui il doit un compte exact de sa mission. 
Des chapitres annuels de tous les recteurs d'une province, 
unis aux religieux du chef-lieu, maintiennent les liens de 
la discipline et de l'obéissance avec toute la fermeté 
nécessaire; une sentence d'excommunication frappe les 
absents sans excuses. Enfin, le chapitre général réunit à 
Rome, sous la présidence du grand maître et la haute direc- 
tion d'un cardinal protecteur, tous les commandeurs 



' Encore devons-nous dire que beaucoup d'établissements ont dû échapper- 
à nos recherches» surtout dooa les pays étrangers* 



3^0 TIB INTÉRIEURE AUX XIV' ET X¥* SiftCLES 

magistraux, avec le chapitre ordinaire de Sainte-Marie. 
Ce sont les grandes assises annuelles de la PentecAte. On 
y paie les tributs ou canons ; les nouveaux recteurs reçoivent 
du grand maître la confirmation de leur charge par Tim* 
position du birretum et le baiser de paix; on prend 
connaissance des affaires générales de TOrdre, et chacun 
emporte copie des nouveaux privilèges, gages de ra£Eection 
des Souverains Pontifes. 

Tel est le spectacle o£fert par Tordre du Saint*£sprit, à 
cette période de son parfait développement. La France, 
objet plus particulier de notre étude, nous montre cette 
organisation en plein fonctionnement. Les maisons magis* 
traies et conventuelles se partagent les hôpitaux répandus 
sur toute la surface du royuume. La répartition de ces 
hôpitaux ne s'est pas opérée, comme on Ta pu dire *, par 
une mesure administrative générale, telle que la création 
des provinces chez les Franciscains et les Frères Prêcheurs. 
La seule loi de la filiation a présidé au grroupement hiérar^ 
chique des maisons du Saint-Esprit. Les preuves de ce fait 
sont évidentes : c'est d'abord Tenchevètrement de toutes 
ces maisons ; Besançon commande à des hôpitaux des 
Pyrénées * ; Auray a des dépendances jusqu'aux portes de 
Dijon et de Montpellier. C'est ensuite la grande inégalité 
qui règne dans la répartition : tel chef-lieu possède vingt 
dépendances ; tel autre en a deux seulement. Enfin 
nombre de maisons qui comptent plusieurs membres, sont 
cependant soumises elles-mêmes à ime commanderie 
magistrale '. 

La maison magistrale et conventuelle d'Auray brilla 
pendant longtemps d'un vif éclat, à la tête de ses vingt-neuf 
hôpitaux, dont quatre avaient, eux aussi, une famille 



* A. Castan, Notice^ I, p. 155. 

* Au moins pendant le XI 1 1« siècle, d'après la visite de frère MoneUe (Diplom.^ 

■ Voir le tableau des commaaderies de France, aux PUas iustif., n* X^ 



NOUYELLES FONDATIONS ajl 

nombreuse': au total, cinquante maisons fondées par cette 
mère prodigieusement féconde et relevant de son autorité; 
Besançon venait ensuite, avec trente-quatre dépendances et 
un certain nombre de maladreries. Plus heureuse que la 
maison d'Auray, cette dernière sut faire respecter son 
autorité jusqu'à la fin ; et tandis que la puissance d^Aùray 
déclina rapidement % le commandeur de Besançon jouit i 
peu près invariablement de la charge de vicaire et visiteur 
général des pays ultramontains, honneur qui marque sa 
situation prépondérante. Montpellier fut éclipsé de très 
bonne heure par ces deux maisons magistrales. Ses filles 
aînées, formant elles-mêmes de nouveaux essaims, s'érigè- 
rent en chefs-lieux indépendants, de sorte que sept maisons 
seulement demeurèrent sous la juridiction immédiate de 
Montpellier. Marseille et Aix en possédèrent le même 
nombre ; Agen, Bordeaux, Aix, Montauban, Nîmes, 
Toulouse, Fréjus, Toulon, quatre; Clermont^ Angoulèmej 
Draguîgnân et d'autres encore, deux. En Bourgogne pros- 
péraient Saulx, avec ses quatre hôpitaux et ses cinq 
maladreries, et Dijon, qui eut d'abord huit maisons filiales, 
mais dont la principale se détacha plus tard pour former 
une province à elle seule : c'était Angers, qui gouvernait 
dix-huit maisons. Enfin, pour compléter notre énumération, 
mentionnons la commanderie de Steffansfeld en Alsace, 
qui avait en France la plupart de ses dépendances, au nombre 
de vingt. Si l'on ajoute à ce tableau d'ensemble les cou- 
ronnes de confréries qui entouraient chacune des maisons, 
et dont bon nombre avaient assez d'importance pour 
nécessiter la présence d'un frère à demeure, on aura une 
idée du développement immense pris par notre ordre 
pendant le XI V* siècle. 



• ■ 

' Coutances possédait sept maisons, Millau, huit^ Pont-Saint-Esprit, quatre 
et Bergerac, deux. 

* Les possessions d*Auray étaient * trop disséminées ; elles ja rendirent 
promptement indépendantes. 



2)2 TiE orriuEintB aux xnr* n* xv* smciBS 

Tcmtefois* ce ne serait pas donner an lecteur vne idée 
parfaitement juste de l'Ordre, que de le laisser scms rim- 
pression de ce tableau, sans indiquer les quelques c mib re s 
qui Tassombrissent malheureusement. Si TOrdre en général 
se maintint, jusqu^au milieu du XV* siècle, dans un état 
florissant et prospère, il ne faudrait pas croire que ses 
membres en particulier n*adent pas souffert quelquefois, et 
de diverses manières. Les guerres, si firéquentes an moyen- 
âge, ne les épargnaient pas ; ainsi lliôpital de Vanoonleurs 
fut détruit entièrement en 1 370 ' ; d'autres fois, c^étaient 
des incendies ou des pestes ; Troyes se relevait à prîne 
d*un incendie général, quand des « mortalités et autres 
pestilences vinrent de nouveau (1383) compromettre son 
avenir*. Ici les municipalités s'emparaient de la gestion 
des biens, comme à Marseille (i 399) ', ou détournaient ces 
biens de leur destination primitive ^ ; là, un parlement 
interdisait les quêtes ^ Enfin, les troubles et les divisions 
intérieures venaient parfois, mais d'une façon passagère, 
compromettre le bien accompli. Dans une histoire générale, 
nous ne pouvons tout citer : disons un mot cependant de 
deux querelles plus importantes par leur durée. 

La première s'éleva entre les maisons-mères des deux 
Bourgognes, Besançon et Dijon. Dès Tannée 1263, 1^ 
procureur général du Saint-Esprit de Rome avait délégué 
à frère Pierre de Liesle, recteur de Besançon, la haute main 
sur Thôpital de Dijon et ses dépendances *. Nous ignorons 
combien dura cette sujétion ; mais sous le rectorat de frère 
Jean de Choyé {1426-1439), à la faveur des guerres an- 
glaises qui plus d'une fois eurent pour théâtre les deux 



• Abbé Renard^ Hist. m de Vhôp. de Neuf château, p. 108. 

• Ibid. 

• Mortreuil, L'Mp. du Saint-Esprit de MarseiUe, p. 156. 
< A Sandeck, en 1410 (Abbé Renard, ibidJ) 

• A Besançon (A. CasUn, Notice, I, p. 167), 

• ibid., II, p. 195. 



NOUVELLES FONDATIONS 2JJ 

Bourgognes, cette maison avait souffert de nombreux 
désordres dans son administration. Pour y remédier, le 
chapitre général, tenu à Rome le 2 avril 1437, décréta 
Tannexion de Dijon, Fouvent, Tonnerre et Bar-sur-Aube 
à Besançon ^ Lors du décès du recteur Dijonnais (1439), 
le maître de Besançon, frère Lambelet Vernier, visiteur 
général pour les pays ultramontains, voulut exercer son 
autorité^ en mettant à la tète de la maison de Dijon un 
religieux de sa maison^ son propre neveu. Les religfîeux de 
Dijon lui opposèrent frère Pierre Crapillet, alors profès à 
Sainte-Marie in Saxia, à qui le grand maître accorda l'in- 
vestiture •. Les dissensions recommencèrent bientôt, au 
sujet des limites respectives des deux maisons pour les 
quêtes. Le recteur de Dijon, dont un frère était conseiller 
du duc de Bourgogne, intéressa Philippe le Bon à la 
querelle, et celui-ci écrivit au grand maître qui s'empressa, 
sur sa demande, de révoquer les pouvoirs donnés par ses 
prédécesseurs à frère Lambelet Vernier (1454). Philippe 
manda à ce dernier, en lui signifiant la réponse du grand 
maître, que : « Vu et considéré ce que nous a écrit le maître 
général, et ainsi que ledit hôpital de Dijon est notre fonda- 
tion, notre intention est le garder et défendre en ses droits 
et prérogatives partout où il appartiendra et par tous les 
moyens que verrons que faire se devra .» Le vicaire général 
se vit obligé de plier sous une volonté si puissante '. 

La querelle se ralluma en 1480. Un certain Jacques de 
Prel s'était introduit dans l'hôpital de Besançon et avait 
réussi à s'en assurer le gouvernement, grâce à la compé- 
tition de deux recteurs, nommés l'un par le Pape, l'autre 
par le grand maître. Innocent VIII brisa, par sa bulle de 
1485, les prétentions de cet aventurier, qui exigeait pour 



* Ibid.f I, p. 164. 

* D. Calmelet» HisU ms de Dijon, chap. III. 

* Jbid. 



2)4 ▼!> nrrùjsaïïE aux ôt* ir zr* sdcus 



lui le cens de 15 florins, dû par Dijon à Sainte-Marie, 
et usurpait les territoires assignés aux quêteurs de cette 
maison. Jacques de Prel avait du reste été évincé dès 
Tannée 1482 *• 

Les débats entre Toul et Besançon furent plus Id^fs et 
plus acharnés ; ils durèrent jusqU^au XVTP âède. Ici la 
maison-mère avait à défendre des droits, non plus acquis 
par une simple concession, mais tenant à la constitution 
même de TOrdre ; L'hôpital de Toul, fondé i>ar celui de 
Besançon, tenta de bonne heure de briser le lien de la 
filiation ; mais à la différence des maisons qui dépendaient 
de Montpellier , il eut affaire à des commandeurs magistraux 
pleins d'énergie dans la défense de leurs droits. Une bulle 
de Clément XII, obtenue par surprise en 1391, avait donné 
à Toul Tautonomie, avec pouvoir d'élire ses recteurs, et le 
monopole des quêtes dans les Trois-Evèchés, à la seule 
condition d'indemniser le chef-lieu par une rente de douze 
florins '. Cette bulle ne parait pas avoir eu une gfrande 
portée, car dès 1388 on voit le commandeur de Besançon 
présider à la confection d'inventaires à Toul*. Une sentence 
du tribunal de la Rote cassa la bulle de Clément VII 
(1436), et l'année suivante, Eugène IV, de concert avec le 
chapitre général, promulgua et homologua cette sentence*. 
Les quêtes dans les Trois-Evêchés furent laissées à Toul 
moyennant l'indemnité ci-dessus (1439), et les deux maîtres 
s^entendirent pour le paiement des irais du procès (1441). 
Dix ans plus tard, ils s'unissaient pour résister au grand 
maître qui venait de nommer un recteur de son chef, sans 
prendre l'avis du maître Bisontin (1451). Toul conserva 
donc sa dépendance, et pendant assez longtemps il demeura 
en paix, suivant le rapport qu'en faisait au grand maître, 



* A Castan, Notice^ II, p. 196; — Diplom:, I, p. 124. 

* Arch, dcVhôp, de Besançon, chap. 1, n* 8a, 
^Ibid. 

« Ibid,, chap. 81?. 



NOUVELLES FONDATIONS 3}$ 

frère Lambelet Vernier en 1468', Nous verrons bientôt 
renaître cette querelle, signe avant-coureur de maux plus 
grands, qui vont assaillir l'ordre du Saint-Esprit tout 
entier. 




CHAPITRE VI 



LES GRANDS MAITRES AU XVP SIÈCLE 



COMMENCEMENT DE LA DÉCADENCE 
LE PROTESTANTISME 




ous avons interrompu la nomenclature des grands 
maîtres à l'interrègne pendant lequel Sixte IV, 
ayant nommé son neveu Pierre Barbe à révêché 
de Vicence, remplit lui-même pendant trois ans les fonc- 
tions de grand maître. Il permit au bout de ce temps de 
procéder à une nouvelle élection, et les suffrages se portèrent 
sur le camérier, Pierre Mathei de Capocinis. On ne 
pouvait faire un meilleur choix. Offert par ses parents à 
Thôpital de Sainte-Marie dès son jeune âge, le nouveau 
grand maître était un religieux exemplaire. Son gouver- 
nement, qui dura trente ans (1447-1477), fut également 
prudent et ferme. On a vu plus haut comment il s'opposa 
aux tentatives des recteurs de Montpellier. A sa mort, le 
chapitre choisit, pour lui succéder. Innocent de Flaviis 
de Rovère^ proche parent de Sixte IV, alors régnant. Au 
moment de son élection, le nouveau grand maître était à 
la tète de l'abbaye de Saint-Clément. Son passage dans 
l'Ordre fut marqué par une protection spéciale et de nom- 



2}B us GRANDS MAmtlS AU ZTI* 

breuses faveurs accordées par le Souverain Poatife. SfadelV 
fit aux édifices de Sainte-Marie des réparations fort iBpor* 
tantes et augmenta ses revenus dans de notables propor- 
tions. Plus de vingt bulles*, dont cinq sont insérées au re- 
cueil imprimé de TOrdre, témoignent de sa prédilection 
pour la maison romaine. Par la première, le grand mattre 
est investi d'un pouvoir absolu ; le gouvernement db 
toutes les maisons, la direction et le jugement de tous les 
membres, la collation des hôpitaux, bénéfices, oratoires, 
prieurés, chapelles, granges, et en général de tous les biens 
appartenant à TOrdre, lui sont entièrement dévolus * 

La seconde bulle de Sixte IV s'exprime en termes encore 
plus énergiques : le Pape veut et entend que tous et chacun 
des hôpitaux et lieux charitables, placés sous le vocable 
du Saint-Bspritj soient dépendants deThôpitalde Sainte- 
Marie et lui appartiennent, nonobstant toute coutume ou 
prescription contraires, même anciennes. Ces lieux, 
hôpitaux et membres, ne peuvent être donnés en titre ou 
en commende qu'à des frères de l'Ordre, religieux profès, 
et par la seule volonté du grand maître, qui peut à sa g^uise 
les révoquer et les renvoyer à leur cloître, toutes les fois 
qu'il le juge à propos. Nul, parmi les recteurs, particU" 
lièrement dans les régions ultramontaines, ne doit 
être assez osé pour prendre le titre de grand maître, 
nommer des recteurs, vendre les biens des hôpitaux et 
exercer aucune juridiction ou supériorité quelconque sur 
d'autres maisons que la sienne propre, à peine d'excommu- 
nication et de privation de sa dignité '. 

Cette clause était dirigée contre les prétentions du 
recteur de Montpellier ; mais des mesures aussi rigoureuses, 
si elles étaient nécessaires contre lui, devaient nuire sin- 



* p. Saulnier, p. 44. 

* Bulle du i; août 147;. Diptom,^ I, p. 91* 
' Bulle du 3j jattvier 1476. Ibid,, I, p. 9$- 



COMMENCEMENT DE LA DÉCADENCE 2)9 

gulièrement aux autres commandeurs magistraux. Il était 
impossible, en eflfet, que le grand maître pût gouverner de 
Rome toutes les maisons disséminées dans TEurope entière, 
sans s'exposer à des retards énormes, à des dépenses 
considérables, sans risquer même souvent de rendre des 
décisions insuffisamment ou faussement éclairées. Une telle 
centralisation était excessive pour Tépoque et nous aurons 
occasion d'en constater les effets pernicieux. Toutefois ce 
n'est guère qu'à partir du XVI* siècle qu'elle fut appliquée 
avec la plus grande rigueur, et, même à cette époque, les 
chefs de provinces eurent toujours une certaine autorité, 
non seulement sur le spirituel, mais aussi sur le temporel 
des maisons de leur filiation ; les actes des chapitres 
provinciaux en font foi. 

Sixte IV s'était réservé temporairement, à l'époque où 
il reconstruisait l'hôpital de Sainte-Marie, la collation de 
toutes les préceptories de l'Ordre qui viendraient à vaquer, 
et particulièrement de celle de Rome, à laquelle il avait à 
cœur de donner un maître doué des qualités nécessaires à 
la prospérité de cette maison. Innocent de Rovère étant 
décédé en 1484, le Pontife fit assembler en sa présence tous 
les frères qui purent se rendre à son invitation et leur 
restitua le droit d'élire le grand maître. Les termes de sa 
bulle laissent voir qu'il dirigea le choix des capitulants sur 
la personne de Pie de Médicis de Rovère^ bénédictin de 
la congrégation de Sainte-Justine et religieux de l'abbaye 
de Saint-Paul, qui fut élu à l'unanimité des suffrages '. Le 
grand maître se montra digne du choix du Pontife. Il en 
obtint de nombreuses grâces, entre autres la communication 
à l'ordre du Saint-Esprit de tous les privilèges et préro- 
gatives dont jouissait l'illustre congrégation bénédictine de 



* BuUo du 6 février I48;, Ibid.^ I, p. it;. 



240 us GKAXDS MATTUS AO ZTI* UkOM 

Sainte-Justine, à laquelle il appartenait avant son entrée à 
Sainte-Marie '. 

Constant Guillelmi * (1491-1495), son snooesseur, eut 
Thonneur de recevoir Charles VIII dans sa maison et de 
Tinscrire en sa présence au registre des confrères du 
Saint-Esprit*. Il était auparavant religieux de Sainte- 
Marie. Gratien de Villeneuve (1495*1497)7 ancien l^at 
en France et en Allemagne, ne passa que deux années à la 
tète de V Ordre. Benoit de Senis {1497-1504), Gabriel de 
Salis de Saona (1505), Albertino de Rovère (1505-1513), 
étaient étrangers, sauf le second, qui avait rempli pendant 
dix ans Toffice de camérier. Hilarion de Philippis 
(1513*1514) avait aussi montré sa capacité dans tous les 
emplois de la maison de Sainte-Marie. Pendant son court 
magistère, il eut l'honneur de siéger; avant tous lesgénéraux 
d'ordres, au concile de Latran, dont il fut Tune des 
lumières ^ Alexandre de Neronibus (15 14-1526), avant 
son élévation à la grande maîtrise, était majordome du 
palais sous Léon X. Ce pape lui permit, ainsi qu'à ses 
successeurs, de porter les insignes de la prélature et la 
soutane violette, afin qu'ils pussent faire bonne figure au 
milieu des familiers de la cour pontificale ^ Trois bulles 
coufirmatives de ses immunités furent accordées à l'Ordre 
par Léon X *. 

A partir de cette époque^ les grands maîtres ne sont plus 
généralement des religieux, mais des prélats de la cour 
romaine, qui considèrent cette charge comme un échelon 
conduisant à de plus hautes dignités. Cosme Tornabonus 
(1526), Léonard Bonafide (1526), Charles Arioste (1530), 



• Ibid, ; — P. Saulnier, p. 44. 

' Pour la série des grands mattreSi voy. Touvrage de P. Saolnîer, chap. VI. 
' Voy. plus haut, p. 159. 

• P. Saulnier, p. 47. 

• Bulle de 1515. Arch, de SainU-MarUin Saxia, lib. rub., f> 214. 
*Diphmata, I, p. i;5, 140, 14;. 



COMMENCEMENT. DE LA. DÉCADENCE 24I 

Jeati'Pierre de Sanctis (i 533), François de Landis (i 535) j 
Alexandre Guidiccioni (1546), firent tous un court sé- 
jour à l'hôpital du Saint-Esprit et le quittèrent pour 
Vépiscopat. Si la dignité de grand maître était rehaussée 
par ces choix, il est permis de croire que l'Ordre n'eut 
pas tout à gagner à de si fréquents changements/Jules III 
en vit les inconvénients ; pour y remédier, il en vint à 
supprimer la grande maîtrise et à confier l'administra- 
tion de l'hôpital à un conseil composé de prélats et de laïcs '. 
Mais l'expérience prouva bientôt que le remède était pire 
que le mal et Paul IV rétablit le généralat : en effet, 
supprimer le grand maître, c'était mettre l'anarchie 
dans l'Ordre. Louis Simoneta (1552), élu sur ces entre- 
faites, était évêque de Pesaro ; au bout de deux ans, il fut 
créé cardinal. Après lui vinrent deux protonotaires, 
Antoine Lomellino (1555) et François Capello (1556), 
qui ne firent que passer dans cette charge. La maison de 
Sainte-Marie, l'ordre entier avaient grand besoin d'un grand 
maître plus stable, qui pût le diriger avec des vues suivies. 
La Providence le préparait dans la personne de Bernardin 
Cyrillij d'Aquila (i 556-1 575V 

Notaire apostolique et chanoine de Sainte-Marie Majeure, 
puis recteur de la basilique de Lorette^ dont il fut aussi le 
premier historien, il était majordome du palais, quand 
Paul IV le choisit pour gouverner l'Ordre. Il prit aussitôt 
l'habit et fit profession. Pierre Saulnier fait le plus bel 
éloge de ce maître : « La maison, dit-il, menaçait ruine en 
de nombreux endroits : il la restaura si bien, qu'elle 
paraissait un édifice nouveau ; l'église, ornée par ses soins, 
faisait l'admiration de tous ; il mit tant de vigilance à faire 
disparaître les abus, que sa maison paraissait vivre sous une 
règle nouvelle*. » Il donna la croix à Nicolas Bufalini, 



* Bulle du ;o octobre î^sx.Ccmpcndio délit PrùfiUgU, n» 2, 

• P. Saulnier, p. Çi. 

16 



242 LES GRANDS MAITIIES AU XTI* SdCLE 

oncle du cardinal Mazarin, dont le frère Octave avait fait 
profession dans TOrdre. Mais son œuvre la plus méritoire 
fut l'impression de la Règle. Il y joignit une lettre, 
adressée à tous les frères, dans laquelle brillent du plus vif 
éclat son zèle et son ardente charité; en voici la teneur: 
« Aux frères de Tordre du Saint-Esprit, en quelques lieux 
qu'ils soient établis. Bernardin Cjrrilli d'Aquila^ précep- 
teur et maître général du même ordre. Frères bien-aimés, 
nous vous offrons de nouveau la Règle de notre ordre et 
les antiques institutions de nos pères, et nous vous exhor- 
tons de tout notre pouvoir, selon Tobligation de notre 
charge et de notre affection, à l'observer exactement, afin 
que par elle le Dieu tout puissant nous dirige en sa voie, 
et que, par le secours de son Esprit et par vos prières, ce qui 
se trouverait affaibli dansTOrdre soit affermi avec Taidedu 
ciel, ce qui serait malade soit guéri, ce qui serait brisé soit 
soutenu, ce qui serait déchu soit relevé, ce qui serait perdu 
soit recherché avec la tendre affection de la charité. Que la 
vertu du même Esprit ranime parmi nous les pusillanimes, 
qu'elle ramène les esprits troublés, qu'elle protège et 
défende ceux qui sont abattus ou languissants ; que sa 
droite garde toutes nos maisons. Pour moi, qui devrai 
rendre compte de vous tous et de moi-même, qu'il daigne, 
par sa miséricorde et vos prières, me prendre en pitié et 
me faire grâce. Salut à vous tous dans le Seigneur, et que 
chacun observe ces commandements et ces préceptes de la 
vie régulière dans la crainte de Dieu. Donné à Rome, en 
l'hôpital du Saint-Esprit, le premier avril 1564 ". » 

Nous ne devons pas oublier le puissant secours apporté 
au grand maître par un français, nommé frère Nicolas 
Pierre Cyrille, d'Autun ■. Pendant près de quarante ans, 
ce saint religieux remplit la charge de prieur, donnant à 



* Régula Sacri Ordinis Sancti Spiriius in Saxia,Kottkm, Z564. 
' Il avait par affection, pris le nom de son chef» 



COMMBKCBMBMT DB LA DÉCADENCE * 34) 

tous l'exemple de Thumilité, de la pauvreté et de la charité 
la plus parfaite. Ses hautes vertus lui valurent rafifection 
de trois papes et Testime de tous les cardinaux; il mourut à 
Ventrée du XVP siècle '. 

Les grands maîtres qui se succédèrent à Sainte-Marie 
jusqu'à la fin de ce siècle furent Thésée Aldohrandi (1575), 
Jean-Baptiste Ruino (1582), Antoine Meliori^ d'Aqua- 
viva (1586), Michel Mercati^ Auguste Fivisani (1591). 
Il s'attachèrent à Tornementation de l'église et à l'agran- 
dissement des édifices ; malheureusement aucun d'eux n'eut 
un long magistère. Saluste Taurusiy de Monte Pulciano, 
nous arrêtera plus longtemps. Mais avant d'entreprendre 
le récit de son gouvernement, nous devons retracer aux 
yeux du lecteur la situation générale de l'Ordre à cette 
époque. 

Ici, notre tâche d'historien devient plus pénible. Le 
seizième siècle fut pour l'Europe entière une époque de 
troubles et de désordres qui faillirent tout submerger. 
L'autorité de l'Eglise n'était plus écoutée ; minée depuis 
longtemps déjà par l'influence de légistes imbus d'idées 
presque païennes, sa tutelle pacifique et bienfaisante était 
répudiée par les rois ; le Schisme d'Occident vint hâter la 
marche de l'insubordination générale ; bientôt Luther allait 
lever l'étendard de la révolte et arracher au manteau royal 
du Christ un immense lambeau. L'ordre du Saint-Esprit 
devait nécessairement avoir à pâtir de tous ces troubles ; 
il en souffrit en effet cruellement ; ses beaux jours étaient 
passés et la période des épreuves commençait. La disci- 
pline, subissant le contre-coup de l'état général des 
esprits, se relâcha en de nombreuses maisons, et très 
souvent la révolte prit la place de l'obéissance. Les guerres, 
les envahissements des mimicipalités, enlevèrent à l'Ordre 



^ p. Saulnier, p« 76. 



i44 Là GtAXDS MAirUS AO XTÎ* S&CLE 

bien des hApttaiix et ces spoliations commencèrent Tcenvre 
de destruction que devaient achever les calvinistes. 

Partout les revenus étaient considérablement diminués. 
Les quêtes ne pouvaient plus se faire avec r^rularité : 
tantôt c'étaient les ennemis qui occupaient les le nito ir es 
où elles devaient se prélever, tantôt les parlements on les 
évêques en interdisaient la publication. Ajoutez à cela 
que les terres étaient très souvent laissées incultes ou 
ravagées par Tennemi ; puis les famines et les épidémies, 
suites ordinaires des troubles politiques, achevaient de 
ruiner les maisons, qui se voyaient forcées de contracter 
d'énormes emprunts pour compenser les pertes que leur 
causaient ces calamités sans nombre. Souvent aussi les 
hôpitaux furent soumis aux dîmes et aux impôts comme de 
simples bénéfices, nonobstant toutes leurs réclamations, 
fondées sur les déclarations pontificales et royales. Les 
bulles des papes sont unanimes à proclamer pour les 
hôpitaux l'exemption de toutes exactions et extorsions de 
décimes ou autres impositions. François I^ en 1544» 
François II en 1559, Charles IX en 1562, Henri IV en 
1608, etc. *, rendirent des édits analogues, et, malgré tout, 
les officiers fiscaux parvenaient souvent à extorquer aux 
pauvres une partie de leur substance. 

Il était difficile, dans ces conjonctures, que les œuvre$ 
de charité et d'assistance hospitalières ne subissent pas une 
notable diminution. Les pauvres se plaignaient de ne plus 
trouver un secours aussi abondant ; les magistrats recueil- 
laient ces plaintes et s'en faisaient l'écho ; ce fut le prétexte 
de leur immixtion dans les affaires de nos hôpitaux. Le 
parlement de Bourgogne, à la suite d'un édit obtenu par le 
mayeur et les échevips, ordonna, en 1528, que le produit 
des quêtes et aumônes, de l'hôpital de Dijon serait confié à 



' Diplomaia, M, PP* 10^ 18, a4t 29, etc. 



COMMENCEMENT DE LA DÉCADENCE r 24^ 

des administrateurs pris parmi les échevins et les habitants " . 
Cette mesure n'était que provisoire, à la vérité, et le patri- 
moine de la maison demeurait encore entre les mains du 
recteur; mais c'était un acheminement vers une autre 
mesure plus radicale. En effet, un arrêt de 1545 ordonna 
que tous les maîtres et recteurs d'hôpitaux de la ville et 
du ressort eussent à rendre compte de leur administra- 
tion par devant la cour suprême ; c'en était fait dès lors de 
l'indépendance des recteurs du Saint-Esprit. Heureusement, 
il se trouva souvent des magistrats zélés et charitables, qui, 
loin de profiter de leur autorité pour nuire aux hôpitaux du 
Saint-Esprit, s'appliquèrent à seconder les recteurs dans 
la bonne administration du bien des pauvres. ^ 

Voyant de près le dévouement des religieux et la dimi-i 
nution de leurs ressources, en même temps que l'augmen- 
tation des misères à soulager, ils défendaient à l'occasion 
contre d'injustes attaques les maisons, soumises à leur 
surveillance. Un avocat constatait devant le parlement, en, 
1566, le bon accord qui régnait entre les consuls et le 
recteur régulier de l'hôpital : « Les aumônes faites à, 
l'hôpital y sont si bien gouvernées, que l'on peut dire 
qu'en icelui les pauvres y sont tellement reçus et traités 
que même pour aujourd'hui, en cette saison qui est fort 
chère, Tonne trouve aucun mendiant en la ville de Dijon *. » 

Ce fait, élogieux sans doute pour les magistrats Dijon- 
nais, peut nous porter à croire que des mesures en soi 
funestes à l'Ordre, furent prises quelquefois par des 
hommes animés de bonnes intentions et désireux d'assurer 
l'accomplissement des fondations et le service régulier des 
pauvres. Il ne pensaient pas que cette ingérence dans les 
affaires de l'Ordre, après avoir été un instrument de pro- 
tection entre des niains désintéressées et charitables, 



... ; 

* Diplomata, II, p. 6 ; ^ D. C&imtieX^ Histoire n$. de Vhôpital de Dijon, 
chtp. IV. 

• D. Calmélet, Hist. m*, chap. .IV, . . 



246 us ORAIIDS MAmtES AU XTi* SAOLE 

pouvait devenir on instrument d'opp r ession en passant à 
des hommes ambitieux ou mal disposés. Le principe 
mauvais une fois admis, finit toujours par porter ses fruits, 
bien que les conséquences funestes en puissent être 
quelque temps retardées par la bonne volonté de ceux qui 
rappliquent. Les municipalités, après avoir prétendu 
surveiller seulement la gestion des biens des h^tanx, ne 
tardèrent pas à prétendre à la possession même de ces 
biens, au détriment de TOrdre qui les avait reçus. 

Cependant les nombreuses maisons du comté de Bour* 
gogne se trouvaient dans une situation critique. Les guerres 
de Charles le Téméraire avaient attiré des bandes armées 
qui ravageaient cette province en tout sens ; vint ensuite 
une série d'années improductives qui achevèrent de plonger 
le peuple dans la plus a£Freuse misère. Après la famine, ce 
fut le tour de sa trop fidèle compagne, la peste, qui sévit 
à Besançon, d'une manière en quelque sorte permanente, 
pendant la première moitié du XVI* siècle. L*hôpital ne 
tirait presque plus rien des quêtes, interdites à diverses 
reprises par le parlement ; du reste, la rivalité des Maisons 
de France et d'Autriche les rendaient le plus souvent 
impossibles; les terres demeuraient incultes, faute de 
bras pour les cultiver : on ne faisait face aux dépenses les 
plus urgentes que par des emprunts fort onéreux. La 
contagion encombrait l'hôpital. Tant que ses finances le lui 
permirent, il supporta le fardeau sans se plaindre; mais 
en 1525, le recteur dut faire des instances pour en être 
déchargé. La réponse fut une délibération du magistrat 
qui confiait à deux séculiers la régie du temporel de l'hô- 
pital et limitait le rôle des religieux à la desserte des 
fondations pieuses. Ce changement d'administration ne 
créait pas de ressources nouvelles ; un tel état de choses ne 
pouvait durer longtemps. Les administrateurs municipaux, 
une fois à l'œuvre, constatèrent facilement que la ruine 



COMMENCEMENT DE LA DÉCADENCE 247 

trop réelle de l'établissement tenait à de tout autres 
causes qu'à la prétendue mauvaise gestion des recteurs, et 
force fut de la décharger du soin des pestiférés, en cons- 
truisant une maison à leur usage (1528). Les religieux 
tendaient de plus en plus à restreindre leurs services à 
l'assistance des enfants, des femmes en couches et des 
voyageurs. Après diverses oppositions de la commune, qui 
menaçait de s'emparer de la maison, le recteur, frère 
Claude BuflFet, se résigna, en 1571, à céder à la ville, avec 
une dotation convenable, l'hôpital Saint-Jacques, réuni 
au Saint-Esprit depuis 1436. Au prix de ce sacrifice, il 
conserva l'administration de sa maison et n'eut plus à 
admettre que les enfants, femmes et passants non malades, 
car dès lors les pauvres, les vieillards et les infirmes furent 
reçus par la ville, à l'hôpital Saint-Jacques *. 

Les autres maisons de la province, dépendantes de 
Besançon, n'étaient pas plus florissantes que celle-ci; par- 
tout l'appauvrissement amenait les réclamations et les 
empiétements des pouvoirs civils. Ainsi le parlement de 
Dole rendit, le 10 avril 1557, un arrêt de règlement qui 
introduisait dans le contrôle de l'hôpital de Gray le 
mayeur et les échevins, en les chargeant de le visiter deux 
fois par année, de veiller à la conservation de ses titres et 
à la réparation de ses bâtiments : prérogatives qui étaient 
en la possession exclusive du recteur Bisontin *. 

Cette ingérence de l'autorité civile, quoique louable 
dans son but, avait, nous l'avons dit, le grave inconvénient 
de porter atteinte aux privilèges de l'Ordre et d'encou- 
rager les prétentions des corps municipaux, qui partout 
alors tendaient à se rendre seuls maîtres des hôpitaux et 
de leurs biens. 

Il faut bien aussi Tavouer, les rivalités intestines, occa- 



* A Castan, Notice, l, p. 166 et sv. 

* J. Gauthier, Notice hUt, sur l'hôpital du Saint-Esprit de Gray^ p. 14. 



248 LES GRANDS MAITRES AU XVI« SlftCCB 

sionnées par les compétitions à la charge de recteur, ne 
furent pas une des moindres causes de Taffaiblissement de 
rOrdre et des usurpations séculières. Dès le milieu du quin- 
zième siècle, les grands maîtres romains, s'appuyant sur 
des bulles qui leur en conféraient le pouvoir *, se réservè- 
rent la nomination non seulement des commandeurs magis- 
traux, mais de tous les simples recteurs. Ils voulaient ap- 
paremment resserrer, par cette mesure, les liens de 
Tobéissance, qu'ils voyaient se détendre. Mais, en cherchant 
à rendre plus étroite la constitution hiérarchique de l'Or- 
dre •, ils ne parvinrent qu'à en fausser les ressorts et à 
Tafifaiblir. Les commandeurs magistraux, auxquels avait 
toujours appartenu la nomination des recteurs subordonnés, 
protestèrent en nommant de leur côté des sujets qui en- 
traient en lutte avec ceux qui tenaient leur titre du grand 
maître. Pour comble de malheur, il arrivait fréquemment 
que des intrigants, le plus souvent étrangers à l'Ordre, se 
faisaient pourvoir des hôpitaux vacants, au moyen de bulles 
subreptices, obtenues en cour de Rome comme s'il se fut 
agi de bénéfices ordinaires, et nonobstant les exemptions 
que les papes avaient si souvent renouvelées. De là, à 
chaque vacance, double et quelquefois triple nomination ; 
l'anarchie et le désordre se seraient introduits à moins. 

« L'autorité royale, représentée par le parlement, faisait 
le plus souvent l'appoint nécessaire pour faire pencher la 
balance en faveur d'un concurrent, et lui donnait l'investi- 
ture et la possession de l'hôpital *. » Ces faits si regretta- 
bles se reproduisirent presque à chaque vacance, à partir du 
XVP siècle. 

D'autre part, les funestes libertés^ ou plutôt, selon le 



* Bulle de Sixte IV, ij août 147^ Diplom,, 1. p. 9i- 

* Leur autorisation était devenue nécessaire, même pour donner Thabit atut 
postulants. ^Autorisation pour le recteur de Besançon, i$$6. Arch. S, E. m 
Saxia, lib. O, f» U, etc.) 

» J. GàutHicr, of. aï., p^, tj. 



COMMENCBMBNT DE LA DÉCADENCE 249 

mot de Fleury •• les servitudes de l'Eglise Gallicane, 
inspiratrices ordinaires de la royauté, ne tendaient déjà que 
trop à ruiner l'autorité du grand maître. Les privilèges et 
bulles des papes n'étaient valables en France, suivant la 
doctrine parlementaire, qu'après leur enregistrement au 
parlement ; il en était de même des publications de quêtes- 
et d'indulgences •. Les généraux d'ordres siégeant à l'étran- 
ger se voyaient refuser l'exercice de toute juridiction dans 
l'étendue du royaume et ne pouvaient nommer ni procu- 
reurs, ni visiteurs de leuro maisons '. 

L'hôpital de Montpellier sut tirer parti de cette situation. 
Depuis la sentence définitive du cardinal de Lérida (1450), 
ses recteurs n'avaient plus osé faire grand bruit; ils 
faisaient confirmer leurs pouvoirs par le grand maître et 
payaient régulièrement le tribut annuel de trois florins *, 
comme on peut le constater sur les registres censiers de- 
Sainte-Marie in Saxia. 

Frère Jean Calvet, deuxième du nom, crut le moment 
venu de rallumer Tancienne querelle. Il fit présenter à 
Henri II un placet *, dans lequel il prenait le titre de 
« Général et grand maître de tout TOrdre en deçià les 
Monts. » Pour revendiquer la primauté et l'indépendance de 
Montpellier, il s'appuyait sur la bulle d'Innocent III de 1 198 ' 
et celles d'Honorius III et de Grégoire XI ; mais il avait 
grand soin de passer sous silence les révocations formelles 
qui en avaient été faites par Innocent III lui-même, en 
1209, par Grégoire IX et Sixte IV. Rappelant les protes- 
tations de quatre de ses prédécesseurs, il ne parlait non! 
plus ni de leur soumission, ni du paiement significatif du 
tribut annuel. Henri II, alors à Toulouse, donna dans le 



* Nouveaux opuscules, p. 156. 

* Edit de François !•'« du 12 janvier i$;8, Diplom . II. p. 8. 

* Arrêt du parlement de Paris, i^ février xuh Ibid.^p, 9* 
' Voir plus haut; chap. III., p. 206. 

* Z>f^(oinato, II| p. 1). 



350 LS8 GRANDS MAITRHS AU XTI* SliCLE 

piège et délivra au commandeur des Lettres Patentes, où il 
se donne le titre de « Fondateur et Protecteur de Thôpital 
de Montpellier », et mande au gouverneur de la ville de 
veiller à ce qu'il ne soit porté atteinte à ses droits*. Hélas ! 
ce n'était point une sanction de sa révolte, mais bien plutôt 
une sauvegarde contre la destruction et la ruine, que le 
commandeur eût dû implorer du roi très-chrétien : quelques 
années encore, et des nombreuses maisons du midi de la 
France, il n'allait demeurer que des ruines ! Les Calvinistes 
se préparaient dans Tombre à leurs sauvages exploits, et 
déjà ils avaient donné dans d'autres pays la mesure de ce 
qu'on pouvait attendre d'eux en France. 

La première maison qui eut à souffrir des violences du 
protestantisme fut la maison même de Rome, et elle se 
ressentit longtemps des atteintes qui lui furent portées. 

En 1527, le connétable de Bourbon, traître à sa patrie et 
à sa foi, marchait sur Rome, à la tète de quarante mille 
soudards, luthériens forcenés pour la plupart, et le reste, 
bandits accourus de tous les points de l'Italie. L'assaut fut 
donné du côté de l'hôpital Sainte-Marie et l'ennemi entra 
dans la ville par la porte Septimana ou San Spirito, en* 
clavée dans les bâtiments du Saint-Esprit. On devine le 
sort de notre hôpital dans une telle catastrophe. Le pillage 
fut horrible : « Jamais, observe Sismondi, jamais peut-être 
dans l'histoire du monde une grande capitale n'avait été 
abandonnée à un abus plus atroce de la victoire ; jamais une 
puissance armée n'avait été formée de soldats plus féroces, 
et n'avait plus absolument secoué le joug de toute disci- 
pline* ». Pendant neuf mois entiers, la ville étemelle fut 
livrée sans aucune défense à un ramassis de tout ce que 
l'humanité déchue peut produire de plus dégradé, à des 



* Lettres Patentes du 30 septembre i^U' Diplom,f II« p. X5« 
' Histoire des républiques Italiennes^ t. XV, p. 269. 



OOMMENCBMBKT DE LA DÉCADBNCB 2$! 

êtres dont les passions immondes n'avaient d'égal que le 
fanatisme sacrilège et la soif de. pillage. C'est ainsi que 
l'ordre du Saint-Esprit fit connaissance avec le protestan- 
tisme. La suite fut digne de ce commencement. Dès les pre- 
miers moments, de 1525 à 1530, les maisons de la Suisse 
furent arrachées à l'Ordre et tombèrent au pouvoir des 
villes. 

En Allemagne, de vingt-cinq maisons florissantes, trois 
à peine survécurent. Leurs possessions étaient considérées 
comme biens ecclésiastiques, au même titre que les richesses 
des évêchés et des abbayes ; elles étaient par conséquent 
de bonne prise, pour des princes qui ne voyaient dans la 
Réforme qu'un excellent moyen de remplir leurs trésors 
et d'assouvir leurs passions. Le célèbre hôpital de Munich 
demeura debout au milieu de la tourmente. Fondé en 1251 
par le duc Othon l'Illustre ; brûlé en 1327 ; rebâti par Louis 
de Bavière ; enrichi par la munificence des princes et la 
charité des citoyens, il cessa d'être desservi par nos reli- 
gieux à une époque inconnue, mais certainement postérieure 
à la Réforme *. L'hôpital de Wimpfen, réduit par les hé- 
rétiques à la dernière extrémité, put se soutenir pendant 
quelque temps encore, grâce à ses voisins de SteflFansfeld 
et de Memmingen. Ce dernier fut exceptionnellement favo- 
risé. Les religieux, quoique privés depuis longtemps déjà 
de la gestion temporelle du bien des pauvres, purent 
continuer sans entraves à les servir, à célébrer dans leur 
église l'office du jour et de la nuit, et à faire, au milieu 
d'une ville en grande partie protestante, toutes les céré- 
monies du culte catholique, grâce à la sage tolérance des 
magistrats et à la reconnaissance des habitants. Et lorsque 
Wimpfen aura succombé à son tour sous de nouveaux coups, 
nous verrons encore Memmingen, véritable oasis au milieu 
de l'Allemagne, abriter à la fin du siècle cent malades 



' C. Meichelbeck, Hi$i. FrUing,^ t. \h p. 88. 



352 LS8 GRilNI]^ MAfnU». AU ZVI* m^CkR 

et cinquante enfants confiés aux frères du Saint-Esprit % 
Dans les pays Scandinaves, les dernières années du XV' 
siècle avaient été pour TOrdre une époque de rénovation ; 
il devait cette prospérité à la faveur du roi Christian II, 
qui, lors d'un pèlerinage à Rome (1474)1 s'était fait iAscrire 
au nombre des confrères du Saint-Esprit \ Sous l'impulsion 
royale, plusieurs maisons nouvelles s'étaient même élevées^ 
comme Faaborg (1477), Odensée (1478),* Matmoë et 
Nestved (vers le même temps) ^ « Mais ce n'étaient plus 
que des fleurs d'automne condamnées à périr dans le dur et 
prochain hiver du protestantisme ; elles ne servirent ^ère 
qu'à parer le cercueil de l'Eglise catholique dans ces con« 
trées vouées à l'erreur '. » Les successeurs de Christian^ 
bien loin d'imiter son exemple, se plurent à détruire les 
maisons du Saint-Esprit, en même temps qu'ils abandon- 
naient la foi de leurs pères. Toutefois, ayant affaire à des 
peuples fort attachés à leur religion, dans des pays dont, la 
constitution politique était très libérale, ils préférèrent, 
pour arriver à leur but, la ruse et l'hypocrisie aux moyens 
violents employés en Allemagne. Voici desf exemples.de la 
manière dont ils procédaient. 

En 1528, Frédéric i*' disposa de l'hôpital de Malmoê au 
profit des bourgeois de la ville, pour en jouir lorsque les 
frères du Saint-Esprit, sous la pression des tracasseries de 
Ja Réforme, l'auraient abandonné. Comme ils demeuraient 
malgré tout au chevet de leurs malades, une simple accu- 
sation de dilapidation, faussement portée par les bourgeois* 
suffit pour les faire expulser. La même année, le prince 
qualifia les hospitaliers de Faaborg d'hommes honorables 



' Relation de la Visite de Metcjiior de la Vallée, en 1596 ; — Suepia EccUùast. 
p. ;66, 609, 896; — Holstenius, Codex Regularum, t. V. p. 49$. 

• Voy. plus haut, p. i$9i . . 
' C'était la seconde maison de l'Ordre dans cette vUIe. 

* Daugaard, Des Couvents Danois au moyen-Age. — GalUa Christ. , t. V, p. 
4i i^' - 

■ Abbé Renard, Hist. de Vhôpital de Neuf château (ms). 



COMliCBNCteMËKt DE LA CÉCAlTBNCB l^J 

et de vie pure, et leur donna unç égliise paroissiale relevant 
de la Couronne, avec la charge d'acquitter les fondations 
royales et de pourvoir les pauvres malades de nourriture, 
de bière, de vêtements et de tous les soins honnêtes qui 

• • • 

leur sont nécessaires. Deux ans plus tard, il les dépouilla 
complètement*. — L'hôpital de Copenhague avait été fondé 
au XIII' siècle et enrichi de dons royaux et populaires, qui 
fournissaient largement aux besoins des pauvres. Le pre-* 
inier juin 1529, Frédéric le prit sous sa protection spéciale, 
avec ses propriétés, ses frères, ses sœurs, ses serviteurs, 
confirmant expressément les privilèges accordés par ses 
ancêtres. Mais, dès l'année suivante, le prince hypocrite 
signait l'ordre de sécularisation *. — La maison d'Aalborg 
avait, elle aussi, un passé long et glorieux dans les annales 
de la charité ; soixante ans avant l'introduction du Luthé- 
ranisme (1455) elle comptait encore seize religieux et vingt- 
quatre sœurs au service des malades. En 1540, s'ouvrit 
pour elle la période des malheurs ; église, couvent, asile des 
pauvres, Frédéric enleva tout et relégua les religieux avec 
leurs malades dan^ un couvent de Franciscains ; quatre 
ans plus tard, ce dernier asile fut saccagé par l'armée de 
Rantzau. 

La même année, l'hôpital très florissant d'Aarhus * fut 
cédé, par lettres royales, à l'évêque luthérien de cette ville ; 
un peu plus tard (1552^ les frères de Rantzow et de Hor- 
sens furent expulsés *. — Le voisinage du château royal avait 
été longtemps, pour la maison de Ribe^ la source de faveurs 
princières ; mais il lui devint fatal. Christian II, la trou- 
vant â sa convenance, sécularisa les religieux et s'empara 
de leur demeure. L'hôpital de Flensborg partagea le même 



* Daugard, of, cit., p. 14$, ^07. 

* Horger Fr; Rôrd'àm; Les igliits et la Couperets dcCopenhagui du mcyeni^ge^ 
pp. 207-^9- 

t' ' En I4<^) les ireligi«ùx avaient ^établi une imprimerie dans leur hôpital (Dau- 
gaard, op. ci7.,p. J89). . : 

«Daugard, op. cit., pp. 381, J9$, 398. : ; 



2 $4 LB8 QRiOfDS MAITRES AU XYl* SIÉCLB 

sort en 1551. — L'année 1541 vit la fin de Tantique hôpital 
d'Odensée ; enfin, en 1570, fut ruiné celui de Rœskilde, 
création belle entre toutes, où malades, vieillards, pauvres, 
trouvaient un abri assuré, où, non content d*élever les or- 
phelins, on facilitait aux mieux doués Taccès de l'université 
de Paris *. 

En Suède, tous les hôpitaux du Saint-Esprit, dont qnel- 
ques-ims, comme celui de Soederkœping, étaient considé- 
rables, sombrèrent dans le naufrage des institutions 
catholiques *. Le silence de l'histoire au sujet de ceux de 
Norvège laisse supposer qu'ils eurent un sort aussi lamen- 
table. De ces établissements nombreux et florissants, il 
n'est resté que les bâtiments en ruine de la maison de 
Halsnoé, situés dans une île des côtes occidentales du 
royaume, en tace de la ville de Bergen. Toutes ces fonda- 
tions du grand ordre hospitalier étaient donc destinées à 
périr jusqu'à la dernière, sous le joug de fer des princes 
Danois d'Oldenbourg et des princes Suédois de la dynastie 
de Vasa, pour qui le luthéranisme fut un moyen d'implanter 
leur domination tyrannique dans des régions jusqu'alors 
très attachées à Torthodoxie *. 

En France, pour avoir été plus tardive, l'œuvre de 
destruction fut peut-être plus sanglante que partout 
ailleurs, lorsque l'heure sonna où nos hôpitaux durent, 
comme ceux d'Allemagne et du Nord, subir les terribles 
atteintes du vandalisme sectaire et impie. Les Huguenots 
préludèrent à leurs sauvages exploits à Nîmes, en 1560, 
par le pillage de la cathédrale et des autres églises et le 
sac des couvents. L'année suivante, ce fut le tour du Lan- 



' Daugard, op. cii,, pp. 190, 429, 44$ ; — Monter, HisL eccUUast. du 
Danemark et de la Norvhge, t. II, p. 656. 
- ' Eric Wenaerhalom, DUsert, de ord. SpirUm SancU in Saxia. UpsaUe, 

1791. 
' Abbé Renard, op. ciU 



COMMENCEMENT DE LA DÉCADENCE 255 

guedoc. Nul prêtre romain, écrivait l'un des chefs de 
l'insurrection, n'oserait se montrer en Gascogne, en Pro- 
vence, dans le Bas-Languedoc et jusqu'aux Pyrénées; 
partout les idoles sont abattues *. En 1562, ils mirent le 
siège devant Montpellier et s'en emparèrent. L'hôpital, 
situé en dehors des murs, fut leur première victime ; ses 
richesses furent pillées, l'église renversée, les archives livrées 
aux flammes, la communauté chassée ou mise à mort, enfin 
les bâtiments ruinés de fond en comble *. Partout, sous les 
pas des Huguenots, ces horreurs se renouvelaient; Lyon, 
Orléans, Blois, Poitiers, Troyes, Caen, Angers, Rouen, Le 
Mans, les trois quarts de la France, furent impunément mis 
à feu et à sang par de sauvages sectaires. Six ans plus 
tard, ce fut le tour de Montauban, de Castres, de Viviers, 
d'Uzès, de Pont-Saint-Esprit, de Bagnoles, etc. Partout 
où ils étaient les maîtres, les protestants chassaient lés 
prêtres, supprimaient les communautés religieuses et ren- 
versaient les sanctuaires. De leur propre aveu, les hérétiques 
mirent à mort, en France seulement, quatre mille religieux, 
déshonorèrent douze mille religieuses, dévastèrent deux 
mille églises, détruisirent deux mille couvents et quatre- 
vingt-dix hôpitaux ». Ainsi périrent la plupart des maisons 
dépendantes de Montpellier, enveloppées, ainsi que leur 
antique berceau, dans la ruine commune. « Ce terrible, 
mais juste châtiment de Dieu, la maison de Montpellier se 
l'était peut-être attiré par les divisions qu'elle avait entre- 
tenues au sein d'une famille vouée à la charité ^ » 

Seul au milieu de l'Europe, le royaume fortement chrétien 



* Lettres de Languet à l'électeur de Saxe, Halle, 1699. 

*GaUia Christ, f t. VI, col. 809-810; — Germain , De la charité publique et 
hospitalière à Montpellier au moxen-âge, p. 25. 

' Voy. un article de M. de Gerlache, premier Président de Ul cour de cat- 
sation de Belgique, Univers du 15 décembre 18^7. 

' Relation, de la YuUe de Melchior de la Vallée. 



256 LES GRANDS MAITRES AU XYI* SliCLB 

d'Espagne eut le bonheur tle demeurer à Tabri du fléau. 
Aussi, pendant que notre ordre agonise en tant de lieux, 
peut-il montrer avec orgueil ses hôpitaux d'Espagne en 
plein fonctionnement. D'assez nombreuses maisons prirent 
même naissance à cette époque. Pendant les années 1498 
:et 1499, le grand maître délivra les autorisations néces- 
saires pour fonder des hôpitaux : à Pierre de Portulas, curé 
de Sainte-Marie de Aragosta^ au diocèse de Lerida * ; à 
frère Jean de Regio, qui voulait en doter son pays natal, 
Regio del Canino ; dans le même temps, deux autres 
furent érigés à Calahorra* et à Burgos *; peu après, l'hôpital 
des Saints Quirice et Julien % puis celui de Canavezes en 
Portugal *, étaient agrégés à l'Ordre. Enfin plusieurs 
monastères de religieuses du Saint-Esprit s'ouvraient àcette 
époque, parmi lesquels un à Séville • et un autre en Cas- 
tille, dans lequel la fondatrice, Marie de Anguillar, en^a 
elle-même \ Dans ces monastères, les religieuses étaient 
soumises à une règle sévère et observaient la clôture, 
comme leurs sœurs d'Italie. 

N'oublions pas de rapporter un fait tout à l'honneur de 
notre ordre et de la catholique Espagne. Ce furent les 
frères du Saint-Esprit qui furent choisis pour apprendre 
au Nouveau Monde la charité et l'hospitalité chrétiennes. 
En 1 560, le grand maître Bernardin Cyrilli érigeait un 
hôpital à Cuscoa, dans le Pérou, et un autre à Mexico •; 
deux ans après, les villes de San Thomé et de Goa recevaient 
le même bienfait*. Bientôt enfin Carthagène^ Ciudad de los 



' Arch, de Ste Marie in Saxia, Hb. rub., 0> 137 vo (; mai 1498). 
*Ibid., fo 168. 
•/^W., lib. A, fo 12. 
*/^W., lib. GG.,ri42. 

• Ibid,, Fouillé du XVI» siècle. 

• IbU,, lib. J, P> 1Ç8. 
-> là,, ibid, 

•Ibid., Fouillé du XVIe siècle, P> 75. 

• P. Saulnier, p. 10. 



COMMENCEMENT DE LA DÉCADENCE 257 

Reyes et Saint-Domingue possédaient des colonies d*hos- 
pitaliers. Ce furent les derniers rejetons de Tordre du 
Saint-Esprit ; ils viennent du moins heureusement ajouter 
un rayon dans le ciel si sombre de son histoire au XVI* 
siècle. 




17 



CHAPITRE Vn 



LA VISITE DE FRÈRE MELCHIOR 
DE LA VALLÉE 




[B concile de Trente avait prescrit aux abbés et anx^ 
chefs d'ordres religieux exempts, de procéder à 
Tavenir très régulièrement à la visite canonique des 
maisons de leur dépendance, afin que Tétat religieux pût 
recouvrer en peu d'années son ancienne beauté, par la 
suppression de tous les abus. Dès qu'il fut assis sur le trône 
pontifical, Clément XIII se mit lui-même à l'œuvre et, 
pendant quatre années, visita et réforma entièrement les 
monastères et les hôpitaux de la ville étemelle. Puis, vou- 
lant poursuivre l'œuvre de régénération jusqu'aux extrémités 
de l'Eglise, il enjoignit aux généraux d'ordres d'envoyer 
des religieux prudents et éclairés, avec les pouvoirs néces- 
saires pour visiter minutieusement et réformer chacune des 
maisons de leurs instituts. 

Le grand maître du Saini-Esprit se hâta d'obéir auiç 
prescriptions pontificales. Mais comme une telle entreprise 
eût dépassé les forces d'un seul homme, il répartit la 
charge entre plusieurs. Nous ne connaissons point le 
visiteur chargé de l'Italie et sa mission n'a pas laissé de 
traces. Celui d'Espagne et de Portugal se nommait Dom 



36o Làr ynan 

Franoesco Qoesada. Ayant reça sa oommisskm en 1599* oe 
grave et saint personnage parconmt les deux royaumes 
confiés à son zèle, et après s'être rendn compte de Tétat 
des hôpitaux et des monastères qoe TOrdre 7 possédait en 
grand nombre, il 7 remit la discipline en une vigoeor 
nouvelle. Le rapport qu'il adressa au grand midtre.fîit 
imprimé dans le même temps *, mais il nous a été impos- 
sible de le consulter ; ThApital de Sainte-Marie lui-même 
ne le possède plus. Sans doute, il eut jeté de vives lumières 
sur la situation prospère des hôpitaux Espagnols à cette 
époque. 

La tâche la plus lourde fut dévolue à un profès de 
Thôpital romain : il devait parcourir la France, l'Allemagne 
et jusqu'à la Pologne. Plus heureux qu'en ce qui regarde ses 
deux collègues, nous possédons de sa visite une relation 
officielle et fort détaillée, qui cependant est demeurée 
manuscrite. C'est cette relation qui va faire l'objet du pré- 
sent chapitre. Mais il ne sera pas inutile, avant d'en 
entreprendre ranal7se, de faire connaître notre personnage. 

Melchior de la. Vallée, né à Toul avant 1550, apparte- 
nait, dit-on ', à une famille distingfuée par sa noblesse. 
Frère Jean Gerrier le Vieux^ recteur du Saint-Esprit de 
Toul, avaittenu le jeune enfant sur les fonts du baptême. 
Cet excellent parrain, optimus patrinus S semble avoir 



* Arckt de Vhâp, de Besançon, cas. C, B. 2 

* P. Saulnier, p. 9. 

' L'abbé Renard, Hi$t, ms. de Neufchâteau. Nous ignorons sur quelles preuves 
s*appuie cet auteur, lorsqu'il inscrit Melchior à la Csmille de Christophe de la 
Vallée, qui mourut évèque de Toul en 1607. Il y arait plusieurs familles nobles 
qui portaient ce nom. A Tune d'elles appartenait un autre MiUkior de la VaUée, 
fils d*un orfèvre de Nancy, qui devint protonotaire et grand-chantre à Saint- 
Georges de la même ville et mourut vers i6?i (H. Lepage, Melchior delà 
Vallée, dans les Mém, de la Soc, <tArchiol, Lorraine, 1882, p. 2$7-|io). La siaû- 
litude des noms semblerait indiquer une parenté entre ce personnage et notre 
visiteur. L'érudition Lorraine parviendra sans doute à résoudre le problème, 
que nous ne pouvons que poser ici, au sujet de l'origine d'un homae^q» lait 
honneur à son pays. 

*RaUo VisUationls. 



DE FRÈRE MELCHIOR DE LA VALLÉE 201 

destiné à son ordre Tenfant qu'il avait initié à la vie 
chrétienne. En 1565, Melchior prit en effet la croix des 
hospitaliers dans sa ville natale '; puis il se rendit à Rome, 
afin de puiser à leur source même les eaux vives de la 
charité. Là, ses qualités brillantes eurent bientôt attiré 
l'attention du grand maître, qui le nomma, quoique bien 
jeune encore, recteur de Besançon, la principale maison de 
rOrdre au delà des monts (1573). Mais la commune, qui, 
après avoir installé d'autorité le frère Jean Buffet, n'avait 
pu réussir à le faire agréer à Rome, empêcha par la force 
son concurrent de prendre possession, si bien qu'au bout 
de quatre années de procès et de luttes, compliqués d'appels 
au parlement et même à l'empereur % Melchior prit le parti 
de résigner ses droits (1577). Le grand maître le dédom- 
magea en lui donnant l'hôpital de Foligno '. 

Profond théologien, très versé dans la peinture et la 
musique, orateur agréable et disert, il se trouvait désigné 
naturellement par un ensemble de qualités peu communes 
pour les pluii hauts emplois. Dès l'an 1580, il recevait une 
délégation de visiteur apostolique *; et lorsque le grand 
m^tre donna à son zèle un champ plus étendu et l'envoya 
réformer en son nom les hôpitaux de France, d'Allemagne 
et de Pologne, il s'y montra constamment négociateur ' 
habile et religieux plein de l'esprit de sa vocation. A 
son retour, il fut chargé de rédiger, à l'aide des archives 
de l'hôpital romain, un manuel ou Pouillé, par états et 
provinces, de toutes les maisons appartenant à l'ordre du 
Saint-Esprit. C'était un travail important, qui l'obligea à 
lire une masse considérable de documents. Il en vint à 
bout cependant, et compléta son manuel par une table 



* Areh, de Miurihe et Mot,, G. iu$ Obituaire du Saint-Esprit de Tout ; * 
Abbé Renard, c»^. ci/. 

* A« CasUn, Notice, II. I79f I97« 

* Batio VisUaUcnU. 

* Arch. du Saini'Eipriidc RonUt Ub. S, f ^9. 



a62 LA TttlTg 

analytique des principaux actes de juridiction conc er nant 
les prieurés de TOrdre, de 1431 à 1600, date oùil adievait 
ce grand travail '. 

La confrérie du Saint-Esprit, restaurée jadis par 
Eugène IV, Sixte IV et Jules III, était retombée dans 
une sorte de décadence et d*oubli, comme il arrive fréquem- 
ment aux institutions de ce genre : frère Meldiior «itreprit 
de lui rendre son ancien éclat, et un fl&n succès couronna 
ses efforts. 

Le principe de toutes ses actions, c'était la vertu, qui 
avait jeté dans son cœur les racines les plus profondes. 
Aussi passait-il généralement pour un saint. Depuis long* 
temps son patrimoine était devenu celui des pauvres, et 
tous les dons qu'il recevait étaient employés invariable- 
ment, soit au soulagement des malades, soit à Tachât de 
pieuses récompenses, destinées à attirer les enfants aux 
catéchismes familiers qu'il aimait à leur faire. Ses amis lui 
représentaient-ils que ses vêtements usés ne convenaient 
point à un homme de sa condition : « Ne me voyez-vous 
donc pas, leur répondait-il en souriant, quand je monte à 
Tautel, tout brillant d'or et de soie ? » Etant prieur de 
Foligno, il fit placer (1608) dans une châsse très riche, au 
dessus du maitre-autel, les reliques du Bienheureux Antoine 
le Hongrois. Singulièrement dévot aux trois rois Mages, 
dont l'un était son patron, c'était merveille, dit Saulnier, 
comme il exaltait et imitait leur générosité et leur humilité 
au^ pieds de l'Enfant-Jésus. Il mourut le 6 janvier 1613, 
le jour même des Rois, auxquels il avait voué un culte si 
tendre. L'humble religieux, qui n'avait aspiré qu'à une vie 
obscure et cachée en Dieu, fut après sa mort l'objet des 
témoignages les plus pompeux de l'estime publique. Il se 
fit un immense concours autour de sa sainte dépouille, et 



* Note écrite à la fin de Tannée i(99 par frère Melchior, fi 1x6. — Cet inven- 
taire fort commode nous a été très utile dans nos recherches tnx archives de 
rhôpital romain. 



DB FRiRB MALCHIOR DE LA YALLÂE 20} 

pour satisfaire le peuple, il fallut le conduire à sa sépulture 
par un long circuit et transformer un simple convoi funè- 
bre en une marche triomphale *. 

Un tel homme était capable de faire un grand bien, dans 
une mission comme celle qui lui avait été confiée, grâce à 
Tascendant de sa sainteté, grâce aussi à son intelligence et 
à sa prudence consommée. En le nommant visiteur général^ 
le grand maître avait fait preuve d'un véritable discernement 
et Teffet répondit à son attente. 

Le bon religieux se mit donc en route, le 19 juin 1596, 
muni des lettres du grand maître Salluste Taurusi et d'un 
bref ampliatif du pape Clément VIÏI. Pendant le cours de 
son voyage, qui dura plus d'un an, il prit soin d'en noter 
jour par jour toutes les circonstances. Cette relation % écrite 
dans un excellent style^ qui témoigne de l'esprit cultivé de 
son auteur, est d'ime lecture fort intéressante et donne de 
précieux détails sur l'état de l'Ordre dans les régions qu'il 
parcourut. Les pages suivantes n'en sont que le court 
résumé. Frère Melchior, en visiteur consciencieux, voulut 
que le premier acte de sa mission fût la visite de l'hôpital 
de Foligno, dont il était recteur. Il y ordonna toutes choses 
pour le temps de son absence et dressa un inventaire des 
biens, qu'il envoya sans retard au grand maître. Il était le 
10 juillet à Florence, dans le but de passer en France par 
Milan ; mais la guerre entre les rois de France et d'Espagne 
rendait alors le passage fort périlleux. Il dut donc vendre 
son cheval et se rendre à Gènes par mer ; il gagna ensuite 
Turin, d'où il traversa les Alpes, se dirigeant sur Lyon 
par Grrenoble. Là non plus, les dangers ne manquaient 



* Voir, pour les détails biographiques qui précèdent, P. Saolnier, pp. 75-76. 

* Ratio seu discursus totius visitationis ordinîs Sancti Spiritus in Saxia de 
Urbe per Galliam et Germaniam, quam frater Melchior de Valle Tullensis, 
efusdem ordinis presbiter professus, executioni demandavit ab anno Domini 
1596 ad annum 1597, quas 19 junii ejusdem anni exordium habuit. — Arch, de 
l^hôp, de Bfsançon^ Boite 14, chap. II, n* i. 



2é4 Là rmm 

pas : c'étaient les calvinistes, maîtres absolus dnDanpIiiiié ; 
puis LesdiguièreSf gouverneur de Grenoblei en lotte avec 
le duc de Savoie. Il n'y avait pas à reculer cependant. Les 
compagnons de route de frère Melchior le pressèrent en 
vain d'écouter les conseils de la prudence et de cadier sa 
croix : il n'en voulut rien faire, et l'événement lui donna 
raison. La croix le protégea et les habitants de Grenoble 
lui rendirent honneur pour la plupart, ce qui lui donna 
lieu de composer le distique suivant : 

Fulminât ira tremens frustra inimice salutis, 
Crux colitur^ geminans candida ubique Dei. 

L'itinéraire normal du visiteur était de passer directe* 
ment de Grenoble à Montpellier, « siège du célèbre hôpital, 
d'où dépendent de nombreux prieurés dans cette province 
et celle de Gascogne. » Mais cet hôpital, aussi bien que la 
plupart de ceux des provinces de Toulouse, de Narbonne, 
de Bordeaux, de Bourges et d'Arles, était aux mains des 
Réformés. Dans ces conjonctures, il ne pouvait s'y présenter 
sans danger pour sa vie. Il omit donc la visite des très 
nombreuses maisons du midi de la France, que l'hérésie et 
les guerres rendaient impraticable, et se dirigea sur Lyon, 
où il arriva le 3 août. Ses gens l'y attendaient avec ses 
bagages ; ils étaient venus à la suite du cardinal de Florence, 
légat du Pape près le roi Henri IV. 

Mais de nouvelles épreuves l'attendaient. Se rendant à 
Dijon par la Saône, il mit trois jours pour aborder à Châlon, 
et peu s'en fallut qu'il ne périt de faim sur son bateau : les 
gens de guerre avaient si bien dévasté les bords de la 
Saône, qu'ayant négligé de se munir de vivres à Lyon, les 
passagers n'en purent trouver sur la route. Heureusement 
la Providence vint à leur secours, en leur envoyant une 
assez grande quantité de poissons, qui furent jetés sur le 
pont par un coup de vent, pendant la nuit. Trois jours 
encore, et Melchior arrivait à Dijon, traîné dans un chariot. 



DB FRÂRB MBLCHIOR DB LA TALLiS 26^ 

Là, nouveau danger : la peste, qui commençait à sévir dans 
la région, avait envahi Thôpitalr De plus, frère Pierre 
Tarlot, qui avait la rectorie de Dijon depuis le mois de 
janvier de la même année^ avait demandé son institution à 
Tautorité séculière, contre les droits du grand maître. La 
situation était critique et la tâche du visiteur épineuse et 
délicate. Déposer Tintrus, c'était se heurter à l'adminis- 
tration de la ville et au parlement. D'autre part, pénétrer 
dans Thôpital, sans avoir sondé les dispositions du recteur, 
c'était compromettre le succès de sa mission. Frère Tarlot, 
heureusement, mit lui-même im terme à la perplexité du 
visiteur ; à peine eut-il appris son arrivée, qu'il se rendit 
au devant de lui, accompagné d'im frère, afin de lui souhaiter 
la bienvenue et de le conduire à l'hôpital du Saint-Esprit. 
Les difficultés étant ainsi aplanies, Frère de la Vallée 
commença aussitôt la visite canonique. Nous la rapporterons 
en entier, afin de donner au lecteur une idée complète de 
ce qu'était une opération de ce genre au moyen-âge. 

Le visiteur commença par se rendre à la chapelle, pour 
mettre sa mission sous la protection de l'Esprit-Saint ; puis 
il se rendit au chapitre, où l'attendaient deux frères prêtres, 
trois jeunes novices et cinq sœurs, qui composaient alors le 
personnel de l'hôpital. Après une exhortation du visiteur 
sur les quatre vœux et les obligations des hospitaliers, un 
notaire, qu'il avait eu soin d'appeler, donna lecture de la 
commission du grand maître et du bref pontifical, que 
tous reconnurent valables et authentiques. Ces préliminaires 
achevés, la visite commença. Le visiteur et les frères, revê- 
tus du surplis, de l'étole et du capuce, à la manière des 
docteurs, puis les sœurs, portant des chapes suivant la 
coutume du pays, se rendirent processionnellement à la 
chapelle, précédés de la croix et de deux acolythes. Après 
le chant du Vent Creator j le visiteur fit ouvrir le Taber- 
nacle et le trouva en état assez décent. Il passa ensuite en 
revue chacun des autels, ainsi que les fonts du baptême, 



266 LA ymsTE 

dictant au notaire ses observations. Pois il p arcumut ThA» 
pital nouveau, qu'il troui^ assez beau et ël^^ant ; après quoi 
il fit la visite de l'ancien. Comme le magistrat de la ville 
s'était arrogé le droit d'administrer les revenus de l*hApital 
pour la plus grande partie, frère Meldiior ne voulut point 
imposer aux religieux de trop lourdes charges à cet égard; 
il les avertit seulement d'avoir le plus grand soin des mala- 
des pour le spirituel, comme aussi de Tadministratioii des 
sacrements et de l'office divin, ajoutant qu'ils répondraient 
devant Dieu du moindre manquement. 

Le lendemain, le pieux visiteur réunit les sceurs, avec le 
recteur et un frèreconventuel, etdansune longue et touchante 
instruction, il leur rappela leurs devoirs envers les malades 
et les enfants. Elles devaient, leur dit-il, recevoir lessacre« 
ments de Pénitence et d'Eucharistie chaque mois, suivant 
la règle de l'Ordre et les prescriptions du concile de 
Trente. Il enjoignit aussi au recteur de tenir la main à ce 
que les frères novices en fissent de même. « Ensuite, versant 
d'abondantes larmes, il leur parla du grand péril où étaient 
tombées les âmes et l'ordre entier^ par la n^ligence et 
l'incurie des aînés ; c'était là, hélas 1 ce qui avait causé la 
perte de presque tous les hôpitaux, tant en France qu'en 
Allemagne. » 

Le troisième jour, comme la peste menaçait d'envahir 
jusqu'à sa demeure, frère Melchior prit les dernières dis- 
positions, afin de hâter son départ. Il régla que les croix 
portées par les frères et les sœurs et qui étaient en drap 
d'argent, ne seraient qu'en toile blanche, suivant l'usage de 
Rome ; que l'office serait récité selon l'usage romain et le 
bréviaire réformé du Concile ; que pendant le repas de la 
communauté, on ferait une lecture de l'Ecriture sainte ou 
d'un livre spirituel. Enfin il fit remise à la maison des tributs 
ou responsions en retard et promit même pour l'avenir des 
faveurs du grand maître, en considération de ses charges 
et de sa pauvreté. Il fit aussi dresser l'inventaire des 



DE FRiRB MBLCHIOR DE VALLÉE 267 

meubles et ornemeats de la chapelle, qu*il trouva assez 
richement garnie ; quant à l'inventaire des revenus et biens 
de Thôpital, il n'en put obtenir qu'un aperçu sommaire, à 
cause de l'opposition des magistrats ; il lui parut que ces 
revenus pouvaient monter à 150 livres d'or, outre les 
grains et le vin, qui suffisaient à peine à la consommation 
courante. Ayant fait signer au concurrent de frère Tarlot, 
nommé par le Pape, une renonciation à son titre, moyen- 
nant im dédommagement convenable, il célébra une messe 
solennelle suivie de la procession , recommanda de nouveau 
aux frères et aux sœurs la charité, la concorde, le zèle de 
leur état et se remit en route (11 août). 

Il avait eu soin de faire rédiger par le notaire un acte 
authentique de toute sa visite ; cet acte, signé des parties 
et de plusieurs notables, qui avaient assisté à la visite, fut 
déposé aux archives de l'hôpital*. 

Les prieurés de Tonnerre, Bar-sur-Aube, Sainte-Sévère, 
« et d'autres encore qu'il ignorait, » se trouvaient dans ces 
régions; mais la peste, et plus encore, les bandes de soldats 
et de voleurs en rendaient la visite si périlleuse, qu'il dut 
passer outre sans les voir. La Franche-Comté lui était 
fermée aussi par la contagion et l'effervescence causée par 
la guerre entre cette province et la Lorraine. Le temps 
n'était vraiment pas favorable à une mission comme 
celle de Melchior de la Vallée. Sans se décourager, il se 
promit de revenir sur ses pas plus tard, et s'arrêtant à 
peine à Neuf château, en Lorraine, il arriva à Toul, « son 
pays natal, » le 15 août, fête de l'Assomption. Les religieux 
le reçurent avec joie, et une bonne partie des habitants 
vinrent lui souhaiter la bienvenue. Sa première visite fut 
pour l'évêque de la ville, auquel il exposa le but de son 
voyage. Les jours suivants furent consacrés à la visite, et 



' Ffère Qteelet T» iaaér^dans «on ouvrage. 



366 LA 

vraiment lliôpital avait grand besoin de réfiofsie. Soo 
personnel se composait de six religieux, qni firent de gnn* 
des plaintes de leur prienr, firère Désiri des Bceofii ; 
ces plaintes étaient du reste iqqpuyées par Tèvèque 
et par toute la ville, et à bon droit. Rien n*étalt en oidre 
dans la chapelle : les calices rompus, les ciboires rongésde 
rouille, les ornements en lambeaux, relise toute noircie 
parla fumée, six belles dodies muettes faute de cnides, tel 
était le tableau lamentable qui s'offirit aux yeux du vis i t eur ^ 
Dans l*hôpital, quatorze enfants, sous la garde d*une 
femme à gages, avaient à peine de quoi se couvrir ; son 
premier soin fut de leur distribuer des vêtements et de 
renouveler les draps et les couvertures des lits. Il fit en- 
suite décorer à ses frais la chapelle et la pourvut de 
nouveaux ornements. 

Mais le plus difficile de sa tAche n^était pas aooompli.Un 
jour qu'il se disposait à se rendre à Tinvitadon de Tabbé 
d'un monastère du voisinage, il fut abordé par le recteur, 
suivi de témoins et d^un notaire, qui lui donna lecture 
d*un long factum de protestation contre la visite, comme 
faite sans pouvoirs et nulle par conséquent. Le visiteur 
se contenta de mettre en pièces la copie qui lui était pré- 
sentée et de réprimander le notaire, pour s'être prêté 
à une procédure contre un visiteur apostolique, dont les 
jugements sont sans appel. Néanmoins, plus inquiet qu'il 
ne voulait le paraître, il résolut d'attendre, pour terminer 
la réforme de cette maison, son retour d'Allemagne, 
espérant que le temps amènerait une détente dans les 
esprits . Mais avant son départ, il pria l'évêque de veiller 
pendant son absence au bon ordre de ThApital et lui 
donna plein pouvoir de prendre en son nom toutes les 
mesures nécessaires, et même de ne point reculer devant 
l'incarcération des mutins. La précaution était bonne : quel- 
ques jours à peine s'étaient écoulés, que déjà les religieux 
se soulevaient de nouveau contre leur prieur, etque l'évêque, 



DE FRiRB MELCHIOR DE LA VALLiB 269 

le jugeant incapable de rester plus longtemps à la tète de la 
maison, se voyait obligé de le mettre au secret. 

Ayant donc quitté Toul le 1 7 septembre, accompagné 
d'un religieux et d'un serviteur, frère Melchior arriva à 
Strasbourg, puis le 20 à Steffansfeld. Cet hôpitaf, assez 
considérable, était situé entre Strasbourg et Haguenau, 
dans une plaine entourée partout d'épaisses forêts. L'hérésie 
y avait exercé ses ravages, et le plus grand nombre des habi- 
tants s'étaientlaissés séduire. Cependant l'hôpital subsistait 
toujours et se trouvait même dans ime assez bonne situation. 
Son recteur, frère Henri Groscopff, reçut le visiteur avec 
empressement. La visite s'accomplit comme à Dijon ; les 
exhortations pressantes de frère Melchior firent passer dans 
le cœur du recteur et des quatre frères conventuels le zèle 
dont il était dévoré. Il entra dans de minutieux détails sur 
l'office, le chant, le calendrier, la parfaite exécution des 
fondations de messes et d'anniversaires, qu'il offrit de faire 
réduire par le Pape, suivant les décrets du concile de 
Trente, au cas où le personnel de la maison serait insuffisant 
pour en supporter la charge. L'hôpital était occupé par 
quatorze enfants au berceau et cinq jeunes filles, employées 
aux soins de la maison et des enfants, sous la conduite 
d'une femme âgée et discrète. Le visiteur recommanda 
qu'on leur Ht apprendre un métier qui leur permit de 
gagner leur vie plus tard, sans péril pour leur foi et leurs 
mœurs. Il chargea l'un des frères de leur expliquer la 
doctrine chrétienne; de plus, tous les dimanches, à la 
grand'messe, devait avoir lieu une instruction, destinée à 
prémunir les catholiques contre l'hérésie et à ramener les 
hérétiques secrets ou déclarés, reçus à l'hôpital ; car tous 
les hôtes devaient être contraints par le prieur d'assister 
aux offices du dimanche. Le revenu total de la maison se 
montait à quatre mille florins Rhénans de deux au ducat 
d'or de la Chambre, et à 579 quartaux environ de froment; 
le vin suffisait à peine au quart de la consommation. Les 



IfO LA Tlfirt 

dépenses allaient, dans les années ordinaires, à trois mille 
florins ; mais les malheurs de l'époque les avaient fait 
augmenter d'une manière considérable, malgré la grrande 
économie du recteur. Les bâtiments étaient assez somp^ 
tueuiL, et de très belles dépendances existaient en plusieurs 
lieux, notamment à Strasbourg. En les visitant, Mèlchior 
voulut aller donner lui-même quelques encouragements aux 
religieuses de deux couvents, restés seuls catholiques au 
milieu d'une population entièrement luthérienne. Depuis 
longftemps les prêtres n'osaient plus s'aventurera Stras^ 
bourg en costume ecclésiastique; cependant son audace 
n'eut pas de suites fâcheuses. Au bout de six semaines d'un 
séjour utilement employé à faire pénétrer dans toute 
l'économie de la maison dé Steffansfeld, par son exemple 
aussi bien que par sa parole, la régularité et la ferveur 
d'un zèle renouvelé, notre visiteur reprit sa route, le 3 
novembre; Cette fois, il se fit accompagner d'une suite plus 
nombreuse et plus imposante, dans laquelle se trouvaient le 
prieur de Steffansfeld et deux notaires, dont l'un devait 
servir d'interprète ; ces personnages ne le quittèrent plus, 
tant que dura son séjour en Allemagne. La première mai* 
son du Saint-Esprit qu'ils rencontrèrent, trois jours après 
le passage du Rhin, fut celle de Wimpfen, ville impériale 
appartenant au diocèse de Worms. Les habitants étaient à 
peu près tous luthériens; néanmoins la présence du visiteur 
et de sa suite fit sensation. A son grand étonnement, le 
syndic, accompagné des douze prindpaux notables, vint, 
au milieu de son repas, le complimenter et lui offrir le vin 
d'honneur, comme à un personnage important. 

L'hôpital avait été autrefois conventuel, et les bâtiments 
en étaient beaux et'commodes ; mais la ville s'était emparée 
des' salles de malades et de la plupart des revenus ; elle 
aurait même tout pris sans l'intervention du prieur de 
Steffansfeld, qui était chargé du service religieux, deimis 
que la modicité des ressources ne permettait plus d'y 



DE FRiRB MELCHIOR DE LA VALLÉE 27I 

entretenir un personnel suffisant. Le visiteur régla que le 
service des fondations se ferait à Steffansfeld, puisque cette 
maison jouissait des derniers revenus ; il chargea aussi le 
prieur de procurer un frère prêtre, lorsque des malades 
catholiques s'y présenteraient; car il n'y laissait qu'un 
gardien. 

Il s'agissait ensuite de traverser la Souabe entière, du 
nord au midi ,afin de visiter la maison de Memmingen. Il 
fallut huit jours à nos intrépides voyageurs pour faire ce 
long trajet, a à travers d'immenses forêts entrecoupées d'un 
nombre infini de rivières. » Par mesure de prudence, en un 
pays fort hostile au papisme^ le visiteur avait consenti à 
dissimuler sa double croix, sur les instances de ses com- 
pagnons de route. Après avoir traversé Heilbronn, Essling, 
Elchingen et Ulm, la petite caravane faisait, le 20 novem- 
bre, son entrée dans lavilleimpérialede Memmingen. Là, 
comme à Wimpfen^ la municipalité avait fait main-basse 
sur l'administration des revenus, dont elle n'avait laissé 
qu'une faible partie pour l'entretien du personnel. Frère 
Melchior fut reçu par le recteur, « vieillard de très haute 
taille et d'aspect fort rébarbatif, mas imposant et digne ; » 
il se nommait frère Balthazar Meyer. Après avoir accueilli 
ses hôtes avec cordialité, il leur fit les honneurs de l'hôpi- 
tal ; ils y trouvèrent une centaine de malades alités ou 
d'infirmes. Dans une autre salle bien chauffée, une cin- 
quantaine d'enfants s'appliquaient à des études et à des 
occupations diverses, en bon ordre, les garçons séparés des 
filles, sous la surveillance de maîtres et de maîtresses. 

Cependant le visiteur ne songeait pas sans inquiétude à 
la façon dont les autorités, entièrement luthériennes, 
accueilleraient sa mission. Là encore, la Providence vint le 
tirer d'embarras ; son arrivée avait fait sensation : le syndic 
et son conseil se crurent, de même qu'auparavant ceux de 
Wimpfen, obligés de lui souhaiter la bienvenue, en lui 
ofirant un vin d'honneur. Les difficultés devaient lut vmk 



Xl^ LA TISITB 

du recteur lui-même. Deux frères seulement ae tronvaiént 
alors à Memmingen ; lés autres étaient occupés dans le 
voisinage. Frère Melchior demanda qu*on les fit assembler 
tous dans la maison conventuelle ; le vieillard répoildit 
d'abord évasivement ; puis peu après, il fit soudain au visi- 
teur sommation d'avoir à quitter les lieux le plus prompte- 
ment possible, dans la crainte sans doute des dépenses 
occasioniaées par un séjour prolongé, ou par ipëur d'avoir à 
se plier, à son âge, aux exigences de prescriptions plus 
sévères. La ferme attitude de Melchior eut raison des 
mauvaises dispositions du recteur, et la visite put s'ac- 
complir à la manière accoutumée. Elle s'ouvrit par une 
messe solennelle du Saint-Esprit, accompagnée de nombreux 
instruments de musique, dont tous les frères jouaient avec 
une grande habileté. L'église était fort riche en ornements 
et en vases sacrés : l'hôpital de Rome même n'en possédait 
pas de comparables. La maison était tenue sur un pied de 
discipline très rigide ; le recteur exigeait de son nombreux 
personnel l'obéissance la plus absolue ; le silence était 
continuel ; les repas, d'une frugalité voisine de la parci- 
monie ; défense était faite de sortir sans l'autorisation 
expresse du prieur ; le premier à l'office du jour et de la 
nuit, il exigeait de tous la plus grande ponctualité. Du 
reste, très attentif à procurer à ses religieux le bienfait 
de solides études, il les envoyait étudier chez les Jésuites, 
et leur faisait en outre donner une forte culture musicale, 
entretenue par des exercices quotidiens. La pauvreté la 
plus stricte régnait chez les religieux ; ils ne possédaient 
que ce que le recteur jugeait bon de leur accorder : aussi 
le disait-on très riche. 

Il avait fait nommer, en cour de Rome, comme son 
coadjuteur avec succession, un de ses parents, religieux de 
la maison, contre l'avis unanime de son chapitre. Devant 
les réclamations des frères, le visiteur jugea bon d'user de 
ses pouvoirs ; il fit élire un autre coadjutQur, qu'il intronisa 



DE PRÈRB MELCHIOR DE LA VALLÉE IJJ 

solennellement, avec Taàsistance du prieur de Stefifansfeld. 
Enfin, ayant mené à bien ces négociations épineuses et fait 
les recommandations utiles, il prit congé des religieux et 
du terrible recteur. En quittant le couvent, remarque-t-il, 
il sembla à ses compagnons qu ils sortaient d'une prison, tant 
était grande la contrainte respectueuse imposée par le 
visage ol3rmpien de frère Balthazar Meyer. 

Frère Melchior aurait bien désiré visiter toutes les 
maisons existant en Allemagne, mais il dut se résigner à 
rentrer en France, sur Tavis de frère Henri Groscopff que 
toutes étaient tombées au pouvoir des hérétiques, soit par la 
force, soit à la mort des prieurs, que Tincurie des visiteurs 
nommés pour TAUemagne avait laissés sans rempla- 
çants. Laissant donc la visite des hôpitaux de Neumarkt, de 
Pfortzheim,deG.romingen, de Berne en Suisse, de Worms, 
et d'autres plus éloignés, il reprit le chemin de StefiFans- 
feldt. Là, des lettres l'attendaient, qui lui apportaient de 
mauvaises nouvelles de Toul . Les frères s'étaient révoltés 
de nouveau à son départ, comme nous l'avons dit, et la 
maison menaçait ruine, malgré les efforts de l'évèque. Sa 
présence était urgente, et il y partit en toute hâte. Arrivé à 
Toul, il prit en main le gouvernement de la maison. 
Plusieurs profitaient de la faiblesse et de l'incapacité du 
recteur pour mettre le désordre partout ; il se vit contraint 
de les châtier avec rigueur : le recteur fut déposé et le 
grand maître ne tarda pas à lui donner un successeur. Un 
long séjour fut nécessaire au frère de la Vallée pour rétablir 
l'ordre et la discipline dans cette maison, qu'il aimait 
comme le berceau de sa vocation. Ayant achevé ce labo- 
rieux ouvrage à force de prudence et 4e vigilante fermeté, 
il alla passer trois jours dans la ville de Vaucouleurs, qu'il 
n'avait fait qu'entrevoir, lors de son premier passage. La 
maison était aux trois quarts ruinée par les désastres des 
guerres, et l'hospitalité était des plus restreintes, par suite 
de l'état des revenus, qui suffisaient à ^eine à l'entretien 
du prieur et d'un coadjuteur, son neveu. 

18 



274 ^ VISITE 

L'état de la province avait obligé frère Melchior, Tannée 
précédente, à remettre la visite de Besançon ; cet état de 
troubles ne s'étant pas sensiblement modifié, il lui fallut 
malgré tout procéder à sa mission. Mais la haine entre 
Bourguignons et Lorrains n'était pas le seul, ni même le 
plus grand obstacle. On se souvient que frère Melchior 
avait été, douze ans auparavant, nommé par le grand 
maître, commandeur de Besançon, tandis que la commune 
installait frère Jean Buffet, religieux de Thôpital. Les 
débats avaient été fort mouvementés. Melchior de la Vallée, 
qui n'osait se présenter en personne, délégua, pour pren- 
dre possession en son nom, François de Chassagne, 
chanoine du grand chapitre de Besançon ; mais toutes ses 
tentatives échouèrent. Jean Buffet fut alors cité en cour de 
Rome; la commune lui ayant intimé Tordre de ne pas 
comparaître, il encourut, par contumace, l'excommuni- 
cation, et la sentence fut placardée dans les lieux publics 
de Besançon. François de Chassagne, auteur de cette in- 
fraction aux privilèges de la commune, fut sommé de venir 
répondre de sa conduite devant le conseil de ville; mais 
le chapitre prit fait et cause pour son membre, et lui 
ordonna de faire défaut, comme exempt de toute juridic- 
tion laïque. Il n'en fut pas moins condamné, ainsi que le 
frère Melchior, à une forte amende. Alors le chapitre^ 
se considérant comme lésé dans l'un de ses membres, 
porta plainte par devant le roi d'Espagne ; la commune 
riposta par un appel à la cour d'Empire *. La médiation du 
parlement fut impuissante ; il ne fallut rien moins^ pour 
apaiser ce conflit de juridictions, que l'intervention du 
fameux Don Juan d'Autriche, qui députa, à cet effet, au 
nom de l'empereur, François de Vergy, gouverneur et 
capitaine général du comté de Bourgogne, le président du 
parlement de Dole et deux autres personnages considérables. 



* Besançon était alors ville impériale. 



DE FRÈRE MBLCHIOR DE LA VALLÉE 275 

Une ambassade aussi solennelle ne pouvait manquer 
d'aboutir ; le chanoine fut amnistié « en mémoire du glo- 
rieux Charles-Quint et par déférence pour la maison 
d'Autriche », à condition d'obtenir la levée de l'excommu- 
nication pour Jean BuflFet ; ce dernier abdiqua la charge 
et la remit à François de Chassagne, auquel frère Melchior 
avait auparavant cédé ses droits. Le traité fut conclu le 
2 juillet 1578 et annoncé par une volée de la cloche Porte- 
joye^ suivie d'un Te Deum, Le soir, pendant un brillant 
souper que la ville offrit aux membres de l'ambassade, au 
cardinal-archevêque et à quelques-uns des chanoines, les 
trompettes et l'artillerie municipales se firent plusieurs 
fois entendre. Les frais de ce long procès furent partagés 
entre l'hôpital et la commune ; cependant celle-ci ne put 
se défendre de la satisfaction toute illusoire de condamner 
le premier auteur de la querelle, frère Melchior, au rem- 
boursement total de la dépense ^ 

On comprend qu'après un tel éclat, le visiteur était assez 
peu soucieux de se présenter dans la ville. Arrivé à quelque 
distance, il envoya prier le conseil de lui accorder un 
sauf-conduit pour accomplir sa mission. Sademande souleva 
un orage ; quelques-uns ne parlaient de rien moins que de 
le retenir prisonnierjusqu'à libération complète de l'amende 
à laquelle il avait été condamné. Devant une pareille obs- 
tination, le visiteur jugea prudent de ne point franchir les 
murs de la ville et se contenta d'appeler les frères et le 
commandeur dans leur résidence d'Ecole, située dans le 
voisinage. La messe et le Veni Creator terminés, il 
s'enquit de l'état de la maison ; on lui répondit que la ville 
s'était emparée, depuis près de trente ans, de la majeure 
partie des revenus et avait réduit les religieux au soin des 
enfants abandonnés et à la réfection des voyageurs ; qu'il 



* Pour tout ce débat, voy. A. CastaOi Notice, II, pp. 179-180; — Ratio pisi" 
iationis^ sur la fin. 



2>;6 LA VISITE 

n'y avait d'ailleurs pas à songer à rétablir les choses d^iis 
leur ancien état ; quant à la discipline et à la régularité des 
religieux, elle était satisfaisante; la maison était plus pros- 
père au spirituel qu'au temporel. Avant le départ du 
visiteur, « les religieux revinrent à Ecole, avec du vin et 
des provisions de bouche, annonçant qu'ils voulaient 
prendre leur repas avec lui ; ce qui fut accepté avec joie. 
Tout se passa, suivant les usages du pajrs, gaiement et 
décemment. Deux religieux diacres, âgés d'environ trente 
ans, servaient à table. Sur IWdre que leur donna le visi- 
teur d'y prendre place, ils répondirent que cela ne leur 
était pas permis, et de plus, que l'usage du vin ne leur 
ayant pas encore été accordé par le recteur, ils ne buvaient 
que de la piquette, de la bière ou de lacervoise. Frère 
Melchior, admirant que des hommes de cet âge et de 
cette qualité se soumissent à un semblable régime, pria 
le maître de leur accorder, :pour cette fois et en consi- 
dération de sa présence, à chacun un setier de vin. » 

Le dernier acte de frère Melchior fut d'instituer frère 
Henri Treffard, le recteur de Besançon, vicaire général 
du grand maître dans les Gaules, les Bourgognes et la 
Lorraine; le grand maître confirma ensuite cette nomina- 
tion en y ajoutant des prérogatives et une juridiction très 
étendue. « C'était à bon droit, dit-il, car ce recteur est le 
plus puissant de tous en ces contrées, par le nombre de 
ses prieurés et dépendances; l'hôpital de Toul lui-même 
lui est soumis, ainsi qu'il nous l'a prouvé par des docu- 
iiients authentiques. » 

Des nombreux hôpitaux situés en Franche-Comté, le 
visiteur, par suite de l'état de la province, ne put voir que 
celui de Gray, situé sur sa route. Il reçut là, des magistrats 
et de beaucoup d'habitants, une foule de plaintes sur la 
mauvaise administration du recteur, Martin Jobelot ; mais 
le temps ne. lui permît pas de lui faire son procès ; il en 
chargea lé commandeur dé Besançon, supérieur de l'in- 



DE FRÈRE MBLCHIOR DE LA VALLÉE 2/7 

culpé ; il àe contenta d'exhorter instamment ce dernier à 
changer de vie et à prendre plus de soin du bien des 
pauvres, dont il répondrait devant Dieu au jour du juge- 
ment. Tout) dans cette ruine, n'était cependant pas imputa- 
ble au recteur; car peu auparavant, les magistrats l'avaient 
obligé à brûler ou à jeter à la Saône les lits, draps, 
couvertures et tout ce qui avait servi aux pestiférés, ainsi 
que l'attestèrent des témoins dignes de foi. 

Continuant sa route, le visiteur arriva à Dijon, où le 
grand maître lui avait écrit de passer de nouveau, afin de 
s'assurer si certains articles de la réforme, auxquels il 
tenait beaucoup, avaient été insérés dans son acte de visite. 
Il ne put entrer dans l'hôpital : la peste était toujours 
maîtresse de la ville ; les portes de l'hôpital avaient été 
fermées et deux sœurs y soignaient les pestiférés ; déjà 
quatre des religieux avaient payé leur dévouement de leur 
vie. Le recteur demeurait en dehors de la maison avec trois 
sœurs. Il eût été souverainement imprudent de s'attarder 
à Dijon ; frère Melchior se mit en devoir de terminer au 
plutôt sa mission, en retournant à Toul. 

Une aventure qui aurait pu avoir des suites graves, lui 
advint à trois lieues de cette ville : deux soldats Bourgui- 
gnons, du parti d'Espagne, le dévalisèrent, lui et son 
serviteur, et lui enlevèrent son cheval. Fort heureusement 
le gros de la troupe les suivait de près ; l'officier, qui 
était italien, après un long interrogatoire, lui fit rendre 
ses bagages et le laissa aller ; cette fois encore il en fut 
quitte pour la peur ; mais il eut soin de prendre, pour se 
rendre à Neufchâteau, une route moins fréquentée. Frère 
Philippe Luzurier était prieur de l'hôpital de cette ville et 
le gouvernait avec un grand talent; il fallait toute son 
industrie pour le relever de ses ruines. Afin de ne point 
augmenter ses dépenses, le visiteur se contenta d'une visite 
sommaire et laissa au commandeur de Besançon le soin de 
parfaire la réforme. Comme les prieurs de toutes les 



2y8 tA Tum 

maisons soumises à Besançon se rendaient dans cette ville 
tous les ans au chapitre général de la Pentecôte, frère 
Melchior avait chargé le commandeur de donner lecture 
de son acte de visite et d'en faire prendre copie à tous ses 
subordonnés, en tenant la main à son exécution dans toute 
la province. Enfin le visiteur rentra à Toul la veille de la 
Toussaint 1597. Il recommanda de nouveau sa chère mai- 
son aux bons offices de l'évêque et des autorités civiles, et 
le 5 novembre, « il dit, non sans un serrement de cœur, un 
suprême adieu aux pénates paternels 1 et prit la route 
d'Italie. Son voyage avait duré un an et quatre mois. 

Accomplie au milieu de périls de toutes sortes, que la 
guerre ou la peste, et souvent les deux fléaux à la fois, 
semaient sous ses pas, la mission de frère Melchior de la 
Vallée ne fut pas aussi complète qu'il l'eût désiré. Néan- 
moins elle contribua certainement, pour une bonne part, 
à conserver, dans les maisons qu'il vjsita, l'esprit de l'Ordre 
et la discipline hospitalière, que nous verrons fleurir jus- 
qu'à la fin dans les Bourgognes et la Lorraine. 




CHAPITRE VIII 



L'HOPITAL DE SAINTE-MARIE IN SAXIA 



AU XVII* SIÈCLE 




PRÈS rhorrible catastrophe du sac de Rome, en 1 528, 
le chef de l'Ordre, la maison romaine, avait été 
longtemps à recouvrer son ancienne splendeur. 
Sur la fin du siècle, néanmoins, elle y était parvenue, et 
depuis, nous n'aurons plus à enregistrer dans son histoire 
d'atteintes graves portées à sa prospérité. Du reste, les 
papes, qui avaient fini par se réserver absolument la nomi- 
nation des grands maîtres, avaient le plus grand intérêt à 
choisir pour cette importante fonction des personnages 
recommandables par leurs qualités et leur entente de l'ad- 
ministration. 

Nous avons parlé déjà de Saluste Taurusi (i 594-1600), 
l'ami de Bellarmin et de Baronius, qui s'efforça d'appliquer 
à l'Ordre les réformes du Concile de Trente, au moyen de 
la visite générale qu'il en fit faire, et qui mourut archevê- 
que de Pise. Après lui, vint le célèbre médecin ytt/^5 de 
Angelis^ qui conserva la maîtrise pendant dix-sept mois 
seulement (1600-1602). Jérôme Agucchio ne passa pas 
plus longtemps à Sainte-Marie ; nommé cardinal, il quitta 
rOrdre en 1604. Le magistère â! Octave^ de l'illustre 



28o L*HOnTAL DE SÂIHTE-IIARIE iNSÂXU 

maison ^Este^ fut plus court encore ; mais il fut marqué 
par une création d'une grande importance ; nous voulons 
parler de la banque du Saint-Esprit ou Banco San Spirito ; 
tout en faisant à Tépargne les conditions les plus avanta- 
geuses, elle devint bientôt pour Thôpital une ressource 
très précieuse '. Octave d'Esté mourut jeune encore, en 
1605. Son successeur, Pierre CamporeuSj après avoir 
déployé pendant douze anis un grand zèle dans ses hautes 
fonctions, fut appelé par Paul V à des fonctions plus 
hautes encore, au sein du Sacré Collège (làij). Evangelista 
Tornioli passa de Tordre des Olivétains dans celui du 
Saint-Esprit, qui le conserva quatre années seulement. De 
même, Balthajar Bologneti échangea le généralat des 
Servi tes contre celui de notre ordre, en 1621 ; sa science 
théologique, son talent d'orateur, unis à une grande sain- 
teté, le firent nommer à Tévèché de Nicastro en Calabre 
(1624). Raphaël Invitiati mourut Tannée même de son 
élévation; Joseph Anselmi (1624-1630) avait fourni une 
carrière brillante dans les congrégations pontificales; il 
était enflammé d'un zèle très louable pour la réforme de sa 
nouvelle famille ; mais, remarque Saulnier, comme ce zèle 
le portait à adopter une discipline toute nouvelle, au lieu 
de restaurer l'ancienne, il échoua dans sa tentative. Le 
court magistère de César Racagni fut fécond cependant, 
car dans ses deux ans il consacra douze sœurs, donna la 
croix à trente-deux frères dans sa maison et à douze au 
dehors ; c'est là un exemple de rare fécondité pour la mai- 



* c Cette institution fut créée, dit le cardinal Morichini, afin que les veuves, 
les orphelins et les établissements charitables pussent y déposer leur argent 
en toute sûreté, et tous les biens de 1* hôpital furent hypothéqués en garantie 
de ces dépôts. Cette banque prit un rapide accroissement, d'autant plus que 
ses billets, délivrés en échange des sommes déposées, avaient cours comme 
des espèces sonnantes. > On prétend, dit le même auteur, que cette institu- 
tion donna à Law Tidée de sa trop fameuse banque de crédit. ^Voy. Léon 
Lallemand, Histoire de la charité à Rome, p. 241). 

Le Banco San Spirito perdit peu à peu de son importance à partir de 1870 ; 
il est aujourd'hui en faillite, grAce aux spoliations subies par Thôpital du 
Saint-Esprit. ^ 



JlV XYII* StiCLB 281 

son romaine. Pierre Saulnier donne de grands éloges à 
Etienne VaiuSj évèqnedeCjrène^inpartibuSjqmdeson 
temps même occupait le généralàt. Ces éloges étaient 
mérités par une administration pleine de sagesse et des 
restaurations aussi nombreuses qu'importantes faites à 
Sainte-Marie. C'est alors que la sacristie fut ornée des 
belles boiseries et des peintures qui existent encore ; à la 
même époque les lits de bois de l'hôpital furent remplacés 
par des lits de fer, pour une plus grande propreté. En 
outre, le grand maître restaura tous les châteaux et domai- 
nes des environs de Rome, et réussit encore à dégrever sa 
maison déplus de 70.000 livres de dettes. Jérôme Lanuvii\ 
qui lui succéda en 1650, était protonotaire apostolique ; 
Innocent X lui donna l'habit le jour même de sa nomina- 
tion ; son grand âge lui fit résigner sa charge au bout de 
trois ans. Sous Charles Antoine Dondini (1654-1660), le 
cardinal Corradus, visiteur apostolique, fit plusieurs décrets 
pour le bon régime de la maison. Virgile Spada 
(1660- 166 2) appartint d'abord à la congrégation de l'Ora- 
toire. Il composa un ouvrage où il énumérait tous les 
monastères, hôpitaux et prieurés d'Italie et du monde 
entier ; il y avait joint l'énumération des privilèges de 
rOrdre et de la Confrérie. Cette œuvre intéressante n'a 
pas été imprimée et le manuscrit en est perdu. Il prit aussi 
une décision importante pour la maison de Rome : ce fut 
de supprimer les sœurs cloîtrées, probablement par mesure 
d'économie, car elles pouvaient être suppléées par les 
jeunes filles qui demeuraient dans la maison. 

A partir de cette époque, la vie des grands maîtres 
n'offre que peu d'intérêt pour l'Ordre ; ce sont des grands 
personnages de la cour pontificale qui, après quelques 
années de fonction, reçoivent pour la plupart la pourpre 
cardinalice. Leur administration tend de plus en plus, 
du reste, à se renfermer dans l'Italie, par suite de la 
perte de§ maison? des pays protestants et aussi dés ea- ' 



282 L'HOPITAL DE SAINTE-MARIE IN SAXIÀ 

traves apportées au fonctionnement de TOrdre en France. 
Nous renvoyons, pour Ténumération des derniers gprands 
maîtres, à la liste placée à la fin du volume. 

Nous n'avons pas encore donné au lecteur une descrip- 
tion d'ensemble de Thôpital Sainte-Marie. C*est ici le 
lieu de combler cette lacune. Nous allons donc, après 
avoir décrit sommairement les édifices, pénétrer dans 
réconomie des services hospitaliers de la grande institu- 
tion. Aussi bien, pour Tétude de cette organisation 
longtemps sans rivale au monde, nous avons un guide 
excellent dans l'ouvrage de frère Pierre Saulnier, qui 
vécut lui-même, au XVII« siècle, dans Thôpital romain. 

Marchionne d'Arezzo * avait été Tarchitecte choisi par 
Innocent III pour élever l'hôpital du Saint-Esprit. Les 
bâtiments, par leur grandeur, répondaient à la magnifi- 
cence de la fondation pontificale ; mais il ne nous est rien 
demeuré de l'établissement primitif. Sixte IV, le principal 
restaurateur de l'Ordre et de la maison romaine, fit renou- 
veler, en 147 1, par Baccio Pintelli, la majeure partie des 
bâtiments. Celui-ci construisit la grande salle des malades, 
longue de 126 mètres*, qui pouvait recevoir de chaque côté 
une triple rangée de lits. Sur le côté de cette façade qui 
longe le Borgo San Spirito, était adossé un portique 
en colonnade d'une belle ordonnance, qui plus tard fut 
muré et l'est encore actuellement ; on y plaçait des réchauds 
à l'usage des pauvres, auxquels on servait les restes des 
repas. Les murs intérieurs de la grande salle furent alors 
ornés de peintures représentant les principales actions du 
pontife fondateur; et sous la coupole centrale, André 



* Voy. pour la description architecturale de Phôpital de Sainte-Marie : P. 
LetarouiIly,Ei//îc« de Rome modcrnet j vol. in-f«, Paris, i8$o, pi 256-261; — 
L. Lallcmand, Histoire de la charité à Rome, 1878, p. 228 et sv. ; — Germer- 
Durand, Notice sur plusieurs sceaux relatifs à Varchihàpiial du Saint-Esprit à 
Rome, etc. 

' Voir la PI. I. en tète du volume. 



AU XVII* BlkCLB 



28ï 



Palladio, à l'époque où il mesurait k Rome les monuments 
antiques, érigea un autel élégant; c'est l'unique œuvre de' 
ce maître qui subsiste à Rome. La grande salle est encore 
aujourd'hui à peu près dans son état primitif. 








iiB). 



Une autre salle de 33 mètres de longueur, placée à 
angle droit avec la première, remonte, ou peu s'en faut, à 
la même époque. Un double cloître lui est adossé. 

Baccio Pintelli fit aussi les plans de l'église, et le clocher' 
fut élevé sous Sixte IV, dont il porte les armes. Mais ces 
plans furent modifiés sous Paul III, par Antonio da 
Sangallo {1534-1550}, et la façade ne tut construite que 
sous le pontificat de Sixte V (1585-1590), sur les dessins 
d'Ottaviano Mascherino, Les peintures qui décorent l'inté- 
rieur de cet édifice sont des élèves de Michel-Ange. 



284 l'hôpital D&SAXNTB-MAIUE IN SAXIA 

c Au même architecte est également dû le palais réservé à 
Thabitation du grand maître, qui réunit la grande salle à 
Téglise. La cour intérieure est carrée et d^une architecture 
bien ordonnée ; les portiques du rez-de-chaussée et les 
galeries du premier étage y forment des promenoirs 
commodes, bien ouverts à Tair et à la lumière* De Tavis 
d'un juge éminent, l'ensemble de ces édifices anciens, et 
surtout la grande salle, avec sa porte d'entrée aux sculp- 
tures d'une extrême élégance, témoignent « de l'heureux 
épanouissement de Tart à cette époque du XV* siècle, où 
deux artistes, Baccio Pintelli et Julianoda Sangallo, se font 
remarquer par de si brillantes qualités'. » Les Papes 
faisaient bien voir, en confiant les restaurations de leur 
hôpital favori à deux des principaux architectes de Tâge 
d'or de la Renaissance italienne, en quelle estime ils tenaient 
Sainte-Marie in Saxia. 

« Au siècle dernier, sous Benoît XIV, le chiffre de la 
population, qui avait doublé, nécessita de nouveaux agran- 
dissements, et ce pieux pontife, étendant les bâtiments 
dans la direction du pont Saint-Ange, construisit, sur les 
dessins de Fuga, une nouvelle salle longue de 92 mètres ; 
elle reçut le nom d'aile neuve {Braccio nuovo) ■. » 
Benoit XIV enrichit l'hôpital d'un musée d*anatomie et 
d'un amphithéâtre ; Pie VII, continuant les agrandisse- 
ments, fit élever de l'autre côté du Borgo et en face de la 
grande salle Sixtine, un bâtiment comprenant deux im- 
menses salles superposées *. Enfin Pie IX fit faire, par un 
éminent architecte, M. Francesco Azuri, les modifications 
intérieures les plus importantes, afin de procurer à l'établis- 
sement tout le confortable moderne, sans toucher toutefois 
à tout ce qui pouvait s'y trouver d'intéressant au point de 
vue de l'art. 



' p. V.eXAToyxWXyj Edifices de Rome moderne, 

■ L. Lallemand, Histoire de la charité à Home, p. 229. — Voy. la Pi. I. 

'Ibid. - . . 



AU XVII* SIÈCLE 285 

Pour résumer cette description : au XVII* siècle, le 
palais des pauvres occupait, le long du Borgo^ dans le 
quartier de Rome qui a pris ce nom, une longueur de près 
de trois cents mètres. Ses bâtiments comprenaient Téglise, 
le palais du grand maître, deux salles immenses, le monas* 
tère des religieuses, entièrement séparé, les cloîtres des 
frères et des enfants abandonnés, les habitations des chi-* 
rûrgiens, domestiques et aides de toutes sortes ; puis des 
dépendances considérables, telles que pharmacies, écuries, 
basse-cour, moulin, lavoirs, celliers, granges, jardins bota- 
niques et potagers, et enfin le cimetière. 

Deux cent soixante-dix maisons appartenaient à rhôpital, 
dans l'intérieur de la ville. On a reproché, en ce siècle, 
aux administrateurs, de ne point retirer un revenu assez 
considérable de tant de locations; un auteurjudicieux répond 
que la première charité consiste moins à secourir les mal- 
heureux, qu'à les empêcher de tomber dans la misère par 
de trop grandes exigences. 

Les possessions de Tarchihôpital s'étendaient au loin 
dans la campagne romaine : des villes, des châteaux, des 
abbayes, de fort nombreux domaines et fermes lui appar- 
tenaient en toute justice et seigneurie. Malgré des ampu- 
tations trop souvent réitérées, faites par les Souverains 
Pontifes, ou dues à des aliénations malheureuses, ces biens 
étaient encore assez étendus pour former au siècle dernier 
trois centres administratifs ou châtellenies, défendues par 
des châteaux-forts et des tours, et administrées par des 
gouverneurs particuliers *. C'était à bon droit que notre 
hôpital était nommé « le plus grand seigneur de Rome. » 

Venons-en maintenant à l'organisation intérieure du 
vaste établissement % organisation qui ne le cédait en rien, 



• p. Saulnier, p. 129. 
: -^ Pour cette description, nous résumoDs à grands traks le chapitre XI de Pv 
Saulnier : AmplUudo Romai\œ d(mu$ et atçonomiaf pp* 1 15-191. Ne pouvant rap- 



286 l'hôpital de SiUNTB-MÀRIB IN SAXIA 

pour le fonctionnement régulier de ses innombrables 
louages, à ce que nos grands hospices montrent aujourd^ui 
de plus parfait. A la tète du personnel, aussi nombreux que 
bien ordonné, se trouvait le grand m^tre. De lui découlait 
toute autorité ; rien ne se faisait que par ses ordres. Il 
nommait les recteurs et les administrateurs des domaines ; 
mais dans les affaires importantes de son hôpital, aussi 
bien que s'il s'agissait des intérêts généraux de l'Ordre, il 
était tenu de prendre l'avis de son chapitre. En raison de 
sa haute dignité, ce prélat jouissait d'un train de maison 
spécial, composé d'un secrétaire, de chambriers, cocher, 
cuisinier et autres valets inférieurs. 

Pour soutenir le fardeau d'une administration si étendue 
et si complexe, le grand maître était aidé d'un vicaire ou 
procureur général, qui avait pouvoir de le suppléer en tout. 
Le vicaire était comme l'œil du grand maître, sans cesse 
ouvert sur tout ce qui pouvait porter atteinte à la discipline ; 
à lui étaient confiés la direction matérielle de la maison, 
l'approvisionnement des divers services et l'inspection des 
enfants et des jeunes filles. 

Au dessous de cette autorité générale, chaque section 
avait son préposé spécial : c'était d'abord le Prieur j chargé 
de tout le service spirituel. Il avait sous ses ordres les 
gardiens de l'église, les frères prêtres qui remplissaient 
les fonctions curiales pour les habitants du quartier, les 
maîtres de cérémonies, chantres, chapelains, aumôniers 
des sœurs et des malades, et les instituteurs des enfants. Le 
service divin était célébré avec une grande pompe ; deux 
chœurs de chants, formés de frères et d'enfants soutenus par 
des orgues et un orchestre, exécutaient les chants liturgi- 
ques et les motets des grands compositeurs. Six prêtres se 
partageaient le soin d'administrer les sacrements aux 



porter ici les détails aussi nombreux que dignes d'intérêt, dans lesquels est 
«ntré notre historien, nous nous contentons d*y renvoyer le lecteur. 



▲u xvn« SIÈCLE 287 

malades et d'assister les mourants ; deux avaient la direc- 
tion spirituelle du monastère des religieuses ; un autre, 
celle des jeunes garçons. Enfin, des curés et des chapelains 
desservaient à demeure toutes les dépendances de la 
campagne. 

Le service des malades était placé sous la direction d'un 
prieur et d'un sous-prieur qui veillaient sans cesse au bon 
ordre et à l'exécution des ordonnances médicales, à la 
nourriture et au transfert des malades dans les salles 
affectées aux diverses maladies. Huit médecins et quatre 
chirurgiens se partageaient le service médical du jour et de 
la . nuit ; l'un d'eux était chargé en outre d'un cours de 
médecine et d'anatomie à Tusage des jeunes gens de la 
maison, ainsi que de nombreux étudiants de la ville. 

Un pharmacien en chef, secondé par cinq élèves, pré- 
parait les remèdes ; vingt-quatre gardiens faisaient le 
service des malades, sous les ordres de six caporaux. En 
outre, un secrétaire général tenait registre des entrées et 
sorties, ainsi que des vêtements et objets appartenant aux 
pensionnaires. Le nombre des employés de l'hôpital 
dépassait quatre- vingt ; ce n'était pas trop pour un courant 
annuel de 9000 malades. 

Le service était si bien réglée il régnait un tel ordre dans 
l'hôpital, que les étrangers le visitaient comme une mer- 
veille. La grande salle était réservée aux victimes des 
fièvres paludéennes, toujours en grand nombre à Rome; 
les maladies contagieuses, celles qui réclamaient des soins 
plus spéciaux ou des opérations chirurgicales, étaient 
traitées dans des locaux particuliers. Enfin, par une atten* 
tion délicate de la charité, des appartements spéciauxétaient 
même réservés aux riches et aux nobles tombés dans le 
dénuement. Le luxe et l'abondance de leur vie passée 
rendait leur infortune plus cuisante, et l'on s'efforçait de 
la leur adoucir. Un legs avait même permis de les servir 
.dans une vaisselle d'argent* 



288 l'hôpital DB SklHTErUMM IN SAXIA 

m 

Trois corps de logis distincts étaient réservés aux nour- 
rices, aux jeunes garçons et aux jeunes filles. Les enfants 
déposés à rhôpital étaient extrêmement nombreux : tandis 
que, dans les siècles précédents, ils allaient à peine à trois 
ou quatre cents^ ils étaient montés, en 1648, à plus d^un 
millier. Il ne faudrait pas croire que tous ces enfants 
eussent été des fruits de la débauche : ces derniers étaient 
au contraire en nombre très restreint ; la plupart étaient 
déposés par leurs parents, que la pauvreté, la maladie ou 
les revers de fortune obligeaient à les abandonner. On 
savait que les enfants élevés à Sainte-Marie avaient un 
avenir assuré ; de plus, le droit public leur maintenait le 
titre et les effets de la légitimité. 

Il y avait, près de la porte d'entrée, une fenêtre armée 
de barreaux de fer, dont Técartement était mesuré pour 
permettre le passage d'un enfant de trois mois environ ; 
à l'intérieur était un tour, muni d'un petit matelas destiné 
à recevoir l'enfant. Au bruit fait par le tour, un serviteur 
accourait, s'enquérait, auprès du déposant, du nom de l'en- 
fant, demandait s'il était baptisé, s'il avait des marques 
auxquelles on pût le reconnaître, etc. Le déposant était 
libre de répondre à ces questions ; défense absolue était 
faite de le suivre et de s'enquérir de son identité : aussi la 
sécurité était-elle si grande, que les expositions se faisaient 
presque toutes en plein jour. 

L'enfant était porté par le gardien du tour à la directrice 
de la nourricerie, qui notait toutes les particularités relatives 
à l'exposition et le confiait à l'une des nourrices, en atten- 
dant qu'il fût emporté au dehors. Il y avait toujours à la 
maison, pour ces premiers soins, au moins vingt-quatre 
nourrices à demeure. Tous les quinze jours, les femmes de 
ià ville et de la campagne qui désiraient des nourrissons 
«'assemblaient à l'hôpital ; après examen et sur le certificat 
de leur curé, on leur confiait un enfant. Plus de quinze 
cents enfants étaient habituellement élevés à la campagne. 



AU xvii« siècLs 289 

Tous leâ trois mois, les nourrices recevaient, avec leur 
salaire, des langes ou des vêtements ; mais à partir de huit 
mois, le salaire diminuait progressivement. Les enfants 
étaient rendus à Thôpital à Tâge de sept ans, à moins qu^ilâ 
ne restassent dans la famille, à titre d'enfants adoptits, ce 
qui arrivait souvent. Rentrés à Sainte-Marie, les jeunes 
garçons étaient confiés à la garde de quatre sœurs âgées, 
et occupés soit à de petits ouvrages dans la maison, soit à 
apprendre à lire et à écrire sous la direction d'un prêtre ; 
plus tard, les mieux doués poursuivaient leurs études et les 
autres étaient placés en apprentissage. 

L'éducation des jeunes filles réclamait des soins plus as- 
sidus et plus délicats : elle était confiée aux religieuses. 
Celles-ci, à la différence des hôpitaux ultramontains, ne ser- 
vaient pas les malades, mais vivaient depuis longtemps en- 
tièrement séparées dans une maison distincte, qui compre- 
nait un cloître, une chapelle, des dortoirs, et formait, en un 
mot, un monastère complet ^ C'est là qu'étaient reçues les 
jeunes filles, lorsque à l'âge de sept ans, elles rentraient 
à Sainte -Marie. Leur nombre dépassait cinq cents en 
moyenne, car on les exposait plus volontiers que les 
garçons ; elles étaient partagées eia trois sections suivant 
leur âge, les plus grandes prenant soin de leurs compagnes 
moins âgées. Les sœurs les exerçaient aux travaux du 
ménage, à la couture : elles blanchissaient le linge, raccom- 
modaient les vêtements des serviteurs et des pauvres, et 
brodaient des ornements sacrés. 

Le temps venu, les plus pieuses étaient admises à faire 
profession dans leur maison adoptive ; les autres, c'était 
le plus grand nombre, étaient mariées avec une dot de 
cent livres, dont vingt étaient employées à leur trousseau. 

Comme la clôture rigoureuse dans laquelle elles étaient 



* C*est sans doute par inadvertance que M. Léon Lallemand a écrit que \P9 
soeurs chargées des enfants à l'hôpital du Saint-Esprit, étalent des sœurs de 
Sat nte-Thècle. (HisU des enfants assistés, p. $^). 

19 



i^ L^HOPITAL DR àAINTB-MARlB IN SAXU 

élevées aurait opposé un obstacle absolu à leur établisse- 
ment, on y pourvut au moyen d^une institution fort 
curieuse. Trois fois par an, le second dimanche après 
TEpiphanie, le jour de S. Marc et le mardi de la Pentecôte, 
les enfants et tout le personnel de Thôpital se rendaient en 
procession solennelle à la basilique de Saint-Pierre, où ils 
étaient admis à vénérer les reliques de la Passion. Les 
jeunes filles destinées à un établissement étaient parées 
avec plus de soin, pour les désigner aux regards des pré- 
tendants, toujours fort nombreux. Ceux-ci, pour manifester 
leur choix d'une des jeunes filles, n'avaient qu'à lui offrir 
un anneau en guise de fiançailles. Toutefois les demandes 
n'étaient accueillies qu'après une enquête sérieuse et discrète. 

Tel était, au XVII« siècle, cet admirable établissement 
de Sainte-Marie, œuvre de prédilection des papes, dont ils 
avaient fait « un chef-d'œuvre d'administration délicate et 
prévoyante * ». On ne saurait trop admirer l'organisation 
intérieure de cet hôpital romain, type et modèle de tous 
ceux que l'ordre du Saint-Esprit avait répandus dans tout 
le monde chrétien. On y retrouve en effet, avec un confor- 
table matériel que notre civilisation contemporaine n'a 
guère dépassé, ces précautions, ces attentions délicates de 
la charité chrétienne, qui sont si douces au cœur du malade 
ou de l'indigent. 

Ce serait peu en effet, de donner au corps les soins qu'il 
réclame, si l'on ne rendait en même temps moins lourde, 
pour rame la tristesse et quelquefois la honte de l'infortune. 
Or ce but que peut difficilement atteindre un dévouement 
purement mercenaire, était obtenu pleinement dans ces 
maisons où l'amour du prochain n'était qu'une extension 
de l'amour de Jésus-Christ ; où le pauvre se sentait enve- 
loppé, pour ainsi dire d'une atmosphère de sympathie 
créée par le sentiment de la fraternité chrétienne. 



* L.Gautier, Histoire de la charité; p. 59. 



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CHAPITRE IX 



LES PSEUDO-CHEVALIERS 



ET l'ordre en FRANCE AU XVIIO SIÈCLE 




E n'est pas un petit travail que de débrouiller l'his- 
toire de notre ordre, au milieu des confusions de 
toutes sortes dans lesquelles il tut jeté au XVII* 
siècle. Des aventuriers, qui lui étaient étrangers pour la 
plupart, cherchèrent à s'assurer la possession de ses biens. 
Ils s'adressèrent dans ce but aux rois de France, sous 
prétexte de restaurer les maisons ruinées, et ils en obtinrent 
en eflfet des édits très favorables. Mais l'intervention royale, 
au lieu des bons effets qu'elle n'eût pas manqué d'obtenir, 
si elle eût agi de concert avec le grand maître romain, ne 
réussit au contraire qu'à augmenter le chaos ; c'est la juste 
remarque d'un judicieux auteur: « Ce fut donc, dit-il, au 
commencement du dix-septième siècle que l'on commença 
à songer au rétablissement de cet ordre en France, qui y 
était presque anéanti ; mais au lieu de le remettre dans son 
ancien lustre et dans sa splendeur, ce ne fut au contraire 
qu'une confusion et qu'un chaos depuis l'an 1602, jusqu'en 
1700, que le Roi développa ce chaos en déclarant cet ordre 
purement régulier et nullement militaire ' », 



' p. Hélyot, Histoire des ordres monastiques , t. II, p. 207. 



294 LES PSEUDO-CHEVAUERS 

et Angleterre, sans Tétendre ny venir sur les terres de 
mon obéissance, et celles deçà les Monts, nonobstant que 
des Papes de leur propre mouvement ayent décidé le 

contraire, ce que je veux ignorer et ledit Sieur de La 

Terrade se passera de bulles, si elles ne sont telles que je 
vous dis, et en jouira sans icelles » 

Ainsi mis en demeure, avec une arrogance qui sentait 
peu son roi Très-Chrétien, Urbain VIII céda et accorda à 
La Terrade le titre de général de TOrdre en deçà les Monts, 
avec une indépendance complète du général de Rome*, 

On aurait grand tort de croire que le nouveau général 
se fût donné tant de mouvement, dans le but de restaurer 
l'hospitalité dans les maisons de France. En vérité il 
cherchait tout autre chose, car il ne rêvait à rien moins 
qu'à faire de Tordre du Saint-Esprit un ordre militaire * à 
Tusage de la noblesse, même mariée. Avec une audace 
incroyable, il s'était gratifié, dans ses requêtes, du titre de 



* Bulles des 26 mars et 9 mai 1635, Diplom,, \, pp. 150-1$!. 

■ Disons, pour être complet, que le P. Hélyot (t. Il, p. ao6) croit voir une 
preuve de l'existence de chevaliers du Saint-Esprit au XV* siècle, dans une 
bulle de Pie Ih, de l'an 1450, conservée par Leibnitz. Selon cette bulle. Pie II 
aurait supprimé, pour doter de leurs biens le nouvel ordre de Notre-Dame 
de Bethléem, plusieurs ordres militaires ou hospitaliers, entre autres celui du 
Saint-Esprit in Saxia : alias Religiones sipe Miiiiias ac Hospiialia infra $cripta^ 
videUcet S. La\ari, ubiUbet consistentia, S. M, de Castello Britonum de Bologna, 
acS. Sepulchrif nec non Sancti Spiritus in Saxia de Urbe, et omnia ah eo depen- 
dentia aut illius habitum seu crucem dupUcem deferentia, et B. M. Cruciferorum.., 
Nous avons de fortes raisons de suspecter Tauthenticité de ce document. 
D*abord les ordres religieux cités ont survécu à ce décret de suppression. 
Et puis, en ce qui concerne l'ordre du Saint-Esprit: ou bien la bulle avait en 
vue, selon Topinion du P. Hélyot, une milice de chevalerie adjointe aux hos- 
pitaliers de Sainte-Marie, mais ni l'histoire de TOrdre, ni les archives romaines 
n'en ont conservé la moindre trace ; ou bien il s'agit de Tordre hospitalier 
lui-môme, et ici la suppression devient absolument invraisemblable, de la part 
d'un pontife qui a donné à cet Ordre de nombreuses marques de bienveillance. 
Commentaurait-ileu la pensée de détruire une fondation des pontifes romains, 
objet de la sollicitude spéciale de tous les papes } 

Nous trouvons une autre mention de chevaliers dans un hôpital du Saint- 
Esprit ; c'est dans la concession, faite par le duc Jean V de Bretagne, d'une foire 
annuelle en faveur d'Auray (;o décembre 14^4, Dipbm., Il, p. 4). On voit par 
cet acte que l'hôpital était alors aux mains de « Messire Juon Duval, cheva- 
lier » et d*un collège de chapelains. Rien n'indique (}ue ce Çhçvalier prélen(IU 
appartenir kutip milice du Saint- Esprit . 



ET l'ordre en FRANCE AU XVIl'' SIÈCLE 295 

chevalier de V ordre du Saint-Esprit. Les lettres patentes 
de 161 8, qu'il obtint de Louis XIII, ayant reproduit ce 
titre, « il se crut assez autorisé pour établir une chevalerie 
en cet ordre. Il en donna en conséquence la croix et Tépée 
à nombre de séculiers *. » Afin de donner du relief à sa 
création, il emprunta aux anciennes religions militaires 
toute une nomenclature de chevaliers ecclésiastiques et 
laïques, frères servants d'armes et d'épée, économes, 
agents, trésoriers, etc., et mit cette organisation au compte 
d'une prétendue restauration de Tordre hospitalier , qu'aurait 
opérée Henri III, le jour même où il institua l'ordre 
honorifique du Saint-Esprit *. Et comme il fallait à tout 
prix assurer à cette chevalerie une antiquité respectable, 
il composa un ouvrage, dont nous avons déjà parlé % dans 
lequel il attribuait la fondation de l'ordre du Saint-Esprit 
à sainte Marthe, et donnait gravement la liste de tous les 
grands maîtres sans oublier les chapitres généraux, depuis 

saint Lazare, premier général 

Des lettres patentes de 1618,1619, 1626 et plusieurs arrêts 
du Grand Conseil % donnèrent à l'envi au sieur de La 
Terrade les plus amples facilités pour le rétablissement 
des hôpitaux ruinés. Mais son ambition n'allait pas jusque 
là : il se contentait d'en revendiquer les biens, qu'il attri- 
buait à ses chevaliers, moyennant redevance. Le dernier 



' D. Calmelet, loc, cit. 

' Cette pièce, visiblement calquée sur les statuts de Tordre du Saint-Esprit 
d'Henri III, se trouve aux Arch. nat., M. 4^ ; elle commence ainsi: «Le ser- 
ment et vœu du très chrétien roy de France et de Pologne Henry III de ce 
nom et aucuns statuts qu'il a faits pour Tordre et chevalerie des archihospi- 

taliers du Saint-Esprit Nous Henry, par la grÂce de Dieu roy de France 

et de Pologne.., jurons de vivre et de mourir en la foy catholique pro- 
testant de maintenir en la faveur de nos armes et force de nostre puissance 
royale à jamais TOrdre sacré de TArchihospitalité du Saint-Esprit, tout ainsi 
que le grand Ordre de notre nouvelle institution, en union d*iceluy et sans jamais 
le laisser déchoir, maintenant que nous sommes éclairez de la vérité de son 
érection, et fondation être faite par la bien a/mée hôtesse de J. C... »On sent 
ici la collaboration du fécond La Terrade. 

• Voy. p. 

* Les Diplomata reproduisent treize lettres patentes, arrêts de parlements 
çx du Grand Conseil, en faveur de La Terrade, de 1618 à 1644, pp. ^9-77* 



296 LES PSBUDOCHEVAUERS 

acte que nous connaissions de lui est un brevet de 
commandeur delà maladrerie de Saint-Lazare-les-Chauny , 
du 18 février 1648^ en faveur de Jacques du Passage, dont 
Nicolas François de Plaignevaulx, chevalier de TOrdre, 
avait commission de recevoir la profession. « Devant lui 
donc^ au pied des saints autels, en présence des religieux 
et officiers de TOrdre et des chevaliers assistants, ceux-ci, 
Tépée nue à la main, Jacques du Passage eut à prêter 
le serment exigé par les statuts ; puis il reçut le collier de 
commandeur à la croix d^or double émaillée de blanc avec 
quatre fleurs de lys dans les angles, portant au milieu le 
Saint-Esprit d'un côté et r Annonciation de l'autre '. » Il 
y avait loin^ de ce cérémonial militaire, aux vœux de reli- 
gion prononcés par nos hospitaliers le jour de leur 
profession I 

La Terrade avait fait jeter dans les prisons de TOfficia* 
lité de Paris un nommé Nicolas Gaultier, qui prétendait 
lui aussi à la commanderie de Montpellier et se mêlait de 
créer des chevaliers. Il fut lui-même interné à celle de 
Fort-l'Evêque, par le prévôt de l'Ile de France', nous ne 
savons pour quels méfaits. 

Son vicaire généralissime, Jean Alexandre Déscyscures, 
chanoine comte de Lyon, était également détenu à Fort- 
in Evèque : « c^était là sans doute le noviciat de ces sortes 
d'aventuriers, qui ne connaissaient l'Ordre que par la croix 
qu'ils déshonoraient • ». Comme Désescures y avait rem- 
placé La Terrade, il espéra après sa mort succéder à sa 
dignité de chef de la chevalerie du Saint-Esprit. Il ne se 
trompa point, car ayant recouvré sa liberté, il obtint de 
Louis XIV, par surprise, un brevet pour cette place, le 



* Comte de Brandt de Galametz, Li chevalier de Sinceny et U commandeur 
de Chauny. Aperçu sur Us ordres de MaUe et du Saint-Esprit de Montpellier , in 4*, 
1888, p. 17. 

■ P. Hélyot, p. 208; — D. Calmelet, chap. VI. 

* D. Qalmeict, loc, cit. 



ET l'ordre en frakce kjj xvip siècle 297 

4 janvier 1656 *. Il eut tout le temps, pendant les onze 
années qu'il porta son titre, de créer, à la mode de son 
prédécesseur, une légion de chevaliers du Saint-Esprit. 
Mais les compétiteurs ne lui manquèrent pas ; il y en eut 
jusqu'à cinq à la fois, et Tun d'eux, Nicolas Gaultier eut 
l'adresse de faire rendre en sa faveur une ordonnance royale. 

Le roi, en eflFet, « pour arrêter les manœuvres de tous ces 
intrus, dont la conduite faisait gémir les vrais membres de 
l'Ordre, » nomma, le 19 mai 1656, une commission composée 
d'évêques et de magistrats, à l'eflFet d'examiner les titres de 
ces prétendus généraux, officiers et commandeurs. Cette 
commission donna sa décision l'année suivante : il était de 
la piété du roi^ disait-elle, de favoriser le rétablissement 
d'un ordre qui avait pris naissance en son royaume, d'où il 
s'était répandu dans tous les autres royaumes de la chré- 
tienté, où il est encore florissant. Mais il était nécessaire 
de faire de très expresses défenses aux nommés Aubry, 
Lescoray, Lebœuf et Désescures, de prendre le titre de 
commandeurs généraux, comme ils prétendaient, et de 
porter à l'avenir l'habit et la croix de l'Ordre. En consé- 
quence, un arrêt du conseil d'Etat, intervenu le 7 septembre 
1657, maintint Nicolas Gaultier, si fort malmené autrefois 
par LaTerrade, à la commanderie générale de Montpellier, 
comme étant le seul qui eût produit des titres valables de 
son état, et les autres prétendants furent menacés de 
peines exemplaires, s'ils le troublaient dans sa possession. 

Désescures n'en fut pas intimidé: il se pourvut sans 
mot dire en cour de Rome et se fit mettre en possession 
par arrêt du Grand Conseil, en 1658. Mais l'officialité de 
Paris, qui lui avait interdit de se décorer de titres usurpés, 
le condamna à diverses peines infamantes, et enfin des sen- 
tences de bannissement furent décernées contre lui par le 
Châtelet et le parlement, le 29 mai 1668. La même année, 



• ibid. 



298 LBS PSBUDO-CHEVALIERS 

le roi donna la commanderie de Montpellier à M. Rousseau 
de Bazoches, évèque de Césarée, conseiller au parlement de 
Paris. Ils*y maintint, malgré le refus de bulles parle Pape, 
malgré Désescures et nombre d'autres concurrents, qui 
s'acharnaient à leur proie. Ce nouveau chef paraissait 
animé d'un véritable désir de relever les hôpitaux de 
rOrdre; mais il mourut peu après, en 167 1, au cours de sa 
visite de l'hôpital de Dijon. 

Reposons-nous un instant de toutes ces luttes d'intrigants 
et jeton3 un coup d'œil sur les maisons restées fidèles à leur 
sainte vocation, dans les deux Bourgognes et la Lorraine. 

La maison de Dijon, située sur le territoire français, fut 
nécessairement en butte aux convoitises des chevaliers. Les 
religieux n'avaient pas osé protester ouvertement contre 
la bulle d'Urbain VIII, qui brisait l'union qu'ils avaient 
toujours conservée avec Rome. Mais le recteur donna avis 
au grand maître des menées de La Terrade et en reçut, en 
1628, un rescrit de l'auditeur général de la Chambre apos- 
tolique, par lequel il lui était fait défense de reconnaître 
d'autre général que le maître romain. Frère Cornu et sa 
communauté déférèrent avec joie à ces ordres et La Terrade 
n'osa plus les inquiéter. Libres de ce côté, ils continuèrent 
à s'adonner avec ardeur aux œuvres de charité. La peste 
et la famine, rentrées à Dijon en 1629, y exercèrent leurs 
ravages pendant deux années entières. Ce fut pour nos 
hospitaliers une nouvelle occasion de montrer leur dévoue- 
ment. Depuis que la ville s'était emparée de l'administration 
des revenus, la mense conventuelle des religieux était 
séparée et à leur usage exclusif: ils l'abandonnèrent géné- 
reusement au soulagement des malheureux, « se réduisant 
à l'extrémité du pain et de l'eau que la règle leur promet 
et que la charité commande, toutes les fois que les besoins 
des pauvres deviennent extrêmes '. » 



* D. Calmelet, chap. VI. 



ET L'ORIMdS EN FRANCE AU XVIl'' SIÈCLE SÇÇ 

Il semble qu'une telle générosité aurait dû leur assurer 
quelques égards de la part du corps municipal : il n'en fut 
rien. Il profita au contraire de tous les prétextes pour cen- 
traliser entre ses mains tous les revenus, en écartant autant 
que possible les religieux de l'administration. A la fin, le 
recteur, frère Boulengier, w qui voyait où portaient les 
coups, » se décida à un arrangement définitif. Pour éviter 
une ruine complète, il abandonna la mense conventuelle, 
à charge de percevoir une pension annuelle de 300 livres 
pour lui, et de 150 livres pour ses religieux. L'accord fut 
conclu sur ces bases, le 4 avril 1648. Les religieux conser- 
vaient leur habitation, avec le droit d'avoir des novices, et 
demeuraient chargés du service spirituel de tout rétablis- 
sement '. 

La communauté continuait à montrer au grand maître 
de Rome un profond attachement, car elle voyait là une 
sauvegarde pour l'avenir. Mais en 1670, un ordre impérieux 
de Louis XIV lui enjoignit de reconnaître pour supérieur 
exclusif l'évèque de Césarée. Les religieux durent obéir, 
mais instruisirent le grand maître de ce qui se passait. M. 
de Bazoches fit la visite de la maison, au mois d'août 167 1, 
et fut fort édifié du bon ordre qu'il y trouva ; les charges 
étaient dignement remplies, les exercices spirituels et les 
offices célébrés avec décence et régularité. La frugalité de 
la vie et Inexactitude avec laquelle les comptes étaient 
tenus suppléaient à la modicité des ressources. Les enfants 
exposés et les pauvres étaient bien soignés, et les sœurs 
hospitalières en grande régularité et ferveur. 

Les hôpitaux de Tonnerre, Bar-sur- Aube et Fouvent, 
dépendances de Dijon, s'eflForçaient de suivre l'exemple de 
leur chef, en exerçant l'hospitalité dans la mesure de leurs 
ressources, également fort amoindries. 

La Franche-Comté et la Lorraine, n'étant pas encore 



^ D^ Calmelet, chap. VU 



JOO LES PSEUDO-CHEVALIERS 

des provinœs françaises, furent à l'abri des nécessités qui 
contraignirent Dijon à se soumettre aux commandeurs de 
Montpellier. Ceux-ci n'eurent que la satisfaction toute 
platonique de faire insérer les hôpitaux du comté de Bour- 
gogne et de Lorraine dans la bulle d'Urbain VIII, de 
1625, et dans divers arrêts et lettres patentes des rois de 
France. Tranquilles sous l'autorité du mattre de Sainte- 
Marie, dont ils continuaient à recevoir les titres de 
procureurs et vicaires généraux, les recteurs Bisontins 
consacraient tous leurs efforts au relèvement de leurs 
hôpitaux, dévastés au cours de la lutte gigantesque sou- 
tenue pendant plus d'un siècle par la Franche-Comté contre 
la France. Claude Nazey (161 5-1635), Claude Pécaud 
(+1659), Jean- Jacques Despoutot (+1672), Denis Beuque 
(+1705) furent des recteurs zélés et des administrateurs de 
grand talent, qui ne reculèrent pas devant le sacrifice même 
de leur fortune privée pour le relèvement de leur maison. 
Aussi, grâce à ces hommes de tète et de cœur, l'établisse- 
ment de Besançon, au moment de la conquête française, 
avait-il recouvré 1?. plupart de ses domaines usurpés et de 
ses prérogatives anéanties par les guerres *. 

Toutes les maisons dépendantes de Besançon suivaient 
l'énergique impulsion du chef-lieu, dans le travail de res- 
tauration. Gray avait rebâti son hôpital, détruit en 1622 par 
par un incendie ; Neuchâteau avait aussi réparé les désastres 
plus grands encore qu'il avait eu à subir, se trouvant sur le 
passage des armées. La ville, de 1634 à 1670, fut brûlée par 
les Suédois, assiégée six fois et reprise alternativement 
par les Français et les Lorrains, enfin dépeuplée par la 
peste et la famine *. Frère Charles Meusnier obtint 
d'Alexandre VII des indulgences plénières pour les fidèles 
qui contribueraient à la réédification de l'hôpital, et la 



* A. Castaiiy Notice, II, p. i8|. 

* Abbé Renard, Histoire ms. 



ET l'ordre en fronce AU XVII« SIÈCLE 30I 

confrérie fut rétablie d^ns un très grand nombre de 
paroisses. A Poligny, après la peste de 1636 et le sac de 
la ville en 1638, l'administration sur les lieux avait cessé: 
on ne retrouve nulle culture des fonds, nul exercice d'hos- 
pitalité jusqu'en 1656, époque où Bernard Fromond, 
religieux natif de la ville, ayant obtenu la charge de rec- 
teur, consacra toute sa fortune au rétablissement de 
l'hôpital et réussit dans ses efforts, au grand applaudis- 
sement de tous *. 

Le mouvement de restauration donnait déjà les plus 
heureux résultats dans la province entière ; les magistrats 
des villes en témoignèrent à l'envi plus tard. Nul doute 
que si Louis XIV, au lieu de se laisser abuser par des 
chevaliers d'aventures, eut remis les mêmes pouvoirs aux 
mains plus dignes de nos religieux, la France entière n'eût 
pas tardé à ressentir les effets de leur zèle, encouragé par 
le grand maître de Sainte-Marie et le Souverain Pontife. 
Malheureusement, l'intrigue est souvent plus forte que la 
vertu et le bon droit. Les troubles et les désordres fomentés 
par les commandeurs de Montpellier et leurs suppôts, pour 
qui l'entrée dans l'Ordre n'était qu'un moyen de vivre sur 
les biens des hôpitaux, sans le moindre souci de leur réta- 
blissement, finirent par lasser Louis XIV et favorisèrent 
merveilleusement les projets de son ministre Louvois. 

Celui-ci, qui était grand maître de l'ordre de Saint- 
Lazare, cherchait depuis longtemps à faire réunir à cet 
ordre les biens des autres ordres militaires et hospitaliers, 
afin d'en faire des pensions pour les officiers des armées 
royales. Il réussit donc à faire signer au souverain un édit 
qui lui donnait pleine satisfaction. Dans cet édit, porté en 
décembre 1672, le roi dit que, voulant soutenir les officiers 
de ses troupes, il n'a point « trouvé de moyen plus conve- 
nable, ni qui fut moins à la charge de ses finances et de 



' Chevalier, MémoUts hisiàriqua d€ Polignff t. 11^ p. i)9« 



)02 LES t^SBUDO-CUBVAUnté 

ses peuples, » que d'affecter les biens et revenus de quel- 
qu'ancien Ordre dans TEglise et dans son royaume à des 
pensions destinées aux gentilshommes et officiers de ses 
troupes, qui par des services signalés s'en seront rendus 
dignes. Il ajoute qu'il a fait choix de l'ordre de Saint-Lazare, 
comme étant propre à ses dessins, et que, parjèle pour la 
religion, en qualité de Fils aîné de VEglise, il veut 
rétablir cet ordre dans ses anciens biens et privilèges, les 
augmenter même, « et en composer des commanderies qui 
puissent servir de récompenses honorables et utiles pour la 
noblesse de notre royaume et les officiers et soldats qm 

auront bien servi dans nos armées » 

« Et pour d'autant plus favoriser ledit Ordre, et le rendre 
considérable. Nous, de la même autorité que dessus, avons 
concédé et uni, concédons et unissons audit Ordre l'admi- 
nistration et jouissance générale, perpétuelle et irrévocable, 
de toutes les maisons, droits, biens et revenus ci-devant 
possédés par tous autres ordres hospitaliers, militaires, 
séculiers ou réguliers, éteints, supprimés et abolis de fait 
ou de droit dans notre Royaume, et Terres de notre 
obéissance, spécialement les ordres du saint-esprit DE 
MONTPÉLIER, de Saint- Jacques de l'Epée et deLucques, du 
Saint-Sépulcre, de Sainte Christine de Somport, de Notre 
Dame diteTheutenique, de Saint Louis, de Boucheraumont, 
et autres, lesquels nous avons déclarés éteints, sup- 
primez et abolis, et les biens d'iceux vacants, unis et 
incorporez comme dit est, audit Ordre du Mont Carmel et de 

Saint Lazare Et par une ample grâce nous concédons 

pareillement, et unissons audit Ordre l'administration 

et jouissance perpétuelle et irrévocable de toutes les mala- 
deries, léproseries et commanderies ; ensemble tous les 
Hôpitaux, Hôtels-Dieu, Maisons-Dieu, Aumôneries, Con- 
fréries, Chapelles hospitalières, et autres lieux pieux de 
notre Royaume, soit qu'ils soient possédez en titre de béné- 
fices, ou simples administrations, où V Hospitalité n'est 



fit L*ORDRB EN PRANCB AO XVII* SIÈCLE 3O} 

pas OU fCapas été cùdevant gardée^ suivant les conditions 

de leur fondation , pour desdits biens et revenus ainsi 

réunis en être formé par Nous des commanderies , 

en faveur des Officiers et Soldats de nos Troupes, qui se 
seront fait admettre dans ledit Ordre, etsuricelles, yafiFecter 
telles pensions qu'elles pourront et devront porter, pour en 

gpratifier d'autres Officiers '. 

C'était, on en conviendra, pour le Fils aîné de l'Eglise, 
une singulière manière de ténioigner « son zèle pour la 
religion, » que de supprimer ainsi, de sa seule autorité et 
sans même avertir le Chef de l'Eglise, des ordres anciens, 
dont plusieurs étaient encore pleins de vie. Le grand roi 
disposait ainsi de biens qui ne lui appartenaient en aucune 
façon, qui ne relevaient que de l'autorité ecclésiastique et 
du Pape : c'était la confiscation pure et simple du domaine 
des pauvres, la violation de la volonté des fondateurs et 
bienfaiteurs des hôpitaux et lieux pieux, qu'il supprimait 
au lieu de les rétablir et de les protéger, comme 
c'était son devoir de roi et de chrétien. Le moyen était bon 
en effet, pour doter commodément et sans bourse délier, 
les officiers et soldats français ; il était digne d'avoir été 
conçu par le brutal ministre Louvois. Mais nous allons voir 
que, si l'idée était simple, l'application ne le fut pas autant, 
et que la force cette fois au moins dut plier devant le droit. 



* Diplomaia, II, p. 128. 





CHAPITRE X 



L'ÉDIT DE RÉUNION A SAINT-LAZARE 



SUPPRESSION DÉFINITIVE DE l'ORDRE EN FRANCE 




'ordre de Saint-Lazare et son grand maître 
Louvois, heureux destinataires de la plus grande 
partie des biens hospitaliers du royaume, dont 
redit d'union avait dépouillé les ordres religieux et les 
habitants, pour les affecter à un usage entièrement opposé 
à leur destination, se hâtèrent défaire les démarches néces- 
saires pour profiter d'un si magnifique accroissement de 
patrimoine. Le premier soin de Louvois fut de nommer des 
commissaires, qui se firent livrer, par autorité de justice, 
tous les Fouillés et Terriers des hôpitaux visés par l'édit 
de 1672. Mais, lorsqu'il voulut entrer en possession, la 
résistance se dessina, vigoureuse et opiniâtre. 

Pour ne parler que de l'ordre du Saint-Esprit, dans les 
maisons même ou cet ordre ne possédait plus de titulaires, 
les commissaires se trouvaient en présence d'une résistance 
également acharnée ; c'étaient d'un côté les particuliers, 
qui avaient envahi les propriétés, comme biens vacants ; de 
Tautre, les administrations municipales, qui avaient attri-* 
bué ces mêmes biens à d'autres établissements charitables. 

Dans les deux cas, c'était donc, pour chacune des maisons 

20 



}06 l'ÉDIT DB réunion a SAIHT-LâZABB 

revendiquées^ une série de procès longs et coûteux, avec 
des recherches de titres fort difficiles. Aussi n'est-il pas 
étonnant qu'au bout de vingt ans, et malgré plus de trois 
mille arrêts rendus en faveur de Tordre de Saint-Lazare, 
la prise de possession eût été encore peu avancée. 

Les difficultés, déjà considérables i>our les hôpitaux 
vacants, le furent bien davantage encore quand il s'agit des 
maisons occupées par les frères réguliers du Saint-Esprit ; 
là, les tentatives des chevaliers de Saint-Lazare demeurèrent 
généralement infructueuses. Frère de la Grrange, recteur de 
Dijon, ayant été assigné, en 1691, à la chambre royale de 
TArsenal, à Paris, pour s'y voir condamner à abandonner 
son titre et les revenus de sa maison à Tordre de Saint- 
Lazare, se servit pour sa défense de Tédit même de 1672, 
qui décrétait Tunion des seules maisons où Thospitalité 
n'avait pas été ou n'était pas actuellement exercée^ Cette 
clause avait été déjà la sauvegarde de Bar-sur-Aube et de 
Poligny, comme elle le fut des autres maisons. Rien ne 
fut plus facile au recteur de Dijon^ que de démontrer, par 
les certificats du parlement, des magistrats et de Tévèque 
de Langres, que Thospitalité n'avait jamais c^ssé à Dijon. 
L'abbé de Saint-Bénigne attesta, au non de l'assemblée du 
clergé, que l'hôpital du Saint-Esprit « avait toujours servi 
et servait encore à nourrir et élever les pauvres enfants 
orphelins et exposés, qui sont pour l'ordinaire au nombre 
de plus de deux cents, qui sont gouvernés par les reli- 
gieuses du Saint-Esprit établies dans ledit hôpital et 
actuellement au nombre de dix, et instruits des mystères 
de la religion par les religieux profès du même ordre, 
actuellement au nombre de six..... ; que lesdits religieux 
vivent en communauté et régularité dans leur maison 
conventuelle avec leur dit recteur; célèbrent dans leur 
église, qui est propre et bien ornée, tous les jours le service 
divin avec une exactitude et une dévotion si exemplaires, 
que Ton peut dire que leur dite église est un des lieux de 



SUPPRESSION DÉFINITIVE DE l'ORDRE EN FRANCE 307 

prédilection les plus fréquentés de la ville ' . » Les certificats 
des magistrats contenaient les mêmes éloges. 

Le parlement de Besançon disait des religieux et des 
sœurs de cette ville, que c'étaient « tous gens de vertu et 
de probité, qui s'acquittent fort bien de leur devoir, et 
montrent à tous le bon exemple, tant dedans leur Eglise, 
Hôpital et Maison, que dehors; même dans les offices 
divins, assemblées publiques et processions, auxquelles ils 
ont coutume d'assister en corps avec toute la piété, bien- 
séance et édification possibles ; étant aussi actuellement 
gardé dans ledit Hôpital l'hospitalité envers les Enfants 
Trouvés^ de tout quoi ladite Cour a octroyé, etc. » Les 
magistrats ajoutaient que les enfants y étaient apportés 
« de tous les endroits de la Province, et même des Etran- 
gers *. » L'archevêque, Antoine-Pierre de Grammont, 
gprand et pieux prélat, faisait ausssi de ses religieux un 
éloge mérité, en disant qu'ils menaient une vie fort exem- 
plaire et à son entière satisfaction ». 

Nous pourrions multiplier ces témoignages, car partout 
où se trouvent nos religieux, c'est le même concert unanime 
d'éloges reconnaissants, qui montre de quelle estime ils 
continuaient à être entourés. 

Avec cela, il était difficile aux chevaliers de Saint-Lazare 
d'aboutir dans leurs projets. Ajoutons que le Pape avait 
réclamé vigoureusement par son nonce, contre un empié- 
tement si considérable sur le pouvoir spirituel, seul juge et 
directeur ^es lieuxpieux et desordres religieux. Ilprotestait 
qu'il ne se prêterait jamais à l'abolition des ordres visés 
par l'édit d'union, sans causes, sans nécessité et surtout 
sans avoir entendu toutes les parties ^ 



D. Calmelet^ chap. VI. 
' Idée générale, p. i:. 

* Ibid,, p. 12. 

* Idée généraUfp, 21, 



)o8 l'édit de réunion a saint-lazara. 

Les chevaliers se lassaient de tant de démarches, dont 
les résultats étaient loin de compenser les peines et les 
frais. Sur ces entrefaites, ils perdirent, par la mort du 
grand maître Louvois, leur plus ferme appui (1691). 
Louis XIV, n'ayant plus pour l'influencer l'impérieuse 
volonté de son ministre, comprit, avec son grand bon sens, 
qu'il était allé trop loin, et qu'au lieu de supprimer \fis 
hôpitaux, il fallait tenter de vigoureux efforts pour rétablir 
l'hospitalité, interrompue sur tous les points du royaume, 
au grand préjudice des malheureux. Aussi rendit-il, au 
mois de mars 1693, un nouvel édit, par lequel il révoquait 
celui de 1672 et restituait aux ordres supprimés leur exis- 
tence légale et leurs biens. 

Les considérants de cet édit sont remarquables. Le roi 
constate que l'union des biens hospitaliers à l'ordre de 
Saint-Lazare n'apportait presqu'aucune utilité aux officiers 
de ses troupes qui en jouissaient à titre decommanderies, 
et cela à cause des difficultés créées par une multitude de 
contestations et de procès ; que les ordres hospitaliers et 
militaires supprimés « ne pouvant être regarde^ comme 
entièrement éteints^ il seroit juste de leur rendre lesdits 
biens et revenus, sauf à être pourvu à la réformation des 
abus qui s'y sont glissez ; » qu'il ne pouvait rien faire enfin 
de plus digne de la justice et de la charité, que de laisser 
les revenus des hôpitaux « pour être employez à la subsis- 
tance des pauvres des lieux, suivant l'esprit et l'intention 
des Fondateurs, en y établissant une bonne administration 
pour l'avenir '. » 

Lés débats occasionnés par l'édit d'union eurent pour 
résultat d'attirer l'attention de Louis XIV sur l'abandon 
général de l'assistance hospitalière. Il y avait en France 
une multitude d'hôpitaux et d'hospices de toute espèce, et 
pourtant c'est à peine si les classes indigentes en tiraient 



* Diplomata, II, p. 148. 



SUPPRESSION DÉFINITIVE DE l'oRDRB EN FRANCE 3O9 

quelque secours. La principale cause en venait des guerres, 
qui depuis deux siècles désolaient le pays, et dont les éta- 
blissements de bienfaisance avaient souffert plus encore que 
les particuliers; les revenus échappés à la dévastation 
étaient si modiques, que la plupart du temps ils suffisaient 
à peine à l'acquittement des services religieux annexés aux 
fondations pieuses, si bien qu'il ne restait rien pour le 
service des malades et des pauvres. Pour remédier à un si 
grand mal, le roi conçut une vaste opération qui, bien 
qu'elle ait passé inaperçue de la plupart des historiens, n'en 
est pas moins un des actes les plus utiles de son adminis- 
tration'. Par son éditdu 24 août 1693, il ordonna que tous 
les hôpitaux, maladreries, léproseries qu'il avait concédés 
à l'ordre de Saint-Lazare en 1672, seraient rendus à leurs 
anciens possesseurs, à charge d'y rétablir l'hospitalité. Mais 
comme un grand nombre n'avaient que des revenus fort 
insuffisants, l'édit disposa qu'ils seraient supprimés, et leurs 
biens unis aux maisons les plus considérables dans chaque 
région, avec obligation toutefois pour celles-ci de recevoir 
les malades des lieux où se trouvaient les hospices supprimés, 
dans la proportion des revenus annexés. Cet édit fut exécuté, 
et partout, « au lieu de dix maisons qui dépérissaient, on en 
eut ainsi une ou deux seulement, mais qui furent floris- 
santes •. » Ce furent les hôpitaux généraux, établis à 
l'instar de l'hôpital général de Paris, qui héritèrent presque 
partout des petits hospices. Cette fois le Pape ne fit pas 
d'opposition, parceque la mesure était vraiment bienfai- 
sante et que les biens hospitaliers conservaient leur 
destination primitive, sans être convertis à un usage 
étranger et profane. 



* A. d'Arbois de Jubainville, Etudes sur Us documents • consentis dans les 

archives des quatre petits hôpitaux de la ville de Trores{}Aém. delà Soc. d'Agric. 
de i*Aube, 1857). — L. Gautier, Histoire de la charité,, p. 65. 

* L. Gautier, loc. cit. 



)I0 L*iDIT DE RéUKION k SAIXT-LàZARI 

A la mort de Tévèque de Césarée, arrivée en 167 1, 
comme nous l'avons dit, Tabbé Morin du Colombier, 
aumônier du roi, se fit pourvoir, par bref de Clément X, de 
la commanderiede Montpellier, vacante depuisquarante ans, 
disait-il, à charge de prendre Thabit et de faire profession 
dans Tordre régulier du Saint-Esprit. Sur ces entrefaites, 
survint Tédit d'union de Tordre du Saint-Esprit à celui de 
Saint-Lazare. Nonobstant cet édit, Tabbé Morin obtint, au 
mois de janvier 1673, de François-Marie Phœbus, arche- 
vêque de Tarse et grand maître de Sainte-Marie in Saxia, 
une provision de vicaire et visiteur général en France. Mais 
cette faveur n'eut d'autre effet que de lui procurer un séjour 
de huit années à la Bastille. Le sieur de La Coste, qui se dit 
ensuite grand maître, de par le choix des chevaliers, reçut 
également du Conseil d'Etat, en 1689 et 1690, défense de 
prendre ce titre '. 

Cependant Tédit de 1 693 , qui rétablissait Tordre du Saint- 
Esprit, eut pour effet de donner une nouvelle impulsion 
aux prétendus chevaliers. Le roi leur accorda pour grand 
maître, quoique le Pape eût refusé d'envoyer les bulles, un 
puissant personnage, Tabbé de Montmorency-Luxembourg. 
Leur nombre grossissait tous les jours : des hommes qui 
n'avaient aucun droit légitime, en vertu des titres de 
Vicaire Général, de Chancelier, de Vice-Chancelier et même 
de Vicaire Généralissime qu'ils s'attribuaient, créaient de 
nouveaux chevaliers. Ils y en avait qui prenaient le titre 
d'Anciens Chevaliers, et qui ne regardaient les autres que 
comme des intrus dans l'Ordre. Parmi ces chevaliers anciens, 
il y en avait qui se disaient premiers Officiers d'épée. On y 
voyait des Chevaliers de grâce, des Chevaliers d'obédience, 
des Chevaliers servants et de petits Officiers ■ 



* p. Hélyot, op, cit, t. II, p. 310. 

* Dans un chapitre tenu au < Grands Augustins de Paris, en 1693, ils avaient 
délibéré qu*on ne recevrait aucuns chevaliers, qu'ils ne payassent ÎTOrdre six 



SUPPRESSION DÉFINITIVE DE L'ORDRE EN FRANCE JII 

Les religieux réguliers, qui n'avaient jamais fait cause 
commune avec les chevaliers, avaient tout à craindre de leur 
insatiable avidité. Aussi, encouragés par le succès qu'ils 
avaient obtenu dans l'affaire de l'abrogation de l'édit 
d'union à l'ordre de Saint-Lazare, abrogation due en 
grande partie à leur opposition, ils résolurent d'achever 
l'œuvre de restauration de l'Ordre en poursuivant l'extinc- 
tion de la milice des pseudo-chevaliers, qui aurait fini par 
anéantir toutes les maisons régulières. La lutte fut vive. 
Les réguliers déléguèrent à Paris, pour faire toutes les 
démarches nécessaires, un habile religieux de Besançon, 
frère Etienne Grandvoynet, recteur de Steffansfeld; l'abbé 
de Luxembourg défendit sa milice. Enfin, après six années 
de discussions et de débats, les commissaires du Grand 
Conseil rendirent leur sentence, et un arrêt du lo mai 1700 
déclara l'ordre du Saint-Esprit purement régulier et hos-^ 
pitalier, rapporta, comme nul et de nul effet, le brevet de 
grand maître accordé à M. de Luxembourg, et fit défense à 
tous ceux qui avaient pris laqualité d'officiers et de chevaliers 
du Saint-Esprit, de prendre à l'avenir ces titres et d'en 
porter les insignes *. 

Atterrés par cet arrêt, les chevaliers ne perdirent pour- 
tant pas encore toute espérance. Le roi avait résolu de ne 
point désigner de grand maître avant d'avoir avisé au 
meilleur moyen de relever l'Ordre. Il nomma, le 15 janvier 
1701, une commission, dont faisaient partie l'archevêque 
de Paris, Bossuet, le P. de la Chaise, l'abbé Bignon, La 
Reynie et d'Aguesseau, pour lui rendre compte de la situa- 
tion des maisons, à l'aide des titres que les recteurs avaient 
ordre de produire. En vertu de cet arrêt et de celui du 25 



cents livres au moins, les chevaliers de grâce, douze cents livres, les chevaliers 
d'obédience, servants et autres petits officiers, quatre cents livres. — P. Hélyot, 

op. cit., p. 2II-3I2. 

^ DiplomatUt Ut P^ 201, . 



}I2 l'ÉDIT de réunion a SAINT-LàZiOtB 

mai 1 705^ frère Joseph Dupont, religfieux de Besançon et 
recteur de Dijon, se rendit à Paris en 1706, muni d^une 
procuration des commandeurs et religieux de Besançon, 
tant en leur nom qu'en celui des recteurs de Dole, Poligny, 
Neufchâteau, Vaucouleurs, Saint-Julien, Arlay et Orgelet, 
tous en dépendant *. 

De leur côté, les chevaliers tentèrent un dernier effort 
et persuadèrent au duc de Chatillon, troisième fils du 
maréchal de Luxembourg, de postuler pour lui-même le 
titre de grand maître, qu'il n'avait pas vu sans regret enlever 
à son frère. Le procureur des réguliers, frère Dupont, 
était profondément dévoué à son ordre; mais, appréhendant 
le crédit du duc de Chatillon, il commit la faute d'entrer 
dans les propositions de ce seigneur. Il promit, au nom des 
réguliers, qui ne lui avaient point donné tant de pouvoir, 
de ne pas se prévaloir de Tarrêt de 1 700 et consentit à ce 
que l'Ordre fut mixte, c'est-à-dire composé de chevaliers 
et de réguliers, qui auraient à leur tète un grand maître 
séculier, assisté d'un grand prieur ecclésiastique, nommé 
par les religieux et confirmé par le Pape *. Heureusement, 
cette complaisance n'eut pas de suites fâcheuses ; les commis- 
saires reconnurent le bien fondé de l'arrêt de 1700 et le roi 
en confirma purement et simplement la teneur, le 4 janvier 
1708 '. 

Cet arrêt fut la base de la conservation des derniers hôpi- 
taux du Saint-Esprit'; plusieurs furent même recouvrés, 
parmi lesquels ceux d'Angers et d'Auray *. Enfin, faisant 



* D. Calmelet, chap. VII. 

* D. Calmelet, chap. VI U 
' Diplomata, II, p. 239. 

* Pendant le temps de Tunion de l'Ordre à celui de Saint-Lazare, les reli- 
gieux ne conservaient que dix maisons : Dijon, Bar-sur-Aube, Besançon, Arlay, 
Dole, Gray, Poligny, Rouflfac, Steffansfeld, Wimpfen ; en 1708, l'Ordre en avait 
recouvré six : Chaussin, Fouvent^ NeufchAteau, Orgelet, Saint-Julien, Vaucou- 
leurs : treize autres lui furent rendues de 1708 à 1741 : Aix, Agen, Angers, 
Audignon,Auray,Confolens, Largentière, Mèze, l'Ile en Jourdain, Maubourguet, 
Montpellier, Sainte- Sévère, Tonnerre. — Idée générale^ p. 48-49. 



SUPPRESSION DÉFINITIVE DB L'ORDRE EN FRANCE il^ 

droit aux prières des religieux, Louis XIV leur accorda 
pour grand maître un personnage éminent et capable de 
les protéger efficacement : le cardinal dePolignac. Ce fut le 
dernier acte du monarque à l'égard de Tordre du Saint. 
Esprit, auquel il avait fini par rendre justice. Le brevet de 
grand maître fut expédié au cardinal par le Régent 
(3 novembre 17 16), malgré toutes les démarches du duc de 
Chatillon ». Il n'obtint cependant ses bulles qu'en 1733, par 
suite de l'opposition du cardinal Doria, grand maître de 
Sainte-Marie *. Sous sa haute protection, les hospitaliers 
jouirent enfin de quelque tranquillité ; mais sa mort, arrivée 
trop tôt •, vint remettre en question l'avenir même de 
l'Ordre. 

Clément XII n'avait conféré la grande maîtrise au car- 
dinal qu'à titre de commende, en sorte qu'à sa mort les 
religieux devaient élire l'un d'entre eux à cette dignité. 
Cette disposition fut traversée par deux personnages qui, 
grâce à leur séjour à Paris, réussirent à mettre la main 
sur la direction des affaires de l'Ordre. Ils se nommaient 
Antoine Tousart et Pépin Dumontet. Le premier était un 
ancien récollet, qui avait fait profession dans la maison 
de Dijon ^ Le second, après avoir fait profession, en 17 11, 
à l'abbaye de Chancelade et joui successivement de trois 
bénéfices dans cette congrégation, s'était qualifié du titre 



* Diplomata, I., p. 384. 
*D. Caimeiet, chap. VII. 
' Le 20 novembre 1741. 

* Il devait sa situation à frère Dupont, qui se l'était adjoint pour la publi- 
cation, à laquelle il travaillait depuis longtemps, du recueil des bulles et des 
privilèges de TOrdre. Doué df qualités assez brillantes, mais trop superfi- 
cielles pour mener à bien une telle entreprise, Tousart se contentA d'ajouter 
aux documents réunis par frère Dupont des commentaires critiques qui mon- 
trent un esprit faussé par les erreurs gallicanes. Les deux tomes en un 
volume in-folio de cet ouvrage, dédié au cardinal de Polignac, parurent en 
172J, sous le nom de Tousart seul. D. Calmelet se plaint des frais énormes 
dont la publication de cet ouvrage greva les maisons de l'Ordre pendant de 
longues années. Un arrêt du Grand Conseil les avait obligés à se charger de 
cette dette, mais le parlement de Besançon fit défense k celles de Franche - 
Comté de rien payer, et elles ne furent pas inquiétée». 



)I4 t'iorr DE RÉmnON a. S4IHT-LiIABB 



de commandeur d* Audignon ; mais il ne put jamais Justin 
fier de son entrée dans Tordre dn Saint-Eqnt. Leurs 
intrig^ues leur valurent, après la mort dn caidinal de 
Polignac, les pouvoirs, à Pépin, d*administrateur général^ 
et à Tousarty de procureur général de TOrdre *. 

Dès lors, les jours de Tordre du Saint-Esprit forent 
comptés. Dans la commission même de Pépin avait été 
insérée une clause néfaste, à laquelle il ne s'opposa point, 
et qui s'inspirait de la politique du Régent à T^^ard des 
ordres religieux : c'était la défense absolue de recevoir des 
novices. On ne pouvait trouver un meilleur moyen de pro- 
curer Textinction, à bref délai, de TOrdre en France. En 
même temps, tous les recteurs durent envoyer au sieur 
Pépin les états, revenus et titres de leurs maisons \ pour 
être par lui communiqués à une commission chargée de 
décider du sort de TOrdre. Mais TaflFaire traîna en longueur 
et n'eut pas alors de suites. Le 6 octobre 1747, parut une 
ordonnance royale pour une nouvelle production de titres, 
non plus devant la commission, mais devant les Intendants 
de province. Les avis de ces hauts fonctionnaires, les mieux 
placés pour être bien éclairés, furent très favorables', mais 
ne produisirent aucun effet. Le recteur de Dijon, voyant 
Tinutilité de toutes les démarches et le dépérissement de sa 
maison, faute de nouveaux sujets, tenta un dernier effort 
et implora l'intervention de Benoit XIV, par Tintermédiaire 
du grand maître romain. Le Pape connaissait la situation 
misérable faite à TOrdre ; il recommanda à son nonce de 
faire toutes les diligences pour obtenir que Tinterdiction de 
recevoir des novices fut levée. Malheureusement, c'était en 
1750, dans le moment où Tassemblée du clergé était aux 



* D. Calmelet, loc, ciU 

* Edit du ij avril 1742, Arch, nat, M. 4$. — Le recteur de Besançon, 
frère Bardenet, refusa toute communicatto/i {Ibid., M, 71). 

* Voy. le Mémoire de Tlntendant de Franche-Comté. Arch, du Douhs, c«b 
ii| (Intendance). — V. aussi, Diptom.y U II, les Avis d'juitr.es* Intendants 



SUPPRESSION DÉFINITIVE DE L*ORDRE EN f RANGE 315 

prises avec la cour, au sujet delà déclaration du clergé ; le 
nonce jugea que toutes ses remontrances seraient inutiles : 
il se tut *. 

Pendant ce temps, le sieur Pépin profitait de sa situation 
d'administrateur général pour extorquer aux recteurs le 
plus d'argent qu'il pouvait, sous prétexte de les défendre 
auprès de la cour. Ces sommes ne suffisant pas à son avidité, 
il s'appropriait le revenu des maisons vacantes. Chargé en 
1747, par le recteur de StefiFansfeld, de protester contre une 
pension de mille livres assignée sur sa maison, il enleva 
en effet cette pension à son destinataire, mais ce fut pour 
la partager avec son digne acolyte Tousart ; ce dernier, du 
reste, n'en profita pas longtemps, car il mourut peu après, 
âgé de quatre vingt deux ans. 

Pépin semblait s'être donné la mission d'anéantir ce qui 
restait en France de ce malheureux ordre. Il s'y prit de 
diverses manières. S'étant emparé de la commanderie 
d'Auray, à la mort du dernier titulaire, il eut l'idée bizarre 
de consacrer les maisons du Saint-Esprit à former des 
élèves pour l'école militaire, projetée par un édit de l'année 
1751. Il congédia donc les pauvres d'Auray et mit à leur 
place six jeunes enfants, qu'il prétendait sortis des meil- 
leures familles de la province, et auxquels il donna un 
costume bleu, avec la double croix du Saint-Esprit. Dans 
une demande d'approbation adressée au roi, il se faisait 
fort, si on lui abandonnait les biens de l'Ordre, d'élever 
ainsi plus de cinq cents gentilshommes. Il renia à l'Ordre 
la qualité de régulier, qu'il avait pourtant défendue avec 
force dans un Placet * imprimé en 1743, et soutint, dans un 
nouvel écrit où il renouvelait toutes les extravagances du 
siècle précédent, que l'Ordre était noble et militaire. 



* D. Calmelet, chap. VII. . . 

* Idée générale de l'ordre hospitalier du Saint-Esprit de Montpellier t Paris, 174;, 
in-8® de 56 p. 



.Jl6 L*ÉOfT DE RÉmnON A SAlHT-LâZAKB 

Toutes ses tentatives de ce côté échouèrent. Il tenta une 
autre voie, et, au mois de septembre 1759, il notifiait à tous 
les recteurs une lettre du ministre et une décision du 
Conseil en dix articles, « qui enjoignait à tous les comman- 
deurs et chanoines de TOrdre dVnvoyer sur le champ leur 
consentement à son extinction, à la réunion de ses biens à 
Tordre séculier et militaire de Saint-Lazare, à leur séculari- 
sation et incorporation de leurs personnes àoettedievalerie, 
sous l'autorité de Mgrr le duc de Berry, qui en est grand 
maître '. » Cinq seulement des religieux fléchirent devant 
les menaces de Pépin et la crainte du ministre, et donnèrent 
Tadhésion demandée*, à Tinsu de leurs recteurs. Devant 
les protestations des autres, le ministre, pour lever les 
scrupules de leur conscience, fit solliciter à Rome ', par le 
conseil de Tordre de Saint-Lazare, une bulle de réunion 
des deux ordres, ce que le Pape finit par accorder, le 3 jan- 
vier 1762. Le sieur Pépin se réjouissait de son succès, et s'ap- 
prêtait à seconder de toutes ses forces Tévèque d'Auxerre, 
nommé exécuteur de la bulle, lorsqu'un jugement flétris- 
sant rendu contre lui * vint Tarréter en le privant de tous 
ses titres, au mois de septembre 1763. Il est remarquable 
que ce personnage remuant eut la même fin que tous les 
intrus ses prédécesseurs : au moment où ses manœuvres 
allaient être couronnées de succès, la Providence Tarrèta\ 
Frère Alexandre-Joseph-Rémond de Bellecin, religieux 
de Besançon et recteur de Saint-Julien, hérita du titre de 
vicaire et administrateur général, que lui valut son adhé- 
sion à la bulle d'union. 



* D. Calmelet, chap. VII. 

* Voy. Capitulations ou conditions proposées par MM, du Saint-Esprit de 
Montpellier, avant de donner leur consentement à l'union et à Vextinction de leur 
ordre à celui de St Lazare, 1759, ms. — Arch. nat, M. 4$, n« 12. 

* Brevet de S. M. du i"" février 1760^ portant permission de solliciter une buUe 
d'union ; — Bulle de Clément XIII, du ^ janvier 1762 ; — Lettres patentes du 22 
juin 176}, Arch. nat , M. 42, n^ i. 

' D. Calmelet, loc, citp 
•Ibid, 



SUPPRESSION DliFINITIVB DS l'oRDRB EN FRANCE JI7 

Nous allons assister encore une fois à la lutte entre les 
deux ordres. Celui de Saint-Lazare, ne voulant pas s'ex;* 
poser à voir sa proie lui échapper de nouveau, résolut de 
mener vivement la prise de possession. Appuyé sur le 
consentement de frère de Bellecin à Texécution de la bulle, 
donné sans pouvoir des autres membres et sans délégation 
d'un chapitre général, Tabbé de Cambacérès, prit posses-^ 
sion des ruines de Thôpital de Montpellier, au nom du bu- 
reau de Saint-Lazare, le i6 avril 1764. Il en fit autant de 
plusieurs autres hôpitaux de la région, qui n'avaient pas 
de titulaires. Après ce facile succès, les efforts se portèrent 
sur les maisons régulières. Le 6 décembre de la même 
année, le commandeur et les religieux de Dijon reçurent 
assignation pour comparaître par devant Tabbé Duchatel, 
commissaire de l'évèque d'Auxerre, chargé de fulminer la 
bulle d'union. Frère Calmelet avait préparé sa défense; il 
n'eut pas de peine à démontrer que cette bulle, ayant été 
obtenue par l'ordre de Saint-Lazare, sans le consentement 
de celui du Saint-Esprit, et sur des motifs erronés, était 
nulle et obreptice ; en conséquence il fit opposition à son 
exécution. Il se hâta de prévenir les autres recteurs contre 
les surprises des commissaires de Saint-Lazare. Aussi, 
lorsque ces derniers arrivèrent à Besançon, munis des 
lettres du comte de Saint-Florentin, vicaire général pen- 
dant la minorité du Dauphin, et du ministre Choiseul, 
ils trouvèrent toutes les autorités contraires, et le parle- 
ment refusa nettement d'enregistrer la bulle. 

Impuissants à Besançon et dans tout le ressort du parle- 
ment de Franche-Comté, les commissaires voulurent du 
moins surprendre les maisons d'Alsace. Mais là encore ils 
furent déçus. Le jour même de leur arrivée à Steffansfeld, 
le grand conseil d'Alsace, prévenu à la hâte, se réunit 
extraordinairement et leur fit défense expresse de procé* 
der à aucune visite, sécularisation ou union des maisons du 
Saint-Esprit situées en Alsace, avant d'avoir fait enregistrer 



)l8 L'iDIT DB RiUHiOlf A SàlNT-LAZàRB 

les arrêts, lettres patentes et bulles sur lesquelles ils pré- 
tendaient appuyer leurs opérations. Devant une résistance 
si résolue, les pauvres commissaires durent se résigner au 
départ '. Le cardinal de Rohan--Guéménée, évéque de 
Strasbourg, prit ses hospitaliers sous sa protection, et leur 
permit de se recruter par des novices, de sorte quHls subsis- 
tèrent jusqu'à la révolution. 

Dijon fut moins heureux. La connivence du bureau de 
Thôpital de la Charité fut la cause qui en amena la perte. 
Le 17 mai 1768, un traité passé entre M. Bouhier de 
Lantenay, délégué du Bureau, et le comte de Saint- 
Florentin, partagea les biens des hospitaliers entre les deux 
parties : Thôpital s'adjugeait les bâtiments, les fonds et les 
cens situés à Dijon ; Tordre de Saint-Lazare recevait les 
domaines plus éloignés et la maison de Fouvent^ destinés à 
former une commanderie. Frère Calmelet s'opposa naturel- 
lement à ce partage qui le dépouillait sans même Tentendre. 
Peut-être, grâce à l'appui du gouverneur de Bourgogne, 
le marquis de laTour-du-Pin, baron de Fouvent ■, aurait-il 
réussi à l'empêcher, sa vie durant. Mais on lui fit com- 
prendre, dit-il, que, l'extinction de l'Ordre étant inévitable 
par suite de son défaut de recrutement, il ne lui servirait 
de rien de se raidir contre les volontés royales, et il finit 
par consentir au traité, moyennant une pension annuelle 
de 1 500 livres^ la jouissance des bâtiments d'habitation, la 
liberté de finir ses jours au service de l'hôpital, et enfin 
une pension de 800 livres au frère Petit, son dernier 
religieux, s'il survivait au commandeur*. 

Telle fut la fin de cette belle maison hospitalière de 
Dijon, où pendant cinq siècles les disciples de Gui de 
Montpellier avaient répandu à pleines mains les bienfaits. 



* D. Calmelet, chap. VII. 

* Calmelet était originaire de Fouvent, où sa famille avait en pendant plus 
d*un siècle la justice de cette baronnte {Ibid.) 

* D. Calmelet, Ufid. 



SUPPRESSION DÉFINITIVB DE l'ORDRE EN FRANCS JIÇ 

.La dernière satisfaction du bon commandeur, frère 
Calmelet, après plus de trente ans de service, fut de pen- 
ser que les biens de sa chère maison continueraient à servir 
au soulagement des pauvres et des orphelins, selon le but 
des fondateurs ; car Thôpital de la Charité, issu du Saint- 
Esprit, héritait de ses œuvres de miséricorde. 

Dans la Franche-Comté, Textinction des religieux ne fut 
due, ni à Tordre de Saint-Lazare, ni à la bulle de Clément 
XIII, qui furent impuissants, mais uniquement à Tinter- 
:dictionqui leur avait été faite de recevoii-des novices. Par 
suite de cette interdiction, la maison-mère de Besançon fut 
obligée, par le défaut de sujets, de renoncer successivement 
à la direction de tous les hôpitaux de la province. 

A Poligny, après la mort de frère Jean-Baptiste Bas 
(1756), il n'y eut plus qu'un administrateur ecclésiastique, 
pris dans le clergé de la ville. Un prêtre séculier avait 
également succédé, en 1760, à frère Mathieu Guillemin, 
commandeur de Neufchâteau ; l'année suivante, mourut 
frère Jacques Jacob, qui avait été recteur de Vaucouleurs 
pendant plus de quarante ans. Jean-François Bullet. frère 
du célèbre érudit, travaillait lui-même depuis dix-neuf ans 
à rebâtir son hôpital d'Arlay, lorsqu'un jour, en 1759, on 
le trouva sans vie dans la carrière de son enclos ; une 
grosse pierre l'avait écrasé*. Frère Archimbaud, trente- 
huitième et dernier recteur de Gray, mourut en 1771 ; toute 
la ville, par l'organe de ses magistrats, « rendit un respec- 
tueux hommage à sa mémoire, à ses vertus et au soin tout 
particulier qu'il avait des enfants trouvés". » Enfin, à 
Besançon, les religieux s'étaient éteints peu à peu, le 
vieux commandeur, Nicolas Bardenet, finit par demeurer 
seul. Trop infirme pour pouvoir suffire au service spirituel 
de l'hôpital, il fit abandon de ses droits à la mense conven* 



• Abry d'Arcier, Histoire du bourg <fAr/tf/, p. jço, 

* J. Gauthier, Notice hist, sur Vhôpital de Gray^ p. p. 



)lo L*iDrr DC nÈcwtov â SAnrr-LâZAKt 

toelle. moyennant une pension de 1 500 Irares^ et 
à Tours 1772;. où il momut en 1780 *. 



Ainsi finit en France, dans sa brandie mascnfiae cc 
principale, cet ordre si longtemps illustré par sa splendcsr 
et surtout par ses bienfaits. Les rois de France, 
teurs naturels, furent la première cause de sa 
en le séparant de son chef, le grand mahre ramain ; 
relâcher les liens de Tobéissance. c'est ouvrir la porte à 
tous les désordres. Quand, plus tard, les maisons demeiirées 
fidèles prirent à cœur de relever les ruines accumulées par 
le protestantisme et les milices d'aventuriers, la même 
cause \'int paraljser tous leurs efforts. Sans chef, inhabiles 
à combattre les intrigues nouées à la cour, ils étaient 
condamnés à succomber. Et Louis XV, en défimdant k 
rOrdre de se recruter, le frappa au cœur, bien plus sûre- 
ment que lorsqu'il le livra, vingt ans après, aux chevaliers 
de Saint-Lazare et du Mont-Carmel. 

Cependant, hâtons-nous de le dire, notre ordre ne périt 
pas tout entier, et les hôpitaux de Lorraine et de Franche - 
Comté ne cessèrent point de jouir de ses bienfaits : nous 
allons voir les sœurs du Saint-Esprit, demeurées seules, 
continuer courageusement la mission de charité qu^aupa- 
ravant elles partageaient avec leurs frères. 



* A. Castaa, Notice, II, p 190. 




jtfwagMig^g^ag^g^^ 



CHAPITRE XI 



LES SŒURS DU SAINT-ESPRIT 



XVni'-XIX' SIÈCLES 




lOMME on Ta vu dans le cours de cette histoire, 
l'ordre du Saint-Esprit fut composé, dès ses 
premières années, de frères et de sœurs. Chaque 
hôpital contenait donc deux communautés distinctes, mais 
régies par un seul maître et adonnées aux mêmes œuvres 
charitables. Les sœurs, dans les maisons moins importantes 
surtout, furent souvent les plus nombreuses ; le personnel 
de ces maisons se composait en général du recteur, seul 
ou assisté d'un religieux, et de trois à cinq sœurs. Cette 
prédominence de l'élément féminin était déjà très sensible 
dès la fin du XV* siècle, où les frères entraient presque tous 
dans les saints ordres ; elle le devint bien davantage au 
XVII% et les sœurs tendirent de plus en plus à assumer 
seules, dans les hôpitauxdu Saint-Esprit, le service matériel, 
qui, en même temps, se spécialisait dans le soin principal 
des enfants abandonnés. Le rôle des religieux se borna dès 
lors à l'administration spirituelle et temporelle des établis- 
sements ; et lorsque cette dernière leur fut enlevée par 
les municipalités, ils furent réduits à n'être dans leurs 
hôpitaux que de simples chapelains ou aumôniers. 

21 



322 LES SOEURS DU SAINT-ESPUr 

Au milieu des désastres amoncelés aux XVI« et XVH* siè- 
cles, les hôpitaux de Franche-Comté, ruinés et abandonnés 
pour la plupart, avaient perdu leurs familles de sœurs. 
A Besançon même, plusieurs pestes successives avaient 
tellement décimé la communauté, pourtant nombreuse, 
qu'il n'était pas resté une seule religieuse. Il fallait à tout 
prix remédier à cette triste situation. Par bonheur, 
Thôpital de Dijon abritait alors une communauté nom- 
breuse et pleine de ferveur. Jean-Jacques Despoutot, 
commandeur magistral de Besançon, s'adressa donc à 
frère Robert, recteur de Dijon, qui lui confia, en 1665, 
deux sœurs intelligentes et pieuses. Celles-ci, après avoir 
formé de nouveaux sujets à Besançon, retournèrent pour le 
reste de leurs jours dans leur maison professe. 

Malheureusement, la prospérité même de la communauté 
Dijonnaise fut cause de sa ruine. Par raison d'économie ', 
un arrêt de Tannée 1695 décida d'abord la réduction 
progressive des religieuses jusqu'au nombre de quatre 
seulement, qui furent laissées entièrement à la charge de 
la mense conventuelle des frères ; puis, bientôt après, les 
revenus des frères suffisant à peine à leur entretien, le 
recteur dut se résigner à laisser s'éteindre la communauté 
des sœurs. I^ dernière religieuse mourut en 1722, à l'âge 
de quatre-vingt-quatre ans, sans avoir cessé jusqu'au bout 
de consacrer ses soins aux enfants de l'hôpital *. 

La communauté des sœurs de Besançon eut une exis- 
tence plus longue et plus prospère. Grâce aux nombreuses 
novices qui se présentèrent, elles furent, au bout de peu de 
temps, en état d'envoyer des essaims dans les hôpitaux de 
Gray, de Poligny, d'Arlay, de Vaucouleurs et de Neuf- 
château, qui, par leurs soins, redevinrent florissants '. 



* Les sœurs du Stint- Esprit faisaient double emploi avec celles de Sainte* 
Marthe, placées dans le nouvel hôpiul, annexe du Saint-Esprit, en xô&i. 

* D. Calmelet, chap. VII. 

* Itid, 



Chaque maison recrutait elle-même son personnel suivant 
ses besoins, par l'admission de jeunes novices. En 1680, 
frère Simon Pageot, recteur de Gray, était secondé par 
deux sœurs; plus tard, il y en eut communément cinq ' ; 
Neufchâteau en possédait six en 1730, Vaucouleurs trois en 
1749, tandis qu'au même temps leur nombre était de 
quatorze à Besançon ; enfin la moyenne à Poligny était de 
quatre ou cinq religieuses. 

Toutes les sœurs appartenaient à la première bourgeoisie 
et on exigeait, à leur profession, une dot de 2000 livres, 
plus un trousseau estimé à 1000 livres, afin d'écarter les 
postulantes de la classe pauvre, dont l'éducation aurait pu 
n'être pas en harmonie avec la vie et les occupations aux- 
quelles elles étaient destinées *. 

Les six communautés reçurent, en 1709, du commandeur 
de Besançon, frère Poncet Perraud, un règlement commun, 
tiré de la règle de l'Ordre et accommodé à leur situation 
particulière. Le commandeur magistral se réservait d'au- 
toriser les recteurs de sa dépendance à recevoir la profession 
des novices, lorsque, ayant reçu l'habit après une épreuve 
de six mois, elles seraient, après six autres mois, jugées 
dignes par les religieuses de faire profession. L'une des 
religieuses, ordinairement la plus ancienne, était placée au 
dessus des autres et chargée de veiller sur leur conduite. 
La pauvreté la plus stricte devait être gardée : défense 
était faite de rien conserver en propre, pas même les 
menus objets offerts par les parents, sans l'agrément de la 
maîtresse ou ancienne. 

Le lever était à cinq heures en été, à cinq heures et^ 
demie en hiver '. La prière et la méditation se faisaient en^ 
Commun. A la place de l'office canonial, les sœurs récitaient* 



* J. Gauthier, Notice, pp. 26, 39, 14. 

* Règlement conservé à la maison de Poligny. 

* Les règlements postérieurs mirent quatre heures «t quatre beuires«t demie. 



;24 LES SOnJRS DU SànrF-ESPRÎT 

cent cinquante pater^ autant que possible dans le temps 
marqué pour les heures canoniales. Elles se confessaient et 
communiaient une fois la semaine. Lorsqu'une d'elles avait 
obtenu permission de sortir de la maison, elle devait se faire 
accompagner. La lecture pendant les repas, les jeûnes 
chaque vendredi, les obligations relatives aux enfants et 
aux malades, ne faisaient que renouveler les anciennes 
prescriptions. Telle était en substance la règle des hospita- 
lières du Saint-Esprit, règle encore en vigueur aujourdliui 
sans modifications notables. 

On aurait pu craindre que Textinction de la branche mâle 
de rOrdre, dans la seconde moitié du siècle, n'atteignit 
aussi lescommunautés annexes de sœurs; heureusement il 
n'en fut rien. La résistance combinée des relig^ieux et des 
administrations municipales avait réussi à sauveg^arder 
les maisons de l'annexion à l'ordre de Saint-Lazare. Les 
villes, une fois maîtresses de leurs hôpitaux, n'eurent g^arde 
de renvoyer les sœurs, qui leur rendaient de si éminents 
services ; elles les laissèrent à leur poste de dévouement. 
Mais comme Tordre du Saint-Esprit était aboli en France, 
et que d'ailleurs il était impossible aux sœurs de se rattacher 
au grand maître romain, elles prirent le parti de rentrer 
dans le droit commun, en se plaçant sous la sauvegarde 
et la juridiction de leurs évêques diocésains. 

Les religieuses de Poligny donnèrent l'exemple : « Vojrant, 
dit l'historien de cette ville, l'état dépérissant de l'ordre du 
Saint-Esprit, la vacance de la place de grand maître dudit 
ordre (en France), elles ont, par mon avis, supplié Mgfr le 
cardinal de Choiseul, archevêque de Besançon, de les pren- 
dre sous sa protection et juridiction, en quoi elles ont 
donné un exemple salutaire à suivre aux autres maisons*. » 
Cet exemple fut en effet suivi par celles de Gray, en 1771, 



• Chevalier, No/«ii?w», f» jj v», volome noncoté, ik la Bibl dePoligny. 



xvni*-xix* SIÈCLES 325 

et de Besançon, Tannée suivante, lors de la retraite du 
dernier commandeur. Cinq ans plus tard, Tévêque de Toul 
reçut celles de Neuf château et de Vaucouleurs '. 

Ce fut là le seul changement opéré dans la vie des reli- 
gieuses. Dès lors, les visites, les nominations de supérieures 
et d'aumôniers, enfin tous les pouvoirs des commandeurs 
magistraux passèrent aux mains de l'administration épis- 
copale. On voit, par les registres des communautés de 
Poligny et Neuf château, que les visites canoniques 
étaient faites très régulièrement par des vicaires généraux, 
qui rendaient pleine justice, dans leurs rapports, à la 
fervente régularité de nos hospitalières, comme aussi bien 
leur dévouement et leur charité leur avaient conquis depuis 
longtemps l'attachement des populations. 

Le seul événement que nous ayons à signaler à cette 
époque, dans l'existence de nos maisons, est l'incendie qui 
dévora Neuf château, le 14 octobre 1779. Les écuries et 
remises, la salle des malades, le logement des religieuses, 
la pharmacie, la première travée de la chapelle et l'élé- 
gante tour hexagonale du clocher, furent détruits par les 
flammes. Ce désastre fut réparé en deux ans : la ville et les 
campagnes avoisinantes se hâtèrent ^de fournir de fortes 
sommes pour la restauration d'un établissement qui leur 
rendait des services signalés ; le patrimoine des sœurs, 
qu'elles abandonnèrent généreusement, acheva de couvrir 
les dépenses. 

Dix ans après, la révolution éclatait. Tout le monde 
connaît les attentats consommés à cette époque néfaste. 

Le sort de nos hospitalières suivit celui des communautés 
religieuses ; leurs bienfaits passés ne leur servirent pas de 
sauvegarde. En 179 1, le maire de Poligny , usant du pouvoir 



* Ms des archives de la maison de Poligny. — L*hôpital d*ArIay*ayant été 
réuni à cette époque à celui de Besançon, sa dernière hospitalière, la mère 
de Belot, Agée et infirme, se retira à Poligny. — Abry-d'Arcier, Histoire du bourg 



)26 LES SOUKS DU SAnrfE3PUT 

que lui conférait la loi du 14 octobre 1790, procédait à 
Télection d'une supérieure et d'une économe ; les sœurs 
étaient alors au nombre de sept. L'intervention^ malveil- 
lante le plus souvent^ de l'autorité civile dans l'administra- 
tion des hôpitaux^ n'était que le prélude d'attentats plus 
redoutables ; ce furent, à bref délai, la prohibition des 
vœux et l'interdiction de recevoir des novices, puis enfin 
l'abolition même de l'état religieux et la suppreâion du 
costume. Le 9 juin 1792, ordre fut donné aux sœurs de 
Polig^y de prêter le serment schismatique, sinon, d'avoir 
à quitter leur poste. Placées dans l'alternative de renoncer 
à leur mission de charité, ou de renier leur foi, elles durent 
se résigner à quitter leurs chers orphelins. Celles de 
Besançon et de Vaucouleurs subirent le même sort. Quant 
aux sœurs de Neufchâteau^ malgré leur refus énergique 
de prêter le serment^ elles furent tolérées, à condition de 
quitter le costimie religieux ; mais si elles demeurèrent 
à leur poste d'honneur, ce fut au prix de rudes épreuves : 
a Nourries de pain de munition, obligées de loger jour et 
nuit au milieu des malades et des mourants sans le moin- 
dre salaire, forcées de quêter même leurs vêtements, en but 
à la surveillance la plus étroite, » c'est ainsi qu'elles tra- 
versèrent l'orage. Après la tourmente, la supérieure était 
dévorée par un cancer incurable, une autre sœur était 
paralysée pour la vie, une seule demeurait valide. 

Expulsées de leur maison, les sœurs de Poligny ne se 
crurent pas déliées de leurs obligations charitables ; elles 
se livrèrent gratuitement au soin des malades dans l'hôpi- 
tal de la ville % en attendant des jours meilleurs. Leur 
concours, repoussé de « l'hospice des enfants de la patrie, » 
comme on appelait alors la maison du Saint-Esprit, y eût été 



« Ce fut grâce à la protection constante et dévouée de MM. Etienne Monnier 
et Fromond, procureurs syndics, qu*elies durent la faveur de passer dans 
l*h6pital les années terribles, sans ôtre inquiétées. Elles étaient alors au 
nombre de quatre. 



XVIII*-XIX* SIÈCLES J27 

pourtant plus nécessaire que jamais. Le nombre des enfants 
abandonnés augmentait dans des proportions efiFrayantes, 
par suite du relâchement extrême des mœurs, et la plupart 
périssaient, faute de soins '. Aussi, lorsque sœur Elisabeth 
Grandvaux, jugeant les circonstances favorables, se mit sur 
les rangs, en 1795, pour une place devenue vacante à 
l'hospice, les administrateurs du district s'empressèrent 
d'apostiller sa demande, et l'administration centrale la mit 
à la tète de l'établissement, qu'elle servait depuis plus de 
quarante ans. 

Après la révolution, les deux seules communautés dé 
Poligny et Neufchâteau purent se reformer dans leurs 
maisons, mais dans quel état d'amoindrissement ! Les trois 
sœurs de Neut château reprirent solennellement l'habit dû 
Saint-Esprit, le dimanche 3 mars 1805 et reçurent en même 
temps plusieurs novices. Ce fut le 10 juin de l'année sui- 
vante, que les sœurs Thérèse Parraud et Constance Guyon, 
seules survivantes de la communauté de Poligny, rentrèrent 
en fonctions dans leur hospice, devenu asile départemental 
des enfants assistés. 

Restait une grosse difficulté ; il fallait obtenir l'autori-' 
satiôn gouvernementale, pour le rétablissement des 
communautés. Ce ne fut qu'après bien des déms^rches, et 
grâce à l'intervention pressante des évèques de leurs 
diocèses respectifs, que nos hospitalières obtinrent enfin, 
le 8 novembre 18 10, le décret impérial qui autorisait leur 
rétablissement et homologuait leurs statuts, conformes à la 
règle suivie avant la révolution . Dès lors leur avenir était 
assuré et elles purent se livrer sans craintes pour l'avenir à 
leur mission bienfaisante. En 181 2, la maison lorraine 



* Le Directoire du district de Poligny proposait à cette situation un remède 
digne de l'époque: « Puisque Tadoption, disait-il dans son rapport, cette 
vertu si sublime, n*est pas encore connue et mise en pratique, Topinion ne 
pourrait-elle donc pas forcer les citoyennes muscadines à prendre soin d'un 
de ces enfants dès sa naissance ? • Il ne manquait plus que de voir les femmes 
honnêtes obligées par la Révolution à élever les enfants du libertinage! A/i- 
nuaire du Jura, 185^, p. 90. 



% 



}28 LIS taoRS DO SAorr 

comptait déjà sept professes. Celle de Pol^rny fat pins 
lente à se reconstitiier ; cette année même, la mort préma- 
tniée d^ane 8<enr rédoisait à deox religieuses la oommananté ; 
heorensement, de jeunes postniantes vin rent pr é se r v er c ette 
maison d'one nouvelle mine. 

Cest ainsi que la seconde brandie de Tordre dn Saint- 
Esprit échappa, bien amoindrie, il est vrai, an nanfrage 
qui engloutit tant d'ordres anciens et illustres. 

Quel était, pendant ce temps^ le sort de nos hApitaux 
étrangers? Nous aurions voulu pouvoir les suivre jusqu'au 
moment où les frères et les sœurs du Saint-Esprit en furent 
déchargés ; mais nos recherches sur ce point sont demeurées 
à peu près infructueuses. Nous savons seulement que 
Benoit XIV enleva aux frères d'Espagne, en 1741,1a juri- 
diction sur les sœurs, pour la confier aux évêques * ; ce feût 
semble indiquer que la branche aînée était alors sur son 
déclin. Laplupartdes hôpitaux d'Espagne et d'Italie parais- 
sent avoir été gouvernés, dès la fin du siècle dernier, par 
une administration séculière ; mais l'Ordre en conservait 
encore quelques-uns au commencement de celui-ci. En 
Allemagne^ l'hôpital de Memmingen avait survécu à la 
Réforme. Mais, comme nous l'avons dit, la ville en avait 
pris l'administration, tout en laissant les frères à la tète du 
service, avec une mense séparée pour leur subsistance. Le 
logement des frères ou monastère était situé dans la partie 
supérieure, et les salles des malades au rez-de-chaussée 
d'un bâtiment unique^ appelé le grand hôpital. Le recteur 
fut honoré de la prélature en 1752. La communauté sub- 
sista jusqu'en 1803, où elle fut supprimée par suite de 
l'annexion de Memmingen à la Bavière. L'église sert au- 
jourd'hui de magasin à la douane*. 



* Bref de Benoit XIV, conservé à la communauté de Cracovie. 

* Renseignements donnés par M. J. Pross, président de VUnion des Anih 
quaires de Memmingen. 



XVIII«-XIX» SIÈCLES J29 

Quant au chef de TOrdre, il survécut longtemps encore 
à la ruine de ses membres. Au commencement du siècle, 
l'administration française avait enlevé au grand maître, 
comme aux directeurs de tous les hôpitaux de Rome, la 
direction de Sainte-Marie in SaxiUj pour la confier à une 
commission centrale des hospices. Ce régime dura peu ; 
Pie VII rétablit, en 1811, les hospices romains dans leur 
autonomie. En 1826, sous Léon XII, nouvelle organisation 
des établissements de bienfaisance ; ils formèrent un seul 
corps, avec une administration unique et une commission 
directive, présidée. par le commandeur de Sainte-Marie. 
Mais nonobstant le zèle déployé par les administrateurs. 
Pie VIII décréta de nouveau, trois ans après, Tautonomie 
complète des hospices, et Thôpitaldu Saint-Esprit fut rendu 
au grand maître. Cet état dura jusqu'à Tavènement de 
Pie IX. L'illustre pontife crut devoir prononcer. Tannée 
même de son élévation au trône pontifical (1846), la sup- 
pression des chanoines réguliers de Sainte-Marie inSaxia^ 
derniers survivants de Tordre du Saint-Esprit. Le motif de 
cette mesure fut probablement le petit nombre des repré- 
sentants de cet ordre illustre, devenus impuissants à 
soutenir la charge d'un établissement si considérable. Mais 
si l'hôpital de Sainte-Marie a perdu le grand ordre qu'il 
abrita durant tant de siècles, du moins « toutes les œuvres 
de Gui sont encore aujourd'hui pratiquées dans ses immen- 
ses salles, et cet hôpital, le plus vaste et le plus complet 
peut-être du monde, après avoir été inféodé à des établis- 
sements charitables depuis plus de douze siècles, continue 
et continuera d'être pendant bien des siècles, dit Mgr 
Gerbet, le majorât perpétuel de la bienfaisance chrétienne*. » 

En parlant des maisons étrangères à la France, nous 
devons une mention spéciale à celle de Cracovie, qui 



* Mgr Pauliniery p. 96. 



ÏJO 



LB sons 00 suBForsfr 



portage avec Pol^y et Neofdi&teaa le privilège d'avoir 
sorvéco k tous les or^es. Dès le XVII' aède, les «sors 
avaient le soin exclusif de l'hôpital, que les relîgîeiix ne 
faisaient qu'administrer. Elles visitaient aussi les malade» 
& domicile. Lors de la peste de 1707 et 1708, sept d'entre 
elles payèrent on tribat héroïque an fléau. En 1741, Benoit 
XIV les mit sous la jarïdiction de l'évéqne. Le «-awiinai 
lipski, alors titnl^re du siège épiscopal de Cracovie, leur 
donna aussitôt pour supérieur un chanoine de son di^itre, 
homme de grand mérite, et approuva leurs constitutions. 




Fig. 10. — Ancien 



Mais là -comme partout, le vent de l'épreuvedevait passer. - 
Au commencement du siècle {1801), le gouvernement 
s'empara de l'hôpital et interna les sœurs dans un couvent 
de Carmes, dont il avait expulsé les possesseurs. Bientôt, à 
la suite des privations de toutes sortes qu'elles endurèrent, 
le nombre des pauvres religieuses fut réduit et deux; c'était 
le but du gouvernement, qui les plaça alors, l'une chez les 
Bernardines, l'autre chez les Dominicaines de. la ville. C'en 



XViU«-XIX« SIÈCLES JJI 

était fait, semble-t-il, de la pieuse communauté. Mais la 
Providence n'avait permis cette extrémité que pour lui 
rendre une ^e nouvelle et la fortifier par la tribulation. 
En 1850, deux saints prêtres, Tabbé Gladysiewicz, admir 
nistrateur du diocèse, et Tabbé Piatkowski, de concert avec 
la comtesse Wodricka, formèrent le projet de rétablir la 
communauté. Le monastère, a£fecté à un hospice de vieil- 
lards, étant devenu vacant, fut racheté, et, le 27 octobre 
1851, la dernière survivante des sœurs du Saint-Esprit en 
reprenait possession, accompagnée d'une visitandine et de 
six jeunes professes, qui venaient d'achever leur noviciat 
au couvent de la Visitation.* Un saint Jésuite, le P. Buchta, 
renouvela leurs règlements et établit la clôture. Comme 
les sœurs ne pouvaient plus se livrer à l'ancienne vocation 
de l'Ordre, elles obtinrent Tautorisation d'ouvrir une école, 
qui en peu de temps est devenue un pensionnat très floris- 
sant. Elles sont aujourd'hui au nombre de vingt. Un legs 
important de l'abbé Gladysiewicz, leur principal restaura- 
teur, assure à la communauté un aumônier clîoisi parmi 
les prêtres les plus méritants, et la subsistandb est fournie 
par les pensions des élèves et une subvention annuelle de 
1000 florins, faite par la ville *. 

Achevons d'esquisser l'histoire de nos deux communautés 
de Poligny et Neufchâteau. 

Après le décret impérial de 18 10, qui les replaçait au 
rang d'institutions publiques et leur assurait, à l'abri des 
lois, la stabilité indispensable, elles jouirent d'une période 
de tranquillité féconde. Leurs ressources fort modestes 
suffisaient à peine à leurs nécessités les plus impérieuses ; 
mais elles supportaient joyeusement les privations^ du 



* Nous empruntons ces renseignements à notre correspondance avec la 
R. M. Supérieure de Cracovie. 



))2 LES SŒURS DO 8AINT-4SPRIT 

moment qu'il leur était permis de se consacrer à leur sainte 
vocation. 

Suivant les dispositions de la loi du 17 décembre 1796, 
les hospices dépositaires d'enfants trouvés ne devaient 
conserver ces enfants qu'à partir de Tàge de cinq ans, âge 
où les nourrices les rendaient, jusqu'à douze ans, où ils 
devaient être placés en condition, à Texception des seuls 
infirmes. Les sœurs de Poligny ne trouvaient point, dans 
le soin de ces enfants, un aliment suffisant à leur activité. 
Elles demandèrent et obtinrent, en 1807, l'autorisation 
d'ouvrir un pensionnat pour les jeunes filles de la ville et 
des environs, désireuses de recevoir une éducation plus 
soignée ; puis^ en 18 10, la même administration, par une 
dérogation unique en France à la loi de 1796, leur permit 
de garder les jeunes filles à l'hospice, au lieu de les placer 
en condition dans les campagnes, au grand préjudice de 
leur moralité et de leur avenir. Cette mesure, encouragée 
par le conseil général et les préfets, donna pendant plus de 
trente ans les plus heureux résultats. L'augmentation des 
dépenses occasionnées par cette prolongation de séjour était 
compensée en grande partie par le travail de ces jeunes 
filles, et le Conseil général, comprenant l'importance morale 
d'une telle œuvre, votait chaque année des secours à Thos- 
pice. Malheureusement les inspecteurs du gouvernement, 
dans leur zèle pour l'uniformité administrative, voyaient 
d'un tout autre œil cette situation, qu'ils considéraient 
comme une dérogation intolérable à la loi ; ils firent tant 
que le ministre donna ordre, en 1839, de ne conserver à 
l'avenir aucun enfant au dessus de douze ans. On alla plus 
loin ; l'hospice fut réduit au rôle de simple dépôt et les en- 
fants de six à douze ans furent répartis entre les hôpitaux des 
chefs-lieux d'arrondissements. C'était menacer la commu- 
nauté dans son existence même, en lui enlevant sa principale 
raison d'être. Il n'était que trop facile de prévoir que si les 
pauvres religieuses n'avaient pas été congédiées immé- 



XVIII»-XIX* SIÈCLES JJJ 

diatement, elles ne tarderaient pas à Têtre. Il fallait se 
prémunir, afin de n'être pas pris au dépourvu. Mgr de 
Chamon, évêque de St Claude, songeait alors à fonder dans 
son diocèse une congrégation de sœurs enseignantes, pour 
les écoles des campagnes; il jeta les yeux sur notre com- 
munauté, qui reçut avec bonheur ses ouvertures à ce sujet. 
Le principal obstacle venait de la commission administra- 
tive de Thospice, qui s'opposait à toute admission de 
novices, sous prétexte de ne point augmenter les charges, 
qui incombaient au département. Fortes d'une décision 
ministérielle, les sœurs passèrent outre et établirent un 
noviciat, en ayant soin toutefois de n'en laisser aucune 
charge au budget de l'hospice, et dès l'année 1846, elles se 
trouvaient en mesure d'accepter la direction de la salle 
d'asile de Poligny et de plusieurs écoles communales 
importantes. 

Enfin, le 19 juin 1854, ^^ arrêté préfectoral retira à la 
communauté la propriété de l'hospice qui appartenait à 
l'ordre du Saint-Esprit, de par la volonté même des fonda- 
teurs, et le réunit à l'Hôtel-Dieu de la ville. 

A Neufchâteau, cette même interdiction opposée à la for- 
mation de jeunes novices s'était terminée également, après 
un long procès, par la dépossession des religieuses, en 1842. 
Elles se retirèrent proche de la ville, au village de Rouceux, 
dans la maison paternelle de leur supérieure, augmentée 
d'un nouveau bâtiment. Là elles purent, mais au prix de 
privations sans nombre, ouvrir un noviciat, donner asile à 
quelques vieillards ou infirmes et continuer à visiter les 
malades de la ville. 

Les sœurs de Poligny, dépossédées elles aussi, durent 
songer à se créer un établissement. Le 22 juin 1854, Mgr 
Mabille, évêque du diocèse, bénit solennellement la pre- 
mière pierre d'une nouvelle maison, et quatre ans après, la 
communauté y trouvait un asile vaste et parfaitement 
aménagé. 



}j4 LO scnnts d9 sâmr-ESPRrr 



' Devenues libres et indépendantes de tonte senritndé 
administrative^ nos deux communautés ont pu se dévelop- 
per à leur aise et prendre une importance de jour en jour 
plus considérable. 

Aujourd'hui, la maison-mère de Rouceux comprend plus 
de soixante sœurs professes. Cinq d'entre elles ont été 
rappelées, en 1 852 , à la direction de l'hôpital de Neufchâtcau 
par la municipalité, revenue à des sentiments plus équita- 
bles et mieux entendus ; elles desservent en outre six autres 
hospices, et plusieurs maisons nouvelles ne tarderont pas 
à se fonder. La maison de Poligny a pris une extension 
plus grande encore, en raison de la plus grande variété 
des œuvres auxquelles elle se consacre. Ses cent vingt 
religieuses tiennent un pensionnat et des écoles florissantes 
dans la maison-mère, à laquelle est annexé un orphelinat, 
dû aux libéralités de Mgr Mabille, et où quarante orphe- 
lines sont élevées gratuitement. Elles desservent les 
hôpitaux des villes de Morez et Nozeroy, l'asile départe- 
mental des vieillards, à Lons-le-Saunier ; vingt-cinq écoles 
primaires leur sont confiées, et partout ces institutrices 
dévouées consacrent leurs instants de repos à la visite et à 
l'assistance des malades à domicile. 

C'est ainsi que le nom et l'esprit de l'ordre fondé par Gui 
de Montpellier revit dans ses derniers rejetons. L'ordre du 
Saint-Esprit, suscité par la Providence, était venu à son 
heure, en cette époque du moyen-âge où la foi catholique 
fleurissait et s'épanouissait en œuvres de toutes sortes à la 
surface de la terre. Dans cet immense et magnifique concert 
des vertus chrétiennes, soit actives, soit contemplatives, il 
devait représenter la charité agissante, l'amour du prochain 
pauvre, souffrant et délaissé ; il devait être l'instrument 
prédestiné pour disséminer à travers le monde le feu divin 
sorti du cœur même de Notre-Seigneur. Et nous avons vu 
dans cette histoire comment il s'était magnifiquement 



XVIII*-XIX' SIÈCLES JJÎ 

acquitté, avec l'aide et la bénédiction de Dieu, de sa tâche 
providentielle. Avec le temps, d'autres sont venus, qui ont 
été appelés à la même vocation. Mais, dans les lieux mêmes 
où son nom s'est perdu, son œuvre subsiste encore. Com- 
bien de maisons élevées par lui, ombragées longtemps de 
la double croix, s'ouvrent encore aux misères humaines i 
Combien de lieux où la première tradition de l'exercice de 
la charité chrétienne remonte aux fils de Gui de Montpellier! 
Héritières d'un si grand nom, dépositaires de traditions 
si vénérables et si glorieuses, les sœurs du Saint-Esprit ne 
laisseront point périr le précieux dépôt remis entre leurs 
mains. Dans les fondations nouvelles que leur a fait em- 
brasser la nécessité des temps, dans l'œuvre si importante 
de l'éducation de la jeunesse, comme dans l'assistance des 
malades, c'est toujours la charité de Notre-Seigneur qui les 
anime, c'est toujours l'esprit de l'illustre fondateur qui 
revit dans l'âme de ses enfants. Le vieux tronc n'est pas 
mort : « Sa jeunesse s'est renouvelée comme celle de 
l'aigle; » il a produit un rameau plein de sève et de 
vigueur qui portera des fruits abondants. Pour longtemps 
encore, notre siècle léguera aux siècles futurs, comme un 
de ses plus précieux héritages, cet ordre du Saint-Esprit, 
le plus ancien et le plus illustre des grands ordres hospi- 
taliers du moyen-âge. 




TROISIÈME PARTIE 



FOUILLÉ 



OU 



NOMENCLATURE DES HOPITAUX 
DE L'ORDRE DU SAINT-ESPRIT 



zt 



FRANCE ' 



AIX, Bouches-du-Rhône. — Suivant les Annales de la 
Sainte Eglise d'Aix^ Thèpîtal du Saint-Esprit de cette 
ville fut fondé vers l'an 1213. H se déchargea plus tard, 
lors de la fondation de l'Hôtel-Dieu de St. Jacques, du soin 
« des enfants trouvés ou bâtards », moyennant une rente 
de 489 écus. Il est probable néanmoins que Thôpital du 
Saint-Esprit conserva toujours les orphelins légitimes. Il 
devint promptement un prieuré conventuel important, dont 
relevaient Brignoles, Correns, Lambesc, Pertuis, Rians, 
Rougiers, St. Vallier, et les riches confréries de Gonfaron, 
(xrambois, Jouques, PeyroUes, Porrion (Visite de 1288). 
L'état de la maison, pour le spirituel et le temporel, était 
florissant lors de la visite de, frère Mouette. Elle n'est 
cependant citée dans les bulles qu'à partir de Grégoire XI, 
en 1372. Frère Géraud Méchery fut pourvu en 1409 
(Diplom., II, p. 215). En 1431, Antoine de Dijon donna à 
frère Jean Benoit, prieur d'Aix et vicaire général de 
Guérin Teler, de Montpellier, une bastide importante, dont 
le revenu montait encore, au XVII* siècle, à 200 livres 



* Comme nous ne répéterons pas, dans ces notices succinctes, ce qui a été 
dit au cours de l'ouvrage, le lecteur voudra bien, pour les compléter, se repor- 
ter aux Tables qui terminent le volume. 

Afin d'épargner la place, nous avons abrégé les mots qui reviennent le plus 
souvent, tels que : hôp. pour hôpital, — confr, pour confrérie, — dép. pour 
dépendant. — (Y.) indique l'Acte de Visite de F. Jean Monette, en n88, et (P.) 
le Fouillé du Diplomata. . 



^^ rsaui 



I J 4, 3K ♦ 



{Arch. mat.. S x?tiz. 4?;/S)l Fiire Jeu? k 

<» F»sir% y4rrlE. i2> Ibmu. lit. C. f >ffX- I>CKEI3£B3: 
Oâxtzssl ea jocduact à thre de hfe a f &ce, de|s«âs 3^1. 
k^rM;s'to arrêt <le lia Cbambre roraSe (1^74) tm onkimai 
<res Caire nmse â St Lazare ÇDiphnm,. IL p. 21^^ Eb 
i;^. U frère Cha&us Toktuxa. proies deTOidrcfiitt 
msàsUam eo yMStsaiaa -par le Grand CooseO (IKd-, H- 
214;. Le reresni de cette matsoo était alors éfaloê à 1200 
Uvres. (/oelqoes années aq»rës« elle fnt réunie â Iliâintal 
général {pouillé*. U. p. 413). 

ALBIA. — P Hôpital dépendant de Toolon (V. 12S8 ; 
Diplom., IL p. 373% 

AJIBILLOUf Maine-et-Lcrire. — Maladrerie dépendant 
d*Angers 'V. i28fl). 

AMIENS. — Cette maison ne nous est connue qne par le 
catalogue de Jfeldnor de la Vallée (Arck. rom.). 

ASlASEfAgnane, Aignani), Hérault. — HAp.d^Msn. 
dant de Montpellier (Pouilli, p. 447 ; Bolle de Grégoire 
XI (1372). 

ANGERS. — Cette ville reçnt, dès le courant du Xiii* 
siècle, une colonie de lliftpital de Dijon. La maison était 
déjà florissante en 1288 et dépassait son chef parle nombre 
de ses filiations. Elle jouissait i ce moment d'une lépro- 
serie en dehors des portes de la ville, de lliApital du Lion 
d'Angers, et des maladreries d'Ambillou, Brissac, Champ- 
tocé, Châteauneuf, Saumur, auxquelles vinrent successi- 
vement s'adjoindre les hôpitaux de Beaugé, Chemillé, 
Pontis Londone, Longue, La Magdeleine, Mérannes, 
Ponts-de-Cé, Les Rosiers, Sablé et Teurdres. Malgré son 
importance, Angers fut toujoiu^ sous la dépendance de 
Dijon. L'ordre de St. Lazare en prit possession, en vertu de 



' Nous citons id le Poalllé impHniéâ Is tuhe d« Diplamatâr dont 
avont trouvé les indications généralement exactes. 



DE l'ordre du saint-esprit 341 

l'édit de 1672. Mais le recteur de Dijon, frère Joseph 
Dupont, ayant prouvé son droit par une suite de titres, 
par devant l'Intendant, M. de Chauvelin, obtint en 1710 
un arrêt qui lui rendit cette maison {Diplotn., II, p. 234), 
dans laquelle quatre frères donnaient Thospitalité à 250 
pauvres {Arch. nat.^ M. 45, S. 4913). Voici les noms de 
quelques recteurs : Frère François Hudrin, nommé en 
1519 {Arch. rom.y lib. E, f* 197) ; — F. Jean Busson, 1538 
{Fouillé, p. ^12); — F. Nicolas Philippe, 15/^$ {Arch. 
rom.j lib. K, f* 143) ; — F. Jean de Petitpas, 1548 
(Ibid., lib. 37, ^57).— Bulles, à partir de Gégoire XI 
(1372) ; Notice au Fouillé, II, p. 412. 

ANGrOULÊME. — Selon M. le D'. Grigon, il y avait au 
moyen-âge trois hôpitaux à Angoulème : Saint-Michel 
d'Entraigues, hors les murs, Saint-Michel d' Angoulème, 
dans la ville, et TAumônerie de S. Pierre ou du Chapitre'. 
Lequel des trois a appartenu à Tordre du Saint-Esprit ? Le 
premier probablement, car les hôpitaux de l'Ordre étaient 
le plus souvent situés à l'entrée des villes. Quoiqu'il en soit, 
la maison d'Angoulème était conventuelle en 1288, et les 
religieux, d'une conduite exemplaire. Les maisons de Pont 
et de Olino en dépendaient (V. 1288). La bulle de 1372 
la cite. Elle fut réunie à l'hôpital général {Fouillé, p.435.) 

ANSOUIS (Ansonis), Vaucluse. — Hôp. dépendant de 
Steffansfeld en 1288. L'ordre de St. Lazare en a joui 
{Fouillé, p. 438). 

ANTIBES, Alpes Marit. — Hôp. dépendant de Toulon 
(V. 1285) ; passé à l'ordre de St. Lazare {Fouillé, p. 427). 

ARAMON? {De Aragnano, Aragnone, Araignon), 
Gard, diocèse d'Aix {Fouillé, p. 448). — Prieuré hospi- 
talier dép. de Beaucaire, cité dans la Visite de 1288, la 
bulle de Grégoire XI et le catalogue de Melchior de la 



' Note sur les anciens hôpitaux et les maisons de secours di, la viUt d^Angou* 
iém» (BuU. de la Soc archéol. de la Charente, 4* série, t. V, 1867). 



}42 raunxi ns aormunL 

Vallée. Noos en oonnaisscxiis les f ec tenrs suivante : Frère 
Joseph Hokofiui, nommé en 1502 {Arch. ram.^ B, t^ i), 
qui passa i Marseille (1515) et résigna en fiiwear de frère 
Albert de Velleheuve {Ibid., lîb. 28, f 76) ; — F. Jeas- 
Baptiste Caseluo, en 1548 {Ibid.j lib. M^ f 66). 

ARBOIS, Jura. — Gnillanme de la Pierre, d'Arbois, 
écnyer, donna, le 25 mars 1360, à lliApital de Besan po o , 
des terres et des maisons à Arbois, poor s*aaaocier an 
oeuvres de charité de cette maison. Un frère dn Saint* 
Esprit devait résider dans les nonveanx domaines à 
perpétuité ; mais ce service cessa vers 1420 (A. Castan, 
Notice^ II, p. 212). — Deux confréries existaient en outre 
à Arbois ; Tune, située au faubourg de Changin, possédait 
une maison et une chapelle, qui fut reb&tie en 1665 ; eOe 
fut unie à lliApital en 1687. L'autre était érigée dai» 
Téglise Saint-Just dés avant Tannée 1 303 et fut ^ralement 
unie i Thôpital, en 1681 {Arch. de Vhôp. iArhoiSj A. 

37i38t58)- 
ARC-EN-BARROIS, Hte Marne. — H6p. dépendant 

deSaulx(V.). 

ARCS (LES), Var. — Confrérie dépendante de Fréjns. 
Elle donna une pension de 200 livres à Tordre de St. Lazare, 
depuis Tédit d'union jusqu'en 1693 (V. — Pouilléj p. 429). 

ARINTHOD, Jura. — Cet hôp. était du nombre des 
cinq fondés par Jean de Chalon-Arlay^ vers Tannée 1301 
(Voy. p. 221). Il fut administré dès lors par un recteur 
relevant de celui de Besançon. Détruit au cours des 
guerres de Louis XI, il ne paraît pas qu'il ait été rétabli 
depuis. Ses revenus furent définitivement adjugés à Besan- 
çon en 1708 (Rousset, Dict. hist. des communes du 
Jura, I, 73). 

ARLAY, Jura. — Nous avons raconté (p. 222) la fonda- 
tion de Thôpital d'Arlay. V Histoire du Bourg d*Arlay, 
par B. Abry d'Arcier, contient (pp. 378-391) une notice 
assez détaillée de cette maison. Nous nous contenterons de 



DE l'ordre du saint-esprit J4} 

renvoyer le lecteur à cet ouvrage et de. dire en quelques 
mots les destinées de Thôpital. Louis XI Tincendia, dans le 
siège de 1479; ce fut le commencement des calamités. 
Deux autres incendies arrivèrent en 1569 et 1595; cette 
fois il demeura en ruines pendant quarante ans. Frère Jean 
Marchand travaillait enfin à le rétablir, quand les Français, 
qui assiégeaient Bletterans, sous les ordres du duc de 
Longueville, vinrent brûler Arlay et n'épargnèrent pas la 
maison des pauvres. Ce ne fut qu'en 1731 que le frère Jean 
Bullet se remit àl'œuvre de restauration, qui finit par lui 
coûter la vie, comme nous l'avons raconté. — La confrérie 
remontait à l'origine même de l'établissement, car on 
trouve des donations depuis l'année 1330. Les seigneurs.de 
Chalon, de Vienne, de Rufifey, et toute la noblesse d' Arlay 
en faisaient partie. La fête de la Pentecôte était très solen- 
nelle et célèbre dans le pays (Voy. aux Arch. de Besançon^ 
chap. IfU"* 2, les nombreux documents relatifs à cet hôpital). 

ARLES. — Prieuré conventuel, sur lequel les rensei- 
gnements nous font défaut. Il fut réuni à l'hôpital de la 
ville (Pouillé, p. 435). 

AUBAGNE, B.-du-Rhône. — Hôp. fondé par Marseille 
(Fabre, Hop. de Marseille^ I, p. 47 ; — Mortreuil,Z'A(J^. 
du Saint-Esprit de Marseille^ p. 180 et sv.). 

AUBRAC (Damnerie d'), Aveyron. — Hôp. cité à tort, 
croyons-nous, par les documents du XVII* siècle, comme 
ayant appartenu à l'Ordre. 

AUCH. — Il y avait dans cette ville des chapelles et 
des prébendes appartenant à l'hôp. de Bassoues d'Armagnac 
(V.) ; nous ignorons si elles ont jamais formé un hôpital 
complet. 

AUDIGNON, Landes. — Une des premières fondations 
d'Auray, citée dans la bulle d'Honorius III, en 1220, la 
Visite de 1288 et les actes capitulaires d'Auray, des années 
1308, 1312 et 1319 (Diplom.j II, p. 376-379). Le 23 août 
1320, frère Pierre Martin, précepteur d'Auray, institua 



)44 HHJOLi DBS WOmàXJX 

frère Paul de KoRTi prêtre et profès de VOrdre^ reètenr 
de ThAintal d' Aàdignon, vacant par la mort de firère Joseph 
DE Villeneuve {Ibid.^ p. 271). Un religieux de Besaaçc», 
Nicolas Pierre, en tut pourvu en 1569 (Arch. rom.y lib. 
Q, f* 100) ; mais ThApital était ruiné. On lit en effet, clans 
un acte du temps : « En est c(»nmandear M* Pierre Du* 
brocai prêtre dud. lieu. L'hôpital de lad. oommasderie a 
été bruUé. Antoine de S. Genès s'est emparé des fiefk ; M* 
Armand de Peyseronne s'est emparé de la prairie et d'un 
taillis, et plusieurs autres du revenu de lad. commanderief 
les tous de ladite religion, et ledit Dubroca ne leur ose 
contredire » {Procès verbal de l'état des églises du 
Diocèse d*Aire, du 5 octobre 1571, Bull. d'Auch, 1. 1, p. 
460). Après l'union de l'hôpital à St. Lazare, un chanoine 
de Bajronne jouit de ses revenus, qui montaient alors k 
800 livres environ, et y faisait dire une messe par semaine. 
Le Procureur général, frère Bullet, y nomma frère De- 
MANDRE, religieux de Besançon, en vertu de l'arrêt de 
1722. La confrérie était alors encore florissante (Donation 
à Idifrérie^ 18 février 1740, Etude de Mugron (Landes)^ 
Broca, notaire ; '^Pouilléy p. 421 ; — Fouillé du dioc. 
d'Aire^ de 1749, par l'abbé Cazauran, p. 50). 

AURAY, Morbihan. — La tradition porte que la célèbre 
maison conventuelle d'Auray fut fondée par les ducs de 
Bretagne, vers le commencement du XIIP siècle. Le pre- 
mier document qui la mentionne est la bulle d'Honorius 
III, du 23 novembre 1220, par laquelle ce pape prit sous 
la protection de S. Pierre l'hôpital et toutes ses dépen- 
dances, au nombre de vingt-quatre, à savoir : L'église 
paroissiale de S. Gildas et son annexe en dehors des murs, 
les hôpitaux de Saint-Malo, Pont-Saint-Esprit, Mandet, 
Saint-Girons, Taberta^ Audiguon, Millau, l'Hospitalet, 
Bergerac, Libourne, Saint - Jean - d'Angely, Fauvette, 
Mayenne, Montmorillon, Lectoure, La Plagne, Nantes, 
Tour-de-Bas, Tonnerre avec sa maladrerie, Coutances et 



DE X'ORDRE DU SiUMTrBSPRIT )4$ 

ses dépendances de Valognes et Saint-Lô (^Diplom.j I« P* 
i6). Un nombre si considérable de maisons filiales créées 
en un temps si restreint, est ime preuve de la puissante 
vitalité de la maison magistrale d'Auray dès son origine • 
Elle la conserva durant tout le XIII' siècle, à la fin duquel 
son célèbre recteur, frère Jean Monette, lui donna un 
nouvel éclat. A sa mort, le total des hôpitaux filiaux 
d'Auray montait au nombre de cinquante, en y comprenant 
ceux fondés par plusieurs de ses dépendances. Il avait alors 
le premier rang en France ; frère Monette y tenait ré- 
gulièrement les chapitres annuels de sa province. Les actes 
de ti:ois d'entre eux ont été Conservés ; on y voit que 
beaucoup de recteurs des maisons françaises y assistaient, 
outrelessujetsd'Auray(jD//>Z()m.,II,p. 376,377, ^'jq'yPièces 
justif., n^'IV.). Il présidait encore son chapitre le 19 no- 
vembre 1 319, en présence de ses frères y les précepteurs de 
Marseille, Besançon, Troyes, Dijon, et d'un bon nombre de 
ses fils ; mais il mourut peu après, car on voit, au mois 
d'août 1320, frère Pierre Martin faire une nomination 
en qualité de recteur (Jbid.y p. 271). La prospérité d'Auray 
dut disparaître sur la fin du XI V^ siècle : dès 1434 en eflFet, 
on trouve l'hôpital livré à un commandeur séculier et les 
registres romains n'en font plus mention ; des maîtres 
étrangers à l'Ordre l'occupaient encore en 1535 et 1572 
(JDiplom.y II, p. 5, 265, 27o).LaTerrade et Désescures y 
nommèrent de leurs sujets (/6i^., p. 266) ; puis l'ordre de. 
St. Lazare en pourvut M. de Châteaurenaud, lieutenant 
général des armées navales (1674). Après la désunion, 
Charles Mignon, clerc tonsuré, l'obtint de Louis XIV, 
comme un simple bénéfice (1693). Mais frère Michel DE 
France de Vandeuil, religieux distingué de Dijon, en 
fut pourvu par l'Ordre et plaida contre le S^ Mignon, sur le- 
quel il l'obtint par arrêt du Grand Conseil, en 171 5 (Ibid.^ 
P- 253 ; — Pouilléj p. 412). Le revenu était alors de 4.000 
livres. Frère Adrien de Biville, commandeur de Dijon, ea 



;fS pODiLii DIS Bonrâoz 

fit la visite en 1737. Noos avons dit les tentatives de P^iin 
Dumontet pour le transformer en école militaire. Les bâ- 
timents servent aiqoordliui à on oollëge; on 7 voit encore^ 
encastré dans on des mais,.an tombean du XV* siède (P. 
Arthur Martin, Le Pèlerinage de Sainte Anne d'Auraj^ 
Vannes, 1864). 

AURIAC, Hte-Garonne ( Le Fouillé écrit à tort 
Orillac).— H6p. dépendant de Millau en 1288 (V.). Occapè 
par St. Lazare, il fut réuni, après Tédit de 1693, à lli^. 
de Bourg«Saint-Bemard (Pouilli, p. 426). 

AURIOL, B.-du-R]i6ne..— HApital dépendant de 
Steffansfeld en 1288 (V.) ; il n'en restait que la confrérie, 
lorsque St. Lazare en prit possession {Fouillé, p. 438). 

AVIGNON. — Nous avons dit, p. 181, ce qu on sait de 
cette maison ; elle se trouve citée dans le Catalc^^e de 
Meldiior de la Vallée {Arch. rom.). 

BAGNOLE, Var. — Hôpital et confrérie dépendants de 
Fréjus (V.), dont s'empara Tordre de St. Lazare ; mais 
Thôpital fut rendu à la confrérie, par arrêt du 3 août 1693 
{Pouillé, p. 439). 

BALDIÈRE (?).— Confrérie dépendante de Fréjus (V.). 

BARDONNÊCHE, Piémont, autrefois Dauphiné. — Il 
y avait, dans la vallée de Bardonnèche, plusieurs hôpi- 
taux relevant de Besançon (V.). Après leur occupation par 
Tordre de St. Lazare, leurs biens furent incorporés à 
Thôpital de Sézanne (Pouillé, p. 447) . 

BARENTON, Manche. — Maladrerie dépend, de Stef- 
fansfeld (V.). 

BARGARRITO (De) (?). — Hôp. cité dans le Catal. de 
Melchior de la Vallée [Arch. rom.). 

BARGEMONT {De Berjamone), Var. — Hôp. et con- 
frérie, cités dans la bulle de 1372, et dont St. Lazare a 
joui (Pouillé, p. 439). 

BARJAC, Gard. — Hôp. des premiers fondés par Gmi 
de Montpellier ; il est cité dans la seconde bulle dlnnocent 



DE L ORDRE DU SAINT-ESPRIT }47 

III, en 1198, et dans celles de 1225, 1291, 1294, 1343, etc. 

BARRAN, Gers, {Barrin^ dans la visite de 1288). — 
Hôp. dépend, de Millau. 

BAR-SUR-AUBE, Aube. — Hôp . fondé par celui de 
Dijon et de sa dépendance. Il est cité dans les bulles de 
1256, 1291, 1294, 1343, 1372, etc. D'après un terrier de 
Dijon (1450), il devait à celui-ci une responsion de 6 fr. 
Voici les noms de quelques recteurs : Frère Henri, maître 
et recteur de l'hôpital, concluait, en 1304 , un accord avec 
le prieur de S. Pierre de Bar-sur- Aube {Arch. nat.^ M. 
45). — Frère Pierre Tarlot, nommé en 1585, permuta 
en 1595 avec le recteur de Dijon, frère Boulachin. — 
Frère Raillard, 1681. — Frère François Maréchal, 
nommé en 1693, démissionna en 17 10. — Frère Etienne 
Barberot^(i7io). — Frère Tous art s'en fit pourvoir en 
1725 ; mais le cardinal de Polignac, voyant qu'il s'obstinait 
à ne point garder la résidence, l'obligea à se démettre en 
1739. — Frère Couché lui succéda et mourut peu après ; 
puis vînt frère PissAUD (1740), auparavant recteur de 
Fouvent. Tous ces recteurs, à l'exception des deux derniers, 
avaient été nommés par les commandeurs de Dijon (D. 
Calmelet, Hist. ms, passim). D'après l'inventaire des ar- 
chives de Bar-sur-Aube, dressé par D. Maréchal, en 1777, 
(Coll. Moreau, t. 325), il ne restait plus alors dans l'hôpital 
que trois religieuses. (^Les archives de B-s-A. avant 
lySç, par le C** de Barthélémy, Soc. d*agric.^ se. et arts 
de VAube, 1885, p. 311). 

BASSOUES D'ARMAGNAC, Gers. — Maison-mère, 
dont relevaient les chapelles et prébendes d'Auch, ainsi 
que les hôpitaux de Biran et Bretagne (V.). 

BATZ, Loire-Inf . — L'hôp. du Saint-Esprit du bourg de 
Bat^ est mentionné dans une visite épiscopale de 1563,- à 
propos d'une chapellenie qui s'y desservait. La chapelle 
était petite et surmontée, à la moitié de sa longueur, d'un 
logement pour les malades, selon l'usage dans les petits 



I4B 

hApitaox de TOrdre. Les chevalien de Se 
dirent. On en vojrait encore les raines en 1842 (L. 
Assistance publique dans la Loire Infériamre 
1789, diap. VT). 

BAUGÉ, M.-et-Loire. — HAp. dépend. d*Angers. {Ardu 
naU, JL 4j). 

BAULAC (Le), Gironde. — Ancien hApital de Tordre 
de Saint-Jacqnes de rEpée^ qni appartenait à Tordre dn 
Saint-Esprit en 1305, car an mois de join de cette année* 
le précepteor de MontpdUer 7 nommait rectenr firëre Bbr.- 
KARD de Horto Bano^ aliàs de Casanbon, prêtre et prcAs 
de TOrdre. On connaît d*aatres nominations, en 13^5, 
1417, 1470, 1473 (Arch. nat.j S. 4817, 4913). LliAp. est 
mentionné dans la V. de 1288 et la bnlle de Gr^oire XI. 
Ses biens forent unis à St. Lazare, puis à lliApital de Basas 
{Fouillé, p. 435). 

BAYONNE. — H6p. dépend. d'Agen (V.). Il était sitné 
dans le qoartier du Bout-du-Pont ; sa jnremière mention est 
de 1243. Il se transforma, au bout de trois siècles et grâce 
à la faveur de Louis XI, en une riche et puissante collé- 
giale. (Balasque et Dulaurens. Etudes hist. sur Bayonne, 
t. II, p. 180). 

BEAUCAIRE, Gard {Bellicardi). — Hôp. du St-Es- 
prit dont dépendaient Aramon et Lescure (V.). Cité dans la 
bulle de 1372 (Voy. Tabbé Azaîs, La Charité à Nîmes; 
voy. ce nom). 

BEAUNE, Côte-d'Or. — Il y avait à Beaune, au moyen- 
&gGi quatre hôpitaux, que la fameuse fondation de Nicolas 
RoUin absorba successivement par la suite. L'hôpital de 
S. Pierre, destiné aux malades et aux pauvres passants, 
était situé sur la route de Chalon à Dijon. Dans le courant 
du XIII* siècle, il fut cédé à Tordre du Saint-Esprit et 
administré par des religieux sortis de la maison conven* 
tuelle de Saulx, dont il dépendit dès lors. Il est cité dans la 
visite de 1.288, et par conséquent le dernier historien de 



DE l'ordre DU SAlMT-BSnUT )4$ 

Beaune, M. Rossignol^ se trompe, lorsqu'il assigne â Tan- 
née 1350 environ le passage de cet hôpital à Tordre du 
St-Esprit. Antoine de Salins, chanoine de Beaune et rec- 
teur du St-£sprit, en reconstruisit les bâtiments. Mais ils fu- 
rent en partie rasés, pour faire place aux fossés et aux murs 
de la ville, en 1358, année de la prise d'Auxerre parles 
Anglais. Ce qui restait en 1443 consistait en une maison, 
où se trouvait une salle de douze lits et un autel, plus une 
chamhrette à trois lits, où Ton transportait les moribonds 
et les femmes en couches ; en outre, deux pièces ser- 
vaient. Tune de logement au recteur et à trois servantes, 
Tautre, de cuisine, dans laquelle une vaste cheminée per- 
mettait aux pauvres et aux enfants de se chauffer pendant 
l'hiver. Une écurie pour quatre vaches et quatre porcs, et 
un jardin, complétaient ce petit établissement. Il subsista, 
mais en déclinant chaque jour, jusqu'en 161 8, où il fut 
réuni à THôtel-Dieu. La confrérie lui survécut (Gandelot, 
Hist. de la ville de Beaune^ 1772, p. 68 ; -— Rossignol, 
Hist. de Beaune^ 186 ; J. Carlet, ProcèS'^verbal extrait 
d'un reg. dit de la confrérie du Saint-Esprit..., Soc. 
d'histoire... de Beaune, 1882, p. 75-81). 

BEAUSSET (Le), Var. [De Busseta, Buj^eta). — 
Hôp. de la dépendance de Toulouse (V.), réuni à St. La- 
zare, puis rendu aux confrères (Fouillé, p. 440.) 

BEAUVAIS. — Hôp. du Saint-Esprit. (Catal. rom.) 

BEL- ARBRE. (Bélabre, Indre ?) — Le Fouillé le place 
dans le diocèse de Coutances. C'était un hôpital dépendant 
de Saint-Lô {Fouillé, p. 437). 

BELIN, Gironde, -i- Hôp. dépend, de Bordeaux, cité 
dans la Visite de 1288 et la bulle de Grégoire XI (1372). 

BELLEGARDE, Gard. — Hôp. uni à St. Lazare, puisj 
le 15 février 1697, à l'hôpital de Saragnac {Fouillé, p« 

439)- 
BERGERAC. — Hôp. conventuel de la dépendance 

dlAuray. Il existait dès Tannée 1220, car il. est oompris 



}50 POUILLÉ DB^HOPinilX 

dans la bulle d'Honorins III, en favenr d^Amj. Les- mai- 
sons de' Thésiers et de Ponte Banone en dépesdaient* 
Après sa désttnicm de St. Lazare, le curé de . Bergerac 
s'en fit potmroir ; il. fit enfin retour à l*HâtelrDiea: 
{Pouilléj p; 421 ; «• Pergot, . Les origines chrétiennes 
des hâp. du Pirigord : IV, hôp. de Bergerac). 

BESANÇON, Donbs. — Nous avons rapporté la fonda- 
tion de ce. célèbre hôpital (Voy. p. 173 et aussi la TaUe). 
Il nous suffira de donner ici la liste des recteurs, en^ ren-- 
voyant pour de plus grands détails à la- Notice de M.. A. 
Castan. — I. Frère Benoit, vivait en 1 243; — II. F. Pierre 
DE LiESLE, -f 1292. — III. F. Etienne de Malans, +- 
1306.. — IV. F. Pierre de Lyon, + 1350. — V. F. Bar- 

THÉLEBCY BOCHET DE SaINT-OYEND, + 1387. — VI. P.. 

Hugues de Vénère, + 1392. — VII.. F. Jean de Saint- 
Oyend, + 1395. —VIII. F. Pierre VAUDRiBT,de Fouvent, 
-f 1422. — IX. F. Antoine Amion, de Mamay, -f 1427. 

— X. F. Lambelet Vernier, + 1476.. — XI. Antoine de 
Rigney, -f* 14799 commandeur, sans^ avoir fait profession. — 

XII. F. Jacques Garnier, révoqué le 25 avril 1481. -^ 

XIII. Jacques de Prel, évincé avant 1482 ; il n'était pas 
religieux. — XIV. F. Guillaume de Bercy, démi^. en 
1504. — XV. F. Richard Guyot, + 1510. — XVI. F. 
Etienne Millet, + 151 9.— XVII. F. Thomas Michelot, 
+ 1529. — XVIII. F. Claude Buffet, + 1545. — XIX. 
F, Claude Buffet (le jeune), + 1573. — XX^F. Jean 
Buffet, + 1585. — XXI. F.François de Chassagne, + 
1592. — XXII. F. Henri Treffard, + 16 15. — XXIII^ 
F. Claude Nazey, + 1635. — XXIV. F. Claude Pécaud 
+ 1659. — XXV. F. Jean-Jacques Despoutot, + 1672^ 

— XXVI. Noble Antoine d'Orchamps, abdiqua en 1673 
en faveur de son frère. — XXVII. Noble Claude-Fïcan- 
çois d'Orchamps, évincé en 1678, parce qu'il ne prit pa3 
l'habit- ~ XXVni. F. Denis Beuque, + 1705, — XXIX. 
F. Jeax*£tienn£ Grandvoynet, «t* 1706» --^ XXX« F. 



DE L^ORDRE DU SAINT-ESPRIT 35 1 

PONCET PERRAUD, + 1721. — XXXI. F. ADRIEN BUL-" 

LET, évîncé en 1734 par arrêt du parlement. XXXII. F. 
Nicolas Bardenet, dernîercommandeur, démissionnaire 
au 28 août 1772. — La communauté des sœurs subsista jus* 
qu'au 18 août 1792. 

BESOUCE, Gard, — Hôp. dépend, de Nîmes et cité 
dans la Visite de 1288. Après sa désunion de Tordre de St^- 
Lazare, il passa à Thôp. de Saragnac (Pouilléy p. 439.) 

BESSAUT, Landes. — Commanderie importante dé 
Tordre de St. Jacques deTEpée, située dans ime forêt, au 
nord de Lencouacq, en un lieu appelé aujourd'hui THôpital.* 
Elle passa à Tordre du Saint-Esprit au commencement du 
XIII* siècle. C'était en 1288 un prieuré conventuel ; cepen- 
dant le recteur de Montpellier y nommait en 1325 (Ar^A. 
hat.j 5. 481'f). Cette maison est citée dans la bulle dé Gré- 
goire XI (1372). Les Calvinistes la brûlèrent dans les 
troubles de 1565. Après sa désunion de Tordre de St. 
Lazare, ses bienst dont le revenu montait alors à 1 800 livres, 
furent réunis à l'hôpital de Mont-de-Marsan (Pouilléj p. 
422 ; — voy. aussi : Baron de CdLuna,^ Lencouacq, Bessaut 
et l'ordre de St. Jacques de VEpée^ Petite revue catholique 
du dioc. d'Aire et de Dax, 1872 ; — L'abbé Pardiac, Hist. 
de St. Jacques le Majeur et du pèlerinage dé S. Jacques 
de Compostelle^ Revue de Gascogne, t. IV- VI ; — Adr. 
Lavergne, Les chemins de S. Jacques en Gascogne^ ibid. 
t. XX, 1879). 

BÉZIERS. — L'hôp. du Saint-Esprit de Béziers était 
conventuel en 1288 ; Cazères et la maladrerie de la ville en 
dépendaient ; mais il relevait lui-même de Montpellier (V.); 
Est-ce le même établissement que l'hôpital St. Jacques, 
appelé aussi l'hôpital Mage ? Nous le pensons, car M. Ant. 
Soucaille, dans sa notice sur cette maison, dit qu'elle était 
desservie par des sœurs du Saint-Esprit *: L'administration 



r ' Noiice sur l'Hôtel^Dieu Saint-Jacques ou hôp. Mage de Béliers, Bull, de It 
âàc.^châol. de Bézierkf 1881-1882, p. )tu 



)52 fôtmii DIS HomAot 

municipale y installa^ en 1646, des religieuses de la Charité 
Notre-Dame de Paris (Ihid.). C'est donc à tort que le 
Fouillé dit que les sœurs du Saint-Esprit Tadministraient 
encore en itzo (Fouillé^ p. 424). 

BORDEAUX. — Prieuré conventuel important, dont 
relevaient les maisons de Belin, Camas, Montis Juxta flu" 
viunij la Sauvetat, de Veleto^ Malvielle (V.). HuguM 
Palesani en fut nommé prieur en 1470 (Arck. rom., lib. 
20, f 153). Nous ne savons s'il s'agit ici de l'hôpital S. 
Jamme, qui était destiné particulièrement « pour les enfants 
exposez n'estans advouez de père ny mère n (Pélleportf 
Etudes sur la charité Bordelaise, t, I,p. 35). L'hôpital du 
Saint-Esprit fut uni, au XVIP siècle, à l'Hôtel-Dieu. Son 
revenu était de 1200 livres [Pouilli^ p. 448). 

BOUCAU (Le), Basses-Pyrénées. — Hôp. de l'ordre de 
St. Jacques, passé à celui du Saint-Esprit. Il dépendait du 
prieuré d'Agen (V. ; — Fouillé j p. 448). 

BOURGES. — Cette ville possédait un hôpital du Saint- 
Esprit, d'après le Catalogue romain. 

BOURGUET (Le), Var. (Burgheti). —Confrérie, qui 
devait à Sainte-Marie deux livres de dre travaillée ^Ca/a/. 
Romain). 

BRAGAYRAC, Haute-Garonne {De Barhairaco seu 
BragairaCy Visite de 1288). — Un des premiers hôpitaux 
de rOrdre, cité dans la première bulle d'Innocent III et 
dans toutes les suivantes. Nous ne savons à quelle époque 
il a disparu. 

BRESINS, Isère. — Hôp. dép. de SteflFansfeld (V.). 
Quand St. Lazare en prit possession, il ne restait que la 
confrérie (Fouillé, p. 438). 

BRETAGNE, Gers. — Hôp. dép. de Bassoues d^Arma- 
gnac(V.), réuni à St. Lazare, qui en retirait un revenu de 
75 livres (Fouillé, p. 439). 

BRIGNOLES, Var. — Hôp. dép. d'Aix (V.). Par son 
testament du 16 juillet 1361, Ghiillaume Gilly, marchand 



DE l'ordre du SMNT-BSPRIT , J^J 

drapier à Brignoles, nomma les recteurs de Thôpital colla- 
teurs de la chapelle de Notre-Dame, dans l'église parois- 
siale de S. Sauveur, ainsi que de celle qu'il avait fondée à 
Cabasse. Il fonda en outre, pour les femmes qui allaient en 
romevage, un hospice particulier, garni de six lits, « de 
traversins, matelas et linceulx », qu'il voulut être annexé 
à l'hôpital et confié aux frères qui le desservaient [Arch. 
nat.j S. 4812). L'ordre de St. Lazare, après avoir joui de 
la maison du Saint-Esprit, dut la rendre, en vertu d'un 
arrêt du 20 juillet 1696. 

BRIOUDE, Hte-Loire. — Hôp. de l'Ordre ? 

BRISSAt, Maine-et-Loire. — Maladrerie qui relevait 
d'Angers. (V.). 

CABASSE, Var. — Confrérie ou hôp. dép. de Fréjus 
(V.). Attribuée à St. Lazare [Pouillé^ p. 440). 

CADIÈRE (La), Var. — Confrérie appelée Lacudière 
dans le Fouillé (p. 442). Des documents citent la maison 
de la confrérie en 1371 et 1537. Elle passa à l'ordre de St. 
Lazare, qui en tirait 60 livres (Ibid. ; — voy. Mortreuil, 
Hôp. du Saint-Esprit de Marseille.) 

CALLAS, Var. — Confrérie ou hôp. dép. de Fréjus (V.) 
L'ordre de St. Lazare en jouit, mais dut la rendre aux con- 
frères en 1696 {Pouilléj p. 441). 

CANDÉ, M.-et-Loire (Candoe). — Hôp. dép. de 
Coutances. (V.). 

CARCASSONNE. — Hôp. dép. de Millau (V.), cité dans 
la bulle de Grégoire XI, en 1372. 

CARNAS, Gard. — Hôp. dép. de Bordeaux, cité dans 
la visite de 1288 et la bulle de 1372. 

CAZÈRES, Hte-Garonne. — Hôp. dép. de Béziers (V.). 

CASSIS, B.^u-Rhône. — Hôp. et confrérie dép. de 
Marseille (V.), unis à St. Lazare (Pouilléj p. 440). 

CASTELLET (Le), Var. — Hôp. et confrérie dép. de 
Marseille (V.), unis à St. Lazare (Pouilléj p. 441 ; — M. 
Giraud, Dict. topogr. du canton du Bausset) • 

29 



)$4 MUILti DBS HOriTAUX 

CHABLIS, Yonne. — Maladrerie dép. deSanlx (V.). 

CHAMPTOCÉ, M.-et-Loire. — Maladrerie dép. d'An- 
gers (V.). 

CHATEAUNEUF, M.-et-Loire. — Maladrerie dép. 
d'Angers (V.). 

CHAUMONT, Hte-Mame. — Il y avait à Chaumont, an 
XVII* siècle, un hôp. et un collège du Saint-Esprit, dé- 
pendant de rOrdre ; un arrêt du 9 mai 1662 ordonna aux 
usurpateurs de le rendre aux religieux {Diplom., II, p. 
267). 

CHAUSSIN, Jura. — En 1239, Eudes de Chaussin et 
Pétronille son épouse appelèrent les frères de Besançon 
dans Thôp. fondé à Chaussin par leurs prédécesseurs 
{Arch. du DoubSj Intendencej c"^ 113). L'hôp. consistait 
en une maison avec un cimetière et un enclos. Au nombre 
de ses recteurs, on compte : Jean. Rossigneux (1468- 
1480), Pierre Carnet (1482), Jean du Louverot (1519)» 
Guillaume le bœuf, Claude Buffet, le jeune, aupara- 
vant religieux de la même maison (1543), Jean Cherté, 
tous religieux profès (Arch. du DoubSj c^n 113, Intend.). 
Contrairement aux dires d'un auteur récent (D' Briot, An- 
nales de Chaussin^ p. 53), les recteurs habitèrent Thôpital 
et le desservirent jusqu'au moment de sa destruction en 
1636. Trois ans après, Gérard Quéret, prêtre d'Auxonne, 
s'en fit pourvoir en Cour de Rome ; mais le commandeur 
de Besançon fit valoir ses droits et le parlement de Dijon lui 
donna gain de cause (1649). ^1 nomma recteur frère Ana- 
TOILE Mercbret (1636), puis frère Alexandre Barro- 
tin (1649), malgré l'opposition de la princesse de Montmo- 
rency, dame de Chaussin {Ibid.j G. 649, c9^ 134). En 1685, 
la ville de S.-Jean-de-Losne obtint une sentence du bail- 
lage^ qui unissait cet hôpital à celui de la ville, et transigea 
avec Besançon pour la cession des droits de Tordre du 
Saint-Esprit. Néanmoins, à la suite d'un legs important^ qui 
devait être consacré à son rétablissement (1709), le prince 



DE l'ordre du saint-esprit JJJ 

de Condé obtint sa désunion. Mais on ne put parvenir à le 
rétablir, et en 1762, la municipalité consentit définitive- 
ment à en céder les biens à l'hôpital de S.-j6an-de-Losne, 
moyennant le droit à deux lits dans cet hospice (Voy. D' 
Briot, op. city p. 52-58 ; — Rousset, Dict. des communes 
du Jura^ t. II, p. 62 ; Arch. hôp. de Besançon^ chap. 
xxiv). 

CHAUX. — Hôp. que nous croyons le même que Monnet. 

CHEMILLÉ, M.-et-Loîre. — Hôp. dép. d'Angers [Arch. 
nat.j M. 45). 

CHILLY-LE- VIGNOBLE, Jura. — Nous ne possédons, 
sur cet hôpital, que les renseignements donnés par M. 
Rousset {Dict. des communes du Jura ^ t. II, p. 136). Il 
fut fondé, dit cet auteur, au XV* siècle, par les seigneurs 
du lieu pour les pauvres malades, et desservi par un rec- 
teur et un frère de Tordre du Saint-Esprit. Il possédait 
une chapelle dédiée à sainte Claire et renfermait quatre 
lits. Ruiné en 1637, il cessa dès lors d'être habité. L'ordre 
de St. Lazare s'en saisit; mais un arrêt du 24 février 1 696 le 
lui retira et l'unit à l'hôpital du Saint-Esprit de Lons-le- 
Saulnier. 

CIEUTAT, Htes-Pyrénées (Cintra, Ciatra). — Hôp. 
cité avec BayoQue dans une bulle, de Nicolas V, en 1454 
[Diplom.y I,p. 81 ; — Catah rom.). 

CLAIRAC, Pyrénées-Orient. — Hôp. dép. de Mar- 
seille (V.), cité dans la bulle de 1372. Uni à St. Lazare. 
{Pouilléj p. 440). 

CLAPIER, Ave3rron {Clapo, Clapier de mala ve- 
tula). — Un des premiers hôpitaux fondés par Gui de 
Montpellier; il est cité dans les bulles de 1198, 1225, 1291, 
1372, etc. (Voy. Pergot, Les origines chrétiennes des 
hôp. du Périgord, p. 47). 

CLERMONT, Puy-de-Dôme. — L'hôpital S. Adjutor 
de Clermont appartenait à Tordre du Saint-Esprit ; c'était; 
en 1288, un prieuré magistral qui gouvernait les maisons 



156 POUnXÉ DES HOMTAUX 

de Jargeaa et Mardac ; frère Jacques Palumbus en fîit 
nommé prieur, le 17 mai 1449, et frère Jean de Cassano, le 
5 mars 1488 {Arch. Rom.^ lib. 20, T 99 ; 25, T 6). En 1626 
il n'y avait plus de religieux de TOrdre dans lliôpital ; 
mais la confrérie du Saint-Esprit, qui subsistait toujours, 
en revendiqua la propriété [Arck. de l'hâp. de Clermont, 
I. £• 6). Un arrêt contradictoire du Grand Conseil, du 9 
mai 1662, obligea plusieurs particuliers à restituer à cet 
hôpital les biens qu'ils avaient usurpés. UH6tel-Dieu de 
Clermont obtint ensuite la jouissance des revenus, qui 
jnontaient alors à 800 livres. 

. La confrérie du Saint-Esprit continua à subsister, ainsi 
que celles de Gerzat {Ibid. III., B. 225), Coumon (III., B. 
3), Lempdes, etc.^ qui s'étaient formées autour de l'hôpital 
de Clermont et en dépendaient. (Voy. Fouillée p. 434 ; — 
Invent, de Vhôp. de Clermont^ 1887). 

CONFOLENS, Charente [De Confluento). — Hôp. 
dép. de Coutances (V.). Il est cité dans les bulles, à partir 
de 1291. Son revenu montait, en 1543^ à 1.200 livres, en y 
comprenant le produit des quêtes et de la confrérie. Le 
curé du lieu en jouit ; mais il fut rendu à TOrdre en 1728 
i^Arch. nat.j M. 43, S. 4847. — Pouillé^ P- 435)- 

CONSELLEIIS (De) ?. — Hôp. cité au Catalogue ro- 
main. 

COURNON, Puy-de-Dôme. — Confrérie dép. de Cler- 
mont (Voy. ce nom). 

CORRENS,Var. — Hôp. dép.d'Aix (V.); les confrères, 
après avoir payé à St. Lazare xm cens de 30 livres, rentrè- 
rent dans leurs droits par arrêt du 16 juillet 1696 {Pouilléj 
p. 440). 

COUTANCES, Manche. — La maison conventuelle de 
Coutances, une des premières et la plus importante de la 
filiation d'Auray, fut fondée en 1 209, par Tévèque de ce lieu 
(Voy. p. 176). La bulle d'Honorius III (1220) en faveur 
d'Auray mentionne la Maison-Dieu de Coutances. En 1288, 



DE l'ordre du saint-esprit JÇ7 

ses religieux desservaient l'église de S. Pierre, la chapelle 
auxiliaire de S. Nicolas et les maisons dépendantes de 
Rouen, Pont-de-l' Arche, Le Baulac^ Candé, Confolens, 
St. Lô et Valognes. Un mémoire de Tlntendant Foucaud, 
rédigé à l'occasion des affaires de St. Lazare, atteste que 
Thôpital de Cou tances était alors desservi par un comman- 
deur, nommé frère Charles Le Courtois et six religieux 
prêtres de l'Ordre, qui exerçaient l'hospitalité envers les 
enfants trouvés, les pauvres, les soldats et les matelots. 
Son revenu montait à 6000 livres {Arch. nat., S. 4841 ; 
— Fouillé, p. 413). 

CUERS, Var. — Hôp. dép. de Toulon (V.). Après 
avoir été possédé par l'ordre de St. Lazare, il fut réuni, en 
1696, à l'hôpital de son chef-lieu {Fouillé^ p. 430). 

CUGES, B.-du-Rhône. — Hôp. et confrérie dép. de 
Marseille (V.). En 1696, la confrérie obtint sa désunion de 
St. Lazare et rentra en possession de ses droits {Fouillé^ 
p. 440). 

DAX, Landes. — Hôp. fondé en 12 17 et cité pour la 
première fois dans un titre de 1243 ; il était situé près du 
pont. Les PP. Barnabites en jouirent depuis 1 631. En 17 16, 
une délibération du corps municipal chargea M. de Boutges, 
syndic, de traiter avec la congrégation de St. Lazare, pour 
l'envoi de trois sœurs à l'hôpital du Saint-Esprit. En 1778, 
les deux hôpitaux du Saint-Esprit et de S. Eutrope furent 
réunis, en vertu d'une ordonnance royale. Les bâtiments 
du premier furent vendus, à la suite de cette mesure, sauf 
la chapelle, qui servit au culte jusqu'à la fin du siècle der- 
nier [Les remparts de Dax^ par E. Dufourcet, Em, 
Tailleboiset G. Camiade. Dax, 1890, p. loi). 

DÉPART (LE), B.-Pyrénées (S. Loup du Départ) — 
Hôp. dép. d'Orion, et uni à S. Lazare, puis à l'hôpital de 
Pau, le 20 juin 1698 (Fouillé^ p. 445). 

DIJON, Côte-d'Or. — Nous avons parlé assez longue- 
ment de rétablissement de cet hôpital dans la suite de l'his- 



foire 6t fOrâre (V. p. i;i et la TaUe% 
teroftf ki de doiuier la liste des 




L Frère X.. institué en i2C4« par le àac Eaies TU- — 
IL Frère jEAjr(i23i). — IIL Frère Pieule 1^1297-T. 1299U 
IV. Frère Pierrje d'Auxgsxe (1297*1335). fit Utir en 
1304., près des antres oonstmctioosy une gnnge ifÊà. n 
subsisté jnsqn'en 1720. — V. Frère URBAiv)[+iSi2% ^ 
élever en 1337 une maison tenant à la maison conventndle, 
pour servir dlialritation anx rectoirs. — VI. Frère Hfmi 
DE FowEsr {+ 1349). — VII. Frère Girard de Bocr- 
GVEMOHr{+ 1354}. — VIII. Frère GuilulcmedeFocvest, 
(+ 1 388). — IX. Frère Jeak de SAmr-OTEXD. — X. Frère 
Jean d*Agey, 141 i . — XI. F. Sdiond Verjus, 1424. — XIL 
F. SotOS VERXlTf (+ 14 !6). En 1429, Philippe-le-Bon, dnc 
de Boorgog^, vint après son mariage visiter lliâpital avec 
la duchesse et j fit d^abondantes aumânes. — Xin. F. Jeax 
DE CHOIE9 {+ 1439) ; en 1438, grande mortalité à Dijon 
(Voy. p. 216). — XIV. F. Pierre CRApnxET, + 1460. En 
I443f les chevaliers qui assistèrent au fameux tournoi de 
« Tarbre Charlemaigne » à Marsannay-la-Cdte, s^arrè- 
tèrent à leur retour, à Téglise de l'hôpital, et firent à 
celui-ci de grandes libéralités. En 1459, frère Simon Albos- 
set, religieux, fît construire la chapelle de Ste Croix-en- 
Jérusalem, dans Tanden cimetière ; elle existe encore ; le 
même fit don aussi du groupe de la Trinité, déposé aujour- 
d'hui dans cette chapelle. — XV. F. jean Richard. — 
XVI. F. Simon Albosset, démissionna en 1477. — XVII. 
F. Jean BoNNOTTE, + 1480. — XVIII. F. Guillaume 
Sacquenier, abbé commendataire de Baume-les-Moines, 
(+ 1515) ; î^ pos^ 6^ 1505 1^ première pierre de la grand' 
salle, qui ne fut terminée que vers 1595 ; il plaça en 1508 
dansTancien cimetière une très belle croix de pierre, qui est 
aujourd'hui dans le nouveau. — XIX. F. Philippe Mu- 
LART. — XX. F. Jean Ménière, de Fouvent (151 6- 15 18). 



DE L ORDRE DU SAINT-ESPRIT ^$9 

— XXI. F. Claude Laurent, + 1525. Les échevins obtin- 
rent du roi, en 1522, d'avoir par intérim la surintendance 
de Thôpital ; ce fut le premier pas dans l'expropriation des 
religieux. — XXII. F. Dominique Richard, + 1543. En 
1528, arrêt du parlement qui charge deux notables de la 
régie des quêtes, tandis que le recteur conserve celle des 
biens-fonds. — XXIII. F. Jean Regnaudot, + 1552. Des 
lettres patentes d'Henri II (1547) confirment tous les 
privilèges de l'hôpital. — XXIV. F. Bénigne Frelon. — 
XXV. F. Jean Lallement, i 552-1 569. — XXVI. F. 
Philibert Billot, + 1585. En 1569 se forme la Cham^ 
bre des Pauvres j destinée à surveiller l'administration de 
l'hôpital. — XXVII. F. Claude Bazan, + 1590. — 
XXVIII. F. Claude Boulachin. — XXIX. F. Pierre 
Tarlot, 1595-1629. En 1604, S. François de Sales prêche 
à Dijon ; sur ses avis, Ste Jeanne de Chantai jette les 
bases de l'ordre de la Visitation, qui fut d'abord une con- 
frérie, érigée à l'hôpital du Saint-Esprit et destinée à la 
visite des malades et des pauvres. Paul V l'approuva le 
10 décembre 161 1 ; frèreTARLOT en était le zélé directeur. 

— XXX. F. François Cornu, + 163 1. —XXXI. F. 
Didier deChalmAison, + 1640. En 1633, Pierre Odebert, 
conseiller au parlement, fonde l'hospice Ste Anne, pour 
les pauvres et les orphelins; il donne en 1645 80000 frs. 
pour assurer le service du nouvel hospice. En 1640, cons- 
truction d'un nouveau bâtiment pour les sœurs de Ste 
Marthe. — XXXII. F. François Boulangier. En 1642, 
l'ensemble des constructions prend le titre de Notre-Dame- 
de-la-Charité. — XXXIII. F. Jean Mandrot, 1656-1658. 
Vacance jusqu'en 1661. — XXXIV. F. Claude Robert, 
+ i68i. — XXX V.F.François delà Grange, 1681-1695. 
Vacance jusqu'en 1703. — XXXVI. F. Joseph Dupont, 
+ 1726. — XXXVII, F. Adrien deBiville, + 1739. — 
XXXVIII. F. François Calmelet, dernier commandeur, 
installé en 1739, mourut en 1777. dans son hôpital. — Les 



)6o foansÉ des HonTAUx 

détails-ci-dessns sont tirés de YHist. ms de D. Cafaneletet 
de V Histoire de la fondation des hôpitaux dm Saint- 
Esprit de Rome et de Dijon^ par G. Peignot, 1838. Noos 
renvoyons le lecteur à ces deux ouvrages. 

DOLE, Jura. — Rainand III, comte de Bourgogne, 
avait fondé, vers 1 134, à la tète du pont de Dole et sur le 
bord de la voie romaine qui reliait cette ville à Salins, un 
hospice destiné à héberger les pèlerins qui se rendaient k 
Montroland. Cette maison fut cédée à Tordre du Saint- 
Esprit et soumise à Besançon dès le commencement du 
XIII* siècle ; elle reçut dès lors, en outre des pèlerins, les 
pauvres, les malades et les enfants trouvés ou abandonnés. 
La bulle d'Alexandre IV, de 1256, fournit la première 
mention de l'hôpital du Saint-Esprit du pont de Dole. Sa 
dotation primitive, rapidement augmentée par les dons des 
habitants, se comi)osait, en 1342, de 4 pièces de vigne, 19 
pièces de terres labourables, d'une charge de sel à Grozon, 
d'une rente de 20 sous sur les salines de Salins, concédée 
parla comtesse Mahaut d'Artois en 1320, et de quelques 
cens assis sur des immeubles à Dole et aux environs (Arch. 
de Besançon^ chap. I, n* 3, 3 'J. En 1452, frère Pierre 
LouPT, jadis commandeur, faisait, à l'occasion de l'entrée 
en charge de son successeur, frère Girard Foureal, un 
inventaire minutieux du mobilier, qui montre l'aménage- 
ment ordinaire de ces petits hôpitaux, ( Voy. Pièces Justif. , 
n* VII). Du reste, à partir du XV' siècle, les recteurs furent 
pris assez souvent parmi les prêtres séculiers de la ville. 
Ainsi on voit frère Regnaud de Chays, passant en 1438 
du rectorat de Dole à celui d'Arlay^ amodier sa maison 
pour neuf ans à Pierre Gaillot, d'Azans, prêtre, à charge 
par ce dernier de ne point interrompre l'hospitalité. Le 
commandeur de Besançon conclut des amodiations analo- 
grues en 1453, 1459, 1471? etc. (Ibid.); elles devinrent 
habituelles au siècle suivant. Le sac de Dole par Charles 
d'Amboise (1479) fut aussi la ruine de l^ôpital; il était 



DE l'ordre du saint-esprit 36 1 

encore dans le même état de désolation et « desmuni de 
meubles et tous aultres biens, » quand Marguerite d* Au- 
triche, dans un voyage qu'elle fit en Franche-Comté, 
résolut de le relever. Par son acte du mois de février 151 5 
(vx. st.), elle prend à sa charge l'hôpital, pour de nouveau 
le fonder et remettre, comme déjà « elle y avoit faict faire 
très grrand et beau commencement de maisonage et édifice, 
avec aussi provision et garniture de meubles et vaissele. » 
Elle avait l'intention d'y faire construire [de nouveau une 
« belle et solennelle église ci après par trait de temps. » 
En attendant, elle y fonda une messe par semaine^ prit 
sous sa protection le commandeur et les religieux du Saint- 
Esprit attachés à la maison et leur donna le titre de ses 
chapelains ; elle'donna aussi à la maison le titre d'Hôpital 
de Bourgogne et permit aux religieux d'en porter la châsse 
par la province et dé quêter de préférence à tous autres. 
Le parlement (1535) et Charles-Quint (1543) confirmèrent 
cesconcessions. Frère Thomas Michelot était alors recteur 
et fut chargé par la princesse de veiller à la réédification. 
Il passa ensuite à la commanderie de Besançon et nomma 
à Dole, en 1529, frère François Bonvalot (A. Castan, 
Notice^ II, p. 197 ; — Rousset, Dict. des communes du 
Jura^ II, p. 546). Le roi Philippe II d'Espagne céda à la 
ville, le 27 août 1576, les bâtiments et les biens de l'hôpi- 
tal, à condition de les restaurer et d'y recevoir les pauvres 
habitants et les étrangers, même en temps de peste (Rousset 
loc, cit.). Cette disposition, contraire aux droits de l'ordre 
du Saint-Esprit, dura peu, car dès l'année 1 621, un contrat 
était passé entre la commune et la maison, par lequel 
celle-ci devait être considérée définitivement comme un 
membre de Besançon; deux religieux, à la nomination 
alternative du magistrat de Dole et du commandeur bison- 
tin, y élèveraient les enfants exposés jusqu'à l'âge 
d'apprendre un métier et logeraient les pauvres passants 
pendant trois jours seulement (Ibid.). Ruiné encore une 



j6f2 Kxnui DIS woKïàxnL 

fois pendaiit le siège de 1636, YhAfitiâ pot 
coDaenrer quelques traces à'bosfitàBté. En 1689, 
traité entre la ville et le commandeiir de BcsaBçon; œ 
dernier s'obligeait à recevoir dans sa maison les fanfants 
exposés de la ville et à entretenir à Dole un firèfediaigé de 
les recueillir. Les frères Denis beuque et JêMhJSiimuu 
Grandvoynet furent àcette époque et successivement cooi- 
mandeurs de Dole,puisde Besançon. LliApitaldeDoleayant 
été compris, en i yoS^dans le nombre de ceux ou llioqntalitè 
n'était pas exercée, fut uni, par arrêt du Grand Conseil, à 
Besançon, avec charge pour celui-ci de réserver quatre 
places pour les enfants illégitimes nés ou trouvés dans la 
banlieue de Dole. Mais des difficultés survenues entre les 
deux parties retardèrent jusqu'en 1773 lacession définitive. 
Le bâtiment de Thôpital, moins la chapelle, existe encore ; 
Thospice de Besançon le vendit en 1 809 à des particuliers 
et aliéna les derniers immeubles en 1 849, *pour la somme 
de 9000 fr. (A Castan. Notice^ II, p. 225; — Arch. hâp. 
de Bes.j chap. I, n* i^^). 

DONCHERY, Ardennes. — Hôp. , d'après le Pou//W, 
p. 448. 

DRAGUIGNAN, Var. — Prieuré hospitalier, fondateur 
des hôp. de Fayence et de Grasse^ ainsi que de la con- 
frérie du Luc (Vis. 1288). L'ordre de St. Lazare en prit 
possession ; le revenu n'était alors que de 480 livres 
(JPouilléy p. 428). Cité dans la bulle de Grégoire XI (1372). 

EMBRUN, Htes Alpes {Ebrudunum) — Hôp. d'après 
le Catal. romain. 

ESTANG, Gers. — Chapelle de S. Barthélémy, dép. de 
l'Isle-en-Jourdain (V.). 

ESTERNOZ, Elborensis diœcesis (?) — Confrérie et 
chap. du Saint-Esprit ("il r^ A. rom., lib. P, f* 22 — 1560). 

FAUVETTE (La), près Montmorillon, Vienne (C«- 
curra seu la Fauvette, Vis. 1288.) — Hôp. dép. d'Auray ; 
cité dans la bulle d'Honorius III| de 1 220. 



DE L ORDRE DU SAINT-ESPRIT }6} 

FAYENCE, Var. — Hôp. dép. de Draguignan. (V.). Il 
ne restait que la confrérie, lorsque son revenu fut uni à 
St. Lazare, en 1683 {Pouilléj p. 429). 

FLESSANS, Var. — Confrérie ou Hôp., réunie à St, 
Lazare {Arch. Nat. S. 4812). 
FIGEAC, Lot. — Hôp. dép. de Toulouse. (V.) 
FONTENAY, Seine. — Maladrerie dép. de Paris. (V.) 
FOUVENT-LE-CHATEAU, Hte-Saône. — Nous avons 
rapporté, p. 173, la fondation de cet hôp. et sa confirmation 
par Innocent III. Il dépendit toujours de Dijon, dont le 
maître nommait les recteurs, choisis parmi ses religieux. 
Sa redevance envers celui-ci était de 8 fr. (Terrier de Di- 
jon, 1450). Il est mentionné dans toutes les bulles, à par- 
tir de celle d'Alexandre IV (1256). En 1343, Girard de 
FouvENT, recteur, frère de Henri de Fouvent, recteur de 
Dijon, passait un acte avec Léandre de Scey, au sujet 
d'une redevance de 6 mesures de grains, sur le fief de Dié- 
losse. — Frère Jean Pilardet, recteur, assistait au cha- 
pitre de Dijon en 1443. — Frère Claude Laurent de- 
vint vicaire de F. Guillaume Sacquenier, à Dijon, puis lui 
succéda dans cette maison en 1518. — Frère Philippe Mu- 
LART, fut pourvu la même année. [Arch. rom.^ lib. E, f* 
75). Frère Jean Bailly, 1539. — Frère Jean Rousselot, 
pourvu en 1554. — Frère André Duchesne. — Frère 
Thomas Raillard, nommé en i666. — L'ordre de St. La- 
zare jouit de Thôpital plusieurs années ; puis après avoir 
été uni à celui de Chaumont, en 1695, il fut rendu à l'Or- 
dre trois ans après et frère François Massaux en devint 
recteur. Vinrent ensuite les frères Maréchal, démission- 
naire de Bar-sur-Aube (17 15), PisSAUD, transféré à Bar- 
sur- Aube en 1740, Nicolas Maillardet, qui mourut en 
1745. Le sieur Pépin s'empara alors du revenu de la mai- 
son. (Voy. D. Calmelet, Hist. ms. de Dijon). 

FRÉJUS, Var. — Prieuré hospitalier et confrérie im- 
portante, qui donna naissance à celles de Baldière, Cabasse» 



}64 FOUILLi DES HOPITAUX 

Callas, Montferrat, Salemes, Ninii^ et aux h6p. des Arcs 
et de Bagnole (V.). Au moment de Tédit de 1672, il ne res- 
tait du prieuré qu'une maison ^1 ruines, dans laquelle les 
vieillards témoignaient avoir vu deux prêtres entretenus 
par la confrérie et chargés d'enseigner la doctrine aux 
enfants, {Pouilléj p. 428.) 

GARDE-FREYNET, Var. — Hôp. ou confrérie dép. 
de Toulon (V.). Son revenu, revendiqué par Tordre de 
St. Lazare, fut rendu aux confrères en 1696 (P., p. 441). 
GASSILIA (?)— Hôp. dép. d'Auray. (V.) 
GAVARNIE, Hautes-Pjnrénées.— Hôp. du Saint-Esprit, 
qui fut rendu en 1623 à La Terrade (P., p. 437). Cité dans 
la bulle de 1372. 

GERZAT, P.-de-Dôme. — Conf. dép. de Clermont. 
(Voy. ce nom). 
GONFARON, Var. — Hôp. ou conf. dép. d'Aix (V.) 
GOURBERA, Landes. — Hôp. du Saint-Esprit (E. 
Dufourcet et Em. Taillebois, Les remparts de DaXj p. 

lOl). 

GOURBIT, Ariège. — Hôp. du Saint-Esprit {Ibid.) 

GRAMBOIS, Vaucluse. — Hôp. ou conf. dép. d'Aix. Les 
confrères récupérèrent leurs revenus sur Tordre de St. 
Lazare, en 1696 (P., p. 441). 

GRASSE, Alpes-Marit. — Hôp. dép. de Draguignan 
(V.). Il est cité dans la bulle de 1372. Après sa désunion de 
St. Lazare, il fut incorporé à Thôpital des malades de la 
ville (P., p. 441). 

GRAY, Hte-Saône. — Hôp. dép. de Besançon, auquel 
il payait une responsion de 6 fr. Nous avons rapporté sa 
fondation (p. 174 ; voy. aussi la Table). Les recteurs de 
Besançon conservèrent pendant assez longtemps Tadmi- 
nistration de Grray ; mais ils nommèrent ensuite de& 
maîtres particuliers, quand Thôpital eut pris une certaine 
importance. Nous avons parlé assez longruement de cette 
maison ; il nous suffira de renvoyer à la très substantielle 



DE l'ordre du saint-esprit ^65 

Notice historique sur Vhôpital du Saint-Esprit de 
Gray, par M. J. Gauthier, Vesoul, 1873. — On y trouvera 
la liste des trente-huit recteurs. 

GRENOBLE. — Cet hôp. était gouverné, en 1288, par 
les frères de St. Jean de Jérusalem, qui l'avaient doté en 
grande partie ; frère Monette en fit néanmoins la visite ; 
mais il est probable qu'il ne tarda pas à tomber complète- 
ment au pouvoir de l'ordre de St. Jean. L'hôp. de Voironen 
dépendait (V.). 

HENDAYE, B. -Pyrénées (^Anrfaia;. — Hôp. dép. de 
Toulon ; il avait appartenu à l'ordre de St. Jacques. Le 
recteur de Montpellier y nommait en 1305 (Arch. nat.y S. 
4817). La bulle de Grégoire XI le cite. 

HOPITAL-DU-GROSBOIS {V\ Doubs. — Maladrerie 
qui fut acquise par l'hôp. de Besançon avec l'hôp. S. Jac- 
ques des Arènes de cette ville, en 1436 (A. Castan, Notice 
II, p. 215). 

HOSPITALET (L'), Aveyron. — Hôp. dép. d'Auray (V.) 
Cité dans les bulles d'Honorius III (1220) et Grégoire XI 

(1372).^ 

HYÈRES, Var. — Maladrerie et conf . citée dans la 
bulle de 1 372. Les consuls, pour la conserver, payèrent à St. 
Lazare un tribut de 60 livres jusqu'en 1696, où ils en furent 
déchargés et les biens unis à l'hôpital S. Jacques de la ville 
(P., p. 429). 

ISLE-EN DODON (L'), Hte-Garonne. — Hôp. dép. de 
Toulouse (V.), cité dans la bulle de 1372 (P., p. 437). 

ISLE-EN-JOURDAIN (L') {Insula Jordanis), Gers. 
*- Hôp. qui appartenait primitivement à l'ordre de St. 
Jacques. Il possédait en 1288 la chapelle de l'Estang et 
l'hôp. de S. Loup-du-Départ. Frère Pierre Martin, rec- 
teur, fut désigné par le chapitre général de 1319, assemblé 
à Auray, comme Procureur général de l'Ordre [Diplom,^ 
II, p. 379). Ce prieuré avait été important, mais les reve- 
nus s'en perdirent. F. Jacques Jacob y fut nommé en 



)66 fooniÉ vu BOnniix 

1716 et un arrêt du Grnuid Conseil la fendBt 4 TOrdre 
Tamiée suivante. Ce oommandeor passa qn^oes années 
plus tard à Vaucouleurs. {Arch. nat,^ S. 491 it 4912). 

IS-SUR-TILLE. {Is supra amnem de TilU\ Cftte- 
d'Or. — Maladrerie dép. de Sanlx (V.). 

JARGEAU, Loiret. — HAp. dép. de Clennont (V.) 
Réuni au XVll* siècle aux IiApitanx de la viUe et des en- 
virons (P.f p. 438). 

JOUQUES, B.-du-Rh6ne. — Hôp. ou conf. dép. d*Aix. 
Après la désunion à St. Lazare, les confrères r e n trère n t en 
possession du revenu, en 1696 (P., p. 441). 

LAISSAC, Avejnron. — Hftp. dép. d'Agen (V.). 

LAMBESC, B.-du-Rhône. — Hôp. dép. d'Aîx, {Arch. 
nat.^ M. 45). 

LANGRES, Hte-Mame. — Hôp. dép. de Saulx (V.). 

LANNES [S.Mariœ de Lasnier), B.-Pjrrénées. —Hôp. 
annexe de Bidose (V.). 

LARGENTIÈRE {Argentaria de Cochers), Ardèdie. 
— Une des plus anciennes maisons de TOrdre, dtée dans la 
bulle d^Innocent ni, en 1198, puis en 1225, 1291, etc. Elle 
relevait de Monti)ellier. L'ordre de St. Lazare en jouit et 
en tirait 200 livres qui, après Tédit de désunion, furent 
attribuées au curé et aux consuls de la ville. Un arrêt de 
17 19 la rendit à TOrdre ; mais Thospitalité n'y fut pas réta- 
blie (P., p. 414). 

LECTOURE, Gers. — Hôp. dép. d'Auray (V. ; Cat. 
rom). Cité dans la bulle de 1372. 

LEMPDES, P.<le-Dôme. — Conf. dép. de Clennont 
(Voy. ce nom). 

LESCURE {Lascurrensis), Tarn. — Hôp. dép. de 
Beaucaire (V.). Uni à St. Lazare, puis à l'hôpital d'Albi, 
en 1695 (P., p. 442). 

LIBOURNE, Gironde. — L'hôp. Saint-Jacques de 
Libourne est déjà cité dans la bulle d'Honorius IH, en 
1220, comme une possession d'Auray. C'était en 1288 une 
maison conventuelle (V.). Le recteur assistait, en 1308 et 



DE L^ORDRE DU SAINT-ESPRIT J67 

1319, aux chapitres provinciaux d'Auray {Diplom.j II, p. 
377, 379. Cité encore dans la bulle de Grégoire XI (1372), 
l'hôpital était tombé ensuite en décadence, car en 1406, 
l'archevêque de Bordeaux nommait deux prêtres pour le 
rétablir {Htst. de Vhôp. de Z., p. 8). L'hôpital Saint- 
Julien lui était uni. Il est probable qu'à partir de ce temps 
l'Ordre en fut dépossédé ; mais la confrérie y était encore 
florissante au XVII* siècle. Le jour de la Trinité, les con- 
frères prép araient à leurs frais, à l'hôpital, un repas pour 
treize pauvres ; le maire et les jurats servaient en grande 
livrée {Ibid.^ p. 47). L'hôpital, compris à tort dans ceux 
qui tombaient sous l'édit de 1672, puisqu'il avait continué 
à recevoir les malades et les enfants trouvés, fut revendi- 
qué par l'ordre de St. Lazare. La ville le recouvra en 1693. 
(Voy. E. Burgade, Hist. de l'hôpital de Libourne, 1867, 
in-8^) 

LIÉ, Landes. — Conf. qui existait encore en 1700 (Étude 
de Mugron, Landes, Lanefranque, notaire). 

LIGNY-EN-BARROIS, Meuse. — Hôp. du Saint- 
Esprit, avec chapelle ; Une donation lui fut faite en 1232. 
Marguerite de Savoie, veuve d'Antoine II de Luxembourg 
le restaura en 1581 ; c'est à cette époque qu'il dut cesser de 
posséder des frères de l'Ordre (D' Baillot, Not. sur les 
établissements de bienf. de Ligny enB., Mém. Soc. des 
Lettres de Bar-le-Duc, 1881). 

LILLE, Nord. — Hôp. du Saint-Esprit, qui possédait 
encore, au siècle dernier, des sœurs de l'Ordre (P», p. 436; 

— Arch. nat.j S. 4913). 

LION D'ANGERS, M.-et-Loire. — Hôp. dép. d'Angers 
(V.). 
LOT>ÈVE{FontisLondoney Fontaine-Lodève), Hérault. 

— Hôp. dép. de Narbonne (V.). Cité dans les bulles à partir 
de 1294. 

LONGEAUX (Les)', Doubs. — Dès le début du XIII* 
siècle, Thôp. de Besançon avait établi sur la grande route 




TUA 

de Bffiinan à 

Loog^eanx, une ficraie qm 

aux Tojageim et aux «aladr» des l or a litrs 

gueoiii. seigneur de Châtilkm-Giijoae, fnrMa , le 23 

▼ier 1503^ i cette maisoiHDieiiY des droits 

ses bois et ses pâturages. Une charte de farcheféqpe de 

Besançon (1336) en £a¥ear de Poligny, cite rhop. des Loo- 

geanx {éU Langa aqua). Llio^taUté ayant cessé dès la 

première moitié dn XV* siède, les Inens firent retonr à 

Besançon (A. Castan, Notice^ II, p. 206). 

LONGUE, JL-et-Loire. — Hdp. dép. ^Angers {ArctL 
nat., a. 45). 

LONS-L&SAUNIER, Jura. — Vers la fin dn Xm* siè- 
cle, il existait dans cette ville un hôp. dn Saint-Eqnit ; il 
était situé à l'entrée dn faubourg de S. Désiré et sa chapelle 
était dédiée à la T. S. Trinité, comme les ^lises de TOrdre. 
Il est probable que cet établissement secoua de très bonne 
heure le joug de Tobéissance, car, dès le XIV* siècle, la 
nomination des recteurs appartenait aux échevins. On con- 
naît plusieurs de ces recteurs en ce siècle et au suivant : 
aucun d'eux ne parait avoir été religieux du Saint-Esprit 
( Voy . B. Prost, Not. sur trois dalles funéraires franc- 
comtoises^ Mém. delà Soc. d'Emul. du Jura, 1875, p. 375). 
En Tabsence des archives, détruites dans Tincendie de la 
ville, en 1536 (Rousset, Dict. des communes du Jura^ III, 
p. 623), il est impossible d'éclaircir Thistoire de cette mai- 
son ; néanmoins son titre seul et sa dédicace prouvent suf- 
fisamment qu'elle a appartenu primitivement à Tordre du 
Saint-Esprit. 

LOCI MARORICI (?), diocèse d'Auch. -• Hôp. {Cat. 
rom.). 

LUC (Le), Avejrron. — Confr. dép. de Draguignan (V.). 
Ses biens étaient, en 1683, aux mains des Trinitaires, qui 
le^ conservèrent, moyennant une pqnsion de f>o livres à St. 
Lazare. (P., p, 428). 



DE L'OUDRB du SAiKT-eSPRiT 369 

LUZ-EN-BARÈGE ou Lui^-SUSauveur^ Htes-Pyrénées. 
— Hôp. dép. de Besançon, en 1288 (V.). 

LUZINAY, Isère. — Confr. dép. de Vienne (V.). Elle 
fut absorbée par Tordre de St. Lazare, puis rendue aux 
confrères, en 1696 (P., p. 442). 

LYON. — Nous avons établi dans l'ouvrage (p. 182), 
que rhôp. du pont du Rhône, aujourd'hui le grand Hôtel- 
Dieu de Lyon, appartint, au moins pendant quelque ten^ps^ 
à Tordre du Saint-Esprit, puis à la confrérie, devenue indé- 
pendante au XIV' siècle. Nous ne ferons pas ici Thistoire 
de cet établissement, après sa séparation deTOrdre. Disons 
seulement que les consuls, ayant réparé les bâtiments en 
147S» y placèrent,- en 1502, des filles publiques, converties 
par un prédicateur, et leur en confièrent le service. Elles y 
soignaient vingt-cinq enfants trouvés en 1516, et en 1526, 
neuf enfants au berceau, ainsi que plusieurs grands garçons 
et grandes filles. Cette assistance des enfants était sans 
doute un souvenir de Tancien hôpital du Saint-Esprit (Voy. 
Guigue, Notre-Dame de Lyon ; — Dagier, Hist. chro- 
nol. de rhôp. général et Grand HôteUDieu de Lyon^ 
Il 73, etc.) 

MACHECOUL, Loire-Inf. — Hôp. et confr. du Saint- 
Esprit, très anciens (L. Maître, Assistance publ. dans la 
Loire-Inf.^ chap. VI). 

MAGDELEINE (La), Charente. — Hôp. dép. d'Angers 
{Arch. nat.j M. 45). 

MANCIET, Gers. — Hôp. de St. Jacques de TEpée, puis 
dépendance d'Auray, cité en 1220 dans la bulle d'Hono- 
rius III et dans la Visite de 1288. Le jour de S. Eloi 1318, 
frère André Kerni, recteur de M., solda son cens annuel 
de 3 livres tournois au recteur d'Auray {Diplom.y II, 379). 
Cependant, en 141 1, le maître de Montpellier y nommait 
un recteur (Ar^A. na/., S. 4817). En 1768, la commanderie 
de Manciet était possédée par Jean-Jacques de Mesmes, 
seigneur de Patience, grand sénéchal de Marsan (B<>n de 

24 



Caaaa. Leucaumcq. Bessmmt, T^râre ê€ S. Jmeqma ࣠
VEpie d4MS Us Landes. iêj2\ 

XARCIAC, Gen.— Hap.iieii.de OersoBt T.v.Cisé 
dan» la haSltâe 1372, £a ij^- lesdesxliôpudeJI. 
réunis^; le23JaiiTierdecettea]iiiée«G. d'Abfaafie 
:» jodks une rente de S L 6 s. S den. pcnr aoqnt de la 
mmàé d'une flomine de 200 Ihrres léguée à fkâp. dm St- 
ËKprit par M' Jean Desoombes (Arck. mst., S. 4^7. Rcg^ 
f $;. Ce dernier fat uni à St. Lazare, pois à IHôp. général 
d'Aodi ^P.. p. 421). 

MARSEILLE. — Cet hdpital doit sa fondation à la 
confrérie, qui s'était établie dans la ville dans ce bot. Les 
confrères achetèrent, an commencement de Tannée 11 88, 
de Tabbaje de Saint-Sanveor, une maison dans laquelle 
furent reçus les pauvres, les malades et les en£uits aban- 
donnés. La maison ajrant été reconnue insuffisante, un des 
confrères, nommé Hospinel, donna, à la fin de la même 
année, un terrain contigu, sur lequel on éleva un nouveau 
bâtiment. Les frères du Saint-Esprit de Montpellier furent 
alors appelés pour desservir la nouvelle fondation ; mais la 
confrérie, et par son moyen bientôt les consuls, qui en 
faisaient partie, prirent la direction matérielle, tout en 
laissant les recteurs maîtres de leur communauté. 

Le personnel de la maison se composait, en 1306, de 
douze frères, six sœurs et sept subalternes ; frères et sœurs 
portaient le costume de l'Ordre avec la doublecroix. Frère 
Jean Monette fit la visite de Thôp. en 1288 ; à cette date, 
le recteur avait la prééminence sur les maisons du Bausset, 
du Castellet, de Clairac, La Penne, Signes, auxquelles il 
faut ajouter celles de S. Gêniez aux Martigues, d'Aubagne 
et trois hôtelleries ou refuges dans ses domaines ; en ou- 
tre, des confréries très florissantes étaient établies à Cassis, 
Flessans, Cuges, La Cadière, OUiers, S. Maximin et dans 
toute la région. On connaît quelques recteurs : Frère 
Pierre Serena (1296), F. Jean (1306), F. Lombard 



DE l'ordre du saint-esprit 37I 

(131 1). Le recteur de M. assistait aux chapitres généraux 
d'Auray, en 1308 et 1319 {Diplotn.^ II, p. 377» 379)- 

Les efforts des chevaliers de St. Lazare furent impuis- 
sants à en obtenir la cession. C'est aujourd'hui THôtel-Dieu 
de la ville (P., p. 426 ; Mortreuil, Vhôp, du S. Esprit de 
M.; — Fabre, Hop. de Marseille, 1854). 

MARTEL (Z)^ Mar telle, Mar ter elle, Marterelle), Lot. 
— Hôp. dép. d'Agen (V.) ; cité dans les bulles de 1291, 

1294» 1343, 1372. 

MARTIGUES, (5.G^n/Vf-a«x-), B.-du-Rhône. — Hôp. 
dép. de Marseille. Hugues des Baux, vicomte de Marseille, 
le prit sous sa protection, le 14 janvier 121 1 ; l'année sui- 
vante, l'évèque d'Aix accorda cinq jours d'indulgences et 
celui de Marseille trois cents jours aux bienfaiteurs de 
l'hôpital et du pont (Fabre, Hôp. de Marseille, ch. II). 

MAR VILLE, Meuse. — Hôp. cité comme dép. de Toul, 
dans la Visite de 1288. En 1413, Waultrin Bertrand d'Ar- 
rancy le releva complètement, et le remit dans la dépen- 
dance de Toul en 1419 (Voy. p. 223). Le dernier comman- 
deur, F. SCHMITZ, fut assigné par les chevaliers de St. 
Lazare, et un arrêt de 1688 l'obligea à se désister de sa 
charge. Les Prêtres de la Mission revendiquèrent l'hôp. en 
1715, en même temps que l'ordre du Saint-Esprit, comme 
membre de Toul ; mais la ville qui, aprèsl'édit de désunion, 
l'avait annexé à un autre hôpital, obtint la réunion défini- 
tive des deux maisons (P., p. 420 ; — l'abbé Clouet, Hist. 
de Verdun, III, p. 621-626 ; — L. Germain, Inscr. d'autel 
du XV* siècle à Marville, Journ. de la Soc. d'Archéol. 
Lorraine, février 1884). 

MAUBOURGUET, Htes-Pyrénées. — Hôp. dép. de 
Millau, cité dans la Visite de 1288 et les bulles de Clément 
VI (1343) et Grégoire XI (1372). Il appartenait primitive- 
ment à l'ordre de St. Jacques. Uni à St. Lazare, il fut rendu 
à l'ordre du Saint-Esprit, qui en jouissait en 1743 [Arch. 
nat., S. 4907, 4908 ; — P., p. 423). 



J72 ROUILLi DES HOmkUX 

MAYENNE {Mcyne-la-Joye, Mayenne-la-Jukéé). — 
Hôp. assez important en 1 288 ; déjà cité dans la bulle d^o- 
norius III (1220) comme une dépendance d^Aoray. Le rec- 
teur de M. était présent aux chapitres d'Auray, tenus en 
1308, 1315, 1319 ; en 1315, il se nommait Robert de Ct- 
PRIANO et recevait quittance de son tribut annuel de 15 
livres tournois. {Diplotn.j II, 378.) Frère Robert le 
Breton en fut pourvu en 1545. [Arch. rom.^ lib. K, £* 
142.) L'ordre de St. Lazare ne put s'en emparer et la ville 
continua à l'administrer : le service était fait alors par 
de pieuses filles, sous la direction d'un chapelain {Arch. 
nat., ^. 4913 ; — P., p. 422.) 

MAZAUGUES, Var. — Le testament de Florent de 
Castellane (1398) contenait un legs de 40 sous à la confré- 
rie du S. Esprit (Du Cange, Glossarium, v* Confraria.) 

MÉRANNES, Gers. — Hôp. dép. d'Angers {Arch. nat. 
M. 45.) 

MERRO [De) (?) — Hôp. dép. de Millau (V.). 

METZ. — Hôp. fondé vers 1390 par Jean Voley, de 
Choyé, religieux de Besançon, qui s'obligea, lui et ses suc- 
cesseurs, à assister chaque année au chapitre de la maison- 
mère et à lui acquitter un tribut de 3 florins. Ruiné plu- 
sieurs fois par les guerres, notamment par le siège de 1552, 
il demeura inhabité et finalement, à la suite de ce dernier 
siège, le commandeur de Besançon en loua les bâtiments 
pour 99 ans à l'administration de l'artillerie française, avec 
une grange qui en dépendait. Dès lors, le titre de recteur 
de Metz fut cumulé avec ceux de Neufchâteau ou de 
Vaucouleurs {Arch, hôp. de Besançon^ chap. I, n* 7.) 

MÈZE [Mesols^ Mesolsium, MesoulSy de Mesolono)^ 
Hérault. — Très ancienne maison, dépendante de Mont- 
pellier et citée dans la seconde bulle d'innocent III (i 198). 
F. Pierre Mathieu Hugon, recteur, fit un bail à rente 
de la métairie de Singaran, territoire de Mèze, en 1330. 
On connaît d'autres recteurs : les frères Pierre Bertin 



DE L ORDRE DU SAINT-ESPRIT jJJ 

(28 mai 1334) ; Dominique Richard (1390) ; Georges de 
Ferrières (6 mars 1400) ; Bastin Pépin (1438) ; Jean 
SoQUiER (1480) ; Raymond de Agrano, nommé par le 
commandeur de Montpellier en 15 19 ; Antoine Crussol 
(1530) ; Jean Jeoffre (1542). — Le revenu était considé* 
rable avant les guerres de religion ; Tordre de St. Lazare 
en jouit ; mais ils furent rendus en 17 19 {Arch. nat.^ S. 
4812; P., p. 415). 

MILLAU {AtnillaUj Milialdi^ Millati)^ Aveyron. — 
Un des premiers hôpitaux de l'Ordre, cité dans-la seconde 
bulle d'Innocent III (1198) et toutes les suivantes. Le 19 
décembre 1262 (vx st.), le recteur était « fraire Beaudouy 
commandador de Thospital de Sant-Esprit de Millaut. » 
£n 1288, huit hôpitaux relevaient de ce beau prieuré, qui 
dépendait lui-même d'Auray ; c'étaient Barran, Carcas- 
sonne, Maubourguet, Merro^ Narbonne, Nérac, Rodez, 
Aurillac (V.). L'hospitalité n'y étant plus exercée, proba- 
blement depuis les guerres de religion, l'ordre de St. La- 
zare l'occupa, et après la désunion, les particuliers à qui 
les biens avaient été assencés les conservèrent (P., p. 425 ; 
— Arch. nat., S. 4915). Il est possible qu'un hôp. ait aussi 
existé à Milhaud (Gard) ; mais les documents ne nous per- 
mettent pas de le distinguer du précédent. 

MONNET-LE-CHATEAU, Jura. — Hôp. fondé par 
Jean I de Chalon-Auxerre, en 1301 ou peu après (Voy. p. 
221). Il relevait de Besançon et ne fut jamais bien consi- 
dérable. Bâti en dehors des murs, sur le bord du bief Mar- 
tin, il disparut en 1479, lors de la ruine du bourg par les 
troupes de Louis XI (Rousset, Dict. des communes du 
Jura, t. IV, p. 315.) 

MONTAIGU (?) De Monte acuto.— Maladrerie dép. de 
Steffansfeldt (V.). 

MONTAUBAN. — Prieuré magistral dont relevaient les 
maisons de Montvalent, Najac et Naussarens (V.). Cité dans 
la bulle de Grégoire XI (1372). 



174 POCllli DES BOTTTACX 

MONTE JUXTA FLUVIUM ;ZV^ ? Hôp. ilép. de 
Bcnxieaux (V.*, Bulle de 1372. 

MOXTFERRAT. Var. — Hôp. dép. de Fr^Qs (V. 

MONTFLEUR, Jura. — Hdp. fondé vers 1360 par Ho- 
gard de Ville et dép. de Besançon. En 1518. Jean Lhnet, 
prêtre du même lieu, fonda une messe basseàoélâirer cdia- 
qoe samedi dans la chapelle de lliApitalf par les Cunilîers 
de Téglise paroissiale. La confrérie faisait ses exercices 
dans cette chapelle (Rousset. Dict. des communes du 
Jura, t. IV, p. 293.) 

MONTIS JORDANIS 1?}. 

MONTMORILLON, Vienne. — Dépendance d'Anray, 
cette maison existait dès 1220. Frère Monette la visita en 
1288 ; le prieur assistait aux chapitres de 1312 et 1319 à 
Auray. Ses biens, qui montaient à 10.000 livres de revenu, 
furent possédés par Tordre de St. Lazare, et ensuite par les 
Augustins de la ville. L^hôpital de La Fauvette en dépen- 
dait. (P., p. 424 ; — Arch. nat.^ S. 4877-9.) 

MONTMOROT, Jura. — Il y avait à M. un hôp. du 
Saint-Esprit dont Tadministration, confiée d^abord à des 
hospitaliers, passa, au XV' siècle, à des femmes. Il était 
connu, en 1456, sous le nom de maison de la converse 
(Rousset, Dict. des com. du Jura^ t. IV, p. 359). Sa dé- 
pendance de rOrdre dut être de courte durée, car les ar- 
chives de Besançon sont muettes à son endroit. 

MONTPELLIER. — Après ce que nous avons dit de cet 
hôpital dans le corps de Touvrage, il nous reste peu de 
choses à ajouter ici. Nous donnerons seulement la liste des 
recteurs connus, d'après une liste du XVII« siècle rectifiée 
à Taide de nos notes. 

Gui de Montpellier, + 1209. — Frère Gui. — F. 
Aymond de Tarriau ( 1 2 1 7). — F. Guillaume de Chassb- 
NEY (1259). — F. Jean d'Allevon. — F. Ovide Charu- 
GNE (1293). — F. Guillaume Colombi, tint chapitre en 
1345 [Diplom., II, p. 381). — F, LÉON DE Anticolis (1432). 



DE L'ordre du saint-esprit j7J 

— F. GuÉRiN Teler {1450). — F. DÉODAT Richard, 
institué par le grand maître en 1461. — F. Martin Car- 
rière, institué par le grand maître en 1470 et confirmé en 
1475 {Arch. rom.j lib. 20, f 184 ; lib. 24, f 55). — F. Jean 
d'Espagne, /d., en 1484 (lib. 3, r 4). — F. JeanClausel, 
avait recours au grand maître en 1494 (lib. 3, f ...). — F. 
Jean Bertrand, fît obédience par procureur, en 1499 
(lib. rub.,r 158 v^). — F. Henri d'Estagne (?). — F. Jean 
C alvet, obtint en 1 5 1 5 la confirmation de confréries érigées 
et l'autorisation d'en établir de nouvelles (lib. C, f* 31), — 
F. Jean Calvet II, pourvu à Rome en 1 556. — F. Pierre 
DE Valence, 1566. — F. Jean Gastineau, 1580, prêtre 
d'Avignon, pourvu par bulles. — F. Barthélémy Bonnet 
1598. — F. Jean Bonnet, 1598. — F. Jean-François 
Lelong. — Olivier de la Trau de la Terrade, 161 7- 
1648. — Jean-Alexandre Désescures, i 656-1 667. (Voy. 
la liste des grands maîtres de Montpellier, Arch. nat.j 
M. 46 ; — voy. aussi la Table de l'ouvrage). — Montpellier 
possédait en 1225, d'après la bulle d'Honorius III, onze 
maisons : Millau, Clapier, Mèze, La Sauvetat, Bragayrac, 
Largentière, Troyes, Salmachutn Manvalem^ Hyères, 
Barcelonne ; — en 1404, d'après la sentence du cardinal 
de Lerida, vingt-trois, dont les précédents, plus Ste Marie 
Transtyberim et Ste Aga,the in Suburro^ Toulouse, Ste 
Foy, risle-en-Jourdain, Cintra, Bordeaux, Montvalent, 
St Gêniez, St Séver, Fontis-Jodone^ Auch, Confolens, 
Draguignan, de Pradiaco^ Auray. Diplom.^ II. 

MONTVALENT, Tarn. — Hôp. dép. de Montauban (V.), 
cité dans les bulles de 1291 et 1372. En 1677, son revenu 
était de 400 livres (P., p. 438). 

MOUTIERS(LES), Loire Inf. —Hôp. du Saint-Esprit, 
dont la confrérie était en plein exercice en 1623, La cha- 
pelle subsista jusqu'à la révolution (L. Maître, Assist. 
publique dans la Loire-Inf.^ chap. VI). 

MURE D'ISÈRE (LA), Isère, — Conf, du Saint Esprit, 



}7à FOUILLÉ DES HOPITAUX 

citée en 1 349 (Du Cange, Glossarium^ v* Confrargaiufn). 

. MUSSILACUM (?)— Hôp. dép. d'Auraycn 1288 (V.) 

MUSSY-L'EVÊQUE, Côte-d'Or. — Maladrerie dép. de 

Saulx (V.) 

MU Y (LE), Var. — Confr. unie à St. Lazare, pois rendue 
aux confrères en 1696 (P., p. 442). 

NAJAC, Aveyron. — Hôp.ou maladrerie dép. de Mon- 
tauban ; réuni à l'hôpital de la ville après la désunion de 
St. Lazare (P., p. 423). 

NANTES. — Hôp. cité dans la buUe d'Honorius lU de 
1220, comme relevant d'Auray. Lorsque frère Monette le 
visita en 1289, 1^^ deux maladreries situées en dehors des 
murs lui appartenaient. 

NARBONNE. — Hôp. chef de celui de Lodève (V.). Le 
9 mars 1473, F. Martin Carrière, commandeur de Mont- 
pellier, fut nommé par le grand maître prieur de Narbonne, 
L'ordre de St. Lazare en jouit jusqu'en 1693, où il fut imi 
à Thôp. général de la ville (P., p. 442 ; — Arch. rotn., lib. 
19, f 268). 

NAUSSARENS (?), diocèse de Lodève. — Hôp. dép. 
deMontauban(V.). Un arrêt du 12 octobre 1637 Tattribua 
à frère Pierre Bigot. Après sa désunion de St. Lazare, ses 
biens furent retenus par des particuliers (P., p. 447 ; — 
Arch. nat.j M. 43). 

NÉRAC, Lot-et-Garonne. — Hop. dép. de Millau (Bulle 

1372). 

NEUFCHATEAU, Vosges. — Il n'existe pas de notice 
imprimée sur Thôp. de N. Le résumé que nous donnons ici 
est tiré de l'Histoire inédite de M. l'Abbé Renard, ancien 
aumônier et des nombreux documents conservés aux 
archives de l'hôp. de Besançon. 

On a vu déjà l'origine de cette maison. La majeurepartie 
de ses biens lui vint de la branche collatérale de la Mai- 
son de Lorraine, qui habitait le château de Coussey. Renaud 
de Coussey doQQa çn particulier la. terre de Beit)iéléva\ix 
(1240), vaste propriété comprenant une habitation et un 



DE L ORDRE DU SAINT-ESPRIT ^JJ 

moulin, et dans laquelle on bâtit plus tard une chapelle. 
Les bâtiments deThôp., commencés en 1234, ne furent 
terminés qu'au bout de trente ans, comme en fait foi l'ins- 
cription suivante, gravée sur le tympan de l'ancienne porte : 
Anno* Domini- millesimo- ducentesimo- sexagesimo- 

PRIMO- MENSE- MAII" FrATER* ROBERTUS* DE ROMA* FECIT* 
HOC- OPUS' FIERI- DE- ELEMOSINIS* DONORUMQUE- (sic) 
VIRORUM- EIUS- ANIMA- ANIME* BENEFACTORUM - HUIUS* 
DOMUS- SEMPITERNA* LETICIA- PERFRUANTUR* AmEN. — 

Frère Robert, religieux de Rome, était donc alors rec- 
teur ; il mourut en 1277. Nous ne savons sur quelles preuves 
s'appuie l'auteur du ms. cité ci-dessus pour placer un pre- 
mier maître avant lui. Quoiqu'il en soit, nous allons 
donner la liste de ses successeurs, en relatant les faits les 
plus importants de leur rectorat : F. Jean, qui vivait en 
1289, reçut, l'année précédente, le visiteur JeanMonette, 
dont l'acte inscrit l'hôp. de N. parmi les possessions de 
Besançon. Nous constatons par là queN. ne se soumit pas 
à Besançon à l'occasion du secours qu'il en reçut, lors de 
la restauration dont nous allons parler, ainsi que le prétend 
le même auteur ; il est plus exact de dire que c'est à son 
titre de fondateur que Besançon dut sa suprématie et son 
droit de responsion de 6 florins d'or. — De 1314 à 1327, 
« les calamités publiques, la peste, la disette, les inon- 
dations, la guerre enfin, » ruinèrent l'hôpital. Le recteur 
de Besançon, frère Pierre de Lyon, y envoya successi- 
vement trois de ses religieux, les frères Pierre (1316), 
Etienne Blancherel (1327) et Etienne d'Arbois (1328- 
1 33 1 ), qui réussirent à conjurer la ruine, grâce aux libéralités 
de messire Thomas, curé de Rouceux. — F.Réchier (1334). 
— F. Jean de St. Lieffroy (+ 1345). — F. Pierre 
Dupuis (1346-1351). — F.Jean deMarnay (1362-1389); 
en 1376, F. Barthélémy de St. Oyend, recteur de Be- 
sançon, procéda à la visite de l'hôp. : il reçut les plaintes 
du maître contre le sire de Bourlêmont, qui venait dé 



}79 wooaiÀ ofs BomAux 

mettre aa pillage le domaiiie de Berdiélèvaiix et avait 
emporté jusqa aux lits de llioqnoe. — F. jEAlf HASGor 
(1389-1407). — F. Pierre DE Gokdrecourt (1408-1435). 
— F. Besançon Ramel (1435-1484). Celnnci avait à la fin 
comme coadjateur F. Jean Lefebvre (1484-1492), qm loi 
succéda. — F. Armand Tœrceun (1495}. — F. Jean de 
Trampot (1512-1529). — F. Nicolas Luzurier (1529- 
1545). D'après unacte de visitede 1543, les biens de l*liAp. 
consistaient alors en 7 maisons louées à NeufdiAteau, 36fir. 
de revenus divers, 9 jours de v^^ne, 53 fauchées de pré, 
222 jours de terres labourables, plus le domaine de Bertliè- 
lévaux et une ferme de 62 journaux à Noncourt. — F. 
Nicolas Pétremand (1545-1546)- — P- Antoine Barbol 
(1547- 1569). — F. Philippe Luzurier (i 569-1622), qui 
reçut le visiteur Melchior de la Vallée. — Nicolas Foes 
(1622-1627)9 étranger nommé par le grand maître et qui 
ne fit pas profession. — F. Jacques Thierry (1632-1649). 
— F. Georges-Charles Meusnier ( i 656- i 674) . Il employa 
ses biens propres à la restauration des bâtiments ruinés 
par la guerre de Trente ans et obtint de Tévèque de Toul 
la réorganisation de la confrérie dans toutes les paroisses 
où elle avait existé. En 1674, il dut abandonner la maison 
aux chevaliers de St. Lazare. — Réunion à St. Lazare ( 1 674- 
1694). — F. Adrien Bullet (1694-1734). La restauration 
entreprise par F. Meusnier avait été fort compromise par 
un abandon de vingt ans; frère Bullet^ envoyé de Besan- 
çon, fut obligé de loger dans la ville, pendant qu'il dirigeait 
les travaux. Son zèle vint à bout de l'entreprise. — F. 
François Bullet, administrateur (i 735-1 738). — F. 
Mathieu Guillemin (i 739-1 760). Après lui, Besançon 
manquant de sujets, délégua M. Tabbé Prévost, et lorsque 
les sœurs passèrent sous la juridiction deTévèque de Toul, 
il leur continua ses soins comme aumônier. — Sœur Eli- 
sabeth Bullet. première supérieure (+ 1769). — S. 
Marthe Vaulcherot de Schombourg, née à Poligny 



DE L ORDRE DU SAINT-ESPRIT 379 

(+ 1777)- — S. AuGUSTiNE Varenne (+ 1792), vit son 
hôp. dévoré par un terrible incendie. — S. Justine Vive- 
NOT {+ 1805), traversa les rudes épreuves de la révolution 
sans quitter Thôp. — S. Anastasie Laurent (+ 1830). — 
S. Justine Pernot, + 1867, établit la communauté dans sa 
maison paternelle, à Ronceux. — S. Louise Mauljean, 
1855. — S. Anastasie Mougin, 1861. — S. Pauline 
Sandre, 1875. — S. St. Augustin Beurnêl, 1881. (Voy. 
le dernier chapitre). 

NIMES, Gard. — Prieuré hospitalier, chef de Besouce, 
S. Gervais et Bellegarde (V.); il possédait aussi une 
chapelle dans Véglise cathédrale. Cité dans la bulle de 1372. 
Il était situé dans l'espace compris entre la Maison Carrée 
et la Bouquerie, près de la porte du Saint-Esprit (L'Abbé 
Azaïs, La charité à Nîmes ^ Mém. de l'Acad. du Gard, 

18747 p. 51-52). 
NINII ? — Confrérie dép. de Fréjus (V.). 

NOVOSO [De) ?— Hôp. cité en 1312. 

OLINO SEU DOLON{De) ? — Hôp. dép. d'Angou- 
lême (V.). 

OLLIERS, Var. — Hôp. dép. de Marseille (V. ; Arch. 
nat.^ S. 4812). 

ORANGE, Vaucluse. — Hôp. mentionné pour la pre- 
mière fois dans la bulle de Nicolas IV en 1291. En 1438, 
le maître de Besançon y nommait un recteur, en qualité 
de vicaire général. F. Latinus de Castro S. Elia en 
était pourvu le 10 février 1472, et Charles de Pomayrol 
en 1532 {Arch. hôp. de Besançon^ chap II, n'*2 ; — Arch. 
rom.j lib. 19, f 168, lib. 36, f 24). 

ORGELET, Jura. — On ignore l'époque de la première 
fondation d'Orgelet. Jean de Chalon-Auxerre I le fit 
rebâtir de nouvel en Thonneur de N. Dame. Au mois 
d'août 1292, il lui donna, pour assurer la rente de 30 livres 
estevenantes dont il l'avait doté, les deniers à Dieu perçus 
^ Orgelet et Annthod les jours de foires et de marchés, 



}80 FOUILLÉ DES HOPITAUX 

les toises des maisons et le cens qui lui était dû par la 
ville pour Tabandon du bois de la Côte, plus les droits 
d*usage dans ses forêts pour l'entretien et le chauflFage de la 
maison {Arch. du Doubs, c^ 113? c. 2). Par son acte de 
1301, Jean de Chalon confia son hôpital à la maison de 
Besançon, qui dès lors pourvut à son personnel et à sa 
direction. Le bâtiment, construction de belle apparence, fîit 
ruiné par le maréchal de Biron, en 1595 ; mais les boor* 
geois le relevèrent promptementet les échevins en prirent 
la direction, d'après M. Rousset, bien que TOrdre en eût 
encore le soin. Malheureusement des incendies, survenus 
en 1637 et 1674, le détruisirent à nouveau et l'hospitalité 7 
fut abandonnée. Cela fut cause que Tordre de St. Lazare 
put s'en faire mettre en possession en 1672; mais il fit 
retour à l'Ordre en 1693. Le commandeur de Besançon se 
contenta d'administrer les biens, à charge de recevoir les 
enfants trouvés. La ville obtint, en 1733, que ces biens 
fussent réunis au nouvel hôpital construit depuis peu à 
Orgelet (Rousset, Dict. des comm. du Jura, t. IV, p. 576 ; 
— P., p. 408). 

ORION, B. Pyrénées. — Hôp. de St. Jacques, cité dans 
la visite de 1288 et la bulle de Grégoire XI. Il fut réuni à 
St. Lazare, puis à l'hôpital de Pau, en 1698 (P., p. 443). 

ORTHEZ, B. Pyrénées. — Hôp. dép. de Dijon en 1288 
(V.) ; cité dans la bulle de 1372. 

PANTIN, Seine. — Maladrerie dép. de Paris (V.). 

PRADINES, Lot{Pardiraco,Pardimaco, Pradiaco) 
{De). — Hôp. situé dans la province d'Auch et cité dans 
les bulles de 1291, 1294, 1343. 

PARIS. — Après ce que nous avons dit, p. 224, sur l'hô- 
pital primitif du Saint-Esprit de Paris, il nous reste à faire 
l'historique de la seconde maison. A la suite des calamités 
occasionnées par les guerres sous le règne du roi Jean, 
les bourgeois de Paris s'émurent de l'abandon d'un grand 
nombre d'orphelins, et, pour leur porter un secours ef&cace 



DE L*ORDRE DU SAINT-ESPRIT 38 1 

se proposèrent de rétablir Thôpital et la confrérie du St- 
Esprit. Le 17 février 1362, Tévèque de Paris, Jean de Meu* 
lan, approuva leur projet et décida que quatre maîtres 
gouverneraient la confrérie. Cette ordonnance fut ratifiée 
le mois suivant, par le Dauphin Charles au nom du roi. 
Le pape Urbain V approuva à son tour le rétablissement 
{quod de novo construitur) d'une maison si utile et per- 
mit aux gouverneurs de présenter le chapelain à la no- 
mination de l'ordinaire (23 juillet 1362). L'année suivante, 
le 27 juin, la confrérie acquit, pour son établissement, 
(( une grande maison ou hôtel à deux pignons devant et 
derrière, une grange et toutes ses appartenances et dé- 
pendances, situées à Paris dans la place de Grève, tenant 
d'une part au grand hôtel des Grands Piliers, qui jadis fut 
au Dauphin de Vienne, dit aujourd'hui l'Hôtel-de- Ville. » 
Enfin le 4 août 1445, une ordonnance bien connue de Char- 
les VII renouvela les privilèges des Maîtres et des con- 
frères, et décida de nouveau que l'hôpital n'était tenu de 
recevoir que les enfants légitimes, les autres étant à la 
charge du chapitre de Notre-Dame. 

L'organisation intérieure de l'hôpital est expliquée tout 
au long dans le ms. 1 1778 de la Bibl. nationale, qui méri- 
terait d'être publié intégralement. Les premières pages 
sont consacrées à un historique succinct de la maison, fon- 
dée sur le modèle de celles qui existaient « en diverses 
villes de France. » (f*' 1-14.). Vient ensuite le règlement de 
la confrérie, de son assemblée générale de la Trinité, de 
son banquet, etc. (f 19-36) ; puis celui du personnel, as- 
sez nombreux, car on y trouvait un chapelain perpétuel 
avec quatre gens d'église, et un « homme lay » qui avait 
les clefs des portes et des greniers (f* 86) ; une maîtresse 
femme, surintendante des filles et femmes ; une maîtresse 
pour enseigner les petites filles ; une couturière, une cui- 
sinière, une garde-malade, une chambrière au dortoir des 
filles et un chambrier à celui des garçons (f" 87-88). 



|82 POUIIXi DIS ■OTfTAOX 

Les bâdments comprenaieiit une rhapeUr^ des dortoirs 
pour les filles et les garçons, use infirmerie^ des logemeiits 
soigoeaseinent séparés pour le personnel des deux sexes 
et les dépendances nécessaires {f 76). Les le ii ilems rece- 
vaient chaque année leurs vêtements : trois cottes-hardies 
et robes de toile, une robe de drap, deux grands diape- 
rons boutonnés devant, des peliçons et des manteaux pour 
veiller la nuit, des bottes de feutre et des chaussures (f 80). 
Les enfants étaient uniformément vêtus de drap gris (fM). 
Ils étaient instruits par « un bon grammairien et suffisant 
de vie et mœurs approuvé des maistres auxquelles la cog- 
noissance des escolles de la ville de Paris appartient [f* 5); 
ensuite ils étaient placés en apprentissage dans la ville. 
Les grands chantaient l'office canonial avec les prêtres 
(f 87). — En 1537, il y avait à l'hôpital 43 orphelins grar- 
çons, 65 filles, un boursier au collège de Navarre, deux 
cappeteSj plus six autres au collège de Montaigu ; 26 gar- 
çons étaient à m^tre à Paris ; 32 filles au service ou en 
métier, et six petits enfants en nourrice au dehors ; trois 
filles avaient été mariées dans Tannée, avec une dote de 35 
livres d'argent (fgo v*). — Comme nous l'avons dit (p. 227), 
les chapelains étaient alors des frères du Saint-Esprit. 
L'hôpital fut réuni par Louis XIV à l'Hôpital-Général, le 
24 mars 1680 {Recueil d'édits... concernant VHôp. gé- 
néral...^ éd. de 1745, p. 259). Mais il conserva son exis- 
tence propre jusqu'en 1791. La ville de Paris fut autorisée, 
en 1825, ^ racheter les bâtiments aux hospices de Paris, 
pour la somme de 115,585 fr. (Les documents cités dans 
cette notice ont été copiés aux archives hospitalières de 
Paris, avant leur incendie, en 1871. — Voy. Inventaire 
de l'hôp. du Saint-Esprit, par Brièle, 2* éd., 1885.) 

PENNE (LA), B. du Rhône. — Hôp. dép. de Marseille 
(V.), uni à St. Lazare, qui le rendit ensuite. Il est cité 
dans les bulles de 1291, 1294, 1343 et 1372 (P., p. 443.) 

PERTUIS, Vaucluse. — Hôp. et confrérie dép. de Mar- 



i 



DE l'ordre du saint-esprit 38^ 

seîUe (V.), unis à St. Lazare, puis rendus aux confrères. 
(P., p. 443). 

PEYREHORADE, Landes. — Hôp. dép. de Dijon en 
1288 (V.), cité dans la bulle de 1372 ; ses biens étaient, au 
siècle dernier, entre les mains de plusieurs particuliers. 

(P., p. 438). 

PEYROLLES, B.-du-Rhône. — Hôp. et confr. dép. 
d'Aix (V.). Les confrères recouvrèrent leurs biens après 
redit de désunion (P., p. 443). 

PLAGNE, Hte-Garonne. — Hôp. dép. d'Auray (V.) 
Cité dans les bulles de 1220 et 1291. Le commandeur fut 
condamné, en 1670, par arrêt du Grand Conseil, à payer 
le droit de responsion à Tévèque de Césarée (P., p. 437). 

POITIERS. — Maladrerie attrib, à l'Ordre {Arch. 
nat.j s. 4869). 

POLIGNY, Jura. — On ne connaît point la date précise 
de la fondation de cet hôpital ; mais il est à croire qu'elle 
suivit de près celle de Besançon, car la maison de Poligny 
était considérée comme la fille aînée de cette maison magis- 
trale, étant nommée la première dans les actes capitulaires 
et autres. Son premier titre connu est une donation de Tan 
1245, faite aux frères et aux pauvres de l'hôpital (Cheva- 
lier, II, p. 138). Le recteur était de droit, et depuis un 
temps immémorial, membre de la familiarité et du chapi- 
tre de l'église paroissiale. Les biens de la maison furent de 
bonne heure assez considérables et les frères et sœurs 
étaient nombreux dès le XIII* siècle. Nous allons donner 
la liste des recteurs connus, et rapporter en même temps 
ce que nous savons des événements qui ont signalé leur 
magistère. 

I. — Frère Arembert de montmoret, le premier rec- 
teur connu, vivait en 1299. 

F. Pierre de Lyon, recteur de Besançon, s'intitulait, en 
1316, maître de Besançon et de Poligny. Il est probable 
que, élu par les frères de Besançon lorsqu'il était déjà à la 



}84 FOUIlXi DES HOHTAUX 

tète de Polign j, il conserva Tadministration de ce dernier 
(Voy. A. Castan^ II, p. 195). Un grand incendie, arrivé 
en 1312, consuma une partie de la ville et atteignit aussi 
Vhôpital ; mais il fut rétabli promptement (Ms. Chevalier, 

III. — F. Etienne d'Arbois, 1327. Nommé à cette date 
dans une vente faite à Thôpital. Celui-ci n'avait encore ni 
chapelle, ni cimetière. Le 29 janvier 1336 (vx st.), Tarche- 
vèque de Besançon, après avoir lu les bulles des Papes, 
confirmatives des privilèges de TOrdre, permit aux frères 
d'en établir proche leur hôpital, se réservant toutefois 
d'examiner les raisons alléguées par le curé ou les patrons 
de Téglise paroissiale, s'ils venaient à faire opposition à sa 
sentence [Arch. de la maison de Poligny^ p. originale). 

IV. — F. Renaud, dit Copenet ou Copenat, cité dans 
des actes de 1355 et 1364. Marguerite de France, comtesse 
de Flandre et de Bourgogne, concéda à l'hôpital, en 1372, 
une rente de quatre chênes à prendre dans sa forêt àeSous 
la ville [Arch. hôp. de Besançon, chap. I, n* 5). Après 
F. Renaud, il y eut un intérim, pendant lequel le recteur 
de Besançon administra l'hôpital, ainsi qu'il résulte d'un 
acte d'assensement passé en 1379 (Ms. Chevalier, f* 33). 

V. — F. Henri Massier, 1395. 

VI. — F. Hugues Grillot, 141 5. 

VII. — F. Antoine Millet, 14 16. 

VIII. — F. Hugues Grillot de Plaigne, 1425, 1431, 
neveu d'Hugues Grillot, cité plus haut. En 1426, l'hôpital 
fut transféré, du faubourg du vieil hôpital, où il se trouvait, 
dans l'intérieur de la ville, près de la nouvelle église 
S. Hippolyte. Jean Cbousat avait acquis auparavant une 
maison des héritiers de Billard de Montaigu; il la céda pour 
400 écus à F. Hugues de Plaigne, à charge d'y édifier à ses 
frais ledit hôpital, « à scavoir une chapelle ou autel pour 
y chanter, et devant icelle chapelle faire le dortoir des 
pauvres garni de chamlis et d'y faire sa résidence. » Une 



DE l'ordre du saint-esprit 385 

maison contigûe, acquise un peu plus tard, acheva de per- 
mettre Tinstallation, qui eut lieu en 1436. Mais le procureur 
général du baillage d'Aval crut devoir s'opposer à ce 
déplacement, parceque, disait-il, le nouvel hôpital était peu 
favorable aux malades, n'ayant ni cour, jardin, place, 
rivière comme en son ancien emplacement, « dont par 
temsde chaleur et pédimie (épidémie) sepourroient ensuir 
grants maladies, infections d'air, mortalités et autres incon- 

véniens » Il ajoutait que le danger serait plus grand 

encore en temps de guerre, « car par le fait et moyen 
d'espies et explorateurs, qui en habit dissimulé et sous 
umbre de poures, se pourroient retraire aud. hospital, fai- 
gnans estre malades et indigens, pourroit icelui bourg estre 

tray et délivré es mains de nos ennemis » (Chevalier, 

II, p. 669). A la suite de cette opposition, le duc de Bour- 
gogne ordonna la réintégration des malades dans les anciens 
bâtiments. Mais Tordre fut éludé, probablement par le 
crédit de Jean Chouzat, conseiller du duc, et il ne fut 
jamais exécuté. 

IX. — F. ViENNET BiSCOURNER, I436. 

X. — F. Guy Nyvel, 1470- 1474. 

XI. — F. Pierre Perrenel, maître-ès-arts, procureur 
général de l'Ordre, 1476. 

XII. —F. Etienne Millet, 1500. Il administrait l'hôp. 
depuis 1482 et succéda en 1510 au recteur de Besançon; il 
mourut en 1519 (Castan, II, p. 196). 

XIII. — F. Antoine Millet, dit Chauvirey^ de Poli- 
gny, neveu du précédent ; nommé coadjuteur le 3 février 
1508, il lui succéda en i^io {Arch. hôp. de Bes.j cas. C, 

B. 3) 

XIV. — F. Jean Charderonnet, i 540. 

XV. — F. Etienne Rognon, d'une famille noble de Po- 
^ig^Jj prit l'habit à Besançon en 1570, fut nommé recteur 
en 1583 et résigna en 1607. 

XVI. — F. Etienne Prodhon, prit l'habit à Besançon, 

25 



;86 POUILLÉ DES BOnTAVX 

le 8 mars i6o2<, et fat recteur de 1607 à 1650 [Arck. de Is 
m^ de Poligny). A la suite de la peste de 1636 et du sac de 
la \îlle en 1638, la rectorie demeura vacante : le comman- 
deur de Besançon se contentait de tirer ce qu'il pouvait des 
terres, ruinées et en friches pour la plupart. 

XVII. — F. Bernard Fromoxt, de Poligny, 1656-171 3. 
Ce recteur entreprit courageusement la restauration de son 
hôpital. « Il s*y employa avec tant d'ardeur, et usa d'une 
si grande économie, qu'il réussit : il augmenta même les 
fonds de Thôpital de ceux de son patrimoine etd'une partie 
de ceux du chanoine son frère. » Il y remit en honneur les 
œuvres de miséricorde. Aussi, lorsque le sieur de Saint- 
Livière, chevalier de St. Lazare, voulut en prendre posses- 
sion, les magistrats appuyèrent l'opposition du recteur, 
qui obtint enfin gain de cause en 1678 (Chevalier, II, p. 
140). F. Fromoxt avait été forcé de réduire ses œuvres à 
Thospitalité des pauvres et à l'entretien des enfants aban- 
donnés et des orphelins. La cession des biens de la confré- 
rie du Saint-Esprit, riche et prospère, pour la création d'un 
hôpital général (1608), l'autorisait à restreindre le champ 
de son activité. Il demeura plus de quarante ans à la tète 
de la maison. 

XVIII. — F. Joseph Constantin Baudot, nommé par 
le commandeur de Besançon le 26 novembre 17 14, tut pour- 
vu également par le grand maître romain, le 24 décembre 
suivant. Il continua la vie de zèle et de dévouement de son 
prédécesseur, selon le témoignage qu'en rendirent les ma- 
gistrats en 17 18. {Idée générale de l'Ordre..,^ p. 17). 

XIX. — F. LÉOPOLD Couché, 1730. 

XX. — F. Pierre Simon Blanchard, 17 36- 17 50. 

XXI. — F. Jean-Baptiste Bas, + 1756. 

XXII. — F. MuYARD DE Martigna, d'abord capucin, 
fit profession dans Tordre du Saint-Esprit et fut pourvu de 
l'administration de Poligny par arrêt royal. Mais comme 
il en dissipait les biens par sa mauvaise administration. 



DE l'ordre du saint-esprit 387 

une lettre de cachet Ten fit sortir. Ce fut le dernier recteur. 
Le roi nomma supérieure de la communauté et de Thôpital 
la plus ancienne des religieuses : 

XXIII. — Sœur Thérèse Perraud, professe en 171 1, 
mourut le 18 mai 1769, à Vâge de quatre-vingt-cinq ans. 

XXIV. — Sœur Barbe Arryez, de Besançon, professe 
en 1737, sous le nom de Sœur du Saint-Esprit ; élue le 20 
juillet 1769 ; + le 16 octobre 1780. — D'après le règlement 
de Tarchevêque de Besançon, les élections avaient lieu tous 
les six ans, avec faculté de réélection de la titulaire. 

XXV. — Sœur Charlotte Pelay (Françoise de S. 
Charles), professe le 23 septembre 1759 ; élue le 20 juillet 

1775; + le 23 mai 1783. 

XXVI. — Sœur Jeanne-Françoise MouREAU (Marthe 

de la Trinité), de Poligny ; professe le 25 juin 1748 ; élue 
en 1783. 

XXVII. — Sœur Elisabeth-Hyacinthe Viennot 
(Marie- Augustine), de Poligny ; professe le 6 juillet 1762 ; 
élue le 22 juillet 1788. 

XXVIII. — Sœur Marie -Ferdinande Parraud 
(Marie-Thérèse de S. Félix), de Frontenay ; professe le 13 
juin 1786, reconstitua la communauté en 1806 et mourut le 
13 novembre 1828, 

XXIX. — Sœur Anne-Josephe Marmet (Augustine 
de S. Félix); professe en 1812 ; élue le i*' décembre 1828 ; 
réélue en 1837 ; + le 18 mai suivant. 

XXX. — Sœur Marie- Antoine Frelet (Marie- Vic- 
toire de S. Joseph), professe le 21 novembre 181 5 ; élue le 
30 mai 1837 ; réélue en 1849 et 1855 ; + le 30 mai 1856. 

XXXI. — Sœur Marthe Magnard ; élue le 29 juin 
1856, réélue en 1862. 

XXXII. Sœur Stanislas Nicod; élue le 22 septembre 
1868. 

XXXIII. — Sœur Léonie Lacroix ; élue le 20 septem- 
bre 1874 ; réélue en 1880 et 1886. (Voir le dernier chapitre). 



j$8 Hxaxi 

POMÉGUE-EX-FRIOUL lU St. Etietuu. 5. SU- 
phanus). Boudie^-do-Rliôoe. — Hôp. dép. de JlaraeiUe* 
/^V... cité dans les balles de 1294, 1 343.1 372 «Vqjr.Jlortremlf 
Vhôp. du S.'E. de Marseille). 

P03lilIERS« Isère. — Hôp. uni à St. Jjaaare^ puis à 
rbôp. de Beanrepaire (P., p. 444}. 

POXTS ^de Ponte j Ponte grandinatis). Charente-Iiif. 
— Hdp. dép. d*Aiigoiilèiiie, (V.), cité dans les bulles de 
1256 et 1372. 

(POXT-AUDEMER, Eure. — Hop. attrib. à TOrdre, 
{Arch. nat.^ S. 4889}. 

PONT-DE-L'ARCHE, Eure. — Hôp. dép. de Coûtait- 
ces (V.), cité en 1372. Il fut uni à l'hôp. de Vemon (P., 
p. 436). 

PONTIS BONONjE (?) Province de Bordeaux. — 
Hôp. dép. de Bergerac (V.), cité dans les bulles de 1291, 
1294, 1342, 1372. 

PONT-A-MOUSSON, Meurthe. — Hôp. {Arch. nat., 
S. 4910). 

PONTS-DE-CÉ (LES), M. et Loire. — Hôp. dép. d'An- 
gers (Arch. nat.j M. 45). 

PONT-SAINT-ESPRIT, Gard. — Quoique les docu- 
ments publiés par M. Bruguier-Roure dans la première 
partie du Cartulaire de Vœuvre des église^ maison^ 
pont et hôpitaux du Saint-Esprit (Nimes, 1890), ne 
fassent pas mention expresse de Tordre du Saint-Esprit, 
nous avons des raisons sérieuses de croire que Thôp. du 
pont était tenu par des frères de l'Ordre. Nous avons parlé 
de sa fondation, p. 183. Ajoutons qu'en 1288 il était chef 
de ceux d'Agos, de Bidos, de Lannes, et relevait lui-même 
d'Auray, d'après l'acte de visite de F. Monette ; son recteur 
assista en cette qualité aux chapitres généraux d'Auray 
en 1308 et 131 2 {Diplom.j II, p. 376). La bulle de Gré- 
goire XI (1372) cite notre hôp. en ces termes: Domum 
conventualem Pontis Sancti Spiritus. — Un procès 



DE L'ORDRE DU SAINT-ESPRIT jSç 

survenu au XV* siècle entre Thôp, de P.-S.-E. et celui de 
Besançon nous apporte une nouvelle preuve de sa dépen- 
dance de l'Ordre. Les quêteurs des deux hôpitaux se 
faisaient une fâcheuse concurrence dans les diocèses de 
Tarentaise, de Maurienne, de Belley, etc. ; moyennant une 
indemnité annuelle de 40 florins, promise par Besançon en 
1432, la maison de P.-S.-E. s'engagea à cesser toute con- 
currence. Cette convention fut ratifiée par le grand maître, 
le 19 mars 1434 {Arch. de Vhôp, de Besançon, cas. C, n* 
5*; — Arch, rom,, lib. 19, f* 18; — Diplom., II, 447). — 
Cette maison est encore citée dans une bulle d'Urbain VIII 
(1625) et dans le Règlement général de l'Ordre par Louis 
XIII, en 1626. Les efforts de l'Ordre pour sa revendication 
cessèrent à la mort du cardinal de Polignac. 

POURCIEUX, Var [Porrion seu Porrino). — Ilôp.et 
conf. dép. d'Aix (V.), rendus aux confrères après l'édit 
de désunion (P., p. 444). 

PUISIEUX [Putisii), diocèse de Vienne. — Confrérie 
dép. devienne (V.). Les confrères rentrèrent en possession 
en 1696 (P., p. 444). 

PUY (LE), Hte Loire. — Hôp. qui était encore desservi 
par les religieuses du St. Esprit en 1726, sous la direction du 
Chapitre (P., p. 436). 

RAULHAC, Cantal. 

RIANS, Var. — Hôp. dép. d'Aix(V.), rendu aux con- 
frères en 1696 (P., p. 443). 

RODEZ, Aveyron. — Hôp. dép. de Millau (V.), cité 
dans la bulle de 1372. L'ordre de St. Lazare en a joui 
(P., p. 444). 

ROCHEFORT, Jura. — Hôp. dép. de Besançon, cité 
dans la visite de 1288. En 1301, Jean de Chalon s'engagea 
à le doter de 30 livrées de terres ; mais ses héritiers n'ac- 
complirent point cette clause. Un vassal de la seigneurie 
de Rochefort, Jean, surnommé Phiscole, abandonna, en 
1 323, les propriétés qu'il tenait en fief du comte d'Auxerre, 



790 VOOUJLÉ DES HOPITAUX 

sises à Cbâtenois et AadelaDge, à ThApital de Besançon. 
Le comte consentit à la donation , à condition d*ètre déchargé 
de l'obligation contractée par son ayeul (A. Castàn. Notice^ 
II, p. 208/. Lliôpital fut incendiépar les Français en 1479. 
et ses biens unis peu après à Besançon (Rousset. Dict. des 
Comm. dujuraj t. V, p. 451). La confrérie existe encore 
aujourd'hui dans l'église paroissiale. 

ROSIERS (LES), M. et Loire. — Hôp. dép. d'Angers 
{Arch. nat.^ M. 45)- 

ROUEN. — Hôp. cité dans la V. de 1288 et la bulle de 
Grégoire XI (1372). Cet hôpital nous est connu par Tacte 
de visite de F. Mouette, en 1288, dans lequel on lit ces 
mots : « Sur la requête dudit maître (de Coutances), nous 
avons vu et visité la maison et hôpital de la cité de 
Rouen...., de la collation de ce recteur; nous avons 
reconnu que la régularité et l'hospitalité y sont religieu- 
sement observées. » U est cité aussi dans les bulles de 
Grégoire XI (1372) et d'Urbain VIII (1625). L'hôpital du 
Saint-Esprit ou de yi^ViVAo, fondé en 1478 à Martainville« 
par Jean de l'Aigle, succéda-t-il au premier et fut-il des- 
servi par les frères de l'Ordre, nous ne saurions le dire 
( Voy. Notice sur Vhôp. du Saint-Esprit de Rouen, par 
M. de Beaurepaire, dans le Bull, de la Comm. des Antiq. 
de la Seine-Inférieure, t. V, 1882.) 

ROUGIERS, Var. — Conf. dép. d'Aix (V.), dont l'ordre 
de St. Lazare a joui (P., p. 443). 

SABLÉ, Sarthe. — Hôp. dép. d'Angers {Arch. nat., 
M. 45). 

S AINT-FERÉOL, Hte Loire.— Conf. dép. de Vienne( V.) 

SANCTUS FULPUS DE PARTIBUS (?). — Hôp. 
dép. de risle-en-Jourdain (V.). 

S. GENIEZ AUX MARTIGUES (5. Genexii), B. du 
Rhône. — Hôp. dép. de Marseille, cité dans la bulle de Ni- 
colas V en i454(Fabre, Hôp. de Marseille, t. I,p. 44 ;Mor- 
treuil,Z'A<5/>. du S. E. de Marseille). — Voy. Martigues. 



DE L ORDRE DU SAINT-ESPRIT JÇf 

S. GERVAIS, Gard. — Hôp. dép. de Nimes (V.), uni 
à St. Lazare, puis à Thôp. de Sarragnac en 1697 (P., p. 444). 

S. GIRONS, Arriège. — Hôp. dép. d'Auray (Bulle de 
1220 ; — V,). 

S. HILAIRE-LA-COTE, Isère. — Conf. dép. de Vienne 
(V.), qui fut rendue aux confrères en 1696 (P., p. 446). 

S. JEAN, procheLdLon, {S. Johannespr ope Laudunum). 

— Hôp. dép. de Steffansfeld (V.), cité en 1372. 

S. JEAN ? {S.Johannes). — Hôp. dép. de Besançon (V.) 
S. JEAN-D'ANGELY, Charente-Inf. — Hôp. dép. 
d'Auray, cité à ce titre dans la bulle d'Honorius III, de 
1220, et la V. de 1288. Il fut uni à St. Lazare, puis un arrêt 
de 1695 ordonna que Thospitalité y fut rétablie (P., p. 436). 
S. JULIEN, Jura. — Jean de Chalon-Arlay avait pro- 
mis, au mois d'août 1301, d'élever un hôp. du S.-E. dans 
son bourg de S. Julien. Il tint sa promesse, et le dimanche 
Oculi (25 mars) 1302, il lui concéda une dotation de 8 
benats de sel par an sur ses salines de Salins, un pré à S. 
Julien, Tusage de ses bois et des pâturages communaux, 
plus 30 cens de blé ou de dîmes sur différents héritages du 
bourg. Les inventaires de 1360, 1395, etc, montrent que 
cet hôpital était assez bien pourvu. La guerre de 1595 le 
ruina, comme tant d'autres en Franche-Comté ; mais il se 
releva promptement, grâce à un legs de 120 écus que lui fit 
son recteur, Jean Chappuis, d'Orgelet, pour le fonds d'en- 
tretien de trois lits (1601.) — Voici les noms de quelques 
recteurs : Antoine Souse, 1492 (Arch. ch. des comptes de 
Bes., B. 522) ; F. Guillaume Buffet (1568); — Jean 
Chappuis, d'Orgelet {160 i) ; — F. Denis Jobelot (1622) ; 

— Claude Brun (1629) ; — Philibert Villemot (1633); 

— F. Denis Beuque (1667). Quand il n'y avait pas de reli- 
gieux disponibles, Besançon nommait un prêtre séculier. 
L'hôp. ne fut pas uni à St. Lazare ; mais les bâtiments ve- 
nant en ruines, ses biens turent, par arrêt du Conseil, de 
1 708, incorporés définitivement à Thôp. de Besançon, qui les 



^2 POCIUi DES HOrrTACX 

possède encoi^ aojotinlliai. à charge de recevoir les enfuie 
tronvés do bourg ' Vor. Arch. hôp. de Besançon^ I. ch^. 
II ; — A. CastaD. Notice^ II, p. 222 : — P., p. 409 - 

S. JULIEN Voy, LaSaavetat'. 

S. LIEFFROY. Doubs. — Othon II. comte de la Rcxlie. 
donna an S.-E. de Besançon, par une charte do mois de juin 
1225, une ancienne maladrerie, desservie auparavant par 
l'ordre de Citeaux. La maison avec chapelle, des terres 
situéesà S. Ueflfiroj et dans les localités voisines, formaient 
un établissement assez considérable pour que 11i6pital de 
Bes. y établit un religieux chargé de le diriger et d'exercer 
l'hospitalité. Ce service aj^ant été supprimé par mesure 
d'économie, après avoir duré près de deux siècles, le sei- 
gneur de Soye, héritier des sires de la Roche, intenta im 
procès aux religieux sur ce chef ; les assises de Baume, puis 
le parlement de Dole, se fondant sur ce que la donation 
primitive n'imposait pas cette condition, rendirent une 
sentence en faveur de Thôpital de Besançon, le 3 avril 
1413 (A. Castan, II, 204. — Guillaume, Hist. des sires 
de Salins, I. 73, 87, Notes). 

S. LO, Manche. — Cet hôp. est cité, dans la bulle d'Ho- 
norius III de 1220, comme une fondation de celui de 
Coutances ; son établissement avait été opéré par les bour- 
geois de la ville, avec les encouragements de l'évêque de 
Coutances, Hugues de Morville. Le premier acte qui le 
concerne est de 12 17. Frère Monette examina en 1288 les 
comptes du prieur de S. Lô, pendant son séjour à Coutances 
et ce même prieur assistait aux chapitres d'Auray en 1308, 
1315 et 1317 {Diplom.j II, 375 et sv. ; PP. just., n** IV). 
A partir du milieu du XIVo siècle (1349-1351), on voit les 
bourgeois de S. Lô nommer les prieurs et même les frères ; 
ils en avaient donc pris l'administration. Les frères de 
rOrdre ne l'occupaient plus depuis longtemps, quand, en 
17 16, frère Michel de France de Vandeuil, procureur géné- 
ral de rOrdre, y nomma frère Robert Ancelin, chanoine 



DE l'ordre du saint-esprit j^j 

régulier de St. Augustin, demeurant à Ste Croix de la 
Bretonnerie, à Paris. Après un long procès engagé avec la 
ville et Tévèque de Coutances, le recteur eut gain de cause ; 
mais il transigea, moyennant une pension. Le cardinal de 
Polignac y nomma ensuite Pépin Dumontet (1741), qui 
résigna ce bénéfice par permutation avec frère Jean-Domi- 
nique Têtu de Balincourt (v. 1750). Celui-ci consentit, le 
21 juillet 1757, à la suppression du prieuré, réclamée avec 
instances par les bourgeois de la ville, moyennant une 
pension de 1800 livres. (Voy. Fouillé , p. 437. — M. P. 
Parfouru a pris, en 1874, pour sujet de sa thèse d'archiviste 
paléographe, une Etude historique sur la Maison-Dieu 
de Saint' Lô, Les détails cités ci-dessus en sont tirés). 

S. LOUP (Voy. Le Départ). 

S. MALO, Ile-et-Vilaine. — Hôp. dép. d'Auray (V.), 
cité dans les actes capitulaires de 1308, 1312, 13 19 et la 
bulle de 1372. Son revenu était considérable. L'ordre de 
St. Lazare n'en jouit point. (P., p. 436). 

S. MATHURIN, M.-et-Loire. — Hôp. |dép. d'Angers 
{Arch, nat., M. 45). 

S. MAXIMIN, Var. — Hôp. et confrérie dép. de Mar- 
seille (V.). 

S. POURÇAIN, Allier.,— Hôp. dép. de Dijon (V.). Un 
arrêt contradictoire du Grand Conseil, du 13 juillet 1662, 
rendu contre Jean Giraudin, dit Dillon, le condamna à 
restituer à l'Ordre les biens usurpés, plus vingt-neuf années 
d'arrérages (P., p. 434). 

S. RAMBERT (d'Albon, Drôme ?). — Confrérie dép. 
de Vienne (V.). 

S. SATURNIN, Cher. — La Terrade y nommait en 
1643 {Diplom.y II, 398). 

S. SÉVER, Landes. — Hôp. cité dans lesbullesde 1291, 
1294, 1341, 1372. Le 30 novembre 1562, Charles IX 
ordonna la restitution de cet hôp. , qui avait été saisi , en vertu 
de son édit de 1560 {Dipi.j II, p. 24). 



^94 POUILli DES HOPITAUX 

SAINTE-SÉVÈRE, Indre. — Hôp. confondu souvent 
avec le précédent, si bien qull est fort difficile de recon- 
naître les documents qui se rapportent à Tun ou à l'autre. 
Une bulle de Boniface VIII, de 1294, place celui-ci en 
Bourgogne [Dipl.^ I, p. 42) ; de même le Catalogueromain. 
Il dépendait de Dijon (V.) et lui payait 6 fr. de responsion 
(Terrier de 1450). Le dossier de l'ordre de St. Lazare, 
aux Archives nationales, contient, sous le titre de fonda- 
tion de rhôp de Sainte-Sévère, un acte des ides de mars 

1206 : « Ego Rogerius Palastelly, notum ;facio quod 

donavi domui sancti spiritus Ae fonte Marger^ locum 

in quo sita est ipsa domus, cum omnibus pertinentes suis, 

que ecclesie romane et domino pape gratis obtuli 

DatumRome P idus martiî, anno 1ACCYV[Arch. nat., 

S. 4833, copie du XVII* siècle). Jean Cornu, recteur de 
Sainte-Sévère, quitta TOrdre vers 1449, après de nombreu- 
des difficultés de la part de Guérin Teler, de Montpellier, 
et devint grand maître de l'ordre de St. Lazare (Gauthier 

de Sibert, Hist. des ordres de N. Z). du Mont-Car m cl 

et de St Lazare ^ 1772, t. I, p. 269). Le seigneur du lieu et 
un ecclésiastique étaient en concurr-ence pour la possession 
de cette maison en 1720 (P., p. 425). 

S. VALLIER, Alpes-M. — Hôp. et confr. dép. d'Aix 
(V.). L'ordre de St. Lazare, après en avoir tiré une rente de 
100 1., dut le rendre aux confrères (P., p. 445). 

SALERNES, Var. — Hôp. et confr. dép. de Fréjus (V.). 
Les confrères donnaient 20 1. à St. Lazare, pendant l'union 
(P., p. 444). 

SALES (?). — Hôp. dép. de SteflFansfeld (V.) ; cité 
dans la bulle de 1372. 

SALIN A (?). — Hôp. cité dans la bulle de Grégoire XI, 
en 1372, et dans la Visitede J. Monette, comme une dépen- 
dance de Besançon. Il s'agit peut-être ici de Tun des hôpitaux 
de Salins (Jura), qui aurait appartenu momentanément à 
l'Ordre. 



DE L ORDRE DU SAINT-ESPRIT 395 

SAULX, Côte-d'Or. — Hôp. conventuel, dont dépen- 
daient, en 1288, les maisons de Beaune, Arc-en-Barrois, 
Chablis, Etampes, Is-sur- Tille, Langres, et les maladreries 
de Mussy-l'Evêque, Semur et Val-Suson (V.). Il était aussi 
patron de l'église paroissiale, ainsi que des chapelles St 
Simon et St Michel. Il dut, ainsi que la plupart de ses 
dépendances, cesser de très bonne heure d'appartenir à 
l'Ordre. 

SAVASSE, Drôme. — Hôp. cité dans la V. de 1288. 

SAUVETAT (La), Gers. - Hôp. dép. de Bordeaux (V. 
— P., p. 448). 

SaUMUR, m. et Loire. — Maladr. dép. d'Angers. (V.) 

SAVIGNAC, diocèse de S. Malo. — Hôp. (V.), dont 
St. Lazare a joui (P., p. 445). 

SEILLANS, Var. — Confr. dép. de Vienne, dont St. 
Lazare a joui ; le revenu fut ensuite uni à THôtel-Dieu 
(V. — P., p. 445). 

SELLIÈRES, Jura. — Nous avons raconté, p. zzzj la 
fondation de cet hôpital dédié à S. Eloi. Il était situé, 
ainsi que sa chapelle, « emprèsetau dehors de la ville, du 
costé devers bise, au bout du pont de pierre (Terrier de 
1548). Le recteur était tenu d'y entretenir « chambre et 
cheminée garnie de lits pour y recevoir les pauvres » 
{Ibtd,). Trois incendies successifs delà ville ruinèrent cette 
maison et la rendirent inhabitable dès le XVI« siècle. Le 
prince d'Orange y nommait pourtant encore un chapelain 
en 1560. En 1594, Joseph Froissard, président du parle- 
ment de Dole, obtint du roi d'Espagne la cession des biens 
de Thôpital de Sellières au collège des orphelins de Dole, 
qu'il venait de fonder. Ses héritiers rebâtirent cependant, 
à la fin du siècle suivant, la maison hospitalière et la cha- 
pelle, comme en témoigne une inscription placée dans la 
façade ; mais ils n'y rétablirent pas l'hospitalité. La chapelle, 
après avoir servi de lieu de réunion aux congrégations 
pieuses, fut convertie à des usages profanes, puis démolie en 



}96 POUILLi DES HOPITAUX 

1819. La cure occupe aujourd'hui le bâtiment restauré par 
la famille de Froissard-Broissia. La confrérie fut longtemps 
florissante à Sellières et à Vers, paroisse primitive de ce 
lieu {Arch. municip. de Sellières^ Liasse 18, n** 299- 

305). 
SEMUR, CôteKi'Or. — Maladrerie dép. de Saulx (V.). 

SERRES, H. Alpes. — Conf. dép. de Vienne (V.) ; eUe 
payait cinq livres de censé à Tordre de St. Lazare pendant 
Tunion (P., p 445). 

SÈVRES, S. et Oise. — 

SIGNES, Var. — Hôp. dép. de Marseille {Vis.). La 
confrérie payait à St. Lazare, pendant Tunion, une rente de 
130 livres (P., p. 445 ; Arch. nat.j S. 4812). 

SULMACO (De) (?). — Hôp. signalé dans une bulle de 
Nicolas IV (1291), comme situé dans la province de Bor- 
deaux. 

TABERLA {De) (?) — Hôp. dép. d'Auray, cité en ces 

termes dans la Visite de F. Monette: Domus juxtâ 

fluvium prope civitatetn de Taberla. 

TAILLA CO {De), — Hôp. annexe de Manciet (B. 1372). 

TANCINE, Tencin, Isère ? — 

TARASCON. — Hôp. dép. de Besançon en 1288 (V.). 

TARTASSO {De), Tartas, Landes (?) — Hôp. dép. de 
Steffansfeld (V.), cité dans la bulle de 1372. 

TAVERNES, Var. — Hôp. dép. de SteflFansfeld en 1288 
(V.). La confrérie rentra dans ses droits en 1693, après 
avoir payé une rente de 21 1. à St. Lazare (P., p. 446). 

TEURDRES(?) — Hôp. dép. d'Angers {Arch. nat., 
M. 45). 

THÉSIERS, Gard. — Hôp. dédié à S. Jacques et dép. 
de Bergerac (V.). Les chevaliers de St. Lazare en tirèrent 
un revenu de 250 1. ; un arrêt du 22 avril 1695 Tunitàriiôp. 
d'Aramon {Arch.nat., S. 4915; P., p. 446). 

TONNERRE, Yonne {De Tornodoro). — Nous avons 
rapporté, p. 172, la fondation de cet hôpital, qui avait le 



DE L ORDRE DU SAINT-ESPRIT J97 

premier rang parmi les suffragants de Dijon et lui payait 
3 fr. de responsion (Terrier de Dijon, 1450). En 1241, 
Thomas, clerc de Tonnerre, léguait aux pauvres de l'hô- 
pital du Saint-Esprit dix sous pour pitance. Cette maison 
est citée dans toutes les bulles, à partir de 1256. — Le 31 
août 1407,1e recteur de Dijon en pourvut Jean Guénant, 
prêtre de la Chapelle-sous-Flavigny, à la condition qu'il 
prit immédiatement l'habit, ce qu'il fit (D. Calmelet, Hist. 
ms,). — Frère Jean Chassinet, religieux de Dijon et 
recteur de Tonnerre, assistait au chapitre de Dijon de 1443 
(Ibid.). — On connait encore Frère Thibaud Gallois 
{1500), Antoine Delagoutte, qui fit dresser un terrier 
des biens ; Benoit Bourdon (1542); Claude Picardet ; 
Claude Boulachin, qui loua sa maison en 1564, aux cor- 
deliers de Tanlay , expulsés par les Huguenots ; Regnaud 
(1595); Louis Hugues, prêtre séculier, nommé en 1632, 
mais qui ne fit pas profession ; Barthélémy Dubois { 1 637) ; 
Jean de Parrade (1660). L'hôpital fut uni à l'ordre de 
St Lazare, après l'édit de 1672, jusqu'en 1693, où frère 
Bernard de la Monnoye en fut pourvu. Les frères 
Adrien de Biville (1704) etBARDENET (1726) en joui- 
rent après lui. Le dernier recteur fut frère Pierre Mignard 
(1729-V. 1750). A sa mort, le s' Pépin s'empara des reve- 
nus. Après la suppression de l'Ordre, l'évèque de Langres 
voulut doter des biens de l'hôpital le collège des Minimes 
de cette ville ; mais les lettres patentes sollicitées n'étaient 
point encore obtenues en 1789 et ces biens furent vendus 
au profit de l'État. La maladrerie de S. Biaise, proche 
Tonnerre, appartenait à notre maison, d'après la visite de 
1288. (Voy. Hist. ms. de Dom Calmelet ; Gaston JoUivot, 
Etats généraux de 7576. Rech. sur V assemblée des habù 
tants de Tonnerre, 1876, pp. 69-73 ; — Jrch. nat.y S. 
4841). 

TOUL. — D'après un ancien auteur, cette maison devrait 
sa fondation à un échevin de la ville, nommé Néméric 



39^ POUILLÉ DES HOPITAUX 

Barat, qui aurait demandé, en 1238, des religieux au 
recteur de Besançon pour la diriger. Nous la trouvons citée 
pour la première fois dans la bulle de Nicolas IV (1291) et 
la Visite de 1288. Une bulle d'Urbain V (1363) défendit aux 
hospitaliers de St. Antoine de troubler l'ordre du Saint- 
Esprit, et spécialement les religieux de Toul, dans leur 
droit de faire nourrir par les habitants des villes et des 
campagnes leurs animaux domestiques, et en particulier 
les porcs, aux oreilles desquels devaient être attachées des 
sonnettes [Arch, hôp. de Bes., ch. I, n* 7). En 1368, nou- 
velle bulle, à la requête du recteur de Besançon, pour 
obliger les détenteurs des biens de l'hôp. à les restituer 
[Ibid.). Un riche bourgeois de la ville donna, en 1385, une 
somme à partager entre les maisons de Besançon et de 
Toul [Ibid.), Cette dernière était déjà riche et florissante ; 
elle possédait la cure de St. Amand, qui lui fut confirmée 
par Clément Ven 1391. Des donations importantes (1386- 
1389) vinrent encore accroître ses biens. Cette prospérité 
lui fut fatale, en lui faisant entreprendre une lutte longfue 
et désastreuse contre sa maison-mère. Les religieux préten- 
dirent d'abord au droit d'élire leur recteur; les débats 
{1391-1418) se terminèrent par une bulle de Clément VII, 
qui partagea le diflFérend en accordant d'une part à Toul 
l'affranchissement de la visite du commandeur Bisontin et 
le monopole des quêtes dans les Trois- Évêchés ; mais en 
l'obligeant d'autre part à payer à son chef une indemnité 
annuelle de 12 florins. Cette sentence neramena pas la paix. 
Besançon en rappela de la décision de Clément VII à 
Martin V et ce pape confirma (14 18) la délibération du 
chapitre général de l'Ordre, qui replaçait l'hôp. de Toul 
sous la juridiction du commandeur magistral. Le recteur 
insoumis fit néanmoins appel (1434) au concile de Bàle, 
soutenu par la municipalité, et finalement intervint un 
concordat portant reconnaissance du droit d'élection du 
recteur par les religieux, mais obligeant le recteur à recon- 



DE L ORDRE DU SAINT-ESPRIT 399 

naître pour chef le commandeur Bisontin et à lui payer un 
tribut de 1 5 florins d'or. Mais ces clauses furent désavouées 
par la communauté turbulente (1435), et les eff'orts paci- 
fiques du commandeur, pour démontrer que sa juridiction 
ne pouvait que profiter aux intérêts de la maison rivale, 
échouèrent devant Tobstination des religieux, soutenus par 
le clergé et le peuple de la ville. Le procès fut donc repris 
Tannée suivante devant le tribunal suprême de la Rote, à 
Rome. La sentence ne pouvait être douteuse ; elle cassa la 
bulle de Clément VII et déclara la maison de Toul dépen- 
dance pure et simple de Besançon (1436). Le chapitre 
général et le pape Eugène IV promulguèrent et homolo- 
guèrent en 1437 cette sentence définitive, et les mutins se 
virent réduits à composer avec Besançon pour les frais 
énormes d'un procès qui avait duré cinquante ans (1441. - 
Arch. de Vhôp. de Bes.^ chap. I, n** S***). — Nous avons 
parlé d'un autre procès engagé au sujet des quêtes (p. 234), 
de la visite de F. Melchior de la Vallée (p. 267 et sv.) et de 
la dernière révolte, terminée par la condamnation de la 
maison, en 1625 (p. 234). — Des lettres patentes de Louis 
XIII, du 7 mars 1635. unirent l'hôpital au séminaire des 
Prêtres de la Mission. Deux ans après (17 mars 1637), eut 
lieu la séparation complète de la mense de l'hôp. d'avec 
celle du prieuré : les religieux du Saint-Esprit gardèrent 
leur maison, l'église et leurs dépendances; l'hôpital eut la 
maison des enfants trouvés. Enfin les deux maisons furent 
unies, eni7i4, à l'Hôpital Général de la ville. L'ordre de 
St. Lazare en avait joui pendant vingt ans. — Voici les 
noms de quelques recteurs: F. Henri de Foug, + 1400. 

— F. Jean Colson, 1450. — F. Vaûlthier Louyon, 
1468. — F. Henri Argengini, 1474. — F. Thierry, intrus. 

— F. Hasson, 1475. — F. Jean Bertin, 1499-1506, — 
F. Jean Gerrier le Vieux, + 1550. — F. Jean Colard, 
1554' -^ F« Melchior de la Vallée, pourvu à Rome en 
1 580, ne prit pas possession. — F. Jean Gerrier le Jeunei 



arao»! iv^f ^r^A. rM«.. Hb. A* f 21. 41 : G..r 23: lib. 
20. f 11 9: 24« r 25.61. 62. 70. — Vojr. l'Abbé G«iQaKMe« 
Xoticeiur V hospice du Saint-Esprit dé la tilU dé Toml. 
Ji^^ncv. 1*73 . 

TOULOX. Var. — H6p. qui était cooTentori en 12;^ et 
dost le recteur ocrnima ndait aux maisons àAlbia^ HendaTC. 
Cuers. et à la confrérie de Garde-Fremet ■ V. . 
première mention dans les balles est seulement de 1 372. 
L'hospitalité paraît n'y avoir jamais cessé. En 161 1, les 
ma^pstrats lui attribuent une donation de 4 écus 2 sols 
Invent. desArch. communales, p. 73 :en 1638. il achète 
deux maisons pour s'agrandir Ibid.. p. 89'i. De nombre u ses 
confréries faisaient leurs exercices dans les environs {Ibid.j 
Reg. 1604-1690; GG, 10 . L'ordre de St. Lazare ne put se 
mettre en possession que d'une maladrerie concédée aupa- 
rai'ant aux Pères de la Merci ; la ville conserva son hôpital 
du Saint-Esprit, qui fut érigé en Hôpital Général, le 17 
juillet 1752 {Ibid.f p. 137;. Depuis longtemps déjà il ne 
possédait plus de religieux de TOrdre iP., p. 429). 

TOULOUSE, Haute-Garonne. — Prieuré hospitalier 
dont relevaient, en 1288, les hôp. de Busset, Figeac, Tlle- 
en-Dodon et Viterbe. Il est cité dans la bulle de Gr^oire 
XI (1372). Un inventaire des lieux fut fait, en 1675, par le 
procureur de St. Lazare ; les capitouls ayant fait opposition 
le procureur s'appuya sur un extrait du registre du capî- 
toulat, de 1478, duquel il résultait que les enfants exposés 
étaient reçus dans les deux maisons de Saint-Jacques et du 
Corpus Christi du Thaur, ce qui prouvait qu'ils apparte- 
naient à l'ordre du Saint-Esprit (Ar^A. nat.^ S. 4913). L'hô- 
pital Saint- Jacques était appelé aussi l'hôpital du Saint- 
Esprit. Mais depuis longtemps les religieux ne l'occupaient 
plus. (Voy. Cat. rom. ) 

TOURDANT, Isère. Confr. dép. de Vienne (V.) 

Son revenu ne fut pas liquidé par Tordre de St. Lazare et 



DE l'ordre du saint-esprit 4^1 

les confrères rentrèrent en possession en 1696. (P., 446.) 

TOUR-DU-BAS (Le Bourg, Mobihan ?). — Hôp. dép. 
d'Auray (V.), cité en 1220 sous les noms de Hospitale de 
Turri seu Burgo de Bas. L'ordre de St. Lazare en a joui 
(P., p. 424.) 

TOURS, Indre-et-Loire. — Hôp. du Saint-Esprit, vi- 
sité en 1288 par frère Monette et cité dans la bulle de 1372. 
Il était attenant à TEglise paroissiale de Notre-Dame-la- 
Riche. Une décision des Grands Jours, tenus à Tours en 
1543, l'unit à l'Hôtel-Dieu, ainsi qUe les autres hôpitaux 
et maladreries de la ville. A cette époque, le commandeur 
était encore un religieux du Saint-Esprit (Ar^/j. nat.^S. 
4913 ; P., p. 434.) 

TOURUS (Tourves, Var ?). — Confrérie, qui jouissait 
d'une petite maladrerie ; après avoir payé une rente de 145 
1. à St. Lazare, la confrérie et la maladrerie furent unis à 
l'hôpital du lieu. (P., p. 430). 

TROYES. — Le prieuré du Saint-Esprit de Troyes est 
l'un des premiers de l'Ordre, puisqu'il est nommé dans la 
seconde bulle d'Innocent III, en 1198. On conserve dans 
les archives hospitalières de la ville, des titres de donations 
des années 1203, 1222 et 1228, concernant cet hôpital. Il 
était conventuel et possédait une double communauté de 
frères et de sœurs. Son tribut au chef de l'Ordre était de 
3 florins d'or. F. Jean Monette y trouva dans sa visite de 
1288, plusieurs points de discipline en souffrance. Il pro- 
céda à cette visite sur la demande du prieur de Saulx, qui 
par conséquent en était alors le chef. Voici les noms de 
quelques recteurs : F. Robert, reçut en 1203 ime maison, 
meix et jardin sis à Soilloux. — F. Jean Richard, pro- 
céda, en 1 32 1 , sur l'ordre du grand maître, à l'inventaire 
des biens [Arch. rom.^ lib. 21, f* 76). — F. Henri d'Al- 
lemagne, 1431 [Ibid., lib. 19, f 3.) — F. Eustache 
Vercueil, nommé en 1542, résigna sa charge en 1544, en 
faveur de F. Mathieu le Roy {Ibid.^ l. K, f* 45,99). — F. 

26 



^fn focnu MS BoriTAinc 

ASTTOIXE TorsJUtT en fat poomi en 1716, parle 
mandenr de Dijon, frère J. Dopant ; mais il se pot entrer 
en possession : X\Ap. da Saint-Eqirit. qni a^ait été rénni 
à rH6tel'Diea^ n*en fut plos séparé fPouilié p. 424 : — 
D'Arbois de Jobainville. Etudes sur les docuwtents am- 
térieurs à Vannée 128$, conservés dans les archives 
des quatre petits hôp. de la ville de Trqjes, Méin. de 
la Soc. d'Ajrrîc. de TAube, t. XXI. 1 857 . ) 

TUSSANIlï). — D'après la visite de 1288, lliAp. de 
Nantes possédait les léproseries de St. Lazare dans la Tilte 
et de Tussani suprà pontes illiusdem civitatis. 

VAL (LE), P.-de-Calais (?) — Hôp. ou confrérie (P., 
448). 

VAL-SUZON, Côte d'Or. — Hôp. dép. de Saulx (V.). 

VAL-DE-VIRE, Manche. — Hôp. dép. d^Aoray (V.). 

VALETTE (LA), Var. — Confrérie (P., p. 430). 

VALOGXES, Manche. — Hôp. dép. de Coutances (V.), 
cité en 1220, dans la bulle d'Honorius III en faveur 
d'Auray. En 1545, le grand maître en pourvut frère Eus- 
tache {Arch. rom.j lib. K, f* 146). Après Tunion à St. 
Lazare, il fut réuni à Thôpital de la ville (P., 424; Arch. 
nat.j S. 4B41). 

VAUCOULEURS, Meuse. — La ville de Vaûcouleurs 
possédait, depuis Tannée 1 164, une Maison-Dieu établie par 
Hugues le Blanc, qui en avait confié le soin à Tabbaye de 
Molesmes. En avril 1270, JeoflFroy de Joînville, seigneur de 
V., donna aux frères de Tordre du Saint-Esprit de Rome 
cette maison, avec tous les droits dont elle jouissait. Il y joi- 
gnit 20 jours de terre arable, 4 jours à planter en vigne et 
l'autorisation d'acheter 60 jours de terre arable dans le ban 
de la ville [Arch. nat,, S. 4910). Ce furent les frères de 
Besançon qui peuplèrent le nouvel hôpital, car cette mai- 
son en nomma toujours les recteurs et en recevait un tribut 
annuel de 4 fr. Le premier recteurconnu estfrèreTmERRY, 

nommé en 131 6 dans un acte de visite du recteur de 



:f 



DE l'ordre du saint-esprit 403 

Besançon. Vinrent ensuite : F. Laurent, 1337. L'hôpital 
jouissait alors d'un revenu de 15 livres de terres, sans 
compter le produit des aumônes et des quêtes et troncs 
[Arch. nat., ibid.). — F. Jean Deschamps, 1381. Un 
mandement de Charles V (mars 1375) apprend que Thôp. 
fut rasé, à l'exception de la chapelle, et que les murs et 
fossés de la ville occupèrent son emplacement. Heureuse- 
ment un bourgeois, Barthélémy Baudar, donna « au maître, 
frères et sœurs du Saint-Esprit, une place, un jardin et une 
petite maison situés dans Tenceintedes murs ; » ils y rétabli- 
rent Thôp. et une chapelle. — F. Girard Chenus, assistait 
au chapitres de Besançon, de 1468 à 1488. — F. Guillaume 
Petit, 1494. En 1498, le produit des quêtes du diocèse de 
Metz fut affecté par le commandeur de Besançon à la 
reconstruction de Thôp. de V., détruit par les guerres. — 
F. Jean Louvrier, 1501, + ap. 1526. — F. Jacques Lou- 
VRiER, 1542, + ap. 1587. — F. Pierre Louvrier, 1600, 
+ ap. 1630. — F. Jacques Thierry, 1635, en compétition 
avec Jean Tixerant, chanoine de Vaucouleurs, + 1636. — 
F.Armand de la Lagne, 1636, nommé par La Terrade ; 
René et Jacques Garreau, Simon Marotte de Muit, François 
Barbier, Nicolas Bodin, Bazincourt, Gabriel d'Olivier, 
furent des prêtres étrangers et intrus qui se disputèrent 
Thôp., de 1637 à sa prise de possession par Tordre de St. 
Lazare, en 1673. Rendu à Tordre du St-Esprit en 1693, il 
eut de nouveau pour recteur G. d'Olivier qui prit Thabit 
de TOrdre, réédifia les bâtiments et rétablit l'hospitalité. 
— F. JeanMunier, 1705-17 15. —F. Alexis Perreaud. 
-tF. Jacques Jacob, i 7 19- i 761. Nous avons raconté la 
fin de cette maison, dans nos deux derniers chap. (Voy. 
Arch. de Vhôp. de Besançon, chdip. I, |n'io; — F. de 
Chanteau, Notice hist. sur Vhôp. du Saint-Esprit de 
Vaucouleurs, Mém. de la Soc. d'Archéol. Lorraine, 
t. XXXI, 1881). 

VELBTI[7). — HÔp. dép. de Bordeaux (V.). 



404 POUIIxé DES HOPITAUX 

VESOUL, Hte Saône. — H6p. du Saint-Esprit, sur 
lequel les renseignements nous font défaut. Le 17 novem- 
bre 1544, frère Jean Millet en était pourvu, à la suite du 
décès de frère Jean Chiillon (Arch. rom.^ lib. K, f* 123). 

VIDOUZE, Htes Pyrénées. — Hôp. du Saint-Esprit, 
appelé aussi Notre-Dame-des-Landes. Il était possédé au 
XVIP siècle par les Bamabites de Lescar (P., p. 423). 

VIENNE, Isère. — Hôp. dont dépendaient les confré- 
ries de S. Ferréol, Luzinais, de Putisio^ S. Rambert, 
Serres, S. Hilaire, Tourdant, Seillans (V.). 

VITERBE, Tarn. — Hôp. dép. de Toulouse (V.). 

VOIRON, Isère. — Hôp. dép. de Grenoble (V.). 

SUPPLÉMENT AUX HOPITAUX FRANÇAIS. 

AGEN, Lot-et-G. — Maison-mère, dont dépendaient les 
hôp. de Laissac, Ager^ Martel, le Boucau, Bayonne et 
Sainte-Foy, ainsi qu'un second prieuré en dehors des murs 
de la ville (V.). Ses biens furent unis à l'ordre de St 
Lazare, puis à Thôp. général (P., p. 435). 

AGER[Kgres, Hérault ?). — Hôp. dép. d'Agen (V.). 

AGOS, Htes Pyrénées. — Hôp. dép. de Pont-S.-Esprit. 
(V.). 

BIDOS, B. Pyrénées. — Hôp. dép. de Pont-S.-Esprit. 
(V.). 

BILIEA (BiUé, Ile et Vilaine ?). — Hôp, dép. d'Auray, 
d'après un acte capitulaire de 1308. 

BIRAN, Gers. — Hôp. dép. de Bassoues (V.) ; cité dans 
la bulle de Grégoire XI, de 1372 (P., p. 448). 

BIZONE, BusonCj Boa^one AquensiSj inprov. Are- 
latensi (Bouzon, Gers ?). — Hôp. cité dans les bulles de 
1291, 1294, 1343. 

BRIOUDE (5. Juliani de Briddi, d'après Mgr Pauli- 
nier), Hte Loire. — Hôp. cité dans les bulles de 1198 et 
1225, ainsi que dans le cat. romain. 

ETAMPES, S/ et Oise. — Hôp. dép. de Saulx (V.). 



DE l'ordre du SAINT-ESPRIT 405 



ALSACE 

ROUFFACH. — Cet hôp. est cîté dans la Visite de F. 
Monette comme une dépendance de StefFansfeld. F. Etienne 
PoiFFAUD en était commandeur en 1740. Cette maison 
vécut jusqu'aux abords de là révolution [Pouillé^ p. 413). 

STEFFANSFELD . — Nous avons mentionné la fondation 
de cette maison, p. 191. C'était un hôpital riche et considé- 
rable qui, en 1288, était chef des maisons d'Ausouis, OriolOj 
Taverne, Bresins, Rouffac, Sales, TartassOy St Jean 
proche Loudun et des maladreries de Barenton et Mon- 
taigu. Nous connaissons les recteurs suivants : F. Jean, 
pourvu le 14 janvier 1445, avec obligation de payer 40 
florins d'or Rhénans de responsion {Arch, rom,^ lib. 19, 
f 106). — F. Jean Frii, 29 décembre 1448 (1. 20, f* 30). — 
F. JODOCUS de Baden, camérier, 1458 (1. 22, f* 67). — F. 

Jean Roch, 21 juin 1472 (1. 19, f* 185). — F. Jean , 

1516 (1. E, f* 19); il payait, en 1518,80 florins d'or de censé, 
dont 40 pour sa maison et 40 pour celles de son vicariat. — 
F. JeanBreum, + 1549. — F. Jean Fabre, 1549 (1. M, 
f" 67). — F. Mathias Inshernin, 1574 (1. R, f 14). — F. 
Henri Grosskopf, 1592, après la démission de F. Henri 
Bp.uchim (1. X, r 50). — F. Etienne Grand voynet, 
av. 1700. — F. Ignace Fretcher,i7o6. Quatre prêtres 
composaient alors la communauté ; le revenu, qui montait 
à 6.000 livres, était employé à l'entretien des orphelins et 
des enfants abandonnés [Pouillé^ p. 413). — Voy. p. 317, 
pour la fin de cette maison. 

SUISSE 

BERNEi — D'après M. Valthard, cet hôp. remontait à 
Tannée 1233. D'abord très exigu et desservi par un maître 



406 FOUILLÉ DES HOPITAUX 

et deux frères,]il s'accrut considérablement par la suite. Ce 
fut dans son église que fut instituée, en 1 339, une messe à 
perpétuité pour les Suisses qui périrent à la bataille de 
Laupen. Frère Erhard de Baden, recteur de Berne, obtint 
du grand maître, le 14 juin 1458, la concession des quètesde 
r Allemagne. En 1465, cet hôpital fit un accord avec celui 
de Spire, au sujet de ces mêmes quêtes {Arcb. rotn.^ lib. 
22y f 68). La ville s'en empara, lors delà Réforme. Il était 
situé hors des murs (Valthard, Description de la ville de 
Berne^ p. 91). 

LAUSANNE. — Il y avait à Lausanne un ancien hôp. 
du Saint-Esprit, cité parmi les dépendances de Besançon 
dans les bulles de 1256, 1291, 1294, 1343 et 1372. L'acte de 
visite de 1288 et une charte de Hugrues, archevêque de 
Besançon, de 1336, en faveur de Poligny, le citent égale « 
ment. C'est tout ce que nous savons de cette maison. 

NEUCHATEL. — L'hôpital de Neuchâtel remonte à 
une époque reculée. Fondé et doté par les comtes souve- 
rains, il fut confié en 131 2, par les mêmes seigneurs, à 
l'ordre du S.-E. et au recteur de Besançon. Celui-ci en reçut 
l'administration des mains de Renaud, dit Sauvet, cha- 
noine de Neuchâtel, qui en avait auparavant la garde, et y 
plaça des religieux de l'Ordre. En 1380, l'hôpital fut 
reconstruit entre le bourg et la fermeté, du commun accord 
du seigneur, des habitants et du recteur de Besançon. 
Celui-ci tendait à faire de la chapelle une église publique, 
ainsi que l'accordaient les privilèges d'Innocent III, renou- 
velés par ses successeurs ; il y eut de longs démêlés et le 
chapitre de la ville fit une opposition constante (132 5- 1424). 
Le recteur devait annuellement à son supérieur de Besançon 
un tribut de 4 fr. ; il était à sa nomination, sous bénéfice de 
la ratification du comte de Neuchâtel. Il était tenu d'assister 
au chapitre général de la Pentecôte. Les habitants, après 
avoir embrassé le Calvinisme, rachetèrent du comte et de la 
maison de Besançon les biens de leur hôpital et le droit de 



DE L ORDRE DU SAINT-ESPRIT 



407 



Tadministrer. Frère Pétremand, nommé en 151 3, fut 
apparemment le dernier recteur appartenant à l'Ordre 
{Arch. hôp. de Besançon, chap. I,n** 12 ; chap. III, n** 3). 



ALLE\fAGNE 



Eisenach. 

Forêt-Noire (A l'entrée de la) 

Francfort-s.-le-M. 

Fulda. 

Glogau. 

Gromingen. 

Halberstadt. 

Hertingshausen (dioc. de 

Worms). 
Hildesheim. 
Hoexter. 
Koenigsberg. 
Landshut. 
Lùbeck. 



Luxembourg. 

Memmingen. 

Munich. 

Newmarck. 

Pfortzheim. 

Ratisbonne. 

Rudenoide {?). 

Saxonia civitas 

Stenau. 

Stendal. 

Stettin . 

Wimpfen. 

Worms. 



AUTRICHE 



Buda. 

Bulgarum {?). 
Marienbourg ( Castrum 

Mariœ). 
Glurni in Hungaria. 
Hermannstadt ( Cybinium), 
Littau. 



Luconia in Moravia. 
Maros Vasarhely (?), [Va- 

sabrcher, dioc. Trans- 

sylv.). 
S. Hippolyte, proche Vienne 
Septem Castris [De). 
Vienne. 



* Les sources principales oii nous avons puisé pour établir les listes qui 
vont suivre sont : les archives de Thôp. de Sainte-Marie in Saxia ou San- 
Spirito à Rome, ainsi 'que le catalogue dressé par F. Melchior de la Vallée, 
d*après les mêmes archives ; — les bulles publiées dans le Diplomata ; — 
roayraçe de Saulnier et les grandes collections historiques des divers États. 



4o8 



POUnxé DES HOPITAUX 





POLOGNE 


Cracovie. 




Samara (?). 


Kalisz. 




Sandeck. 


Marienbourg (Le 


même que 


Sandomierz. 


ci-dessus ?). 








BELGiaUE 


Alost. 




Malines. 


Bruges. 




Poperinghe. 


Bruxelles. 




Tirlemont. 


Douai. 


DANE 


Ypres. 

MARK 


Aalborg. 




Nakskow. 


Aarhuus. 




Nestvedan. 


Copenhague. 




Odensée. 


Flensburg. 




Randers. 


Fobourg. 




Ribe. 


Hesborg. 




Roeskilde. 


Nansiofij Nahsihien {?). 





SUÈDE-NORVÈGE 



Arboga. 

Enkœpîng. 

Halsnœ. 

Landskrona. 

Lînkœping. 

Lund. 



Malmœ. 

Skenninge. 

Sœderkœping. 

Stockholm. 

Upsala. 



DB l'ordre du saint-esprit 



409 



ESPAGNE 



Agosti^ dioc. Burgos. 

Aillofij d. Salamanque. 

Ajofrin. 

Albelda. 

Albuquerque. 

Alcala la Real. 

Alcantara. 

Almendralejo. 

Almodovar. 

Albacete. 

Ambiguera. 

Anges to {De). 

Aquavîva. 

Aranda. 

Aranjuez (Confr.). 

Aroiechera [De). 

Attenza. 

Baeça. 

Baila. 

Bala. 

Barbastro. 

Bayona. 

Barcelonne. 

Ba^a^ d. Tolède. 

Barca. 

Berbîmbre. 

Bonanza, d. SévîUe. 

Borja^ Arragon. 

Burgos. 

Bracamonte [De). 

Calahorra. 

Calatayud. 



Calcade. 
Cantara. 
Castillejo ? {Cas telle in 

regno Castelliœ). 
Castri Valdissandœ^ {Mo- 

nast. S. Eulaliœ.) 
Catena. 

Daybline (?) Sequnt. diœc. 
Eusœ. 
Fexeval. 
Fontaniles. 
Guardia (La). 
Gradiœ, d. Calahorra. 
Gualdalianalj nullius d, 
Huesca. 
Jaca. 
Jaen. 
Lea. 
Lerîda. 
Lodosa. 
Madère. 
Madrid. 
Magaz. 
Majorque {in civ. Maio^ 

ricen.). 
Médina, d. Cadix. 
Médina del Campo. 
Medralij d. Salamanque. 
Moron. 
Murcie. 
Orcana. 
Olmedo. 



410 



POUILLi DES HOPITAUX 



Ossuna. 

Padiglia. 

Pedelicio ou Pedelino. 

Parti S. Adriani^ d. Pam- 
pelune. 

Portillo, d. Palencia {Mon. 
tnontisjuxta Purtillum) 

Pexinalis^ d. Palencia. 

Porto S. Maria. 

Prunerii tnontis^ d. Gi- 
ron ne. 

Rambla (La). 

Roma, d. Majorque. 

Rota, d. Séville {Monast. 
montai.). 

Salamanque. 

Salas. 

Saldana, d. Palencia. 

Santardi. 

S. Erasmus PortuensiSj d. 
Séville. 

S. Lucar de Barrameda. 

S. Maria de la Pegna, d. 
Astorga. 

S. Martini de la Lomar. 

S. Stephanus de Portu. 

Ségovie. 

Seron, d. Ossuna. 

Séville. 

Sidiglio {De). 



Soria. 

Tolède. 

Trianum^ d. Séville. 

Trigueros. 

Truxillo. 

Tarazona. 

Tudela. 

Un Castillo? (Unicastri), d. 

Pampelune. 
Olmedo. 
Urgel. 

Valbona, d. Burgos. 
Valduerato. 
Valencia. 

Vallis tetrœ^ d. Tolède. 
Valle Scarniy d. Tolède. 
Valtierra. 
Valverde. 
Villanueva. 
Villacarrera. 
Villa de Corrigione^ d. 

Palencia. 
Villœ Melidœ. 
Villa Vallis Oleti. 
Villce Vulganœ, Arragon. 
Vollariœ, D. Huesca. 
'X.èTks {Monast. monial.). 
Zamora. 
Zufrensis, d. Séville. 



OB L ORDRE DU SAINT-BSPRIT 



411 



PORTUGAL 



Almada. 

Alder-do-Chao (Confr.). 

Cabeça. 

Canavezes. 

Casteldaud. (?) 

Cora. 

Drocatiy (null. dioc). 



Lisbonne. 

Porto. 

Portolegre. 

Resignano. 

Victoria. 

Zatnbrina (?), d, Lisbonne. 



NOUVEAU MONDE 



Carthagène. 

Ciudad de los Reyes. 

Cuscoa. 

Goa. 



Mexico. 

S. Domingue. 

San Thomé. 



ITALIE 



Acquapendente. 

Accumoli. 

Alanno. 

Alatri. 

Alexandrie. 

Alvito. 

Amalfi. 

Amandola. 

Amatrice. 

Anagni. 

Ancône. 

AngranOjd.Vicence (Conf.). 

Anguillara, Prov. Padoue. 

Aquila. 



Aquilée. 

Aquitula. 

Arborea, Sardaigne. 

Arce. 

Arco, d. Trente. 

Arezzo. 

Ariano. 

Arquata del Tronto [Cas- 

trum Arguatœ). 
Ascoli. 
Asolo. 
Asola. 

Assoro, Sicile, 
Assise, 



41 i 



founxE Ms HonrAuz 



Asti. 

Astrum, Sicile. 

Atri. 

Aulette. 

Avellino. 

Aversa. 

Baia, d. Nola. 

Balzamo. 

BaroneUo. 

Barbarano Romano. 

Baronissi ? {Baronice AveU 

las)j d. Nola. 
Bassano in Teverina. 
Bassiano. 
Bitonto. 
Boccognani (?) 
Boerij d. Syracuse. 
Bordella^ d. Tivoli. 
Bologne. 
Bovalino. 

Brîgnano Géra d'Adda. 
Buccheri, Sicile. 
Buccino. 
Bucchianice. 
Buscemi. 
Cajanello. 
Calascibetta. 
Calvi. 
Cameli. 
Camerino. 

Campagnano Romano. 
Campagna^ d. Naples. 
Campobasso. 
Camuri, d. Spolètc 
Capaccio. 



Capooe. 



ca. 

Caprociani, d. Aquila. 
Cartulonensis. 
Casalbore. 

Casale di Valœcina {Cas- 
trum Casait in Tuscia). 
Cascia. 

Castanea, Sicile. 
Castelluccio. 
Castel S. Elia. 
Castiglione. 
Castignano. 
Castronuovo di Sicilia. 
Catane, Sicile. 
Catignano. 

Cauli (?) Etats dé l'Eglise. 
Celano. 

Cellino Attanasio. 
Cervaro. 
Cerveteri. 
Cesena. 

Chiaia, à Naples. 
Chiaramonte. 
Chieti. 

Cibiana? {Cibrarii). 
CingoH. 

Citta dî Castello, 
CittaS. Angelo. 
Cività Castellana. 
Cittaducale. 
Cività Lavinia. 
Cività nuova. 
Cività Revale. 
Cività Vecchia. 



DB LORDRB DU SAIKT-BSPRIT 



Civitella, d. Aquino. 

Colonna. 

Corinaldo. 

Corleto, d. Capaccio. 

Corneto. 

Corleone. 

Corsico. 

Cosenza. 

Cotubris? 

Crémone. 

Crigi, 

Diano. 

Fabriano. 

Feltre. 

Ferentino. 

Ferrare. 

Ferrati, d. Marsico. 

Filetto. 

Fiumedinisi {Flumen Dyo- 

nisii), Sicile. 
Florence. 
Foggia. 
Foligno. 
Formello. 
Francavilla, Sicile. 
Gaète. 
Gallese. 
Gènes. 
Giglio. 

Gamundium, Gremone, d. 
• Aquilée. 
Guardia. 
Gubbio. 
Imola. 
Itri. 



Harnia in Tuscia. 

Hasium, Sicile. 

Laurino. 

Laurito, d. Penne. 

Lecco. 

Lentini, Sicile. 

Lufari-, d. Messine. 

Lusurum, Sicile. 

Maiori. 

Marsico. 

Melfi. 

Meleti. 

Messine, Sicile. 

Milan. 

MillO d.CÔme. 

Minco, Minium, Sicile. 

Mirandola. 

Modica, Sicile. 

Mola dî Bari. 

Monforte, Sicile. 

Montalto di Castro. 

Monlefortino. 

Montegranaro, 

Monteleone di Calabria. 

MoDtelupone. 

Montemilone. 

Montereale. 

Monteromano. 

Monte S. Juliano. 

Monte S. Maria. 

Montecosaro. 

Montegallo. 

Monte monaco. 

Montesano. 

Monticelli. 



4Î4 



POUIUi DES HOPITAUX 



Montopoli ? {MonopellCj, d. 

Chieti. 
Morano Calabro. 
Navelli {Napellum in Cam- 

pania). 
Naples : S. Jacohi in 

Chiaia; — S. /okannis 

in nidum; -— Annun- 

ziata. 
Narnî. 
Naso, Sicile. 
Nazzano. 
Nepi. 
Nicastro. 
Nocera. 
Norcia. 
Novare. 

Nundatium ? Sicile. 
Offida. 

Oliveto, d. Sora. 
Orbetello. 
Orculi? {Auricula), A. S. 

Agata. 
Oriolo. 
Orte. 

Ortona, Prov. Chieti. 
Orvieto. 
Osimo. 

Paceco, Sicile. 
Pago, Vénétie. 
Palerme, Sicile. 
Paludi. 
Patti, Sicile. 
Penne. 
Pescara, Sicile. 



¥\\ett6i{Philecta^)âi. Naples 

Piaghe^ d. S. Agata. 

Piedimonte. 

Pîperno. 

Pise. 

Ronco ? {Pontis Ronciij) d. 

Vérone. 
Porcia. 
Portici. 
Potenza. 
Pouzzoles. 
Priverni? 
Proceno. 

Pulgaium} d. Padoue. 
Putavoli? d. Teano.. 
Randazzo. 
Recanati. 
Reggio. 
Resignano. 
Rieti. 

Rignano Flaminio. 
Ripatransone. 
Roccella ? Rocca aquitula^ 

d. Melito. 
Rocca Aspriy d. Padoue. 
Rocca Contracta^ d. Sinî- 

gaglia. 
Roccagloriosa. 
Rome : San Spirito in 

Saxia; — S.Maria Trans- 

tyberim; S. Agata; — 

Abb. di S. Saba (CuU. 

Germanique). 
Sacco. 
Salerne. 



DE L ORDRE DU SAINT-ESPRIT 



415 



S. Giovanni Gemini, Sicile. 

San Quirico. 

San Vito Romano. 

S. Agata. 

Sardagna. 

Senigallia. 

Scaiensis. 

Seni^e? Senensis in Ca- 

labria. 
Sermoneta. 
Sessa, d. Terracine. 
Solmona. 
Sora. 
Spolète. 
Squillace. 
Sutri. 

Tanese, d. Cassano. 
Teramo. 
Terni. 
Terracine. 
Terranova di Sicilia. 
Teano. 



Thiani, Et. Eglise. 

Tivoli. 

Todi. 

Tolentino. 

Torrensis ? 

Tortorici, Sicile. 

Trapani, Sicile. 

Toscanella, 

Tossiccia. 

Trinalto. 

Triutn Pergularum , d. 

Pouzzoles. 
Troia. 
Velletri. 
Venise. 
Veroli. 
Vetralla. 
Viggiano. 
Viterbe. 
Vitoriliano [Membrum W- 

terb.)^ 
Vizzini, Sicile. 




s§s§§§§§§§§§^§§s§§s§§§s§§^ 



PIÈCES JUSTIFICATIVES 



I 

Vente, par Marie de Fabrêgues et Bertrand de Montlaur, a 
l'hôpital du Saint-Esprit de Montpellier, d'une maison avec 
PUITS ET jardin. — 1 197- 

Anno dominice incarnationis millesimo centesimo nonagesimo 
septimo, mense junii. Ego Maria de Fabricis et Ego Bertrandus de 
Montelauro maritus ejus per nos et pernostros bona fide, et sine dolo 
cum hac carta vendimus, tradimus, solvimus et omnino imperpe- 
tuum derelinquimus etcedimus domino deo et domui hospitalis sancti 
spiritus sita juxta Montetnpessulanum et omnibus fratribus et paupe- 
ribus ibidem degentibus tam presentibus quam futuris et Guidoni 
procuratori et fundatori ejusdem hospitalis et omnibus succesoribus 
ejus et tibi Guillelmo de Âgentia vicem ejus gerenti, ad omnes vo- 
luntates vestras, vestrorumque successorum plenarie faciendas, sine 
omni nostra nostrorumque retentione, inquietudine et appellatione : 
scilicet totum consilium et dominium et annuatim duos solidos censuales 
etcartumet omne omnino aliud jus quod habemus et percipimus etha- 
bere et percipere debemus, vel visi sumus habuisse et percepisse ùllo 
tempore, vel aliquis per nos seu nomine nostro, in tota una pecia orti 
cum puteo et domo et arboribus et in hortibus et exitibus et cum om- 
nibus suis pertinentiis et que pertinere possunt vel debent, quam 
emissi de Maria filia quondam Guillelmi Adalguerii et quam a no- 
bis tenebat, quam etiam nos tenebamus ad feudum a domino Guil- 
lelmo Montispessulani ; et est in parochia sancti dionisi de Mon- 
tispessulaneto et confrontatur a vento cum orto vestro, qui fuit dicte 
Marie Adalguine, quem tenetisde domino Magalonense episcopo, et a 
contra cum via qua itur ad Salicatas et ab aquilone cum merdantione 
(?), et a cireo (?) cum orto vestro qui fuit pétri Guidonis. Propter hanc 
autem venditionem, traditionem et emessionem predictam, dedisti nobis 
re ipsa et numeratione ducentum solidos melgorienses, quos a Guil- 

27 



4i8 nàcn jDsnnaiTiTBs 

leiiDO Raymondo de Narbonm et Stephano aossore el more eios, qui 
eos ibi dederunt pro sainte el redemptione animamm SBarnm, kafaoi- 
mus et recepimus, ita qood nihil remansit in debito ; et in ds sprnaBffr 
renunciamus exceptioni non numerate pecunie et si qood amplius hoc 
precio valet vel imposterum valebit illad totom quantntnqimdqoe sit, 
de bono animo et mera liberalitate domino deo et dicto hospîtali pro 
salute et remedio animarom nostramm donamos et ex ceita sdentîa in 
vos et dictum hospitale transferimus et promittimus, communimos Tobis 
quod hoc totum faciemus vos et vestros semper habere et tenere quiète 
et ab omni contradicente jure deffendemus.Si vero aliqood inde a vobîs 
vel vestris ablatum vel evictum fuerit, totum iMs et vestris jure in 
integrum restituemus et damus inde vobîs et vestris regressom super 
omnes res nostras mobiles et immobiles ubicumque fiierint et que- 
cumque sint ; et volumus quod iste generalis regressus perinde va- 
leat per omnia ac si res certe et expressius nominate vel obligate 
essent, in hac parte omni cessante consuetudine. Item promittimus et 
convenimus vobis et vestris per stipulationem, quod non diximus vel 
fecimus, nec dicemus vel (aciemus, quominus dicta venditio et omnia 
predicta in firmitate remaneant, nec contra hanc venditionem et do- 
nationem predictam vel aliquid horum aliquo jure vel ratione, consue- 
tudine vel occasione veniemus, nec aliquis homo velfemina arti nostro 
vel ingénie, sed ita totum firmum et ratum semper manere (aciemus 
plenius per fides nostras. Testes sunt : R. Belini, Luchas Pulverelli, 
R. Vicarius, P. Lobeti, P. Deodati, J . Raymundi de Narbona, 
F. Malecalaatry (?), F. de Stagno, P. Guido, et Hugo Laurentii 
notarius. 

Et ego Guillelmus, dei gratia Montispessulani dominus,filius quon- 
dam domine Mathildis ducisse, hec omnia supradicta universa et sin- 
gula laudamus et confirmamus per nos et per omnes successores nos- 
tros et cum auctoritate hujus presentis carte ; per me et per nostros 
successores, dono, solvo, cedo, et imperpetuum derelinquo, pro al- 
lodio libero, domino deo et dicto hospîtali Sancti Spiritus, pro salute 
et remedio anime mee et parentum meorum, totum jus et ratîonem 
quod in dicta petia orti habebam, habere poteram vel debueram,et ad 
majorem firmîtatem, ne super his aliqua questio moveri possît, pre- 
sentem paginam bulle mee patrocinio communiri volo. Testes sunt : 
B. Lamberti, bajulus^ E. de Sausseto, Poncîus Raymundi, F. de 
Mesoa^ Poncîus Carbonelli, F. de Grabello (?), Joannes Blegeriuset 
Hugo Laurentii notarius, qui hec scripsit. 

c Extrait du n® 2 de la liasse des titres particuliers de la Viguerie de Moot- 
pellier, en général armoire 8 des archives du domaine du roi de la province 
de Languedoc près la Cour des Comptes, Aides et Finances de Montpel- 



PIÈCES JUSTIFICATIVES 4J9 

lier, et collationné par nous, commis à la garde d'icelui. » Signé : Daslez. (?). 
Copie du XVI !• s., Arch. Nat., S. 4856. 



II 



Première bulle cI'innocent in. — 22 Avril 1198. 

Innocentius episcopus, servus servorutn Deî, universis Archiepis- 
copis, Episcopis et aliis Prelatis ecclesiarum. His precipue prelati ec- 
clesiarutn favorem suum debent efïîcaciter exhibere, qui spiritu Dei 
ducuntur, et vacant assidue operibus charitatis ; ne si forsan eorum 
non fulcianlur auxilio, vel religione tepescant^ vel afifectutn eorum 
effectus debitus non sequatur. Sane sicut multorum veridica relatione 
didicimus, hospitale sancti spiritus, quod apud Montempessulanum 
dilecti filii fratris Guidonis sollicitudo fundavit, inter cetera nove plan- 
tationis hospitalia et religione fulget et majoris hospitalitatem chari- 
tatis exercet, sicut hi qui eorum elemosinas sunt experti plenius didi- 
cere. Ibi enim reficiuntur famelici, pauperes vestiuntur, necessaria 
ministrantur infirmis, et magis indigentibus major consolatio exhibe- 
tur, ita ut magister et fratres istius domus non tam receptores dici de- 
beant quam ministri indigentium, et illi soli egeant inter pauperes, 
qui pauperibus necessaria charitative ministrant. Cum igitur dictis 
fratribus de benignitate sedis apostoiice duxerimus indulgendum, ut 
in locis que ipsis a fidelibus ofiferentur, de consensu nostro et sine 
prejudicio vicinarum ecclesiarum, cemeteria ad opusfratrum et famille 
sue tantum et oratoria fabricent, universitatem vestram rogamus, mo- 
nemus et exhortamur in Domino, ac per apostolica scripta vobis man- 
damus, quatenus si qui fidelium in parochiis vestris domos aliquas vel 
possessiones eis obtulerint devotionis obtentu, eos non impediatiS| 
quominus sine prejudicio vicinarum ecclesiarum et vestro^ in eis ec- 
clesias erigant et ad opus fratrum et famille sue tantum cemeteria cons- 
truant, imo potius construendi utraque ipsis licentiam concedatis; cum 
constructa fuerint, dedicationem ecclesiis et cemeteriis benedictio- 
nem sine difficultate qualibet collaturi et in oratoriis ipsis ad presen- 
tationem eorum, sine vestro et ecclesiarum vicinarum prejudicio, sa- 
cerdotes idoneos instituere nullatenus difreratis,qui correctioni vestre 
subjaceant et per vos amoveantur, si ratione suorum excessuum fuerint 
amovehdi. Mandamus preterea vobis, ut cum ab eis fueritis requisiti, 
singuli vestrum de malefactoribus eorum in sua provincia. constitutis 
eis exhiberi faciant justitie complementum ; male&ctores îpsot ad hoc 



430 PliCES JUSTVICATIVES 

per censuram ecclesiasticam monitione premissa, si necesse fiierk 
compellentes. Datum Rome apud Sanctum Petrom, X* Kakadas 

Mail, pontificatus nostri anno primo. 

L*original est aux arch. rom. ; copie do XV* s. au Carttilaire de l*hAp. de 
Dijon. — Impr. dans Baloze et Migne, Uh. VII, ep, 9$; DiploMMlû, l, p. x. 



III 
DBUXliME BULLE D'iNNOCBNT III. — 2} AVRIL II 98 

Innocentius episcopus, servus servorum Dei, Guidoni fundatori 
hospitalis sancti spiritus ejusque fratribus tam presentibus quam fu- 
turis, regularem vitam professis, in perpetuum. Religiosam vitam 
eligentibus apostolicum convenit interesse presidium, ne forte cujus- 
libet temeritatis incursus aut eos a proposito revocet, aut robur, quod 
absit, sacre religionis infringat. Eapropter, dilecti in Domino filii, ?es- 
tris justis postulationibus clementer annuimus, et prefatum hospitale 
sancti spiritus apud Montempessulanum constructum, in quo divino 
estis obsequio mancipati, sub beati Pétri et nostra protectione susci- 
pimus et presentis scripti privilegio communimus. In primis siquidem 
statuentes, ut fratres inibi commorantes, secundum rationabiles institu- 
tiones tuas perpetuo Domino debeantfamulari. Preterea quascumque 
possessiones et quecumque bona predicti hospitalis in presentiarum 
juste ac canonice possident, aut in futurum concessione pontificum, 
largitione regum vel principum,oblatione fidelium seu aliis justis modis 
prestante Domino poterunt adipisci, iirma vobis vestrisque successori- 
bus et illibata permaneant. In quibus ex propriis duximus exprimenda 
vocabulis locum ipsum in quo prefatum hospitale situm est, cum om- 
nibus pertinentiis suis, domos^ vineas, terras, hortos et omnia que in 
territorio M omis Pessulani et in locis circumadjacentibus possidetis. 
Domum quam habetis in villa que dicitur Amillau, cum omnibus per- 
tinentiis suis. Domum quam habetis in loco qui dicitur Clap de mala 
vetula, cum omnibus pertinentiis suis. Domum quam habetis in villa 
que dicitur Mesols, cum omnibus pertinentiis suis. Domum quam 
habetis in burgo Sancti Juliani de Briddi, cum omnibus pertinentiis 
suis. Domum quam habetis in villa que dicitur Bragaac, cum omnibus 
pertinentiis suis. Domum que dicitur in Argentaria de Cachers, cum 
omnibus pertinentiis suis. Domum quam habetis in civitate Trecensi, 
cum omnibus pertinentiis suis. Domum quam habetis in urbe Roma 
juxta sanctam Mariam trans Tiberim, cum domo que est in loco qui 



V 



PliCES JUSTIFICATIVES 431 

cEcitur sancta Agatha, in introitu urbis Rome, cum omnibus pertinen- 
tiis suis. Statuentes ut omnes domos quas in presentiarum juste habetis 
vei in posterum rationabiliter poteritis adipisci, predicto hospitali 
sancti spiritus Mentis Pessulani et procuratores earum tibi, fili 
Guidoni et successoribus tuis perpétue subjacere debeant et humiliter 
obedire, et correctionem tuam et successonim tuorum recipere hu- 
militer et servare. Liceat insuper vobis in domibus vestris sine preju- 
dicio vicinarum ecclesiarum, cum consensu diocesani episcopi^ cons- 
truere cemeteria ad opus fratrum vestrorum et familie tantum^ et ora- 
toria fabricare, in quibus ad presentationem vestram instituantur per 
diocesanum episcopum capellani, et amoveantur per eum cum deli- 
querint, vel aliter etiam corrigantur. Liceat quoque vobis libéras et 
absolutas personas a seculo fugientes recipere ad conversionemet eas 
absque contradictione aliqua retinere. Prohibemus insuper ut nulli 
fratrum vestrorum, post factam professionem in locis vestris, fas sit 
absque maglstri sui licentia inde discedere, nisi arctioris religionis ob- 
tentu, discedentem vero sine communi litterarum cautione nullus 
audeat retinere. Chrisma vero, oleum sanctum, consecrationes alta- 
rium seu basilicarum, ordinationes clericorum qui ad sacros ordines 
sunt promovendiy a diocesanis suscipietis episcopis, si quidem catho- 
lici fuerint et communionem sacrosancte Romane sedis habuerint et 
ea vobis voluerint sine pravitate aliqua exhibere ; alioquin liceat vobis 
quemcumque malueritis catholicum adiré antistitem, gratiam et com- 
munionem Apostolice sedis habentem, qui nostra fretus authoritate 
vobis quod postulatur impendat. Obeunte vero te nunc ejusdem loci 
magistro, nullus generalis sue presumptionis astutia seu violentia pre- 
ponatur, nisi quem fratres communi consilio vel fratrum pars consilii 
saniorum secundum Deum providerint eligendum« Decernimus ergo 
ut nulli omnino hominum liceat prefatas domos temere perturbare, aut 
ejus possessiones auferre, vel oblatas retinere vel minuere, seu qui- 
buslibet vexationibus fatigare; sed omnia intégra conserventur eorum, 
pro quorum gubernatione ac sustentatione concessa sunt usibus om- 
nimodis profutura, salva sedis Apostolice authoritate. Si qua igitur 
in futurum ecclesiastica secularisve persona hanc nostre constitutionis 
paginam sciens contra eam temere venire temptaverit, secundo ter- 
tiove commonita, nisi reatum suum congrua satisfactione correxerit, 
potestatis honorisque sui careat dignitate, reumque se divine judicio 
existere de perpetrata iniquitate cognoscat, et a sacratissime cerpore 
et sanguine Dei et Domini redemptoris nostri Jesu Christi aliéna fiât, 
atque in extrême examine districte subjaceat ultioni. Cunctis autem 
eidem hospitali et domibus sua. jura seryantib.us sit pax Domini nostri 



422 PIÈCES JUSTIFICATTVES 

Jesu Christi, quatenus et hic fructum bone actionis perdpiant et apud 
districtum judicem premia eterae pacis inveniant. Amen. 

Datum Rome, apud sanctum Petrum, IX® Kalendas Mail, indic- 
tione I*, incaraationis Dominice anno M* C® nonagesimo octaTo, 
pontificatus vero nostri anno primo. 

Mêmes sources que pour le n« II. 



IV 



QUITTANCE DE TRIBUTS DONNÉE PAR FRÈRE JEAN MONETTE. I JI7. 

Nos frater Joannes Monette, presbyter, canonicus regularis sancti 
Augustin!, domus magistral! s, conventualis ac hospitalarie sancti spi- 
ritus aurecensis preceptor, necnon predicti ordinis visitator, reco- 
gnovimus ac recognoscimus quod frater Thomas de Crovilla, ecclesie 
domus hospitalarie de villa Sancti Laudi prior ac gubemator, nobis 
sol vit, ac preceptorie nostre magistral! Aurecensi, decem libras turo- 
nensium, pro domo De! Sancti Spiritus de Constanciis, scilicet quin- 
que libras ex argento prioris rectoris dicte domus Sancti Spiritus de 
Constanciis^ alias quinque libras de moneta dict! prioris de Sancto 
Laudo, quas in signum jurisdictionis débet quolibet anno priori Cons- 
tantiensi. Hoc presens scriptum dedimus dicto fratri de Crovilla 
valiturum pro censu nobis debito hoc anno. In quorum fidem ac tes- 
timonium illud subsignavimus ac illi sigillum domus nostre magistralis 
apposuimus, pridie sancte Elisabeth, anno Domini millesimo trecen- 
tesimo decimo septimo. 

Arch. de l'hôp. de Saint-LO, série C, art. lo. 



V. 



EXTRAITS DU REGISTRE CAPITULAIRE DE t'HOPrTAL DE BESANÇON 

(F* 22 V»). — 1466. — Le chapitre de lan mil IIII* soixante six le 
dimanche de cantate IIII jour de may. 

Le maistre de Thospital du saint esperit de Dijon. XV ducas. 

(En marge) Solvit magister rector die dominica de Trinitate anno 
milt*y II II* sexag^ sexto. 

Le maistre de Toul. t . » XV ducas. 



PIÈCES JUSTinCATlYES 42^ 

Sohit m. reclor die capituli anno sexag^ sexto. 

Le maistre de Neufchastel en Lorraine • VI escuz dor. 

{Sohit, etc. Ainsi pour les articles suivants). 

Le maistre de Poligny. • VIII frans. 

Le maistre de Gray VI franS. 

Le maistre de Dole VI fr. 

Le maistre de Neufchastel oultre joux. . . • • IIII fr. 

Le maistre de Sainct -Julien • VI fr. 

Le maistre darlay • • IIII fr. 

Le maistre de Metz III flor. dor. 

Le maistre de Vaulcouleur IIII fr. 

Le maistre de Chaulcin IIII fr. 

Solvit m. rector hodie XVII^ mensis maii unumflor. auri. 

(F** 24 r<») — 1467. — Chapitre du dimanche cantate XXII* jour 
d'avril lan mil IIII^ LXVII. 

(Mêmes mentions). 

(F* 24 V**) — 1468. — Anno domini millesimo IIII™» octavo, die 
quindecima mensis maii, dominica qua in sancta dei ecclesia cantatur 
pro introitu misse cantate^ hora capituli generalis sancti spiritus Bi- 
sunt.^ personaliter comparuerunt in dicto hospitali venerabilas et re- 
ligiosi viri fratres et magistri sequentes, videlicet Symon Albusset de 
Divione, Vuatherius Louyon de TuUo, Bisuntinus Ramellide Novo- 
castroin Lotharingia, Richardus Los de Arlato, Jacobus Garnier de 
Grayaco, Johannes de Quingeyo de Novocastro ultra Jura^ Guill. 
Valucheti de Sancto Juliano, Richardus Lox (espace en blanc) de Mé- 
tis, Girardus Chenus de Valiscolore, et Johannes Rossigneulx de 
Calcinio, hospitalium subdictorum dicti hospitalis sancti spiritus Bi- 
sunt. rectores. In quoquidem capitulo prefatus Guill. Valucheti de 

sancto Juliano fratrem Guidonem Nivelli rectorem hospitalis 

sancti spiritus de Poligniaco et causam perhibuit quasdam lic- 

teras missives pro venerabili et religioso viro fratre Lambeleto Verne- 
rii rectoris prefati hosp. S. Sp. Bis. per dictum Guidonem Nivelli di- 
rectas, continentes in se qualiter die tus frater Guido se excusabat 
taliter quod propter egritudinem qua lectum detinebat nullo modo 
accedere valebat ad dictum capitulum, quoniam rogabat prefatum L. 
R. Verneriiy rectorem predicti hospitalis Bisunt.^ ut ipse pro excusato 
haberety qui quidem magistri sancti spiritus in actu (?) supradicto pro 
excusato habuerunt, etc. 

(F* 80). — 1477. — Anno domini mill® quadr"® septuag* septimo, 
die quarta mensis maii dicta qua in sancta dei ecclesia pro ofBcio seu 
introitu misse cantare consuetum est cantate domino prenominati 



424 PiftCBS JUSTIFfCAnVES 

hora capitulari consueta ac capitulum générale hospitalis sancti sptri- 
tûs Bisunt.y per nobilem et religiosos viros magistrum Antoniura de 
Rigneyo ejusdem commendatorem, decanum ecclesie béate marie 
virgtnis de Belloprato présidente, fratres Richardum Loz, Johannem 
dictum Rossigneulx hospitaiiutn de Arlato et de Calcinorectores, Jo- 
hannem Ducheti, alias de. ... ., Johannem Duplaissis, Johannem 
Billot, Johannem de vico presbyteros, Johannem boni petit henriey (?) 

de , et Girardum Nivdli, religiosos ejusdem hospitalis présentes, 

ad sonom campane more solito congregatos ac simul adunatos, te- 
nendo et celebrando prefatus Richardus Loz procurator et eo nomine 
predicto ut asseraît> contumacia contra rectores hospitalium de Di- 
vione, de Tullo, de Novocastro in Lotharingia, de Polignîaco, de 
Novocastro ultra Jura, de sancto Juliano, de Métis et de Vallisco- 
lore, quum per se, alium vel alias nedum comparuerunt, sed per 
contumaciam ab fuerunt, et ipsis débite trina vice proclamatis ut mo- 
ris est^ contumaces reputari petiit et petit idem procurator. Quam 
quidem contumaciam annuit idem prefatus commendator et concessit 
et comparentibus prefatis magistris de Arlato et de Calcino, necnon 
discreto viro domno johanne Teugnot presbytero, nepote et excu- 
satore relig. viri fratris Jacobi Gamerii, hospitalis sancti spiritus de 
Grayaco rectoris et administratoris^ eum fratrem Jacobum excusan- 
tem et excusam ejusdem verbotenus promulgantem et in presencîa 
plurimorum aliorum quam prenominatorum proferentem, — cujus- 
quidem ténor predicte excuse sic yerbotenus modo predicto probato 
sequitur et est talis. Révérende pater et generose domne, vosque 
venerabiles religiosi domni, dum hactenus conreligiosus et frater 
vester jacobus Garnerii, domnus et avunculus meus, suo et domus sibi 
commisse de Grayaco nomine ex debito rcligionis, singulis in capitu- 
lis congregationibus et convocationibus generalibus ac specialibus in 
hac insigni domo vestra factis, continue ac fréquenter pro débita re- 
ligionis observantia, prompte promptaque obediencia et voluntate 
perseverare cupiens, ad hoc presens vestrum venerabile capitulum 
conferre se satagens presens affuisset, quamvis tuta via hucusque non 
habeatur, nisi tribulationes multitudoque et confusio inimicorum bona 
domus vestre de Grayaco predicte vastarentur et illorum preservatio 
detinuisset ; idcirco hujusmodi vehemens causa omnibus nota ipsum 
merito excusare débet, mihique verbotenus significari mandavit qua- 
tenus ipsum apud reveren. nobilitatem vestram domnorumque religîo* 
sorum vestrorum presentium fratemitates faceret excusatum, hor- 
tando possetenus in caritate ac fraternitate sancta bene volentias ves- 
ras quatenus eum excusatum hac vice suscipere dignentur, offerens 



piicBS jusTiFiCATnrES 435 

et submittens se jugiter Totis et mandatis restris. Quamquidem excu- 
sationem in presentia predictorum suorum Religiosorum propter cau- 
sam in ipsa contentam, considerans de non fuso accessu dictûs ma- 
gister Anthonius ac prefati sui religiosi dictum fratrem jacobum 
Garnerii predicti hospitalis de Grayaco rectorem habuerunt pro suffi- 
cienter excusato et excusatum esse voluerunt et voluat pro hac vice 
per présentes. 

Arch. de l'hôp. de Bes., chip. III, n* i, Boite 16. —Le mêine registre 
contient les actes capitulaires de 1466 à 1562. 



VI 



ACTE DE PROFESSION. — IJOl 

Egofrater Petrus Martin, offerens me ipsum trado Preceptorie et 
Hospitali Sancti Spiritus Aureacensis, et promitto tibi, reverendo in 
Christo hujus Preceptorie et Hospitalis magistro Monetto, et suc- 
cessoribus tuis, conversionem morum meorum, vite emendationem, 
stabîlitatem in dicta Preceptoria, promittoque paupertatem, castita- 
tem, obedientiam integram, et quod supradicti ordinis Sancti Spiritus 
officia et negotia curabo ad honorem Dei, ad victum^ vestitum, 
sustentationem pauperum, infirmorum, peregrinorum et infantium 
expositorum, secundum regulam Sancti Augustini. Datum decimo 
quarto mensis januarii, anno millesimo trecentesimo primo. 

Diphmata, t. U, p. 26$. 



VII. 



INVENTAIRE DE l'HOPITAL DU SAINT-ESPRIT DE DOLE — I452 

Fraire Pierre Loupt, jaidis commandeur de Thospital du Sainct 
Esperit de Dole ci après a baillé à fraire Girard Foureal religieux du 
Sainct Esperit et maistre dud. hosiel, le XV II* jour de mait. 

Deux cbauldières dotel^ tauxé II gros. 

Item. — X chandelier de couivre^ tauxé III g. 

It. — Une clouchete sens tauxe. 

//. — Ung mabre et ung calice sens tauxe. 

//. — Deux chasuble, deux albes, deux amis, deux estoilles, deux 
manuples et deux courroye. 



426 PdCCS JUmFICâTITES 

IL — Treze touailles dans bénie, sens tanze. 

//. — Ung riez messal, sens tmuxe. 

IL — Ung TÎez breriaire, sens taoxe. 

//. — Une quoquesse desUin, tauxé 

//. — Cinq pot destain, une chepine et une aignire, t. XXII g. 

//. — XVIII estueUes destain et trois (dais, i. XXXIVg. 

//• — Quattre potz de couirre tant grans que petitz, t. III fr. 

//. — Deux chaudières, une grande et une petite, t. XXIII g. 

//. — Une petite grasse, une peOe blanche et une vieille trappe, 
t. XVI g. 

//. — Trois chandeliers de couirre, t. IV g. 

//. — Ung chandelier de fert, t. I bl. 

//. — II poichonsy ung de fert et laultre darain, t. V bl. 

IL — Deux grappin de fert, deux vieilles esquemoires, t. VII U. 

//. — I bacin de greal, t. IV bl. 

IL — II vielles celures (?)et une petite pelate, t. VII bl. 

//. — Il hastes de fert, t. XVIII bl. 

//. — IV viez coueches darain, t. V bl. 

//. — I grille et ung trepier, t. XVIII bl. 

i/. — II andier, t. VII g. 

«. — Illchayre, t. XIV bl. 

//. ^ Une table, deux trestel et deux banc, t. VI bl. 

//. — • I mortier et ung petal (l), t. III g. 

//. — Le soilloirduprix , la et le crouchot, t, III g. 

IL — V corbailleSy deux roichons et ung et cinq paires clou- 
seul, t. V g. 

//. — Deux vans, t. I bl. 

//. —I ayche a bois, Ifousseur^ III fousserot, II vielles serpes, 
I bigot et 1 , t. VI g. 

//. — Il grans embousseurs, Il petit, Illtenotet I sapine, t. IX g- 

//. — Vloroillers.t. Xlll g. 

//. — XI lit dont le cinq sont pour couchiés les poures et les aul- 
tres six sont pour lostel, deux viez couvertesde liz, t. XIX fr. VI g. 

//. — V arches vielles dont les deux senscouvercte, t. I fr. 

//. — 1 aultre table et une ais, t. 111 g. 

//. — La grant cuve a loigé une aultre cuve a giron, 1 sapine et 

le à vin duquel led. frère a faict faire ung vaissel a chargé ven- 

dengeet la renduz^ t. VII 1 g. 

//. — VI viez linceulx de lit, sens tauxe. 

i/. — IV vaicheset I veaubc, t. X fr. 

//. — I pelle ferrée, t. II bl. 



PIÈCES JUSTinCATIVfiS 427 

//. — XXI vaissel tant grant que petiz, tant vielz que nuef, t. V fr. 
Some toute LXX VI florins VII groz. 

Sensuigs les aultres biens meubles que led. frère prieur laisse aud, 
messire Girard par manière de Investz et sont tauxé par les dessus 
nommés le jour que dessus. 

XX linceulxbon et convenable, tauxé III florins. 

// — III touailles dautel bonne et I corporeal tout neuf. 

IL — II serviete dautel, I amis et I courroye. 

Z/. — I lit garnis de cussin et de courtepointe, t. XXXIII g. 

IL -* V couverte de lit et II cussin, dont il lya II courtepointe et 
III gaidon, t. 3 fl. 

//. — II aultre lit qui sont estez donnez aud. hospital, I cussin et 
II viez couverte de lit et une pointe, le tout t. IV fr. VIII g. 

//. — I aultre courtepointe pour le lit de mons. le maistre quand il 
viendra a Dole, t. XVIII g. 

//. — II tables de sapins, I paire de trestel et II banc de quier de 
sel, t. VI g. 

//. — Ht que led. frère laisse six journaulx de biefs tout semences 
dont les quattre sont de froment et les autres deux de saigle. 

IL — I fousseur et ung bigot, t. VI bl. 

Lesquelz biens dessus escriptz sont estez tauxé par les dessous 
nommez Nicolas portier, Gehan fromaigeat et estevenin Vala, ilcom. 
miz a la tauxe en la présence de messire Gehan Villet juré de Jouhe 
(?), de messire Gehan Portent (?) de la loye et de moy le notaire cy 
dessoubz subscriptz, lan et jour que dessus, ainsin signé : G. Broulce. 

Arch. de Thôp. de Besançon, chap. I, n» ^. 



VIII 



RÈGLEMENT DE LA CONFRÉRIE DE POCHEPORT (JURa) — 1615 

S^ensuivent les statu dressés par les prieurs et confrères et la con- 
frairie constitué et dressé dois temps immemorable en Téglise paro- 
chiale de Roiceffort soubs Tinvocation du benoist saint Esperit. 

Premièrement ceulx qui vouldront estre receuz en lad. confrairie 
se presanteront aux prieurs dicelle, lesquels à la première assemblée 
feront entendre aux confraires leurs intentions, ung chascun desquels 
estant receuz peyra trante solz pour Tentretenement du service divin, 
que se faict ordinairement en la confrairie et deux frans seullement 
pour l'homme et la femme sy tous deux ils sont receuz, et en das 



428 PiteBS JWTIFICATITBS 

Tûng YÎegne a decedé et le survîTant convole en seconde nopce, il y 
pourra faire admettre sa partie en payant seuUement dix solz. 

A rentrée et réception, lecture leurs en sera faicte des présents 
statutz et promectant les obsenré à leurs possible, faire le proufl^ de 
lad. confrairie et ne rien faire au préjudice d'icelle, et seront tenu 
faire confessions de leurs péchés et recepvoir la saincte communion 
pour gaigne les indulgences plaisnières concédées par sa sainctetez a 
lad. confrairie, sans par ce entendre en aulcune aultre obligations 
ou veu que de pure volonté et dévotions. 

Oultre lesquelles sommes payables a lad. réception, ung chascun 
desd. confraires payera tous les ans quatre blans aux prieurs aux (estes 
de pentecoste ou aultre temps a leur commodité. 

Les confraires assisteront aux processions qui se feront a la dévo- 
tion de lad. confrérie aux feste de Pentecosthe et a Tenterrement des 
confrères décédez avec leurs cierges allumez, selon qu'ilz ont accou- 
tumez du passé. 

Le jours de feste pentechoste au commencement de la procession, 
seront esleu deux prieurs nouveauix par les anciens, qui seront tenus 
neantmoings de prandre l'advis de douze aultre membre, qui seront 
choisiza ceste effect par commun suffrage desd. confraire, pour élire 
et faire choisir les plus idoinnes et capables a lad. charge de prieurs, 
lesquelz debvront procurer l'édification, proufFy et utilitez de lad. 
confrairie et recepvoir les drois dicelle et rendre compte deans le 
jour de feste saincte marie madelaine, après Texpiration de leur 
charge, et advertir avec le son de la cloche les fraire de l'enterre- 
ment de quelque confraire decedé. 

Led . jour de feste pentechoste ou Tune des feste suygantes, lesd . 
confraires se confesseront et communieront, priant Dieu pour l'exal- 
tation de notre mère saincte église, pour l'extirpation des hérésies, la 
conservation de la pais entre les princes crestien et le salut de sa 
saincteté, conformément ausd. indulgences concédées par le sainct 
siège apostolique. 

Seront célébré tous les jour de jeudy par les sieurs curé etfamilliers 
dud. lieu une grande messe en l'honneur du sainctz esperit a diacre et 
soulz diacre avec la procession avant icelle et suffrage pour les tres- 
passez, après les vigiles le mecredi au soir ; aussy seront célébré led. 
jour de pentescote et le lendemain trois grande messe par lesd. curez 
et familliers, ou a leur deffaut par aultre qu'ilz feront choisir et appe- 
ler par les prieurs a la participation des confraires, pour la desserte 
de laquelle messe du jeudy seront payez vingt frans selon l'ancienne 
oousuune, et pour les aultres messes de la penthescotte, a ceulx qui 



PIÈCES iUSTIPICATIVBS 429 

célébreront, a chacun trois gros, et en cas que Ton juge expédient 
d'appeller deux pères cordeliers, trois frans tant pour leur nourriture 
que en aulmosne au couvent sainctz françois de la ville de Dole. 

Ne seront faictz cy après par lesd. prieurs ny aultre aulcune dé- 
pense de bouche aud. jour de feste penthescotte, comme Ton souloit 
faire du passé, ains s*appliquera tout le revenu a œuvres pieuses. 

Ne seront admis ou souffry entre les confrères aulcung blasphama- 
teur, faubc tesmoings, détracteur, usurier ou aultre frauduleux et de 
mauvais exemple ; et ou il en auroit aulcungs, après deux ou trois 
admonitions que leur séroit faictes, sy persévérant en leur vice, il 
seront effacez de lad. confrarie. 

Et en cas de diffîcultez entre les confrères, il seront exhortez de 
remectre leur différant par devant les prieurs, qui les appoincteront 
amiablement sy peuvent, prenant Tadvis du consel, sy besoin faict et 
a chose le mérite et les parties il consentent ; réservé toutefois ce 
qu'est de l'office et auctorite des juges et magistraz et sans attenter a 
leurs drois. 

Advenant le décès d'aulcuns confrères, tous seront tenuz, se com- 
modément faire le peuvent, assister a ses obsèques avec leurs cierges 
allumez et feront les prieurs célébrer trois grandes messes pour le 
salut de Tame du decedé avec les vigilles la voille, a tel jour qui sera 
advisé estre commode entre lesd. sieurs curez et familliers et lesd. 
prieurs, que sera neantmoings au plus tôt que faire se pourra après 
led. décès, et auquel jours lesd. prieurs advertiront les confrères au 
prosne de la messe parochiale du dimanche précèdent, affin qui assis- 
tant sy commandent ainsi faire le peuvent. Et pour lequelz office se- 
ront payez ausd. sieurs dix huit gros, cinq solz au maistre d'escole e^ 
cinq solz pour les peines desd. prieurs, ausquel il seront passez en 
leur compte faisant apparoit de leurs debvoir. 

Nos officialis curie Bisuntine, universis seu vicesgerentis 111"' in 
Christo patris et Dni Dni fernandi de Longvy dicti de Rye, dei et 
apostolice sedis gratia archiepiscopiBisunt..., notumfacimus... quod 
visis statutis..., ration! consona et addivini cultus incrementum con- 
dita comperimus. .. Idcirco... curie dicte sigillum presentibus appon] 
fecimus, y mensis augusti, anno Dni i6i$. — CI. BoitouseL 

Arch. paroissiales de Rochefort. 






4|0 



IX 



wàClMMMMT DE VA COKnÉtJE d'a&BOIS (iURA) — 1666 



StaiMis de la HmtrabU cotifrairie éngU t% la w3U JTArboâ^ umt k 

tiUre ci wpocaiion, du St-Esprit 



Pfcwicmûeot tu fakL coofinirie pourroot estre receuz et 
tootet personnes de run et de Taoltre sexe, pomreo toatefob qi^ds 
soient gens de bien et dlKMineur, exempts de tons crîmes et repn>- 
chef considérables. 

Pour estre admb an nombre desd. confrères, les prétendants a ce 
bonheur seront tenus de présenter requeste au sieur prieur et anhres 
officiers principaux a ce destinés, lesquels délibéreront sur la lequeste 
du suppliant, l'admettront ou refuseront a pluralité de voix, selon 
qu'ils treuveront raisonnable. 

Les confrères s'assembleront dans la chapelle destinée aux offices 
de lad. confrairie et a un chascun sambedy veOle du jour de feste et 
solennité de Pentecoste, après les vespres que seront dittes led. 
jour dans lad. chapelle se commodément faire se peut, sinon dans 
Teglise parochiale dud. lieud*Arbois. 

Et lad. assemUée ainsi faicte serat procédé a l'élection d'un prieur, 
soub prieur, quattre conseillers et un procureur ou recepyeur des 
revenus de la confrérie, lesquels devront estre des plus considérables 
d'icelle, gens de lettre et d'intégrité irréprochable, lesquels seront 
esleuz a pluralité de voix desd. confrères et auront toute l'adminis- 
tration des drois, biens et revenus dependans de lad. confrairie, sans 
neantmoins que l'un d'iceux seul peust faire ou dire quoyque ce soit 
pour les affaires de lad. confrairie sans la pluralité des voix et suffrages 
desd. sieurs officiers, lesquels en toute occurrence auront la pré- 
séance et direction des affaires d'icelle. 

Que si pour affaires urgentes ou considérables spirituelles ou 
temporelles, led. sieur prieur ou en son absence le soubprieur treuve 
expédient d'assembler les sieurs officiers pour avoir leurs bons conseil 
ou advis, il le pourrai faire autant que la nécessité et le bien de lad. 
confrairie le demanderont . 

Serat tenu led. sieur procureur de tenir un livre ou cathalogue 
dans lequel seront inscript les noms et surnoms desd. confrères avec 
la désignation du jour de leurs réceptions en lad. confrairie, comme 
aussy du jour de leur trespas lorsqu'il serat arrivé ; et un aultre livre 



PIÈCES JUSTIFICATIVES 4)1 

dans lequel seront escriptes et soubsignées toutes les délibérations et 
resolutions de lad. confrairie, pour y avoir recours en cas de besoing. 
Serat tenut led. procureur de tenir nottes et protocoles des cons- 
titutions de rentes^ pieux légaux, fondations et autres actes qui seront 
au profit de lad. confrairie. 

Serat de plus obligé led. procureur et recepveur de un chascun an, 
unchascun second dimanche après le jour de feste Pentecoste, 
rendre bon et fidèle compte de toute la recepte qu'il aurat faicte. et 
administration qu'il aurat heu des biens et revenus de lad. confrairie, 
a default de quoy les interest de la somme a laquelle il se treuverat 
reliquataire dois led. jour commenceront de courir a son préjudice. 
^ Et serat led. compte rendu par led. recepveur comme dict est en 
présence desd. sieurs officiers de lad. confrairie en la majeure part 
d'iceux y appelles et présent le rev. Doyen de Teglise collégiale 
Nostre Dame dud. Arbois, le sieur curé ou vicaire perpétuel de 
l'église parochiale dud. lieu ou l'un d'eux par Tadvis et participation 
desquels seront faictes les affaires plus importantes de lad. confrairie 
et à peine de nullité. 

Ne pourront les deniers, profficts et revenus de lad. confrairie 
estre divertis ou employés a quoy que ce soit si ce n'est au proffict de 
lad. confrairie, entretient et réparation de la chapelle et œdifice d'icelle, 
augmentation des fondations et aultres œuvres pieuses et de dévotion, 
sans que les sieurs officiers d'icelle ny aultres en puissent proffiter a 
quelque tiltre ou prétexte que ce soit, laissant neantmoing ausd. 
sieurs officiers le droit et auctorité de payer et salarier raisonnable- 
ment ceux qui auront employés leurs peines et industrie pour le bien 
et advancement de lad. confrairie. 

Prohibant par exprès tous pastes et aultres compositions qui pour- 
roient estre faictes aux frais de lad. confrairie par lesd. confrères ou 
officiers d'icelle à la reddition des comptes ou soub quelque aultre 
cause ou prétexte que ce soit. 

Seront tenus et obligés lesd. confrères de procurer le bien et 
advantage de lad. confrairie lentement et raisonnablement, autant que 
leurs forces et industrie le permettront. 

Item de au jour de leur réception effectivement [payer] au recepveur 
de lad. confrairie la somme de trois 'gros pour estre inscrit dans le 
cathalogue des confrères, de laquelle somme tiendrat compte led. 
recepveur. 

De plus seront tenus lesd. confrères de un chascun jour veille de la 
feste Pentecoste patronale de lad. confrairie, s'assembler dans la 
chapelle d'icelle pour y entendre et assister aux premières vespres qui y 



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pQur Jbd dfffBmrt. 

DefAas procBreroot rk a ytliJik » de sa sûttetéds âdnlgeBoes 
pleaaaerespopfletd^ iJtMfc tBrt s qai pndqaensi les ixaiaies 
iaaiedDgttrefoirmeet pibgaaptes qifSlsp auria g L les 

iiliMiaa rhumw ^mrde iesie ponficidaa Notre 
asMjlafieomdeeilraaieae senne de pnarffnfwtf , 
daats bdL H b aprflr asv aesse chasse «WKaaa fiais de lad. 



hqiifMe seni ificte par aapmtre qa% cboôsinMit, ea 

lesd. ptitttn et coo fr ere s ajeat foadé et doté en Hiappriaia paiti- 

càBer pour dire lesd. messes et aaStres qoi seront fbodées ea lad. 



(Ces statuts fiireot approuvés par rardievèqae de Besançon, 
Antoine-Pierre de GramaKmt^ an coors de sa râice générale, le a8 

1666.) 

Arcfc. de fhôp. iTArfMMt, A. |6. 



«TAT0T8 DE LA COffFRéllîB DE MESBAT (JURA). — I738 

Au nom de Tadoiable Trinité, Père, Fik et Samt-Esprit, Amen. 
Les hflbitans, Echevins, Communauté et confrères de b confrérie du 
Saint*Esprit érigée en Téglise paroissiale St Ouyand du TSlage de 



PlèCBS JUSTIFICATIVES 4)) 

Mesnay, Baillage d'Arbois, estans assemblés en la maison de lad. 
confrérie le présent jour d'huy premier de May de Tan de grâce mil 
sept cent trente-huit, environ les six heures du matin, ont délibéré 
a pluralité des suffrages de recourir à Monseigneur l'Ul"^ Archevêque 
de Besançon, Prince du St Empire, qu*ils ont appris devoir arriver 
aud. Arbois pour sa visite générale, et de le supplier très humblement 
d'avoir la bonté d'authoriser les articles de statuts cy après, concer- 
nans lad. confretrie pour la plus grande gloire de Dieu, attendu que 
par malheur et par succession de temps les anciens statuts de lad. 
confrérie qui est érigée d*un temps immémorial, comme il en conste 
par les terriers et censiers d'icelle, ont été égarés ; et en premier lieu, 
ayant consultés par plusieurs et réitérées fois vénérable personne 
M^'Anatoile Mandrillon, prêtre et curé aud. Mesnay, ils ont décla- 
rés, 

Que les personnes qui composent les familles cy après déclarées, 
sont confrères de la confrérie comm'estoient cy devant leurs prédé- 
cesseurs, 

Sçavoir les Boussards, les Mervans, les Quarrey, les Barbier, les 
Papillard, les Jouvenot, les Bolliferand, les Saillard, les Lornet, les 
Doignand, les Boisset, les Brenans, les Febvre, les Matthey, les 
Bailland, les Morin, les Loysier. 

I. — Que si quelques autres habitans prétendent se faire enrôler 
en lad. confrérie, ils feront leurs poursuites auprès du Prieur et offi- 
ciers de lad. confrérie^ lesquels s^assembleront, et en communique- 
ront au s' Curé, afin qu*estans trouvés capables, ils puissent être mis 
au nombre desd. confrères. 

II. — Led. Prieur et lesd. Officiers seront tenus de prier annuel- 
lement led. Sr Curé de dire et célébrer par chaque premier lundy de 
chaque mois de Tannée une basse messe pour les confrères vivans et 
deffuncts au maitre autel de lad. église, avec le libéra me, et collectes 
ordinaires à l'issue de lad. messe, pour rétribution de quoy luy seront 
payés six livres monnoye du royaume, qu'est à raison de neuf groz, ou 
dix sols du royaume par chaque premier lundy de chaque mois, et au 
cas il soit empêché auxd. jours de lundy, il sera permis aud. Sr Curé 
de remettre et célébrer lesd. messes aux lendemains ou autres jours 
des mêmes semaines. 

III. — Item. Lesd. Prieurs et officiers prieront de même led. Sr 
Curé de dire et célébrer annuellement trois messes de Saint-Esprit à 
haulte voix, les mercredy, jeudy et vendredy de la semaine de Pente- 
coste^ pour les confrères vivans et trespassés avec les libéra me, et 
aspersion d'eau bénite accoutumés^ pour rétribution de chacune des^ 

28 



4M [ PIÈCES JUSTînCATIVES 

quelles messes led. Prieur délirrera aud. Sr Curé <fiz sols oiooiioye 
du royaume. 

IV. — Sera rendu compte annuellement par led. Sr Curé, Esdie- 
vins, Commis, et officiers des revenus de lad. confrérie, lesquels se- 
ront employés suivant la pieuse intention des fondateurs au soulage- 
ment des pauvres du lieu, à Tentretien des luminaires qui tombent 
dans lad. église à la charge desd. confrères, ainsi que pour rentre- 
tien des omemens, services ordinaires, et extraordinaires, et autres 
choses nécessaires à lad. église, le tout à la participation dud. Sr Curé, 
même à l'entretien de la Lampe ardente du Très Saint Sacrement, 
sans attoucher au Luminaire qui doivent être fournis dans les obsèques 
ou Ton observera l'usage et le règlement. 

V. — Et comm'il y a eu de toute ancienneté dans lad. église un 
grand chandelier de fer sur lequel lesd. confrères ont toujours 
fournis treize gros cierges de cire jaune, qui ont toujours été allumés 
les principales festes de Tannée pendant les offices ; lesd. confrères 
ont résolus de l'entretenir à l'avenir sur l'ancien pied. 

VI. — Tout ce que dessus sans que lesd. confrères prétendent dis- 
céder des droits qu'ils peuvent avoir contre les seigneurs décima- 
teurs aud. Mesnay pour l'entretien du chœur, et des ornements sui- 
vant les Edits. 

VII. — Lesd. confrères ont aussi résolus de à la participation dud. 
Sr Curé annuellement et à chaque jour de feste Pentecoste, nommer 
et choisir a pluralité des suffrages, comm'il s'est pratiqué de toute 
ancienneté, celuy d'entr'eux qu'ils connoltront en leur honneur et 
conscience pour exercer la charge du Prieur, lequel sera tenu de 
bien et fidellement gouverner les biens et revenus de lad. Confré- 
rie, et en rendre compte sans pouvoir intenter aucun procez, à 
moins qu'il n'ait pris conseil dud . Sr Curé et des commis de lad. 
confrérie. 

VIII. — Et comm'il y a plusieurs titres, Papiers, Censiers et Ren- 
tiers concernant les biens et revenus de lad. confrérie qui sont peu 
considérables, lesd . confrères ont résolus de faire faire incessam- 
ment un inventaire de tous lesd. titres, lesquels titres seront mis 
avec led. Inventaire dans les coffres et archives en forme de Bangy 
(sic) qui sont dans lad. Eglise, qui ferment à trois clefs, dont l'une 
sera mise entre les mains dud. Sr Curé, une autre entre les mains 
du Prieur, et la troisième en celles de l'un des Eschevins de lad. 
communauté, et sera led. Inventaire revêtu annuellement lorsque l'on 
en chargera le nouveau Prieur, ce qui se fera dans le mois de juin de 
chaque année»* 



PIÈCES JUSTIFICATIVES 4)5 

IX. — Et pour que personne ne puisse ignorer des présents statuts, 
ils seront lus et publiés au jour de feste de Pentecoste de. chaque 
année^ et au prône de la messe paroissiale. 

Le tout soubs le bon vouloir, et plaisir de mond. seigneur TArche- 
vèque de Besançon, Prince du Saint-Empire. 

Fait les ans et jours susdits. 

Approuvé par V Archevêque ^ au cours de sa visite générale, à Artois^ 
le 4 mai 1738. 

Arch. paroissiales de Mesnay ; copie de 1787 aux arch. communales. 



XI 

Fondation de Fouvent. 121 j 

Ego Henricus dominus de Castro Fontisvene, notum facio omnibus 
tam presentibus quam futuris lititeras istas inspecturis, quod cum fun- 
daverim pro remedio anime mee,antecessorum et successorum meorum 
in Castro meo videlicet Fontisvene, quamdam domum in honorem 
Sancti Spiritus, spectantem ad dominum Sancti Spiritus Divionensem, 
et concessi in puram et perpetuam elemosinam, Deo, fratribus et pau- 
peribus Sancti Spiritus dictam domum cum mansis eidem ad- 
jacentibus libère et pacifice possidendam, ad sustentationem 
pauperum et fratrum predictorum. Donavi predicte domui et 
fratribus ejusdem domus duos modios bladii in terris meis apud 
Fontisvenam villam meam annuatim persolvendos, medietatem 
frumenti et aliam avene. Item dedi et concessi sicut predi- 
cti libère et pacifice iinguas omnium animalium que occidentur in 
dicto Castro sicut ipse possidebam, usuarium dicti castri et dicte ville 
tam in nemoribus quam in campis et aliis locis. Sîmiliter donavi duos 
homines, videlicet Humbertum filium Martini, Arnulphum et uxores 
eorum, scilicet Dannot et Simenard, cUm hardibus } suis et ab omni 
servitio, quo mihi tenebantur, eosdem quietavi. Donavi etiam prefa- 
tis fratribus nundinas cum omnibus redditibus, constituendas ad fes- 
tum apostoiorum Pétri et Pauli, post nativitatem beati Joannis Bap- 
tiste, apud castrum Fontisvene, et in domo mea de foro predicte nun- 
dine tenebuntur. Donavi etiam Deo et predictis fratribus et paupe- 
ribus pro remedio anime mee, antecessorum et successorum meorum 
reliquias (i)...mee, et quicumque post decessum meum tenebit pre- 



(i) Un mot illisible. 



4)6 PIÈCES JUSTIFICATIVES 

nominatum castnim similiter reddat. Concessi etiam pro remedio ani- 
me mee, antecessorum meorum et successorum, prenominatis fratri- 
bus dicte domus, ad preces Domini Gerardi de Acheio,totum finagium 
de Dielosse, quod erat de fundo meo^ tam in terris quam in nemori- 
bus, necnon et aliis locis, sicut idem Girardus concessit, et de om- 
nibus prenominatis idem Girardus in presentia mea predictos fratres 
investivit. Hec omnia predicta prout ipsi fratres edificare et colère 
ea potuerint predicte domui et fratribus predictis libère et quiète et 
pacifice, absque contradictione vel exactione aliqua dedi et concessi 
in perpetuum possidenda. Et ut ratum et firmum permaneat, huic carte 
in testimonium sigiilum meum apposui. Datum apud castrum Fontis- 
vene, anno gracie M® CC* XV*". 

Arch. nat., M. 46. 



XII 



CONnRMATION DE LA FONDATION DE FOUVENT PAR INNOCENT III 

Innocentius episcopus, servus servorum Dei, dilectis filiis magistro 
et fratribus hospitalis Sancti Spiritus de Castro Fontisvene, Salu- 
tem et apostolicam benedictionem. Cum a nobis petitura quod 
justum est et honestum tam vigor equitatis quam ordo exi- 
git rationis, uti ex sollicitudine officii nostri ad debitum deveniant ef- 
fectum ; eapropter, dilecti in Domino filii, vestris justis postulationi- 
bus grato annuentes, annua ? terras, redditus^ possessiones et res alias 
que nobilis vir H. de Castro Fontisvene ac G. de Achéio Domini 
domui vestre pietatis intuitu contulerant, sicut ea omnia juste et paci- 
fiée possidetis, nobis et quod vos predicte domui vestre, auctoritate 
apostolica confîrmamus et presentis scripti privilégie communimus. 
NuHi ergo omnino hominum liceat banc paginam nostre confirmatio- 
his infringere, aut ei ausu temerario contraire. Siquis autem hoc at- 
temptare presumpserit^ indignationem omnipotentis Dei et beatorum 
Pétri et Pauli apostolorum etiam se noverit incursurum. Datum apud 
Urbem Veterem, IV® non. maii, pontificatus nostri anno(i). 

Arch, nat,, M. 46, 



(i) XVIl ou XVIII. 



PIÈCES JUSTIFICAUVES 4)7 



XII 



FONDATION DBS HOPITAUX DE ROCHEFORT, MONNET, ORGELET, St-JULIEN 
ET ARINTHOD, PAR JEAN DE CHALON. — 1)01. 

Nos Johannesde Cabilone cornes Antissiodoren. et dominus Rupe- 
fortis notum facimus presentibus et futuris quod cum in villis meis 
et videlicet de Rupeforti, de Moneto, de Orgeieto, de Sancto Juliano 
et de Arintho nos instituerimus edificari et construi videlicet in qua- 
libet villarum supradictarum unum hospitale et unum altare in eodem 
in honore béate marie virginis gloriose nostris propriis missionibus et 
expensis, in quibus hospitalibus pauperes débiles, egeni ac miserabiles 
persone admittantur et hospitentur et vite necessarii secundum facul- 
tatem ipsorum hospitalium et secundum exigenciam et inopiam perso* 
narum degentium pro anime nostre parentumque et antessorum et çuç- 
cessorum nostrorum animarum remedio ministrentur et divina officia 
celebrentur per rectores seu magistros eorum hospitalium. Nos ea- 
dem quinque hospitalia volumus et precipimus esse subjecta in spi- 
ritualibus et temporalibus rectori seu magistro ac gubernationi et 
regimenti hospitalis sancti spiritus Bisuntini. Volumus etiam et pre- 
cipimus quod rector seu magister predicti hospitalis sancti spiritus 
Bisuntini in predictis hospitalibus ponat et instituât magistros seu rec- 
tores in sacris ordinibus sacerdotii jam promotos idoneos et fidèle^ ad 
regendum et gubernandum hospitalia predicta, qui habitum religionis 
seu ordinis déférant et divina officia ad altaria predicta pro anima nos- 
tra, parentum, antecessorum et successorum nostrorum animarum re- 
medio célèbrent et pauperes sicut superius expressum est recipiant 
misericorditer et admittant, quorumque quinque hospitalium nobis et 
heredibus nostris guardiam seu custodiam cum utraque temporali jus- 
ticia in perpetuum retinemus ac etiam reservamus. In quorum testi- 
monium et munimentum sigillum nostrum presentibus nostris litteris 
duximus apponendum. Datum anpo Domini M^ CCC® primo, mense 
augusti. 

Ar chipes de Vhàp, de Besançon^ chap. i, ti^ i. — Original en parchemin avec 
le grand sceau de J. de Chalon pendant en double queue . 



4)8 PIÈCES JUSTinCATlTES 



XIII 



USTB DES GRANDS MAITRES ' 

1. Guide Montpellier, f 1208. 

2. Cynthius 

3. Bernard^ avant 1224. 

4 . AccuRiMBONUS, avant 1255. 

5. Jean, avant 1272. 

6. Paul, 

7. Raymond dbTrbbi. 

8. SlMTIUS 

9. Sylvestre 

10. Jean 11, avant 1290. 

11. Ventura, avant 1292. 

12. Simon Orsini, avant 1295. 

13. Jacques, 1328-1348. 

14. Jean de Luca, f avant 1358. 

1 5 . Gilles de Horto, f avant 1 390. 

16. Pierre de Horto, f 1397. 

17. Jean de Mallotiis de Magistris, f 1 307. 

18. Conrad de Trivio, f avant 1409. 

19. Lellutius de Castro s. Helia, f 1422. 

20. Venturellus de Corneto, f 1424. 

21 . Jean deTricario, évèque de Ferentino avant 1429. 

22. Barontus de Pistorio, f avant 1440. 

23. Pierre Barbo, évèque de Vicence en 1444, pape (Paul II) 

en 1464. 

24. Pierre Mathei de Capoccinis, 1447- 1477. 

25 . Innocent de Flaviis de la Rovère, f 1484. 

26. Pie DE Médicis de la Rovère, 1488, f avant 1495. 

27. Constant Guillelmi, f 1495. 

28. Gratien de Villeneuve, f 1497. 

29. Benoit de Senis, f après 1 Joi. 

30. Gabriel DE Saus de Saona^f 1505. 



^ * Nous nous sommes servi, pour dresser cette nomenclature, de Touvrage de 
Pierre Saulnier (chap. V, argum. V, p. ?i-|8) ; et à partir du n<>6i, du catalo- 
gue rédigé par M. Gattoni, archiviste de l'hospice San-Spirito. 



PIÈCES JUSTIFICATIVES 439 

I • Albertino de la ROVÈRE, I 5 I 3 . 

2. HiLARlON DE PhILIPPIS, f I514. 

3. Alexandre de Neronibus, f 1525. 

4. Cosme ToRNABOtïi, f avant 15 jo. 
;. LÉONARD Bonafide, résigna en 1530. 

6 . Charles Arioste, évêque d'Acerra en 1 5 j } . 

7. Jean Pierre de Sanctis, évèque de Castellana en 1535. 

8. François de Landis, f 1545. 

9. Pierre de Sancto Carpino, gouverneur général pendant la 

vacance. 
40. Alexandre Guidiccioni, 1546, + avant 15 5 j. 
41 • Louis Simoneta, cardinal en 1 5 54. 
42. Antoine LoMBLLiNi, f 1556. 
4 j . François Capelu, f 1556. 

44. Bernardin Cyrilli, d^Aquila, 1556-1575, 

45. Thésée Aldobrandi, f 1582. 

46. Jean-Baptiste RuiNO, f 1586. 

47. Antoine Meliori d'Aquaviva, évèque de S. Marco en 1 591 . 

48. Michel Mercati, f avant d'avoir pris possession. 

49. Auguste FivisANi,f 1594. 

50. Saluste Taurusi, archevêque de Pise en* 1600. 

51 . Jules de Angelis, 1602. 

52. JÉRÔME Agucchio, Cardinal en 1604. 

53. Octave d'Esté, f 1605. 

54. Pierre Camporeus, cardinal en 1617. 

55 . EvANGELiSTA ToRNiOLi, évèquc de Tiffernato? en 1621 . 

56. Balthasar Bologneti, évèque de Nicastro en 1624. 

57. Raphaël lNviTiATi,f 1624. 

58. Joseph Anselmi, f 1630. 

59. César Racagni, f 1647. 

60. Etienne VAius,f 1650. 

61. JÉRÔME Lanuvius, résigna en 1654. 

62. Charles Antoine Dondini, démissionnaire en 1660. 
6}. Virgile SpADA,f 1662. 

64. François- Marie Phœbbus, f 1680. 

65 . François-Marie Antaldi, + 1681 . 

66. Bandinus Panciâticus, patriarche de Jérusalem en 1685. 

67. Jean-Casimir Denoff, Polonais, cardinal en 1686. 

68. Jean-Baptiste Spinola, nommé en 1688, démissionnaire en 

1689, cardinal en 1695 . 

69. Bernardin Casali, f 1713*^ 



440 PliCBS JUSTIFICATITES 

70. Georges Spinula» coadjuteur du précédent en 1706, déoùss. en 

1711^ cardinal en 1719. 

71. SmiBALDUSDE AuRiA^arch. de Bénéyent, 1721 et cardinal. 

72. ZoziMB Vaughaki, f 1729. 
7j . Pierre de Carolis, f 1744. 

74. Antoine-Marie Pallavicini^ nommé en 17)79 f i749- 

75. Jean-Octave Buffalini^ f 1754. 

76. Antoine-Marie ERBA^f 1754-17589 cardinal Odescalchi. 

77. Joseph- Marie Castelli, i7$8-i 759, cardinal. 

78. Louis Cauno, 1759-1766. 

79. Jean Potenziani, f 1775. 

80. RoMUALD GuiDiy 1770-1778, cardinal 1780. 

81. HiPPOLYTE Vincent Marcri, 1778, cardinal 1795. 

83. François Caffarelli, 1778, fia même année. 
8). Dominique Sampieri, 1778-1784. 

84. François de Albitiis, f 1796. 

85. Jean Castilliongeus, 1796, cardinal i8o). 

86. Antoine Pallotta, 1814, cardinal 1823 . 

87. César Guerrieri-Gonzaga, 18 16, démiss la même année et 

cardinal. 

88. Hercule Dandini, 1816, cardinal 1823. 

89. Louis Gazoli, 1823, cardinal 1831. 

90. Antoine Cioja, 1829, démissionnaire^en 1844, moyennant une 

pension de 100 écus, f en 185 1. 

XIV 
liste des visiteurs et vicaires généraux 

I 

1288 — Frère Jean Monette, Recteurd'Auray (Dip/om., II, 370). 

1296 — F. Etienne de Malans (R. de Besançon). — Dépen- 
dances de Besançon et Dijon. 

1326 — F. Pierre de lyon (Bes.) — Allemagne, Bohème, Pologne, 
Hongrie, France, Angleterre (A. Castan, II, 195). 

1359 — F. Barthélémy de St Oybnd (Bes.) — Bourgogne et 
Lorraine (Ibid.), 

1427 — F. Lambblet Vernier (Bes.) — Pays ultramontains de 
langue française (Ibid,). 

1462 — F. JoDOCUS DE Baden. — Visit. gén. et réformat, de Berne, 
Steffansfeld, Lausanne, et des maisons d'Allemagne (A rcA. 
rom.^ lib. 23, f*...). 



PliCES JUSTIFICATIVES 44 1 

482 — F. Guillaume de Bercy (Bes.) — France, Bourgogne» 

Lorraine (A. Castan, II, 196). 
4.. — F. Nasson. — France, Bourgogne, Lorraine {Arçh. rom.f 

1. 24). 
498 — F. Bernard de Lascovas. — Espagne {Ibid., lib. rub., 

f> 128J. 

498 — F , prieur de Steffeit, continué pour TAUem. supérieure 

{Ibid.y f* 191). 

499 — F. Guillaume de Bercy (2* fois). — Bourgognes, Lor- 
raine, Alsace (Ibid,^ 1. A., f' 2). 

5 14 — P. Jean de Herbena (Aix). — Visiteur général (7h'tf., I. G. 
f»65). 

516 — F. Philippe Mulart (Dijon). — Angleterre, Irlande, pen- 
dant 3 ans. (Ibid.<, 1. E, f^ i8)« 

516 — Le même. — Commission étendue à la France. (Ibid., 
1. E,f>24). 

516 — F. Thomas Michelot (Bes.). —Comté de Bourgogne. 
(Ibid.,l. E, fM8v«). 

518 — Le même -^ Evèchés de Flandre, Belgique, Bourgpgne, 
(/Wi.,l.E, fo!46). 

520 — Le même et Philippe Mulart. — Bourgognes, Brabant, 
Holande, Zélande, Flandre, Hanovre, Picardie, évêchés 
de Cambrai, Thérouanne, Arras, Tournay, Cologne, 
Reims, Besançon et suffragants, pour 2 ans (Ibid.^ 1. £, 
f»268). 
I5J0 — F. Jean , (Toul) — Bourgogne, Lorraine (Ibid., 1. F, 

1567 — F. Claude Buffet, le jeune (Bes.) — Régions ultramon- 

taines(7Wi., 1. Q, f* 50) 
i$95 — F. Henri GROSSKOPFF(Steffansfeld). - Allemagne (/{^id., 

1. X,f IJ7). 
1595 — F. Melchior DELA Vallée.— France,;Allemagne, Pologne. 
159. — F. François Quesada. — Espagne (Saulnier, p. ). 
159. — F. Henri Treffard (Bes.). — Parties ultramontaines 

(A. Castan, II, 198). 
161 5 — F. Claude Nazey. — W. (Ibid.) 
16 j 5 — F. Claude Pécaud. - W., (Ibid.) 
1659 — F. Jean-Jacques Despoutot. — W., (Ibid.) 
1678 — F.Denis Beuque. Jtf., (Ibid.) 



442 



nftCBS JUSTIFICATIVIS 



XV 



USTB DBS MAISONS -MÈRES EH FRANCE 



Aix. 

Agen. 

Angers (Dijon). 

Angoulème. 

Arles. 

Auray. 

Bassoues d'Armagnac 

Beaacaire. 

Bergerac. 

Besançon. 

Béziers. 



Bordeaux. 

Clermont. 

Coutacces (Auray). 

Dijon. 

Draguignan. 

Fréjus. 

Grenoble. 

L* I sle-en-J ourdain. 

Marseille. 

Millau. 

Montauban. 



Montpellier. 

Narbonne. 

Nimes. 

Le Puy. 

Steffansfeld. 

Saulx. 

Toul (Besançon). 

Toulon. 

Toulouse. 

Tours. 

Vienne. 



NOTA. — Toutes les commanderies magisU'ales étaient nécessairement 
conveatuelles, puisqu'elles ayaient à entretenir de frères leurs dépendances. 
Mais beaucoup de simples prieurés eurent aussi des novices. — Le titre de 
commandeur ne fut pas réservé aax maîtres des maisons-mères ; il était pris 
aussi par de simples recteurs. De plus, il est inexact de dire, comme Tont fait 
plusieurs historiens de TOrdre, que ce titre ne remonte qu*au temps des dé- 
mêlés avec les prétendus chevaliers; nous en avons trouvé des exemples dès 
le XIV* siècle . 



XVI 



USTB DBS ANCIENNES CONFRÉRIES DU DIOCÈSE DE SAINT-CLAUDE 



Arbois. 

Arinthod. 

Arlay. 

Aumont. 

Baverans. 

Belmont. 

Bersaiiiin. 

Brainans. 

Changin. 

Chapelle (La). 

Châtelaine (La). 

Chatelay. 



Chàtelneuf. 

Chaussin. 

Chissey. 

Colonne. 

Coniiège. 

Crançot. 

Darbonnay. 

Dole. 

Doucier. 

Foncine-le-Haut. 

Fontenu. 

Gendrey. 



Lons-le-Saunier. 

Loulle. 

Louverot (Le). 

Loye (La). 

Marigny. 

Mesnay. 

Monnet. 

Montaigu. 

Montfleur. 

Montholier. 

Montmorot. 

Mont-sous- Vaudrey 



PIÈCES JUSTIFICATIVES 



Neublans. 


Rans, 


Souvans. 


Nevy-les-Dole. 
Nogna. 
Orgelet. 
Oussières. 


Rochefort. 
Ruffey. 
Saint-Amour. 
Saint-Lautein. 


Toulouse. 
Vadans. 
Vaudrey. 
Vers-sous-Sellières 


Parcey. 
Pillemoine. 


Salins (St Analoile). 
Santans. 


Villers-les-Bois. 
Villers- Robert. 


Poligny. 
Pupillin. 


Sellières. 
Sirod. 


Vlllevieux. 
Vincelles. 



Celle liste, tirée p resqu 'en lii rement du Dictionnaire dts Communes du Jura, 
de M. Rousset, est forcément très incomplète ; mtis elle indique suffiisaninent 
i quel point l«con[rérie du Saint-Etprit éiaii répandue jusque dans les moindres 

hameaux. 




TABLE DES CHAPITRES 



Avant-Propos I 

INTRODUCTION 

La charité dans l'Eglise avant le XIII* siècle i 

Première époque j 

Seconde époque 7 

Troisième époque 16 



PREMIÈRE PARTIE 



NAISSANCE DE L'ORDRE. SON ORGANISATION ET SA RÈGLE 



CHAPITRE I 

Gui de Montpellier. Fondation de l'Ordre 27 

I. — Naissance et famille de Gui 27 

II. Fondation de THÔpital du Saint-Esprit à Montpellier )i 

III. — Gui à Rome H 

IV. — Fondation de l'Hôpital de Sainte- Marie in-Sàxia ^8 

V. — Dernières années de GuL — Sa mort •• 4s 

CHAPITRE II 

La Règle de Gui 51 

I. — Gui a fondé un ordre régulier; il est Tauteur de la règle f4 

II. — But de l'Ordre d'après la règle 61 

III. — Hiérarchie de l'Ordre 69 

Cardinal Protecteur, p. 69 ; — le grand maître, p. 70 ; — Vicaire gé- 
rai du grand maître, p* 7) ; — Visiteurs généraux, p. 74 ! — 
Procureurs généraux, p. 77 ; — Assemblées capitulaires, p. 78 ; — 
Recteurs, p. 81 ; — Camérier et Cellerier, p. 8) ;— Prieur, p. 84. 



446 TABLS DES CHAPITRES 



CHAPITRE III 

La règle de Gui ; Régime intérieur de l'Ordre 85 

I. — Personnel de l'Ordre 8ç 

Frères, p. 80 ; — Clercs, p. 89 ; — Sœurs, p. 90 ; — Oblats, p. 92 ; — 

Serviteurs, p. 94 ; — Costume et insignes, p. 94. 

II. — Occupations et emplois loo 

Office, p. loi ; ~ Occupations, p. 102 ; — Repas, p. 106 ; — Sommeil, 

p. 107 ; — Voyages, p. 108. 

III. — Obligations imposées aux membres de TOrdre. — Pénalités.. 109 
Pauvreté, p. iio ; — Obéissance, p. m : — Chasteté, p. 11; ; — 

Sobriété, p. 114 ;— Résidence, p. 114 ; — Silence, p. iiç ; — Es- 
prit déchanté, p. 115. 

CHAPITRE IV 

Biens, revenus et Privilèges de TOrdre 119 

I. — Biens et revenus 1 19 

Constructions des établissements, p. 120 ; — Propriétés et revenus, 

p. 127 ; — Quêtes, p. ijo ; — Tributs, p. 142. 

II. Privilèges et Indulgences 144 

Privilèges, p. 144 ; — Indulgences, p. 149. 

CHAPITRE V 

Confrérie du Saint-Esprit i;; 



DEUXIÈME PARTIE 

SPLENDEUR ET DÉCADENCE DE L'ORDRE 

CHAPITRE I 

Développement merveilleux de l'Ordre en France au XIII* siècle 169 

CHAPITRE II 

Extension de TOrdre en Europe 187 

Italie, p. 187 ; Espagne et Portugal, p. 189 ; Allemagne, p. 189 ; — 
Danemark, Suède et Norvège, p. 19; ; — Belgique, p. 19$ ; — 
Angleterre, p. 196. 

CHAPITRE III 

Rome et Montpellier • • 199 



TABLE DBS CHAPITRES 447 



CHAPITRE IV 

Les grands maîtres, du XIII« au XV« siècle 207 

Protection et faveurs accordées par les Papes 210 

CHAPITRE V 

Vie intérieure de l'Ordre aux XIV et XV« siècles 216 

Nouvelles Fondations, p. 220 ; — L'hôpital du Saint-Esprit de 
Paris, p. 224 ; — Coup d'œil sur l'Ordre aux XIV* et XV* siècles, 
p. 228. 

CHAPITRE VI 

Les grands mattres au XVI* siècle 2^7 

Commencement de la Décadence, p. 24^ ; — Le Protestantisme, p. 

2Î0. 

CHAPITRE VII 

La Visite de Frère Melchior de la Vallée 259 

CHAPITRE VIII 

L'hôpital de Sainte-Marie in Saxia au XVII* siècle 279 

Grands maîtres, p. 279;— Description de l'hôpital, p. 282. 

CHAPITRE IX 

Les Pseudo- Chevaliers et l'Ordre en France au XVII* siècle 291 

Les Pseudo-Chevaliers, p. 291 ; — L'Ordre dans les deux Bourgognes 
et ia Lorraine, p. 298 ; — L'Edit de réunion à l'ordre de Saint- 
Lazare, p. joi. 

CHAPITRE X 

L'édit de réunion à Saint-Lazare. — Suppression définitive de l'Ordre 
en France ^05 

CHAPITRE XI 

Les Sœurs du Saint- Esprit, — XVIIl'et XIX* siècles. 



a4^ tamlb 



TROISIÈME PARTIE 



PO CILLÉ OV SOUESCLATVKE DES HOPITAUX DE L ORDRE DU 



Frtftce î?9 

AlMce 40« 

M«fc 40s 

AlleoMf 0e 407 

Aiftf iche 407 

Po\o%nt 406 

Dâneuurk 406 

Suéde- H orrège 40B 

Belgique 406 

Etpftgnc «t Ponugal ; Nooreso Monde 409 

lUlie 4" 



PIÈCES JUSTIFICATIVES 

I. Vente, par Marie de Fabrègoes et Bertrand de MontUor, à 
Thôpital du Saînt-Etprit de Montpellier, d'un jardin arec puits et 
maifon 1197 417 

II. — Première bulle d'Innocent III. 32 arril 1198 419 

m. — Deuxième bulle d*Innocent III, 3^ arril 1198 420 

IV. — Quittance de tributs donnée par frère Jean Monette, 1117 432 

V. — Extraits du Registre capitulaire de Tbôpital de Besançon 432 

VI. — - Acte de Profession, i^oi 435 

VII. — Inventaire de l'hôpital du Saiot-Esprit de Dole, 14^2 43$ 

VIII . — Règlement de la Confrérie de Rochefort (Jura), 161 ç 437 

IX — Règlement de la confrérie d*Arbois (Jura), x666 4)0 

X. Règlement de la Confrérie de Mesnay (Jura), 1718 4? 2 

XI. — Fondation de FouTent, 1215 4?S 

XII. — Confirmation de la fondation de Fouvent par Innocent III. .. . 4^6 

XI II. — Fondation des hôpitaux de Rochefort, Monnet, Orgelet, St- . 
Julien et Arinthod par Jean de Chalon, i)oi........iii..i<.« 417 

XIV. — Liste des Grands Maîtres 4)d 

XV. — Liste des Visiteurs et Vicaires généraux 440 

XVI.— Liste des maisons-mèros en France 44' 

XVI 1. — Liste des anciennes confréries du diocèse de Saint-Claude. 442 





TABLE DES HOPITAUX DU SAINT-ESPRIT i 



Aalborg, 14J, 224,25 j. 

AarhuuSf 224, 25^. 

Acquapendente^ 188, 209. 

Agen, 404, 176, 2JI, na. 

Ager, 404. 

A^os, 404. 

Aire, 404. 

Aix, H9, 176, 2JÏ, JI2. 

Albia, ^40. 

Alost, 224. 

AmbilloUy ^40. 

Amiens, ho* 

Anagni, 168. 

Aniane, ^o. 

Angers, J40, 176, 224, 

2n, ;ia. 
Angoulème, ^o, 176, 224^ 

Ansouis, Hi* 
Antibes, ^i. 
Aquila, 188. 
Aragosta. 256. 
Aramon, 141. 
Arbora, 195. 
Arbois, ^2, 162. 
Arc-en-Barrois, ^2. 
Arcs (Les), 342. 
Arinthod, ^2, 221. 
Arlay, J42, 124, 222, ji2, 

n% J22. 
Arles, H?» 176. 
Ascoli, 188. 
Atri, 188. 

Aubagne, h?. 171. 
Aubrac, ^j. 
Auch, 34J, 178. 
Audignon, h?» î", ^4. 
Auray, J44, 75, 78, 124, 

U9, lAh 176, 204, a?o, 

294, M2, J14. 
Auriac, 14Ô. 
Auriol, ^6. 
Avignon, ^6, 180. 
Baffnole, J46, 
Baldière, ^6. 



Bardonnèche, ^6. 
Barcelone, 189. 
Barenton, ^6. 
Bargarrih (De\ ^6. 
Bargemont, ^6. 
Barjac, m^ 37- 
Barran, J47, 
Bar-sur-Aube, ^7, 17^ 
2n, 267, 299, J06, J12. 
Bassoues d'Armagnac , 

H7. 
Batz, H7. 

Baugé, Î48. 

Baulac (Le), hB, 179. 

Bayonne, ^48, 179. 

Beaucaire, ^8* 

Beaune, ^48. 

Beausset (Le) h9»I7I* 

Beauvais, 349. 

Bel-Arbre, ^9. 

Belin, ^9. 

Bellegarde, H9« 

Bergerac, J49, 176, 2ji. 

Berne, 405, 77, Ma, 273 

Besançon, J50, 76, 77, 
78, 79, 98, 99, 100, loj, 
104, X05, 122, 127, 128, 
in, W6, n9i 140. I4Ï, 
I4λ M7i 17?. 204, 216, 

217, 220, 22J, 2JO, 2J2, 

246, 261, 274, J40. J07, 

ni, n4. )i7f ?I9, 322, 

J2?,p6. 
Besouce, j^i. 
Bessaut, ni> I79« 
Béziers, ^i» 224. 
Bidos, 404. 
Biliea, 404. 
Biran, 404. 
B^one (Dé)f 404. 
Bordeaux, J62, 176, 25 1> 
Boucau (Le), ^a. 
Bourges, ^a* 
Bourguet (Le), ^a* 
Bragayrac, ^a. 



Bresins, ^a* 
Bretagne, ^a* 
Brignoles, ^a, ia6. 
Brioude, ^a, 37. 
Brissac, 3 $2. 
Bruges, 196. 
Bruxelles, 196. 
Burgos, 256. 
Cabasse, 3)^. 
Cadière (La), n^ 
Calahorra, 2^6. 
Calatayud, 189. 
Callas, n^ 
Canavezes, 256. 
Candé, j$} . 
Carcassonne, n^t 224. 
Carnas, n?- 
Carthagène, 14J, 256. 
Casale, 188. 
Cassis, n?- 

Caslcllel (Le), ^^ ^7^* 
Cazères, ni* 
Chablis, ^4* 
Champtocé, 3^4. 
Chàteauneuf, ^4* 
Chaumont, ^4* 
Chaussin, ^4» "41 175, 

jia. 
Chaux, nS- 
Cheminé, HS* 
Chieti, 188, 
Chilly-le-Vignoble, JÇ^, 

X26. 
Cieutat, nS- 
Ciudad de losReyes, 256. 
Clairac, ^5* 
Clapier, ^5, 37, 79. 
Clermont, n5ï 176» a?i. 
Confolens, n<>f a24, na. 
ConselUiis {De) ^6. 
Copenhague, 194, 251. 
Corneto, 188. 
Correns, 3^6, 
Cournon, )^b, 
Cracovie, 191, ^9» 



(i) Le premier chiffre est celui de la Notice du Fouillé. Pour les hôpitaux 
non français, cette Table comprend seulement ceux qui ont été cités au courant 
de Touvrage. 

30 



TABLE DES GRAVURES 



PLANCHES HORS TEXTE 

PI. I. — Frontispice. — Vue de l'hûp. du Saint-Esprit in Saxiaà Rome 

PI. II. — Les petits eniants présentés au Pape Innocent III ;| 

PI. m. — Innocent III donne l'habit de Tordre aux frères 49 

PI . IV. — Le duc de Bourgogne donne aux frères de Dijon les bulles 

du Pape 6$ 

PI. V. — Costumes de l'Ordre. — Frères 97 

PI. VI. — Costumes de l'Ordre. — Sœurs 129 

PI. VU. — Sceaux de l'Ordre î6i 

PI. VIII. —Sceaux de l'Ordre 176 

PI. IX. — Vue de l'hôpital du Saint-Esprit de Neufchâteau 27; 

PI. X. —Vue de l'hôpital du Saint-Esprit de Poligny 320 



FIGURES DANS LE TEXTE 

Fig. I. — Costume de l'Ordre, d'après le ms. de la règle à Rome 85 

Fig. a. — Dalle tumulaire de F. Pierre d'Auxonne, X1V« siècle 96 

Fig. 3. — Hôpital du Saint-Esprit de Besançon 12^ 

Fig. 4. — Hôpital du Saint-Esprit de Dole 12Ç 

Fig. ç. — Châsse des quêtes de l'hôpital de Dijon 134 

Fig. 6. — Croix des quêtes de l'hôpital de Vaucouieurs 135 

Fig. 7. — Hôp. du Saint-Esprit de Dijon au XV« siècle 172 

Fig. 8. — Hôp. du Saint-Esprit de Cray (1640) 175 

Fig. 9. — La grande salle de Thôp. du Saint-Esprit de Rome 283 

Fig. 10. ^Ancien hôpital du Saint-Esprit de Cracovie 330 



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